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Lettre de la direction des affaires juridiques du ministÈre de l'Éducation nationale et du ministÈre de l'enseignement supÉrieur, de la recherche et de l'innovation | ||||||||||
LIJ N°200 – novembre 2017 |
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ÉDITORIAL | ||
C’est peu dire que le n° 200 de la LIJ s’est fait attendre !
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Natacha Chicot | ||
SOMMAIRE | ||
Jurisprudence | ||
Enseignement : questions généralesPRINCIPES GÉNÉRAUXLaïcité Principe de laïcité – Port de vêtements ou de signes manifestant l’appartenance à une religion – Établissement d’enseignement supérieur – Distinction des qualités d’usager et de stagiaire dans le cadre des études dans un institut de formation en soins infirmiers – Liberté, en qualité d’étudiant, de faire état de ses croyances religieuses, sous réserve de ne pas perturber le déroulement des activités d'enseignement et le fonctionnement normal du service public – Obligation, en qualité de stagiaire dans un établissement de santé, de respecter les obligations qui s'imposent aux agents du service public hospitalier ou le règlement intérieur de l’établissement ne poursuivant pas une mission de service publicC.E., 28 juillet 2017, n° 390740, aux tables du Recueil Lebon
Enseignement scolaireQUESTIONS GÉNÉRALESRelations des établissements scolaires avec les collectivités territoriales (questions communes) Collèges – Restauration scolaire – Collectivités territoriales – Département – Dépenses obligatoires – Transfert de compétence de l’État au départementC.A.A. Nantes, 10 février 2017, Commune de Fondettes, n° 15NT01973
Restauration scolaire – Menu de substitution – Intérêt supérieur de l’enfantT.A. Dijon, 28 août 2017, n° 1502100 et n° 1502726
Élèves en situation de handicap – Temps périscolaire – Restauration scolaire – Répartition des compétences entre l’État et la commune – Prise en charge financière de l’accompagnement des élèves handicapés pendant le temps périscolaireT.A. Pau, 5 octobre 2017, n° 1600287
Enseignement supérieur et rechercheADMINISTRATION ET FONCTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE RECHERCHEComités d'hygiène, de sécurité, et des conditions de travail (C.H.S.C.T.) – Répartition des compétences entre comité central et comité localT.A. Paris, 22 mars 2017, Syndicat national des travailleurs de la recherche scientifique et autres, n° 1601865
Examens et concoursORGANISATIONComposition du jury Recrutement des enseignants-chercheurs – Comité de sélection – Jury d’examen lorsque, sur le fondement de l’article 9-2 du décret du 6 juin 1984, il examine les dossiers des candidats à une nomination et établit la liste des candidats qu’il souhaite entendre – Existence de liens personnels entre un membre du jury d’un examen ou d’un concours et un candidat – Principe d’impartialité du jury d’un examen ou d’un concours – Déport du membre du jury d’examen concerné – Manquement au principe d’impartialité (non) – Application du principe d’unicité du jury de concours (non)C.E., 7 juin 2017, n° 382986, aux tables du Recueil Lebon
Délibérations du jury Souveraineté du jury – Examen professionnel – Seuil d’admission – Appréciation des mérites des candidatsC.E., 12 mai 2017, n° 396335, aux tables du Recueil Lebon
PersonnelsQUESTIONS COMMUNESAccident de service et maladie contractée en service Accident survenu sur le lieu et dans le temps du service – Circonstance particulière détachant cet événement du service – Absence de lien direct avec les conditions d’exécution du service – Imputabilité au service (non)C.A.A. Marseille, 29 juin 2017, n° 15MA03334
Avancement – Reclassement Promotion d’échelon au grand choix – Appréciation de la valeur professionnelleT.A. Toulon, 22 juin 2017, n° 1503599
Rémunérations, traitement et avantages en nature Majoration de traitement – Département d’outre-mer – Congés de maladieC.A.A. Bordeaux, 13 juin 2017, n°15BX03053
Établissements d’enseignement privésRELATIONS AVEC L’ÉTATÉtablissements d’enseignement supérieur privés – Monopole de la collation des grades et des titres universitaires – Délivrance du master – Compétence du ministre – Rupture d’égalité entre établissements d’enseignement supérieur publics et privés (non)C.E., 7 juin 2017, Association Conférence des grandes écoles, n° 389213, au Recueil Lebon
PERSONNELSMaîtres contractuels Maître contractuel stagiaire – Affectation – Établissements d’enseignement privés sous contrat – Report du stage – Absence de stage – Perte du bénéfice du concours (oui)C.A.A. Paris, 7 juillet 2017, n° 16PA01207
ResponsabilitéACCIDENTS SUBIS OU CAUSÉS PAR DES ÉLÈVES OU ÉTUDIANTSAccidents scolaires (art. L. 911-4 du code de l’éducation, art. 1384 du code civil) Accident scolaire – Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (F.G.T.I.) – Réparation – Causes exonératoires de responsabilité pour fait du tiersC.E., 19 juillet 2017, Commune de Saint-Philippe, n° 393288, aux tables du Recueil Lebon
