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Bulletin Officiel du ministère
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PROGRAMME DE L'ENSEIGNEMENT DE L'ÉDUCATION CIVIQUE, JURIDIQUE ET SOCIALE EN CLASSE TERMINALE DES SÉRIES GÉNÉRALES
A. du 20-7-2001. JO. du 4-8-2001
NOR : MENE0101652A
RLR : 524-7
MEN - DESCO A4
Vu code de l'éducation, not. art. L. 311-1 à L. 311-3 et L. 311-5 ; D. n° 90-179 du 23-2-1990 ; A. du 18-3-1999 mod. ; avis du CNP du 26-6-2001 ; avis du CSE des 5 et 6-7-2001
Article 1 - Le programme de l'enseignement de l'éducation civique, juridique et sociale dans la classe terminale des séries économique et sociale, littéraire et scientifique est fixé conformément à l'annexe du présent arrêté.
Article 2 - Le directeur de l'enseignement scolaire est chargé de l'exécution du présent arrêté qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 20 juillet 2001
Pour le ministre de l'éducation nationale
et par délégation,
Le directeur de l'enseignement scolaire
Jean-Paul de GAUDEMAR
ÉDUCATION CIVIQUE, JURIDIQUE ET SOCIALE CLASSE TERMINALE - SÉRIES GÉNÉRALES
LA CITOYENNETÉ À L'ÉPREUVE DES TRANSFORMATIONS DU MONDE CONTEMPORAIN
• Conformément aux principes généraux de l'enseignement de l'éducation civique, juridique et sociale publiés avec le programme de la classe de seconde, l'ECJS a pour objet en classe de terminale de confronter la citoyenneté aux transformations du monde contemporain. Cet enseignement s'efforce d'apporter une meilleure compréhension de la fonction du droit, des institutions politiques et de l'action des citoyens face à ces enjeux. Il mobilise à la fois les notions d'éducation civique acquises au collège, des savoirs enseignés dans différentes matières et les acquis de l'éducation civique, juridique et sociale des classes de seconde et de première.
I - OBJECTIF GÉNÉRAL DE LA CLASSE TERMINALE
En classe de seconde, la citoyenneté politique a été analysée dans sa dimension civile, en partant de la vie sociale pour remonter à ses fondements politiques. En classe de première, les élèves ont été amenés à réfléchir sur l'exercice de la citoyenneté politique, les conditions de la participation politique et les fondements de l'État de droit. Ils ont pu comprendre comment les libertés publiques et privées peuvent être garanties dans l'État démocratique et en quoi elles requièrent la participation et la vigilance des citoyens, l'exercice de leurs droits civiques et leur participation au débat dans l'espace public.
En classe terminale, il s'agit de montrer que les exigences de droit, de justice, de liberté et d'égalité qui caractérisent l'État et les sociétés démocratiques sont confrontées à de nouveaux défis qui mettent à l'épreuve la citoyenneté, notamment les évolutions de la science et de la technique, les exigences renouvelées de justice et d'égalité, la construction de l'Union européenne et la mondialisation économique, culturelle, juridique et politique. Ces évolutions obligent les hommes à toujours repenser leurs droits et leurs libertés, ce qui suscite des débats dans l'espace public. La tension entre les intérêts particuliers et l'intérêt général, des expressions nouvelles de violence et d'atteinte aux libertés, exigent des réponses juridiques sans cesse adaptées. Le débat démocratique amène à interroger les normes et les valeurs sur lesquelles repose le droit et à les confronter à des conceptions différentes de l'éthique et à l'idée de droits de l'Homme. Ces évolutions transforment l'exercice de la participation politique et les formes de la conscience des citoyens, en amenant à repenser les questions de la souveraineté, de la liberté, de la responsabilité, de la justice et du droit.
Ces transformations du monde contemporain sont analysées en propre par différentes disciplines. L'ECJS a pour mission de souligner les enjeux civiques et politiques de ces évolutions, en particulier à travers le débat argumenté, fondé sur le savoir et portant sur des questions suscitées par l'actualité, répondant aux préoccupations des élèves : la connaissance et la capacité de se servir de sa raison permettent de décider et d'agir librement.
