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Bulletin Officiel |
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ENSEIGNEMENTS
ÉLÉMENTAIRE ET
SECONDAIRE
ORGANISATION DES ENSEIGNEMENTS
SCOLAIRES
Programme
"NouvelleS ChanceS"
NOR : MENE9901079C
RLR : 501-2 ; 520-0
CIRCULAIRE N°99-071
DU 17-5-1999
MEN
DESCO
PRÉAMBULE
Depuis dix ans, le nombre de jeunes
sortant du système éducatif sans qualification (1)
a fortement diminué, passant de plus de 100 000 à 57 000
sur le territoire métropolitain. Mais depuis trois ans, un palier
semble atteint : de 1994 à 1997, 8 % des jeunes qui ont quitté
le système éducatif l'ont fait sans formation qualifiante,
la moitié ne sont pas allés au-delà du collège,
l'autre moitié a commencé à préparer un diplôme
professionnel mais n'a pas atteint l'année terminale.
L'enquête "Génération
92" du CEREQ,
publiée en janvier 1999,
dresse un état de l'insertion professionnelle des jeunes qui se
sont présentés sur le marché du travail en 1992, et
analyse leur parcours entre 1992 et 1997. Ce travail de grande qualité
montre à quel point les jeunes sans qualification sont menacés,
plus que les autres, par le chômage et la précarité.
Les trois quarts d'entre eux ont connu le chômage, avec des épisodes
d'une durée moyenne de près de deux ans (alors que cette
durée moyenne ne dépasse pas un an pour les autres niveaux
de formation) ; 15 % d'entre eux n'ont jamais occupé d'emploi en
cinq ans ; un an après leur sortie, près de la moitié
étaient au chômage (deux fois plus que ceux qui ont terminé
une préparation au BEP ou au CAP) ; en 1997, 38 % d'entre eux sont
au chômage (toujours deux fois plus que les sortants au niveau V).
Le diplôme constitue sans
aucun doute une protection contre le chômage (93 000 jeunes quittent
encore aujourd'hui la formation initiale sans diplôme, à des
niveaux divers). Mais ce constat montre que la qualification, au sens de
l'achèvement d'une formation qualifiante, même sans obtention
du diplôme, est déterminante pour l'insertion professionnelle
des jeunes.
À l'aube du XXIème
siècle, nous devons, plus que jamais, donner une priorité
à l'objectif fixé par la loi d'orientation sur l'éducation
de 1989 : "conduire l'ensemble d'une classe d'âge au minimum au niveau
du CAP ou du BEP". L'école a été capable, depuis quinze
ans, d'élever sans cesse le niveau de formation de l'ensemble des
jeunes, et de diminuer le nombre de ceux qui étaient laissés
pour compte. Elle peut et elle doit relever ce nouveau défi : offrir
de nouvelles chances à ces jeunes qui interrompent prématurément
leur formation et qui se trouvent ensuite en grand danger d'exclusion professionnelle
et sociale. Ces nouvelles chances
nécessitent la mobilisation
et l'imagination de tous : de ceux, bien sûr, qui mettent en place
des parcours de formation pour des jeunes déjà sortis du
système ou ayant terminé la scolarité obligatoire,
dans les lycées professionnels et dans le cadre de la mission générale
d'insertion, mais aussi des collèges et même des écoles
car la plupart de ces jeunes ont rencontré de nombreuses difficultés
au cours de leur scolarité et il nous faut prévenir les ruptures
pour accroître leurs chances.
L'école est responsable
d'éduquer, d'instruire et de former les élèves qu'elle
accueille. Mais elle est aussi responsable du devenir de ceux qui la quittent.
Nous ne devons jamais cesser le suivi d'un élève qui nous
a quitté en cours de route tant que le relais n'a pas été
pris (apprentissage, emploi, formation professionnelle). Cette responsabilité
est lourde, difficile à mettre en œuvre, mais l'enjeu est fondamental
pour l'avenir des enfants et des jeunes qu'il nous appartient de former
et de qualifier. Il nous faudra du temps, de l'énergie, de l'imagination,
à tous les échelons du système : des établissements
au ministère, en passant par les services académiques et
départementaux. Mais il nous faudra surtout changer notre regard.
Chaque acteur de l'éducation nationale doit maintenant être
vigilant lorsqu'un élève interrompt prématurément
sa scolarité. Il doit se poser la question : qu'est-il devenu ?
a-t-il trouvé une voie de formation ?
Ce qui précède concerne
tous les niveaux du système, y compris les niveaux de formation
supérieurs. Cependant, le programme "NouvelleS ChanceS" est destiné
aux jeunes qui sortent, ou qui risquent de sortir sans qualification. Ces
jeunes sont ceux qui correspondent à la définition actuelle
(voir note page précédente) auxquels il convient d'ajouter
ceux qui abandonnent à la fin d'une classe de seconde générale
et technologique et ceux, très difficilement recensés, qui
quittent l'école dans le cours même de la scolarité
obligatoire. En concentrant nos efforts sur ceux qui en ont le plus besoin,
nous apporterons une contribution majeure à la lutte contre les
exclusions, qui est une priorité gouvernementale et une urgence
sociale.