Accident scolaire – Pause méridienne – Faute dans l’organisation du service – Responsabilité de la commune (oui) – Responsabilité de l’État (non)C.A.A. Bordeaux, 6 juin 2017, n° 15BX01624
Technologies de l’information et de la communication (TIC)FICHIERS (TRAITEMENTS AUTOMATISÉS DE DONNÉES)Traitement de données à caractère personnel – Droit d’accès – Droit d’obtenir communication des données à caractère personnel – Personne concernée – Ayant droit d’une personne décédée – Transmission du droit à réparation du préjudice subi par la victime avant son décèsC.E., 7 juin 2017, n° 399446, aux tables du Recueil Lebon
Marché public – Hébergement des données – Possibilité d’imposer un hébergement des données sur le territoire national (non) – Principe de libre circulation des données personnellesT.A. Lille, 10 juillet 2017, Société Itslearning France, n° 1705205
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Consultations | ||
Enseignement scolaireSECOND DEGRÉAdministration et fonctionnement des établissements scolaires Second degré – Bourse aux livres – Manuels scolaires – Parents d’élèves – AssociationsNote DAJ A1 n° 2017-0120 du 24 août 2017
Questions propres à la formation continue (GIP-F.C.I.P., GRETA…) GRETA – Stagiaire – Procédure disciplinaire – Exclusion définitive – Autorité compétente pour prononcer la sanctionNote DAJ A1 n° 2017-0101 du 3 août 2017
PersonnelsQUESTIONS COMMUNESObligations des fonctionnaires Activité de collaborateur parlementaire – Cumul de cette activité avec l’activité d’agent publicNote DAJ A2 n° 2017-0023 du 6 juillet 2017
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Le point sur | ||
Les sanctions et mesures administratives applicables dans les cas de plagiat commis par des enseignants ou des étudiants dans l’enseignement supérieur
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ActualitÉs | ||
TEXTES OFFICIELS
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Jurisprudence | ||
Enseignement : questions généralesPRINCIPES GÉNÉRAUXLaïcité Principe de laïcité – Port de vêtements ou de signes manifestant l’appartenance à une religion – Établissement d’enseignement supérieur – Distinction des qualités d’usager et de stagiaire dans le cadre des études dans un institut de formation en soins infirmiers – Liberté, en qualité d’étudiant, de faire état de ses croyances religieuses, sous réserve de ne pas perturber le déroulement des activités d'enseignement et le fonctionnement normal du service public – Obligation, en qualité de stagiaire dans un établissement de santé, de respecter les obligations qui s'imposent aux agents du service public hospitalier ou le règlement intérieur de l’établissement ne poursuivant pas une mission de service publicC.E., 28 juillet 2017, n° 390740, aux tables du Recueil Lebon
L’annexe IV de l’arrêté du 21 avril 2007 relatif aux conditions de fonctionnement des instituts de formation paramédicaux a défini un règlement intérieur type de ces instituts de formation, dont les règlements intérieurs doivent au minimum comporter les règles qu’il fixe, notamment celle que prévoit le deuxième alinéa du chapitre Ier de son titre II, aux termes duquel : « Les signes et les tenues qui manifestent ostensiblement l'appartenance à une religion sont interdits dans tous les lieux affectés à l'institut de formation, ainsi qu'au cours de toutes les activités placées sous la responsabilité de l'institut de formation ou des enseignants, y compris celles qui se déroulent en dehors de l'enceinte dudit établissement. »
Saisi par des élèves d’un institut de formation en soins infirmiers d’un recours contre cette disposition, le Conseil d’État a constaté son illégalité en tant qu’elle pose une interdiction de caractère général, sans distinguer selon les situations dans lesquelles peuvent se trouver les élèves : usagers du service public de l’enseignement supérieur lorsqu’ils suivent leur formation dans un établissement d’enseignement supérieur lors de leur formation théorique et pratique, mais stagiaires dans un établissement de santé lors de leur formation clinique.
En effet si, en application de l’article L. 811-1 du code de l’éducation, les étudiants disposent de la « liberté (…) d'expression à l'égard des problèmes politiques, économiques, sociaux et culturels (…), dans des conditions qui ne portent pas atteinte aux activités d'enseignement et de recherche et qui ne troublent pas l'ordre public » et sont donc, « sauf lorsqu’ils suivent un enseignement dispensé par un lycée public [compte tenu des dispositions de l’article L. 141-5-1 du code de l’éducation], libres de faire état de leurs croyances religieuses, y compris par le port de vêtement ou de signes manifestant leur appartenance à une religion, sous réserve de ne pas perturber le déroulement des activités d'enseignement et le fonctionnement normal du service public, notamment par un comportement revêtant un caractère prosélyte ou provocateur », il n’en va pas de même lorsqu’ils effectuent leur formation clinique sous forme de stage dans un établissement de santé.