En amenant les élèves, sur ces questions limitées et concrètes, à coordonner les connaissances et la réflexion qu'ils construisent dans les différentes disciplines, l'ECJS trouve sa pleine signification. Elle contribue, à sa manière et dans le volume horaire qui lui est imparti, à attester de la cohérence entre les programmes des disciplines et à les articuler entre eux (voir VI, alinéa 2).II - NOTIONS ET THÈMES
L'ECJS exige de partir de questions précises répondant aux préoccupations des élèves pour mobiliser les notions du programme et saisir les relations qu'elles entretiennent.
Huit notions constituent le programme :
- liberté
- égalité
- souveraineté
- justice
- intérêt général
- sécurité
- responsabilité
- éthique.
La présentation de ces huit notions ne doit pas conduire à les explorer de manière distincte mais doit permettre, au contraire, de les articuler diversement en fonction des questions choisies, en montrant, sur un problème précis et concret, les liens et les tensions qu'elles entretiennent entre elles. Ces notions sont par ailleurs polysémiques ; il ne s'agit pas de procéder à une étude exhaustive de chacune d'elles, il convient seulement de montrer que leur maîtrise permet de comprendre le sens des débats qui se déroulent dans l'espace public des sociétés contemporaines. Elles ont été retenues en ce qu'elles permettent d'éclairer le sens et les enjeux, pour la citoyenneté, des grandes transformations du monde contemporain. Il est de la responsabilité du professeur de veiller à ce qu'elles aient été mobilisées et comprises par les élèves au cours du travail, qu'il s'agisse de l'analyse et du questionnement de l'information ou de l'expression personnelle dans le débat argumenté.
À cet effet, afin d'éviter le risque de la dispersion, quatre thèmes, dans lesquels s'inscriront les questions choisies, sont proposés en classe terminale :
- la citoyenneté et les évolutions des sciences et des techniques
- la citoyenneté et les exigences renouvelées de justice et d'égalité
- la citoyenneté et la construction de l'Union européenne
- la citoyenneté et les formes de la mondialisation.
Durant l'année, une ou plusieurs questions, entrant dans l'un ou plusieurs de ces quatre thèmes, seront traitées.III - DÉMARCHE
La démarche proposée mobilise notamment des savoirs issus de différentes disciplines et de leur mise en œuvre pratique. Le choix des questions étudiées pour déboucher sur l'analyse des notions du programme relève de la liberté pédagogique des professeurs. Ils l'adaptent en fonction de la série dans laquelle ils interviennent, des compétences particulières existant à l'intérieur de l'établissement et des possibilités d'interventions extérieures. Cette réflexion ne peut se concevoir qu'à partir des intérêts manifestés par les élèves et de leurs interrogations.
L'actualité, qu'elle soit locale, nationale, européenne ou internationale, peut fournir la ou les questions se rapportant au sens que prend la citoyenneté devant les grands enjeux des transformations du monde contemporain. On fera le lien entre des événements de l'actualité et la réflexion qu'ils suscitent sur les fondements de la justice et du droit, la garantie des libertés et de la sécurité, les conditions de la souveraineté, la nature de la responsabilité des pouvoirs et celle des citoyens. Cette démarche doit permettre de montrer aux élèves les conséquences directes de l'exercice de la citoyenneté et le sens du débat dans l'espace public. Il conviendra de relier les questions posées par l'actualité aux éclairages que fournit l'histoire. Des conseils méthodologiques, quant à l'utilisation de l'actualité en ECJS, sont donnés dans le programme de la classe de seconde ; on pourra s'y référer.