TROIS PRINCIPES POUR L'ACTION
1 - Pas de solution uniforme
mais une réponse pour chaque jeune
Les jeunes qui sortent prématurément
de formation ne constituent pas un public homogène, leurs difficultés,
les causes de la rupture, sont
diverses et complexes. Les solutions
ne peuvent donc être pertinentes que si elles sont adaptées
à chaque type de situation. Les voies de la réussite sont
multiples. Les réponses sous forme de structures, définies
au niveau national, ont montré leurs limites. Elles augmentent souvent
l'exclusion et l'on peut s'interroger sur leur efficacité au regard
des itinéraires de l'ensemble des élèves entrés
en 6ème en 1989. Cette étude montre qu'à difficulté
scolaire égale à l'entrée en 6ème, les élèves
qui ont été scolarisés au collège dans ce type
de structures abandonnent plus souvent leurs études sans formation
qualifiante. De plus, la mise en place de parcours qualifiants pour les
jeunes dépend fortement de l'environnement économique régional
et même local.
Si nous voulons relever le défi
de la qualification pour tous, il nous faut donc mettre en place un parcours
individualisé pour chaque jeune en rupture ou en danger de rupture.
Il nous faut quitter la logique adaptée au plus grand nombre pour
adopter celle du "cousu main" au bénéfice d'un petit noyau
d'élèves qui risquent d'être laissés pour compte.
2 - Libérer les initiatives
et soutenir l'innovation
Ce qui précède implique
un véritable pilotage, non plus résumé à des
instructions descendantes, mais basé sur l'aide à la naissance
des projets pour libérer l'imagination, sur l'accompagnement et
la valorisation des expériences, sur la régulation et l'évaluation.
De nombreuses équipes prennent actuellement des initiatives pour
former des jeunes en grande difficulté, pendant ou après
la scolarité obligatoire. Au regard de l'énergie dépensée,
de la compétence déployée et des réussites
obtenues, ces équipes innovantes méritent un soutien et une
reconnaissance accrus.
En premier lieu, leurs projets,
leurs méthodes, leurs résultats doivent être mieux
connus de l'ensemble du système afin de l'irriguer par des idées
nouvelles. Ils doivent aussi être mieux connus de l'opinion publique
afin de les valoriser et de montrer que l'école est capable de relever
les défis les plus ardus.
En second lieu, c'est en analysant
ces expériences, en les accompagnant, en les évaluant, en
faisant circuler l'information que nous progresserons dans ce domaine.
Encore une fois, c'est sur le terrain que naîtront les vraies réponses
puisqu'il n'existe pas de solution "toute faite". De plus, une régulation
attentive permet d'éviter les dérives énumérées
au dernier chapitre de ce programme.
Enfin, ces projets sont souvent
très innovants et se situent parfois aux marges de la réglementation
du système. Les équipes qui les conduisent rencontrent de
nombreux obstacles et prennent même parfois des risques : montages
financiers complexes, problèmes d'ordre juridique, difficultés
à s'inscrire dans un cadre réglementaire trop étroit,
peu lisible ou absent, non prise en compte de situations très particulières
d'élèves ou de personnels dans les pratiques quotidiennes
de gestion. Les responsables du système (notamment au niveau national)
identifieront ces obstacles, les analyseront et trouveront des solutions
appropriées pour aider les équipes de terrain à mettre
en œuvre leurs projets avec plus de facilité et moins de risques.
3 - Agir avec des partenaires,
tout particulièrement les entreprises
L'école est son propre recours,
elle est responsable des élèves qu'elle accueille et du devenir
de ceux qui la quittent, mais elle a besoin de partenaires pour mener à
bien sa mission. En ce qui concerne les élèves en danger
de rupture dans le cadre de la scolarité obligatoire, ces partenaires
sont les mêmes que ceux qui agissent aux côtés de l'école
dans le cadre des zones d'éducation prioritaires : services de l'État,
collectivités territoriales et associations.
Pour atteindre l'objectif de qualification
pour tous, après la scolarité obligatoire et même parfois
pendant, le partenariat avec le monde du travail (entreprises et branches
professionnelles) est indispensable. En effet, de nombreuses expériences
en cours (formations intégrées, entreprises-écoles,
parcours qualifiant en lycée professionnel) montrent que les jeunes
en grande difficulté ont besoin d'une transition entre le monde
de l'école et l'entrée dans la vie active. Cette période
est d'autant plus longue que les difficultés sont grandes. Elle
se caractérise par un accompagnement conjoint de l'école
et de l'entreprise vers la qualification et l'insertion. Cet accompagnement
ne peut pas se résumer à une simple juxtaposition de périodes
de cours et de périodes en entreprise. Les jeunes en rupture ont
souvent deux problèmes à résoudre pour progresser
: ils ne perçoivent pas le sens des apprentissages scolaires et
ils manquent de repères essentiels pour la socialisation et l'insertion.
L'accompagnement conjoint par l'école et l'entreprise permet de
mieux ancrer les apprentissages dans le réel. Mais surtout, le fait
que deux univers (l'école et le monde du travail) balisent leur
chemin des mêmes repères et des mêmes exigences concernant
les règles de vie et la socialisation, constitue l'une des clefs
de la réussite.
Enfin, deux autres partenaires
sont essentiels pour la formation et l'insertion des jeunes :
- les régions, avec lesquelles
il est nécessaire de mieux articuler nos travaux afin de construire
une offre de formation cohérente pour les jeunes sans qualification
;
- les missions locales et les PAIO,
dont les actions s'articulent de mieux en mieux avec celles de la mission
générale d'insertion, au sein du réseau public d'insertion
des jeunes.
CINQ OBJECTIFS
1 - Mieux connaître le public d'élèves concernés
L'amélioration du recueil
de données
Le repérage quantitatif
des sorties du système pose de nombreux problèmes techniques
: migrations inter-académiques, passages dans l'enseignement privé,
itinéraires complexes avec retour en formation, etc. De plus, tout
système de recueil de données repose sur la qualité
des réponses de ceux qui sont interrogés. Or, il arrive que
les établissements déclarent "sorti" un élève
qui a changé d'établissement ou qui a signé un contrat
d'apprentissage, ou encore qu'ils soient réellement démunis
pour suivre des élèves dont les familles quittent la commune
sans prévenir.