Dans ce dernier cas, le Conseil d’État a rappelé « que lorsqu’ils effectuent un stage dans un établissement de santé chargé d’une mission de service public, les élèves infirmiers doivent respecter les obligations qui s'imposent aux agents du service public hospitalier ; que s'ils bénéficient de la liberté de conscience qui interdit toute discrimination fondée sur la religion, le principe de laïcité fait obstacle à ce qu'ils manifestent leurs croyances religieuses dans le cadre du service public ; que, lorsque les élèves infirmiers effectuent leur stage dans un établissement n'ayant aucune mission de service public, ils doivent respecter, le cas échéant, les dispositions du règlement intérieur de cet établissement qui fixent les conditions dans lesquelles ses agents peuvent faire état de leurs croyances religieuses ».
Par cette décision, le Conseil d’État a également précisé que, dans le cas où leur formation théorique se déroule dans un lycée public, les élèves des instituts de formation paramédicaux sont soumis aux obligations posées par l’article L. 141-5-1 du code de l’éducation, aux termes duquel : « Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit », faisant ainsi prévaloir la nature de l’établissement où sont dispensés les cours sur le principe de liberté d’expression dont disposent les élèves en leur qualité d’étudiants de l’enseignement supérieur.
N.B. : Dans cette affaire, le Conseil d’État ne se contente pas de rappeler les termes de ses jurisprudences en matière de liberté d’expression des étudiants (C.E., 26 juillet 1996, Université de Lille-II, n° 170106, aux tables du Recueil Lebon) et de neutralité des agents du service public (jurisprudence qui est également celle de la Cour européenne des droits de l’homme : voir son arrêt du 26 novembre 2015, n° 64846/11, Ebrahimian c/ France) en les appliquant aux différentes situations dans lesquelles se trouve l’élève infirmier, mais apporte une précision supplémentaire sur la situation des étudiants dont la formation paramédicale se déroulerait dans un lycée public.
Sur ce dernier point, cette décision du Conseil d’État est à rapprocher de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris n° 16PA01319 du 20 juin 2017, qui a également fait prévaloir la nature de l’établissement (lycée) sur celle des formations (exclusivement d’enseignement supérieur) dispensées par l’école nationale de commerce de Paris, établissement ayant le statut d’E.P.L.E. qui « entre dès lors dans le champ d'application de l'article L. 141-5-1 précité, sans que puisse lui être opposée la circonstance qu'elle ne dispenserait que des formations préparant soit aux grandes écoles, soit à l'obtention d'un brevet de technicien supérieur ».
Cette décision du Conseil d’État conforte également les réponses apportées par la direction des affaires juridiques à des questions relatives au port de tenues ou signes religieux par les élèves des écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE). Pendant leur stage en ESPE qui comporte des périodes de mise en situation professionnelle dans un établissement scolaire et des périodes de formation dans les locaux de l’école, les personnels enseignants et d’éducation stagiaires exercent leurs fonctions de fonctionnaires stagiaires et sont, à ce titre, soumis aux obligations qui s’imposent aux agents publics, qu’ils soient ou non en contact avec le public. Par conséquent, ils ne peuvent porter un signe ou une tenue manifestant ostensiblement leur appartenance religieuse.
Il n’en va toutefois pas de même pour les étudiants qui suivent une formation dans ces mêmes ESPE sans avoir la qualité de fonctionnaires stagiaires et, par conséquent, sans être agents de la fonction publique. En leur qualité d’usagers d’un établissement public d’enseignement supérieur, ils ne peuvent se voir refuser l’accès aux formations qui y sont dispensées pour la seule raison qu’ils porteraient un signe ou une tenue manifestant une appartenance religieuse, à la condition toutefois que le port de ces signes ou tenues ne compromette pas, par les conditions dans lesquelles ils seraient portés ou par leur nature, la santé ou la sécurité des étudiants durant les enseignements qui exigent le port de tenues appropriées tels que l’éducation physique, les travaux pratiques de chimie, de mécanique ou de biologie par exemple (cf. C.E., 10 mars 1995, Époux Aoukili, n° 159981, au Recueil Lebon ; C.E., 20 octobre 1999, Ministre de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie c/ Époux Ait Ahmad, n° 181486, aux tables du Recueil Lebon).
Par ailleurs, ces étudiants doivent respecter le principe général selon lequel la liberté d’expression qui leur est reconnue ne peut avoir pour effet de perturber le déroulement des activités d’enseignement et de recherche ou de troubler le fonctionnement normal du service public d’enseignement.
Enfin, ces mêmes étudiants, au cours des stages qu’ils sont amenés à effectuer en E.P.L.E. lors de leur formation, sont soumis à l’exigence de neutralité et ne pourront faire état de leur appartenance religieuse par le port de signes ou tenus manifestant ostensiblement leur appartenance religieuse.