Parmi les méthodes pédagogiques mobilisables pour cet enseignement, il y a lieu de privilégier l'organisation de débats argumentés. Ils contribuent à créer un espace de discussion au lycée permettant à l'élève d'exercer sa liberté d'expression et de se situer dans les grands débats d'idées de nos sociétés contemporaines. Ils lui permettent de distinguer l'intérêt général, qui fonde le sens de la citoyenneté politique en démocratie, des intérêts personnels ou propres à des groupes particuliers. Cela suppose l'intégration des règles du débat. Un débat argumenté, s'il veut faire émerger la confrontation raisonnée des points de vue, est un débat préparé. Il exige le recours à des sources documentaires variées (politiques, historiques, juridiques, sociologiques...), empruntées à des supports et des canaux d'information diversifiés (monographies, périodiques, cédérom, sites Internet, traitements d'enquêtes...), fournis ou indiqués par le professeur ou résultant du travail en CDI. L'organisation du travail préparatoire au débat peut mobiliser des techniques diverses selon le sujet abordé : ouvrages, dossiers de presse, recherche de documents, enquêtes, etc. Dans tous les cas, il s'agit de former l'esprit critique des élèves et de conduire à l'élaboration d'argumentaires construits et pertinents favorisant la confrontation des points de vue singuliers. Enfin, tout débat argumenté doit déboucher sur une reprise en classe sous la responsabilité du professeur. Il appartient au professeur, à l'issue du débat, d'en conduire l'analyse critique et d'en souligner les enjeux en liaison avec les notions du programme. A travers le débat argumenté, la recherche d'une expression orale maîtrisée et raisonnée est un des objectifs de l'ECJS.IV - ÉVALUATION
L'évaluation en classe découle de cette démarche : la pédagogie mise en œuvre fait appel à la mobilisation de l'élève dans des activités diverses écrites et orales de recherche et d'exposition, qui doivent toutes être prises en compte. Le professeur évalue les productions des élèves sous leurs différentes formes : constitution de dossiers, contenu des interventions dans les débats, textes écrits, etc. Il peut fonder son appréciation sur les critères suivants :
- recherche et analyse de l'information ;
- qualité des productions (écrites, orales, audiovisuelles, numériques, multimédias...) ;
- aptitude à argumenter dans un débat ;
- maîtrise des connaissances.V - ORIENTATIONS PRINCIPALES DES THÈMES
V.1 La citoyenneté et les évolutions des sciences et des techniques
Les progrès des sciences et des techniques dans tous les champs de l'activité humaine, la production, la consommation, la médecine... bouleversent les formes de l'existence, les rapports des hommes entre eux, la perception de l'espace et du temps, le corps humain lui-même. Ils suscitent des interrogations et des exigences nouvelles en matière de droits, de justice, de liberté, de responsabilité, de sécurité, par exemple dans les domaines de la bioéthique, de la prévention des risques naturels ou techniques, de la mondialisation des réseaux de communication, de la santé, de la qualité de la vie, de l'environnement, de l'avenir de la planète... Ils modifient aussi les conditions d'exercice de la citoyenneté.
- Faut-il fixer des limites aux progrès des sciences et des techniques et en fonction de quels principes ?
- Comment État et citoyen peuvent-ils contrôler démocratiquement ces transformations ? Comment garantir l'indépendance des décisions démocratiques dans des domaines qui requièrent des savoirs spécialisés ? Quel rôle les experts doivent-ils jouer ? Existe-t-il un risque de technocratie ?
- Peut-on garantir un égal accès de tous les citoyens aux bénéfices des sciences et des techniques ?
- Face à ces complexités et à ces défis, comment permettre l'exercice de la citoyenneté ?V.2 La citoyenneté et les exigences renouvelées de justice et d'égalité
La justice est à la fois un principe qui sert de fondement aux sociétés démocratiques et un ensemble d'institutions qui doivent appliquer ce principe. L'un et l'autre reposent sur l'exigence d'égalité. L'égalité est l'un des principes qui fondent les relations politiques en démocratie. Elle fut inscrite dans l'article premier de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, reprise par la Constitution de la Cinquième République. Au regard du droit, tous les citoyens sont égaux : ils ont les mêmes droits civils et politiques, les mêmes libertés fondamentales. Tous les hommes, même non citoyens, ont les mêmes droits civils, économiques et sociaux. Les inégalités sociales, économiques, culturelles ou mêmes physiques ne peuvent justifier aucune différence de droits. Si l'égalité civile et politique des citoyens est ainsi la première condition d'une société démocratique, les sociétés démocratiques contemporaines renouvellent ces exigences en amenant à interroger la représentation de l'intérêt général, les exigences de liberté et de responsabilité, par exemple dans les domaines de la protection sociale, des droits des communautés culturelles, des revendications de l'individu.
- Comment une société démocratique gère-t-elle aujourd'hui les inégalités de patrimoine, de salaires, d'accès à l'emploi, à la santé, à la culture, à l'éducation ?
- Le principe de justice sociale peut-il justifier des différences de traitement entre les citoyens selon les situations particulières ?
- Des groupes particuliers, territoriaux, sexuels, culturels, peuvent-ils obtenir la reconnaissance de droits propres ?