Nous utilisons actuellement l'enquête
emploi de l'INSEE comme instrument de mesure national (interrogation des
jeunes à domicile) et nous obtenons ainsi des résultats satisfaisants
du point de vue de l'estimation nationale et de son évolution. Mais
cet instrument n'est pas assez précis pour obtenir des estimations
régionales ou académiques, qu'il nous faut calculer à
partir de nos enquêtes internes (SCOLARITÉ qui porte sur les
"présents"). Etant données les inégalités régionales
concernant les sorties sans qualification et la démarche de contractualisation
entre le ministère et les académies, il est indispensable
que chaque académie dispose d'un tableau de bord lui permettant
de suivre les évolutions. Un groupe de travail technique, composé
des directions compétentes du ministère (DPD et DESCO) et
de trois académies examinera les obstacles rencontrés et
élaborera des solutions pour améliorer la fiabilité
de nos instruments de mesure.
Un système de veille
dans chaque établissement ou bassin de formation
Ces résultats à l'échelon
académique ne peuvent s'améliorer que si les établissements
augmentent la vigilance et l'attention portées aux "perdus de vue".
Cette vigilance fait partie du changement de regard sur ceux qui nous quittent
sans formation qualifiante. Un système de "veille" sera mis en place
au niveau local (collège, lycée, bassin de formation, CIO).
Pour ce faire, nous disposons déjà
des entretiens de situation, effectués sous la responsabilité
du chef d'établissement d'origine qui s'entoure de toutes les compétences
utiles. Ces entretiens visent à proposer à chaque jeune,
quittant un établissement scolaire sans solution, un éventail
de possibilités. Mais il faut aussi anticiper et mettre en place
des équipes de suivi des élèves en grande difficulté,
sur plusieurs années. Il convient que plusieurs acteurs du système
éducatif fassent ensemble l'analyse des risques de rupture et assurent
la vigilance nécessaire pour ne jamais perdre complètement
de vue un jeune en danger d'exclusion. Plus l'alerte sera précoce,
plus nous serons efficaces. Toute initiative commençant à
l'école en se poursuivant au collège mérite d'être
encouragée (notamment pour les enfants montrant des lacunes graves
à l'évaluation du CE2).
Enfin, de façon à
repérer et à aider les jeunes sortis sans solution, qui parfois
ne viennent pas d'eux-même, nous devons nous rapprocher de nos partenaires
: PAIO et missions locales, ANPE. Nous serons beaucoup plus efficaces en
croisant systématiquement nos informations avec les leurs, sur le
même jeune à des moments différents de son itinéraire
d'insertion et sur ceux qui sont vraiment "perdus de vue". Il nous faut
faire vivre pleinement le service public d'insertion des jeunes : par des
bilans réguliers, par la mise en commun de ressources et de compétences.
Des recherches pour mieux connaître
ces jeunes et mieux comprendre leur abandon précoce
Grâce aux travaux de la DPD
et du CEREQ, nous bénéficions d'une richesse d'information
sur le passé scolaire, sur l'environnement social et sur les itinéraires
d'insertion des jeunes qui interrompent prématurément leur
formation. Ces informations seront largement diffusées. Elles seront
complétées par des recherches portant sur deux champs :
- une typologie qualitative de
la scolarité des jeunes qui sortent sans qualification, une connaissance
plus fine de leurs caractéristiques sociales et familiales et une
analyse des causes de la rupture et des processus d'exclusion ;
- une description des enfants de
moins de 16 ans qui échappent à la scolarité obligatoire.
2 - Prévenir les ruptures au collège
Une palette de dispositifs
Pour offrir de nouvelles chances
à ceux qui risquent de sortir sans qualification, il faut prévenir
cette rupture au collège, en premier lieu par l'aide individualisée
à chaque élève dans le quotidien de la classe. Les
deux tiers des élèves entrés en 6ème en 1989
qui ont interrompu prématurément leur formation avaient des
difficultés visibles en français et en mathématique
lors des tests d'évaluation. En plus de l'action quotidienne des
enseignants dans leur classe, les collèges disposent d'une palette
de dispositifs à mettre en œuvre, dans le cadre de leur projet d'établissement,
pour offrir ces nouvelles chances.
Il s'agit, en premier lieu, des
classes qui accueillent des élèves en difficulté scolaire
telles que les 4ème d'aide et de soutien et les 3ème d'insertion.
Des réussites remarquables montrent que ces classes peuvent offrir
de nouvelles chances si chaque projet est construit en fonction des besoins
des élèves et si l'on échappe ainsi au danger des
structures uniformes conduisant à l'impasse.
Il s'agit, en second lieu, des
réponses adaptées aux élèves qui entrent dans
un processus de rejet de l'institution scolaire, de façon à
éviter les exclusions d'établissements successifs, qui conduisent
à la déscolarisation. Là encore, des enseignements
peuvent être tirés des initiatives réussies :
- les classes relais ne sont pas
des filières de relégation ; elles ont comme objectif de
recréer, par un accueil spécifique temporaire, les conditions
d'une réinsertion scolaire progressive ;
- les expériences les plus
porteuses de réussite reposent sur des dispositifs gradués
et articulés sur un territoire (bassin de formation ou
département), la première
étape consistant toujours à chercher une solution au sein
du collège d'origine ;
- le changement d'établissement
peut être profitable s'il repose sur un projet individualisé.