Enseignement scolaireQUESTIONS GÉNÉRALESRelations des établissements scolaires avec les collectivités territoriales (questions communes) RESTAURATION SCOLAIRE Collèges – Restauration scolaire – Collectivités territoriales – Département – Dépenses obligatoires – Transfert de compétence de l’État au départementC.A.A. Nantes, 10 février 2017, Commune de Fondettes, n° 15NT01973
Se prévalant du transfert par l’État aux départements de la mission de restauration dans les collèges, opéré par la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, une commune avait demandé au département de prendre en charge le service public de la restauration scolaire au collège qu’elle assurait auparavant par le biais d’une délégation de service public attribuée à un prestataire privé. Le département n’ayant pas fait droit à cette demande, la commune avait réclamé le remboursement des sommes qu’elle estimait avoir indûment supportées entre le 1er janvier 2005, date d’entrée en vigueur de la loi du 13 août 2004, et le 31 mars 2010, date à laquelle le service de restauration scolaire au collège avait été confié au syndicat mixte de gestion créé par la commune et le département.
La requête de la commune tendant à ce que soit annulée la décision du président du conseil départemental refusant de faire droit à sa demande avait été rejetée en première instance et en appel. Le Conseil d’État, par une décision n° 376226 du 19 juin 2015, avait prononcé l’annulation de l’arrêt au motif que la cour administrative d’appel avait omis de statuer sur plusieurs moyens.
La cour administrative d’appel de Nantes, statuant sur renvoi, a jugé, sur le fondement notamment de l’article L. 213-2 du code de l’éducation, qu’à compter du 1er janvier 2005, les départements avaient, en vertu de la loi, la charge de la restauration dans les collèges et qu’ils étaient donc tenus d’assurer ce service public, les dépenses afférentes étant pour eux des dépenses obligatoires. À cet égard, la cour administrative d’appel a rappelé que le président du conseil départemental devait notamment faire connaître en temps utile aux chefs d’établissement les moyens que la collectivité territoriale départementale décidait d’allouer à chaque établissement pour assurer la restauration des collégiens, ainsi que les modalités de gestion du service public de la restauration scolaire.
La cour administrative d’appel a également souligné que le principe de libre administration des collectivités territoriales ne saurait faire échec à la répartition des compétences entre collectivités telle qu’elle est définie par la loi. Par conséquent, la cour administrative d’appel a jugé que la carence du département dans la mise en œuvre de ses obligations légales était constitutive d’une faute de nature à engager sa responsabilité et l’a condamné à indemniser la commune de ses préjudices.
Restauration scolaire – Menu de substitution – Intérêt supérieur de l’enfantT.A. Dijon, 28 août 2017, n° 1502100 et n° 1502726
Alors qu’il s’agissait d’une pratique établie depuis de nombreuses années, le maire d’une commune avait décidé, en arguant du nécessaire respect du principe de laïcité, de ne plus proposer, à compter de la rentrée scolaire suivante, des repas de substitution dans les cantines scolaires les jours où le menu comportait de la viande de porc. Le conseil municipal de cette commune avait entériné cette décision en approuvant le règlement des restaurants scolaires en ce qu’il supprimait tout menu de substitution.
Une association avait formé un recours en annulation contre cette décision, estimant notamment qu’elles portait atteinte à la liberté de conscience et de culte des élèves et violaient l’article 3-1 de la convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) qui prévoit que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une « considération primordiale » dans toutes les décisions le concernant.
Le tribunal administratif saisi de cette requête a rappelé que si le service public de la restauration scolaire a un caractère facultatif et qu’aucune disposition ni aucun principe n’impose l’obligation de proposer aux enfants un menu de substitution, une attention primordiale à l’intérêt supérieur de l’enfant doit être accordée par l’auteur de la décision qui met fin à la pratique en vigueur du menu de substitution, dans la mesure où cette décision affecte de manière suffisamment directe et certaine la situation des enfants fréquentant la cantine scolaire.
Le tribunal a relevé qu’une contrainte technique ou financière pouvait certes légalement motiver une adaptation du service public de la restauration scolaire telle que la suppression des repas de substitution, mais qu’en l’espèce, la décision attaquée, qui se fondait sur une position de principe se référant à une conception de la laïcité, n’était pas, de ce fait, motivée par l’existence d’une telle contrainte.
En outre, le tribunal a écarté le moyen que faisait valoir la commune en défense, tiré de la méconnaissance de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 et de l’article 226-16 du code pénal du fait que, par le passé, lorsqu’un repas de substitution était servi aux enfants, ceux-ci étaient fichés et regroupés par tables selon leur choix, permettant ainsi d’identifier leur religion. Le tribunal a jugé que la commune ne démontrait pas qu’une organisation différente de la cantine permettant d’éviter ces regroupements des enfants aurait été impossible à mettre en œuvre.
Le tribunal administratif de Dijon a donc annulé les décisions attaquées au motif qu’elles ne pouvaient être regardées comme ayant accordé, au sens de l’article 3-1 de la CIDE, une attention primordiale à l’intérêt supérieur des enfants concernés par la suppression des menus de substitution dans les cantines scolaires municipales.
Élèves en situation de handicap – Temps périscolaire – Restauration scolaire – Répartition des compétences entre l’État et la commune – Prise en charge financière de l’accompagnement des élèves handicapés pendant le temps périscolaireT.A. Pau, 5 octobre 2017, n° 1600287
Un directeur académique des services de l’éducation nationale (DASEN) avait opposé un refus à la demande d’une commune tendant à ce que l’État prenne en charge financièrement l’accompagnement d’un élève en situation de handicap pendant le temps périscolaire, au motif que cette prise en charge incombait à la commune responsable de l’organisation des activités périscolaires. La commune demandait l’annulation de cette décision.