La justice n'est pas seulement une idée, c'est aussi une institution qui dit le droit et sanctionne ceux qui enfreignent la loi. Cette mission suppose l'indépendance de l'autorité judiciaire à l'égard des pouvoirs législatif et exécutif, sans que disparaisse pour autant la responsabilité civile, pénale et disciplinaire de ceux qui l'exercent. On constate aussi que les citoyens font de plus en plus appel au juge pour régler des contentieux de toutes sortes qui ne cessent de croître dans l'espace public et les relations privées.
- Comment interpréter le rôle des juges dans les démocraties contemporaines ?
- Pourquoi la justice en tant qu'institution est-elle si souvent sollicitée par les justiciables ?
- Ne risque-t-on pas de réduire la citoyenneté à la seule qualité de justiciable ?V.3 La citoyenneté et la construction de l'Union européenne
La citoyenneté s'est construite historiquement dans le cadre national. Le projet européen, depuis un demi siècle, a conduit à la construction d'institutions qui sont aujourd'hui à l'origine de nombreuses décisions de notre vie collective. Une grande partie du droit national, dans les pays de l'Union européenne, est désormais de source européenne. D'un point de vue juridique, il n'existe pas aujourd'hui de citoyenneté européenne indépendante de la citoyenneté nationale ; d'un point de vue politique, tout ce qui donne une réalité concrète au principe de citoyenneté reste, pour l'instant et pour l'essentiel, national. L'Union européenne crée un niveau d'institutions supérieur et complémentaire aux institutions nationales. Elle amène à repenser les questions de la souveraineté, de l'égalité, de la liberté, de la sécurité, par exemple dans le domaine de l'économie, de l'harmonisation des législations, de l'ouverture des frontières et de la circulation des personnes et des biens, de la construction de forces armées plurinationales.
- L'Union européenne fait-elle évoluer la définition et l'exercice traditionnel de la citoyenneté ? Dans quelle mesure le développement des institutions politiques européennes se conjugue-t-il avec le développement d'une véritable citoyenneté européenne ?
- Une citoyenneté européenne supposerait-elle d'aller plus loin que la simple addition des citoyennetés nationales ? Implique-t-elle la constitution d'un espace public européen ?
- L'élaboration de cette citoyenneté est-elle compliquée par la poursuite de l'élargissement de l'Union européenne ? Sur quels fondements et dans quelles limites cet élargissement est-il possible ?
- La citoyenneté européenne requiert-elle, à terme, la construction d'un État européen souverain ?V.4 La citoyenneté et les formes de mondialisation
Le terme de mondialisation désigne un processus pluriséculaire complexe fait de mutations géographiques, économiques, culturelles, juridiques et politiques. Il s'accompagne d'une prise de conscience à l'échelle du monde de la perturbation des équilibres physiques de la planète et de l'homogénéisation relative du monde vivant. L'ensemble de ces mutations, par exemple le délitement apparent de la notion de frontière nationale, la concentration de pouvoirs au sein d'entreprises transnationales, le rôle accru des institutions internationales, les transferts de souveraineté des États-nations, la vitesse des transformations techniques et des communications, engendre de nouveaux défis qui mettent la citoyenneté à l'épreuve.
- Quels sont les effets de ces mutations géographiques et démographiques sur la citoyenneté ?
- Dans quelle mesure la mondialisation économique affaiblit-elle les souverainetés nationales ? Remet-elle partiellement en cause le lien historique entre citoyenneté et nation ?
- Quels sens peut-on donner aux aspects culturels de la mondialisation ?
- Comment interpréter la nature juridique et politique des transferts de souveraineté des États nationaux et des limitations de pouvoir consenties dans le cadre de traités ou de conventions ?
- L'ensemble de ces évolutions peut-il déboucher sur une forme de citoyenneté mondiale qui nécessiterait la mobilisation de valeurs universelles ?
- Peut-on dire que la mondialisation constitue une menace ou une chance pour les citoyens ?VI - Document d'accompagnement
Un document à l'usage des professeurs accompagne la mise en œuvre de ce programme. Il est pour l'essentiel composé de fiches correspondant à chacun des thèmes d'entrée proposés.
Il suggère des articulations possibles avec des éléments des programmes de différentes disciplines.
Il comporte aussi des fiches qui doivent permettre de mieux maîtriser les méthodes et les outils préconisés, notamment le débat argumenté.