De même, l'accueil dans des collèges offrant un internat peut
être bénéfique pour certains élèves,
à condition que le projet pédagogique soit attractif, qu'il
soit construit en tenant compte de leurs besoins et que les familles soient
totalement impliquées dans cette décision. D'autres modalités
d'internat éducatif peuvent être
explorés avec des partenaires
du collège.
En troisième lieu, quelques
départements ont mis en place des expériences avec des entreprises
sous forme de parcours individualisés pour des collégiens
au bord de la rupture :
périodes en entreprises,
journées au CFA, découverte des métiers. Au vu de
leurs résultats, ces initiatives méritent d'être développées
mais sous plusieurs conditions : l'élève doit rester sous
la responsabilité du collège, chaque convention doit être
unique et les familles doivent être associées aux décisions,
une équipe ressource doit suivre l'ensemble des collèges
qui y participent, la direction départementale du travail, de l'emploi
et de la formation professionnelle doit être un partenaire actif.
Enfin et surtout, de nouveaux textes réglementaires doivent être
élaborés de façon à étendre ces expériences
en toute conformité du point de vue du code du travail.
Enfin, la réflexion sera
relancée et intensifiée sur l'accompagnement nécessaire
de la scolarité des enfants qui risquent d'interrompre leur formation
pour des raisons de santé (handicap ou maladie). Il nous faut également
resserrer nos liens avec les établissements spécialisés
sous tutelle du ministère de l'emploi et de la solidarité.
Sur l'ensemble de ces questions,
le débat national sur le collège permettra de préciser
encore les mesures à prendre pour les élèves en grande
difficulté, grâce à la réflexion lancée
dans les établissements. Cependant, deux publics d'élèves
méritent d'ores et déjà une attention particulière
: les élèves de SEGPA et ceux qui échappent à
la scolarité obligatoire.
L'accès à la qualification
pour les élèves de SEGPA
L'étude récente de
la DPD montre que la moitié des élèves entrés
en SEGPA en 1989 ont quitté le système éducatif sans
qualification. Ce public est donc très exposé aux dangers
de l'exclusion professionnelle et sociale. Mais la même étude
montre que, dès qu'ils ont accès à une formation qualifiante
en lycée professionnel, en CFA ou en EREA, les chances de réussite
des jeunes de SEGPA s'améliorent considérablement. Donner
de nouvelles chances aux élèves de SEGPA suppose donc de
leur permettre de poursuivre leur formation en lycée professionnel
ou en apprentissage avec un parcours adapté à chacun. En
juin 1998, plus de la moitié des jeunes de troisième de SEGPA
se sont vus proposer une orientation de ce type. Nous sommes donc sur la
bonne voie et nous pouvons nous fixer un double objectif :
- offrir aux trois quarts des jeunes
de l'enseignement adapté la possibilité de poursuivre leur
formation en lycée professionnel, en CFA ou en EREA, d'ici trois
ans ;
- réduire les inégalités
régionales en la matière, certaines académies ont
déjà atteint cet objectif, d'autres en sont encore éloignées.
Les capacités d'accueil en
lycée professionnel doivent donc être développées
en conséquence. Ce développement quantitatif et volontariste
doit être complété par l'élaboration d'une carte
des formations visant à la convergence des champs professionnels,
par la mise en réseau des établissements avec des conventions
(SEGPA, lycées professionnels, CFA) et par un travail précis
sur les critères d'affectation en lycée professionnel.
Enfin, la rénovation des
SEGPA fera l'objet d'un réflexion approfondie, tant sur la question
des enseignements dispensés, que sur la professionnalisation et
sur les critères d'entrée. Le débat national sur le
collège permettra d'énoncer des orientations plus précises.
Des sites pilotes pour accueillir
et rescolariser des enfants de moins de 16 ans qui échappent à
la scolarité obligatoire
Même s'il est impossible
d'en mesurer le nombre, nous savons qu'il existe des enfants âgés
de 11 à 15 ans non scolarisés. Les causes peuvent être
multiples et méritent d'être analysées de façon
plus précise : grande pauvreté, arrivée récente
sur le territoire, enfants de familles itinérantes, refus des familles,
exclusion du système ? On peut, d'autre part, faire l'hypothèse
d'une concentration de ce problème sur certains lieux précis
du territoire, notamment dans les grandes agglomérations.
Six projets pilotes seront mis
en place à la rentrée 1999 dans des sites précis où
existe un nombre important de ces enfants "perdus de vue". Ces projets
seront conduits par des équipes de terrain de l'éducation
nationale, en partenariat avec les collectivités locales et les
services de l'état compétents (PJJ, DASS, ministère
de la ville). Une coordination des projets sera organisée au niveau
national de façon à ce que les expériences s'irriguent
mutuellement. Ces projets viseront à créer des centres d'accueil
pour ces enfants non scolarisés, à les repérer et
à les suivre, à les rescolariser progressivement.