Le tribunal administratif de Pau a d’abord rappelé qu’il résulte des dispositions des articles L. 112-1, L. 351-3 et L. 917-1 du code de l’éducation que l’État doit, au titre de sa mission d’organisation générale du service public de l’éducation et dans le but de conférer un caractère effectif au droit à l’éducation et à l’obligation scolaire pour les enfants handicapés, prendre en charge l’accompagnement des élèves handicapés pour exercer, y compris en dehors du temps scolaire, des fonctions d’aide à l’inclusion scolaire.
Le tribunal a ensuite cité les dispositions de l’article L. 917-1 du code de l’éducation, aux termes desquelles les accompagnants des élèves en situation de handicap (A.E.S.H.) peuvent être mis à la disposition des collectivités territoriales dans les conditions prévues à l’article L. 916-2 du même code, notamment pour participer aux activités organisées en dehors du temps scolaire. Il a retenu qu’en l’absence de disposition spécifique prévue par le décret n° 2014-724 du 27 juin 2014 relatif aux conditions de recrutement et d'emploi des accompagnants des élèves en situation de handicap, cette mise à disposition s’effectue dans les conditions prévues par l’article 33-1 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'État, qui précisent que, sauf exception, cette mise à disposition donne lieu à remboursement.
Le tribunal administratif a déduit de la combinaison de ces dispositions législatives et réglementaires que lorsqu’un A.E.S.H. est mis à la disposition d’une collectivité territoriale pour accompagner un élève dans une activité périscolaire ne pouvant être regardée comme tendant à l’inclusion scolaire, la prise en charge financière de cette mise à disposition incombe à la collectivité territoriale.
En l’espèce, la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (C.D.A.P.H.) avait accordé à l’élève handicapé un accompagnement de deux heures pendant le temps périscolaire, sans plus de précision, et les parents avaient demandé à ce que leur fille bénéficie de cet accompagnement pendant le temps de la restauration scolaire.
Le tribunal a retenu que ce temps de restauration scolaire, qui n’est pas compris dans le temps scolaire et dont aucune pièce du dossier ne démontrait en l’espèce qu’il aurait été consacré à des activités de soutien à l’enseignement, ne pouvait pas être regardé comme consacré à une mission d’aide à l’inclusion scolaire. Il en a déduit que la mise à disposition d’un A.E.S.H. pour accompagner l’élève pendant le temps de la restauration scolaire n’était pas nécessaire à la mise en œuvre effective de son droit à l’éducation et il a, par suite, jugé que le DASEN pouvait légalement opposer un refus à la demande de la commune et rejeté, pour ce motif, la requête de la commune tendant à l’annulation de cette décision.
Enseignement supérieur et rechercheADMINISTRATION ET FONCTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE RECHERCHE
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Consultations | ||
Enseignement scolaireSECOND DEGRÉAdministration et fonctionnement des établissements scolaires Second degré – Bourse aux livres – Manuels scolaires – Parents d’élèves – AssociationsNote DAJ A1 n° 2017-0120 du 24 août 2017
Il a été demandé à la direction des affaires juridiques si des associations qui ne sont pas exclusivement composées de parents d’élèves peuvent organiser dans les lycées des bourses aux livres destinées à la location de manuels scolaires aux lycéens.
L’article D. 111-6 du code de l’éducation précise que les associations de parents d’élèves regroupent « exclusivement des parents d’élèves auxquels sont assimilées les personnes ayant la responsabilité légale d’un ou plusieurs élèves ». La circulaire n° 2006-137 du 25 août 2006 relative au rôle et à la place des parents à l’école indique à cet égard que « ces associations doivent (…) pouvoir proposer et organiser certains services en faveur des parents d’élèves ou des élèves, comme par exemple des prêts et bourses de livres ou des bourses aux fournitures ». Pour autant, il ne saurait être déduit de cette circulaire, qui n’a pas de valeur réglementaire, que seules les associations de parents d’élèves peuvent organiser des bourses aux livres dans les établissements scolaires.
En effet, l’article D. 551-1 du code de l’éducation indique que les associations « qui apportent leur concours à l’enseignement public » peuvent faire l’objet d’un agrément lorsqu’elles interviennent, notamment, en appui aux activités d’enseignement. Quant à l’article D. 551-6 du même code, il prévoit qu’une association agréée peut intervenir dans un établissement scolaire sur autorisation du directeur d’école, de même qu’une association non agréée, pour une intervention exceptionnelle et après communication de son projet d’intervention au directeur académique des services de l’éducation nationale (DASEN). Dans ces conditions, il n’y a pas d’obstacle juridique à ce qu’une association qui ne serait pas exclusivement composée de parents d’élèves organise une bourse aux livres dans un établissement scolaire.