3 - Construire des parcours de formation qualifiante après le collège
Des parcours individualisés
et souples, en partenariat avec les entreprises
Pour offrir de "NouvelleS ChanceS",
il nous faudra utiliser toute la palette de possibilités pour construire
des itinéraires de formation et accompagner les jeunes en difficulté
vers la qualification ; il nous faudra faire preuve d'imagination et inventer
des solutions encore inexplorées ; il nous faudra, pour certains
jeunes, appliquer le principe du "cousu main" sans restriction et construire
un parcours pour
un
jeune. Plusieurs équipes
(en lycée professionnel ou dans le cadre de la mission générale
d'insertion) mènent des projets dans ce sens et obtiennent de remarquables
résultats, encore trop peu connus. Leur expérience et leurs
analyses permettent d'énoncer un cadre pour la construction de ces
parcours qualifiants :
- explorer et proposer une gamme
très étendue d'itinéraires, sans restreindre l'univers
des possibles : méthodes pédagogiques, modalités d'accompagnement,
certification par étapes, durée du parcours, statut scolaire
ou contrat d'apprentissage ou de qualification, éducation récurrente,
passerelles, "entreprises - écoles" ;
- soutenir et évaluer les
projets très innovants qui nécessitent des montages juridiques
et financiers complexes, avec l'aide du ministère si nécessaire
;
- développer l'accompagnement
conjoint par l'école et l'entreprise vers la qualification et l'insertion,
non seulement dans le cas d'un contrat d'apprentissage mais aussi sous
statut scolaire en augmentant le temps passé en entreprise dans
les préparations aux CAP ;
- maintenir et enrichir les modalités
de certification par étapes pour le CAP. Plus que tous les autres,
les jeunes en difficulté ont besoin de
repères, de "balises", sur
leur chemin. La délivrance du CAP par étapes leur permet
de sortir de la logique du "tout ou rien" : s'ils n'obtiennent pas tout,
ils ne perdent pas tout. Cet aspect est essentiel pour la réussite
des jeunes et une réflexion doit être engagée dès
maintenant au niveau national, à partir d'une évaluation
des expériences en cours (notamment dans l'académie d'Aix-Marseille)
pour éclairer et guider les pratiques et pour, si nécessaire,
en tirer des conséquences sur la réglementation ;
- mettre en place des réseaux
de lycées professionnels car un lycée ne peut pas, à
lui seul, offrir un éventail suffisant de spécialités
professionnelles ;
- étendre l'expérience
en cours dans l'académie de Lille où des lycées professionnels
volontaires construisent un projet basé sur l'offre d'un parcours
personnalisé à des publics divers : jeunes en formation initiale
sous statut scolaire, adultes en formation continue et jeunes sous contrat
d'apprentissage, jeunes en voie d'exclusion suivis par la MGI.
Les actions de la mission générale
d'insertion
La mission générale
d'insertion se situe au coeur du programme "NouvelleS ChanceS". Durant
l'année scolaire 1997-98, près de 47 000 jeunes ont bénéficié
d'actions spécifiques mises en place par la MGI ce qui a permis
aux deux tiers d'entre eux de poursuivre leur formation ou de s'insérer.
Il convient de rendre hommage aux équipes académiques qui
font preuve d'une détermination sans faille et d'une grande compétence
pour offrir des solutions à des jeunes qui ont abandonné
prématurément leur formation. Cependant, il faut aussi rappeler
que tous les acteurs du système doivent se sentir concernés
par cette mission d'insertion des jeunes. Les recommandations qui suivent
devraient permettre d'améliorer encore l'efficacité des actions
de la MGI :
- inscrire clairement les actions
de la MGI dans un projet académique fort. Les situations respectives
des académies sont encore très inégales du point de
vue du volume d'actions et des résultats au regard des besoins identifiés.
Des indicateurs seront mis en place de façon à mieux coordonner
les efforts dans le cadre de la contractualisation entre le ministère
et les académies.
- resserrer les liens avec les
établissements. Les équipes de la MGI et les actions mises
en œuvre sont encore parfois ignorées ou perçues comme un
dispositif en marge des établissements. Or, la réussite repose
sur une intégration de ces actions dans le cadre d'un projet de
bassin de formation, sur la responsabilité réaffirmée
du suivi des élèves sortants par les chefs d'établissement
et sur le développement d'actions innovantes au sein des lycées
professionnels avec l'aide d'animateurs MGI.
- accentuer la priorité
pour ceux qui en ont le plus besoin. Là encore, les situations académiques
sont très diverses, tant du point de vue du nombre de sortants sans
qualification que de la part des actions MGI dont ils sont bénéficiaires.
La mission générale d'insertion s'adresse à tous les
élèves qui ont besoin d'aide pour s'insérer professionnellement,
mais les jeunes sortant du système sans qualification, ou d'une
seconde générale et technologique, doivent faire l'objet
d'une priorité plus forte. Cette priorité sera prise en compte
dans la construction des indicateurs.
- augmenter, en nombre et en effectifs,
les formations intégrées. Ces actions, d'une durée
de trois ans, constituent un exemple réussi de parcours qualifiant
individualisé avec un accompagnement conjoint de l'école
et de l'entreprise. Elles n'existent pas dans toutes les académies
alors que la pertinence de leur démarche et les résultats
obtenus incitent à leur extension. Ceci ne signifie pas une remise
en cause des CIPPA, qui visent à remotiver les jeunes et à
les aider à construire leur parcours et qui ont accueilli plus de
14 000 jeunes sortis sans qualification en 1997-98. Il faut simplement
veiller à ce que les CIPPA ne se transforment jamais en filière
d'orientation et que leur nature temporaire et souple soit maintenue. En
particulier, il est parfois plus profitable d'être directif et de
proposer des solutions concrètes à des jeunes sans projet
que d'attendre qu'ils construisent eux-mêmes un projet professionnel.