La direction des affaires juridiques a également rappelé que lorsqu’une association organise une bourse aux livres dans un établissement scolaire sans qu’un stockage des manuels soit nécessaire, la passation, après avis du conseil d’administration ou d’école, de la convention prévue à l’article L. 212-15 du code de l’éducation entre la collectivité de rattachement de l’établissement et le responsable de l’association n’est pas obligatoire. Toutefois, cette association doit au préalable obtenir l’autorisation du chef d’établissement. De plus, comme l’indique la circulaire du 25 août 2006, il est préférable que le maire ou la collectivité territoriale de rattachement de l’établissement en soit informé et la souscription d’une assurance est recommandée. Ce raisonnement s’applique quelle que soit l’association concernée afin de ne pas entraîner de rupture d’égalité dans la façon dont seraient traitées des associations amenées à rendre exactement le même service.
Questions propres à la formation continue (GIP-F.C.I.P., GRETA…) GRETA – Stagiaire – Procédure disciplinaire – Exclusion définitive – Autorité compétente pour prononcer la sanctionNote DAJ A1 n° 2017-0101 du 3 août 2017
La direction des affaires juridiques a été saisie de la question de la procédure disciplinaire applicable à un stagiaire d’un GRETA, notamment lorsqu’il est envisagé de procéder à son exclusion définitive.
La procédure disciplinaire applicable aux stagiaires de la formation continue est décrite aux articles R. 6352-3 à R. 6352-8 du code du travail, entrés en vigueur lors de la publication du décret n° 2008-244 du 7 mars 2008 qui les a insérés dans ce code. Depuis cette date, il convient de ne plus se référer à la note de service n° 93-094 du 27 janvier 1993 relative au règlement intérieur applicable aux stagiaires des GRETA, prise pour expliquer des dispositions réglementaires désormais abrogées, laquelle note de service prévoyait l’intervention du conseil de perfectionnement constitué en commission de discipline. Il n’existe donc plus d’instance consultative chargée de rendre un avis sur un projet d’exclusion définitive d’un stagiaire de GRETA.
Quant à la question de l’autorité compétente dans les GRETA pour prononcer les sanctions prévues à l’article R. 6352-5 du code du travail qui attribue cette compétence au « directeur de l’organisme de formation », il ressort des dispositions de l’article D. 423-4 du code de l’éducation qu’il appartient au chef de l’établissement support du GRETA de prononcer ces sanctions.
Un stagiaire de GRETA peut former un recours gracieux auprès du chef de l’établissement support du groupement à l’encontre de la sanction dont il fait l’objet. En revanche, il ne peut former de recours hiérarchique auprès du recteur d’académie dès lors que le chef de l’établissement support du GRETA exerce dans ce domaine des compétences propres en matière de formation continue des adultes.
PersonnelsQUESTIONS COMMUNESObligations des fonctionnaires Activité de collaborateur parlementaire – Cumul de cette activité avec l’activité d’agent publicNote DAJ A2 n° 2017-0023 du 6 juillet 2017
II a été demandé à la direction des affaires juridiques si un fonctionnaire peut cumuler son activité principale avec l’activité de collaborateur d’un député.
1. Les collaborateurs parlementaires sont embauchés par un contrat de droit privé conclu par le député ou le sénateur qu’ils assistent, même si certaines tâches administratives relatives à la gestion de leur situation peuvent être assurées par les services administratifs des Assemblées (cf. Cass. soc., 18 février 2004, UNSA-U.S.C.P. c/ Assemblée nationale et autres, n° 02-60567, au Bulletin ; C.A.A. Paris, 7 octobre 1999, n° 96PA00958).
L’activité de collaborateur parlementaire doit donc être regardée comme une activité privée lucrative au sens de l’article 25 septies introduit dans la loi du n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (article 7).
Il ressort de l’article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 qu’un fonctionnaire ne peut exercer une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit, sous réserve des exceptions que cet article prévoit.
Au nombre de ces exceptions se trouve celle prévue par le 2° du II de cet article 25 septies qui dispose qu’il est dérogé à cette interdiction de cumul d’activités : « Lorsque le fonctionnaire, ou l’agent dont le contrat est soumis au code du travail en application des articles 34 et 35 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, occupe un emploi permanent à temps non complet ou incomplet pour lequel la durée du travail est inférieure ou égale à 70 % de la durée légale ou réglementaire du travail (...). »
Cette dérogation ne saurait toutefois être appliquée à un fonctionnaire de l’État dans la mesure où il résulte des dispositions de l’article 6 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État que seuls les agents contractuels peuvent occuper des fonctions qui, correspondant à un besoin permanent, impliquent un service à temps incomplet d'une durée n'excédant pas 70 % d’un service à temps complet.
Le IV de l’article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 dispose par ailleurs que : « Le fonctionnaire peut être autorisé par l’autorité hiérarchique dont il relève à exercer à titre accessoire une activité, lucrative ou non, auprès d’une personne ou d’un organisme public ou privé dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui lui sont confiées et n’affecte pas leur exercice (…). » Le VII de l’article 25 septies renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de fixer « notamment la liste des activités susceptibles d'être exercées à titre accessoire en application du IV ».
2. C’est le décret n° 2017-105 du 27 janvier 2017 relatif à l’exercice d’activités privées par des agents publics et certains agents contractuels de droit privé ayant cessé leurs fonctions, aux cumuls d’activités et à la commission de déontologie de la fonction publique qui fixe les conditions d’application de l’article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 et, notamment, de son IV.
Il ressort de l’article 6 de ce décret que l’activité de collaborateur parlementaire n’entre dans aucune des catégories d’activités accessoires que les agents publics peuvent être autorisés à cumuler avec leur activité principale.
3. L’activité de collaborateur parlementaire ne peut notamment pas être regardée comme une activité d'intérêt général exercée auprès d’une personne publique ou auprès d'une personne privée à but non lucratif au sens du h) de cet article 6 du décret du 27 janvier 2017.
À cet égard, il convient de rappeler que l’article 38 de ce décret du 27 janvier 2017 prévoit spécifiquement la possibilité d’autoriser les collaborateurs de cabinet des autorités territoriales à exercer au titre d’une activité accessoire les fonctions de collaborateur d'un député à l'Assemblée nationale, d'un sénateur ou d'un représentant au Parlement européen, ce qui confirme, s’il en était besoin, que les auteurs de ce décret n’ont pas entendu admettre de manière générale la possibilité, pour les fonctionnaires de l’État, de cumuler cette dernière activité avec leur activité principale d’agent public. Un fonctionnaire ne peut donc être autorisé, à quelque titre que ce soit, à exercer une activité de collaborateur parlementaire en même temps que ses fonctions principales.
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Les sanctions et mesures administratives applicables dans les cas de plagiat commis par des enseignants ou des étudiants dans l’enseignement supérieur
Le plagiat est une préoccupation récurrente dans l’enseignement supérieur et la recherche. La disponibilité sous un format électronique d’un nombre important et d’une grande variété de publications universitaires a encore accru cette préoccupation en raison de la facilité avec laquelle ces œuvres sont désormais diffusées et, corrélativement, de la multiplicité des possibilités techniques de se les approprier. Cette préoccupation se manifeste par la volonté des établissements de développer des approches préventives, notamment par la rédaction de chartes contre le plagiat ou la soumission des écrits universitaires à des logiciels ayant pour fonctionnalité d’y détecter les emprunts non signalés d’autres œuvres.
Les établissements publics d’enseignement supérieur ne sont toutefois pas démunis pour faire face au plagiat et le sanctionner. L’objet de la présente chronique est de faire le point sur les différentes possibilités qui s’offrent aux autorités d’un établissement d’enseignement supérieur confrontées à un cas de plagiat dans leur établissement. Seront ainsi envisagées les sanctions pénales, les sanctions disciplinaires, les sanctions ordinales et les mesures administratives pouvant faire suite à la détection du plagiat dans un écrit universitaire.
I. LES SANCTIONS APPLICABLES DANS LE CAS DE PLAGIAT
A. Les sanctions pénales applicables aux étudiants et enseignants de l’enseignement supérieur auteurs de plagiat
Aux termes du premier alinéa de l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle : « L'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. »
Le plagiat, qui consiste à s’approprier tout ou partie d’une œuvre et à l’incorporer dans ses propres œuvres, fait partie des violations du droit d’auteur garanti par ces dispositions de l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle. À ce titre, il fait l’objet d’une incrimination pénale, en l’espèce de la qualification de contrefaçon, délit réprimé par les dispositions des articles L. 335-1 à L. 335-9 du code de la propriété intellectuelle et puni de trois ans de prison et 300 000 euros d’amende. Il est dès lors loisible à toute personne qui s’estime victime d’une contrefaçon de saisir la justice pénale afin qu’elle poursuive les auteurs.
Il ne fait pas de doute que la plupart des publications de personnels enseignants ou d’étudiants dans l’enseignement supérieur sont des œuvres de l’esprit au sens de l’article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle et sont, à ce titre, susceptibles de faire l’objet de contrefaçons. Ainsi en est-il par exemple des thèses
Lorsque les victimes du plagiat sont des personnels des établissements publics d’enseignement supérieur, elles peuvent demander à la collectivité publique qui les emploie le bénéfice des dispositions de l’article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 relatives à la protection fonctionnelle.
Par ailleurs, le deuxième alinéa de l’article 40 du code de procédure pénale, aux termes duquel : « Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs », fait obligation aux autorités ou aux enseignants des établissements publics d’enseignement supérieur dans lesquels des plagiats ont été commis de porter ces faits à la connaissance du procureur de la République.
Au chapitre des sanctions pénales, il convient également de rappeler que la loi du 23 décembre 1901 réprimant les fraudes dans les examens et concours publics prévoit que : « Toute fraude commise dans les examens et les concours publics qui ont pour objet l'entrée dans une administration publique ou l'acquisition d'un diplôme délivré par l'État constitue un délit (…) » et est punie de trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 9 000 euros.