Un problème à
résoudre : les difficultés de certains jeunes à l'égard
de toute mobilité géographique
Certains jeunes ne rejoignent pas
le lycée professionnel dans lequel ils sont affectés, même
si leurs voeux sont satisfaits et restent ainsi "sans solution". Ce problème,
paradoxalement plus aigu dans les banlieues que dans les zones rurales,
montre une difficulté grave à l'égard de toute mobilité
géographique. Les causes en sont complexes (identification à
un quartier, peur de l'inconnu, problèmes économiques pour
les transports). Mais il est clair qu'en plus des conséquences sur
leur poursuite d'études, cette difficulté risque de les handicaper
sérieusement pour toute insertion professionnelle durable. Une réflexion
sur ce problème sera engagée très rapidement dans
les lieux où le phénomène existe, avec l'aide du ministère
afin d'analyser les causes et de proposer des solutions sans en négliger
aucune : prise en compte en amont dès le collège et l'école
primaire, mise en place d'internats en lycée professionnel, actions
en partenariat avec des associations de quartier...
4 - Enrichir l'offre de formation au niveau V
Une densification de l'offre
de formation
Une densité suffisante de
l'offre de formation au niveau V, notamment pour la préparation
aux CAP, est un préalable indispensable pour accueillir les jeunes
sans qualification. Or, pour des raisons historiques complexes, la situation
des académies est extrêmement hétérogène
dans ce domaine. Si l'on tient compte de l'offre globale (sous statut scolaire,
en apprentissage ou dans l'agriculture) et si l'on rapporte le nombre de
préparations existantes aux CAP au nombre de jeunes de la classe
d'âge correspondante par académie, ce rapport varie de 17
pour 1000 à moins de 5 pour 1000. De plus, les académies
dont l'offre est faible sont celles qui ont encore des taux importants
de sorties sans qualification.
Sous l'effet conjugué de
la reprise de l'emploi au niveau V et du constat de l'insuffisance des
capacités d'accueil, la majorité des académies ouvrent
actuellement de nouvelles préparations aux CAP en lycée professionnel.
Nous sommes donc sur la bonne voie. Les efforts des académies doivent
être suivis au niveau national dans le cadre de la contractualisation
et leur situations respectives prises en compte. Des indicateurs permettant
de mesurer la densité d'offre de formation au niveau V seront donc
élaborés rapidement.
Une prise en compte des aspects
qualitatifs
Ce développement de l'offre
de formation pour l'accès aux CAP ne doit pas se limiter aux aspects
quantitatifs. Pour l'ensemble du public
accueilli, cette offre doit bien
sûr être guidée par la réalité de l'emploi
pour chaque spécialité. Pour de nombreux métiers,
le CAP bénéficie d'une forte légitimité professionnelle.
Cette reconnaissance sur le marché du travail est essentielle. Permettre
à un plus grand nombre d'élèves d'y accéder
ne doit en aucun cas la fragiliser. De plus, pour que l'offre de formation
constitue réellement une chance de réussite pour les jeunes
en difficulté, il faut traiter simultanément la question
de l'ouverture des sections avec celle des critères d'affectation
des élèves et celle des modalités de préparation.
Les élèves en grande
difficulté à la fin du collège, et notamment ceux
de SEGPA, doivent faire l'objet d'un traitement particulier lors des affectations.
Sans volontarisme de notre part à tous, ils risquent fort d'être
"laissés pour compte", lors de la signature de contrats d'apprentissage
et lors de l'inscription dans certains lycées qui auront tendance
à privilégier l'accueil d'élèves réussissant
plus facilement et ne nécessitant pas de traitements particuliers.
Or, si l'ensemble des acteurs doivent se mobiliser, il appartient clairement
au service public de l'éducation nationale d'offrir de nouvelles
chances à tous ceux qui le souhaitent.
En ce qui concerne les modalités
de préparation, elles doivent être conformes à l'objectif
précédent concernant la construction de parcours individualisés
et souples, en partenariat avec les entreprises. Il est clair que l'ouverture
de préparations au CAP et l'accueil de jeunes en difficulté
n'offriront pas de nouvelles chances si les modalités sont uniformes
en terme de durée, de certification, d'alternance et de prise en
charge pédagogique.
Le partenariat avec les entreprises
et les régions
Pour étoffer et diversifier
l'offre de formation, nous ne pouvons pas agir seuls. En premier lieu,
il nous faut prospecter activement et tisser des liens plus étroits
avec les entreprises qui sont prêtes à accompagner avec nous
des jeunes en difficulté vers la qualification. Plusieurs expériences
ont montré que ces entreprises existent. Elles sont prêtes
à s'investir si nous les informons en toute transparence des difficultés
prévisibles (y compris de l'ordre de la socialisation des jeunes),
si elles sont partie prenante de la formation du début à
la fin, si elles disposent, de notre côté, d'un interlocuteur
fiable et disponible en cas de problème, et elles expriment clairement
le fait que l'éducation nationale est la meilleure garantie.
Ces contacts et cette prospection
sont plus efficaces au niveau local et régional. Mais le niveau
national apportera son aide en signant des conventions cadre avec des grandes
entreprises ou des branches professionnelles pour l'accompagnement conjoint
de jeunes en difficulté vers la qualification, la mise en œuvre
de ces conventions s'effectuera au niveau régional et local.
L'accès à l'emploi
est soumis à une forte concurrence et il s'agit d'un effort de longue
haleine qui nécessitera énergie et détermination.
Il arrive, malheureusement, que certaines entreprises pratiquent une discrimination
condamnable, non seulement à l'embauche mais aussi pour la signature
de contrats d'apprentissage. L'école est dépourvue de moyens
pour lutter contre le racisme et le sexisme dans le monde du travail. Cependant,
nous pouvons et nous devons engager des discussions avec nos partenaires
responsables (employeurs et syndicats) qui condamnent également
ces pratiques. Nous devons surtout appliquer une règle stricte :
ne jamais devancer cette éventuelle discrimination en l'introduisant
par anticipation dans nos pratiques d'orientation ou de suivi des jeunes.
De plus, si cette question préoccupe les jeunes en formation, ils
doivent pouvoir en parler et nous devons les aider pour affronter ces obstacles.
Enfin, enrichir l'offre de formation
ne peut pas se faire sans liens étroits avec la région, premier
partenaire pour la construction de cette offre. La cohérence et
l'articulation des implantations est essentielle pour la réussite
des élèves et elle concerne aussi bien l'apprentissage que
les préparations sous statut scolaire, de même que la qualité
des équipements et des infrastructures. Nous devons donc passer
du stade de l'information réciproque (ce qui est le cas dans la
majorité des académies) au stade de l'élaboration
conjointe d'un véritable plan pluriannuel de formation.
5 - Inscrire les "NouvelleS ChanceS" dans les initiatives européennes
Les échanges européens
L'insertion professionnelle des
jeunes constitue une préoccupation commune à l'ensemble des
états membres de l'Union européenne. Les situations économiques
et sociales sont certes différentes, chaque système éducatif
a son histoire et ses caractéristiques, mais cette diversité
même constitue une richesse potentielle pour l'innovation. Il nous
faut donc encore intensifier nos échanges d'expériences avec
nos partenaires européens. Il nous faut également faire bénéficier
de plus en plus de jeunes d'une mobilité au sein de l'espace européen.
Le Fonds social européen
Les actions du programme "NouvelleS
ChanceS" pour les jeunes après la fin de la scolarité obligatoire
peuvent bénéficier de fonds substantiels de la part du Fonds
social européen jusqu'à la fin de l'année 1999. Il
est même possible que, sous réserve des négociations
en cours sur le nouveau règlement des fonds, la totalité
du programme "NouvelleS ChanceS" soit éligible au FSE pour la période
2000-2006, y compris l'objectif concernant la prévention des ruptures
en collège.
Nous devons donc nous mobiliser
à tous les niveaux du système pour obtenir des crédits
du FSE. Une grande partie de ces financements sont disponibles au niveau
de la préfecture de région et les dossiers sont instruits
par la direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation
professionnelle. Afin de faciliter le montage des dossiers locaux, les
recteurs mobiliseront les compétences de leurs services pour aider
les acteurs de terrain. Le ministère devra produire dès la
parution du nouveau règlement une brochure explicative sur l'utilisation
du FSE et devra trouver des solutions au problème difficile des
circuits de financement. Cette mobilisation concerne également les
programmes d'initiative communautaire (tels que Youthstart) qui seront
redéfinis au même moment.
Les écoles de la deuxième
chance
À l'initiative de la Commission
européenne, il existe des écoles dites "de la deuxième
chance" dans onze villes européennes, dont Marseille. Le site marseillais
a bien sûr toute sa place dans le programme "NouvelleS ChanceS" dont
la démarche est plus globale. "NouvelleS chanceS" regroupe des projets
existants et à venir, fortement ancrés dans les établissements
scolaires même s'il est bien sûr possible d'y inclure des projets
construits à l'initiative de nos partenaires des collectivités
locales. Les services académiques doivent donc être à
l'écoute des projets potentiels qui souhaiteraient s'inscrire dans
le cadre des "écoles de la deuxième chance". Afin de mieux
les inscrire dans la cohérence du présent programme, trois
aspects sont à privilégier :
- nous avons deux priorités
: les élèves que nous perdons ou risquons de perdre en âge
de scolarité obligatoire et ceux qui nous quittent sans qualification.
Nous ne pouvons pas, bien sûr, nous désintéresser des
jeunes plus âgés ayant quitté toute formation depuis
plus d'un an et nous devons leur ouvrir nos portes s'ils veulent revenir.
Mais pour ce type de public, c'est plutôt, dans le cadre du programme
TRACE que devront s'inscrire les projets.
- dans ce cadre précis,
comme dans l'ensemble du programme, évitons les effets de modèle
: ce qui est pertinent à un endroit, avec une équipe, ne
l'est pas forcément ailleurs ;
- les projets doivent comporter
des objectifs d'insertion mais aussi de qualification ; enfin, la "deuxième
chance" ne peut pas être résumée à l'échec
de la première, c'est-à-dire de l'école, niant ainsi
les efforts quotidiens de tous ceux qui font déjà réussir
les jeunes en difficulté.
PILOTAGE ET RÉGULATION
1 - Une adaptation locale et
régionale dans le cadre de la contractualisation
Les principes et les objectifs
qui précèdent constituent un cadre de référence
pour construire et réaliser les actions sur le terrain. La diversité
des académies est forte sous plusieurs aspects : volume de sorties
sans qualification, densité de l'offre de formation au niveau V,
nature des innovations existantes, traditions des relations écoles-entreprises,
emploi et tissu économique, relations avec la région. Il
en va de même, à l'intérieur des académies,
où des territoires peuvent être contrastés. Chaque
académie, chaque département, chaque bassin de formation,
chaque établissement adaptera donc ses modalités d'action
à sa spécificité.
En ce qui concerne les académies,
cette diversité sera prise en compte dans le cadre de la contractualisation
avec le ministère. Les recteurs concernés proposeront des
objectifs quantitatifs pour la réduction des sorties sans qualification
dans leur académie, soit parce qu'ils en font un priorité
de leur projet académique, soit parce que le ministère les
incite à le faire en raison d'un constat objectif. Les académies
performantes maintiendront leur effort et celles où le pourcentage
de jeunes interrompant leurs études sans formation qualifiante est
élevé (plus de 8 %) le réduiront de façon significative
d'ici trois ans.
2 - L'évaluation et les
indicateurs
Ce principe de diversité
appelle en regard une régulation : au niveau national pour les académies
et au niveau académique pour le suivi des actions. Cette régulation
s'appuiera en premier lieu sur une évaluation régulière
des projets mis en œuvre. Au niveau national, une évaluation de
la mise en œuvre du programme et des résultats obtenus sera réalisée
après deux années scolaires complètes, à la
fin de l'année 2001.
Pour permettre cette évaluation
et un suivi régulier, des indicateurs seront élaborés
dès cette année par les directions compétentes du
ministère en liaison avec les services académiques. Ils permettront
de mieux mesurer le nombre de sortants sans qualification par académie
(voir objectif 1), d'établir un tableau de bord des actions mises
en œuvre par rapport aux cinq objectifs du programme et de réaliser
une typologie qualitative des académies pour enrichir la démarche
de contractualisation.
3 - L'accompagnement et l'assistance
technique
La régulation et le pilotage
doivent également s'appuyer sur un accompagnement des actions de
terrain par les services académiques et
départementaux, et notamment
par les corps d'inspection. Cet accompagnement suppose une assistance pour
le montage des projets, un suivi et un soutien pour les équipes
qui innovent face à des problèmes difficiles à résoudre,
une expertise, un regard extérieur pour les
aider à progresser et une
vigilance aux dérives possibles.
En ce qui concerne le ministère,
il lui revient d'accompagner les académies et tout particulièrement
celles où le nombre de sortants sans qualification est important.
Les services compétents sont donc à la disposition des recteurs
pour les aider à mettre en place les projets et pour apporter une
expertise complémentaire.
Pour la plupart des actions à
mettre en œuvre, les textes réglementaires existent, il n'est donc
pas nécessaire d'en produire de nouveaux. Cependant, une cellule
sera mise en place dès à présent, regroupant la DESCO,
la DAF et la DAJ pour trouver des solutions aux obstacles réglementaires,
juridiques ou financiers que rencontrent les équipes innovantes,
pour rendre plus lisible la réglementation et pour la modifier si
nécessaire.
L'ensemble du programme "NouvelleS
ChanceS" sera coordonné par Catherine Moisan, inspectrice générale
de l'éducation nationale, en liaison étroite avec la DESCO.
4 - La circulation des expériences
et la communication
La régulation passe aussi
par l'information et la communication . Dans ce domaine, trois axes seront
développés :
- la circulation des expériences,
des chemins empruntés, des résultats, des obstacles rencontrés.
Pour ce faire, nous utiliserons tous les moyens à notre disposition
: rencontres, publications, réseau internet, groupes d'échanges
sur des problèmes communs ;
- la production d'outils, de vade-mecum
sur des sujets précis : montages de projets, questions pédagogiques,
fonds structurels, certification par étape, périodes en entreprise,
etc..
- la valorisation des expériences
réussies par des actions de communication interne mais aussi externe,
en direction des médias et du grand public.
Un colloque sera organisé
en octobre 1999, à l'inititative de l'éducation nationale,
sur l'insertion professionnelle des jeunes.
5 - Une vigilance constante
Pour terminer, quelques "garde
fous" doivent être présents dans l'esprit de chacun afin d'éviter
les dérives toujours possibles lorsque l'école met en place
des projets pour les élèves en difficulté. Ces "garde-fous"
s'adressent à tous, du niveau local au niveau national et constituent
des repères nés de l'expérience et de l'histoire du
système. Ils font partie intégrante, comme les trois principes
énoncés précédemment, d'un pilotage basé
sur une définition d'objectifs et de limites, une régulation
souple, une autonomie et une responsabilité des établissements.
- veiller à ce qu'aucune
action particulière pour des élèves en difficulté
ne renforce les tendances à l'exclusion du système. Elle
ne doit pas dédouaner ceux qui ont la responsabilité de l'ensemble
des élèves de chercher aussi des
solutions.
- éviter les cloisonnements
: toute action réussie pour des élèves en grande difficulté
doit donner des idées et des pistes pour agir avec tous les élèves,
et inversement ;
- si une action réussie
pour des élèves en grande difficulté profite à
d'autres, elle doit continuer aussi à accueillir ceux qui en ont
le plus besoin ;
- même dans le cas de difficultés
majeures, les jeunes ont une famille, ou un tuteur légal. Il faut
toujours les associer étroitement et l'école ne peut pas
s'y substituer ;
- tenir l'équilibre entre
la durée nécessaire des projets et les dangers inhérents
à leur pérennité, veiller constamment à la
souplesse et à l'évolution ;
- ne jamais renoncer à des
objectifs ambitieux mais rester pragmatique dans les étapes à
franchir. Des résultats modestes ne signifient pas automatiquement
la non pertinence des actions.
- ne pas perdre de vue notre mission
et notre compétence dans le cadre du partenariat : l'école
doit relever le défi de la qualification, elle participe à
l'effort national d'insertion professionnelle des jeunes mais elle n'est
pas responsable du chômage et des conditions sociales difficiles
de certains quartiers. Elle doit resserrer les liens avec les entreprises,
se rapprocher du monde du travail mais elle doit préparer les jeunes
à leur insertion sociale et citoyenne et donc leur donner les moyens
d'affronter un monde souvent difficile ou règne la concurrence et
parfois la discrimination.
Le ministre de l'éducation
nationale, de la recherche et de la technologie
Claude ALLÈGRE
La ministre déléguée,
chargée de l'enseignement scolaire
Ségolène ROYAL
(1) Ces jeunes
sortent soit d'une classe de premier cycle, soit de l'enseignement spécial,
soit de la première année de
préparation d'un BEP
ou d'un CAP (sous statut scolaire ou en apprentissage).