1. Les sanctions disciplinaires applicables aux personnels enseignants de l’enseignement supérieur
Les personnels enseignants des établissements d’enseignement supérieur peuvent ainsi se voir appliquer les sanctions disciplinaires prévues pour les enseignants-chercheurs et membres des autres corps de personnels enseignants de l’enseignement supérieur par l’article L. 952-8 du code de l’éducation et, pour les autres enseignants en fonction dans l’enseignement supérieur, par l’article L. 952-9 du même code. La procédure disciplinaire, qui se déroule devant les sections disciplinaires des établissements, juridictions de premier ressort, puis, en appel devant le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) réuni en formation disciplinaire et, enfin, en cassation devant le Conseil d’État, est organisée par les dispositions des articles R. 712-9 à R. 712-46 du code de l’éducation. La section disciplinaire compétente est saisie, par lettre accompagnée de toutes pièces justificatives adressée à son président et désignant les personnes faisant l'objet des poursuites et les faits qui leur sont reprochés, par le président de l’université ou, en cas de défaillance de ce dernier, par le recteur d’académie, chancelier des universités, à l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la notification de la demande expresse à cette fin qu’il a adressée au président. Le ministre ne dispose de la capacité de saisir la section disciplinaire compétente que dans le seul cas où les poursuites disciplinaires sont engagées à l’encontre du président de l’université.
Il convient également de mentionner le dernier alinéa de l’article L. 952-7 du code de l’éducation qui prévoit que : « Les sanctions prononcées à l'encontre des enseignants par la section disciplinaire ne font pas obstacle à ce que ces enseignants soient traduits, en raison des mêmes faits, devant les instances disciplinaires prévues par les statuts qui leur sont applicables dans leur corps d'origine. » Ces dispositions sont applicables aux enseignants appartenant à un corps de l’enseignement secondaire qui exercent leurs fonctions dans un établissement d’enseignement supérieur : ainsi, l’un de ces enseignants sanctionné en application des dispositions de l’article L. 952-9 du code de l’éducation pour des faits de plagiat commis dans l’exercice de ses fonctions dans l’enseignement supérieur est également susceptible d’être traduit en raison de ces mêmes faits de plagiat devant le conseil de discipline compétent pour les membres du corps enseignant du second degré dont il relève et sanctionné selon le droit disciplinaire commun de la fonction publique (articles 66 et 67 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État et décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'État).
Les membres du personnel enseignant et hospitalier des centres hospitaliers et universitaires (enseignants de statut hospitalo-universitaire) relèvent d’un régime disciplinaire particulier prévu par les dispositions de l’article L. 952-22 du code de l’éducation aux termes duquel : « [Ils] sont soumis, pour leur activité hospitalière comme pour leur activité universitaire, à une juridiction disciplinaire unique instituée sur le plan national (…). » Le décret n° 84-135 du 24 février 1984 portant statut des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires prévoit notamment, dans ses articles 19 à 25, les sanctions disciplinaires qui leur sont applicables et la composition de cette juridiction disciplinaire unique qui statue en premier et dernier ressort. La saisine de cette juridiction disciplinaire relève de la compétence conjointe du ministre chargé de l'enseignement supérieur et du ministre chargé de la santé. Il en va de même pour les personnels relevant du décret n° 90-92 du 24 janvier 1990 portant statut des personnels enseignants et hospitaliers des centres de soins, d'enseignement et de recherche dentaires des centres hospitaliers et universitaires, dont les articles 48 à 53 comportent des dispositions analogues à celles du décret n° 84-135 du 24 février 1984 et renvoient à plusieurs articles du chapitre III intitulé « Discipline » de ce même décret.
Ces procédures disciplinaires peuvent être assorties, dans l’intérêt du service et sous le contrôle du juge, de décisions de suspension de l’enseignant poursuivi pour des faits de plagiat, lorsque les faits imputés à l'intéressé présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité. Là encore, le régime de la décision de suspension de fonctions, qui ne revêt pas le caractère d’une sanction disciplinaire, varie selon la catégorie de personnels enseignants considérée.
La suspension de fonctions de droit commun d’un enseignant-chercheur ou d’un autre membre d’un corps enseignant de l’enseignement supérieur est prévue par l’article L. 951-4 du code de l’éducation qui permet au ministre chargé de l’enseignement supérieur de le suspendre de ses fonctions pour une durée maximale d’un an sans privation de traitement (cf. J.R.C.E., 26 août 2014, n° 382511). Le ministre a délégué cette compétence, par l’arrêté du 10 février 2012 portant délégation de pouvoirs en matière de recrutement et de gestion de certains personnels enseignants des établissements publics d’enseignement supérieur et de recherche pris sur le fondement de l’article L. 951-3 du code de l’éducation, au président de l’université en ce qui concerne les enseignants-chercheurs régis par le décret n° 84-431 du
Les enseignants de statut hospitalo-universitaire relèvent d’une procédure de suspension de fonctions particulière : la suspension n’est pas limitée dans sa durée, mais elle est conditionnée à l’engagement d’une procédure disciplinaire. Cette mesure de suspension, prononcée « lorsque l’intérêt du service l’exige » par arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la santé, est prévue par l’article 25 du décret n° 84-135 du 24 février 1984, ainsi que par l’article 53 du décret n° 90-92 du 24 janvier 1990. La durée de la suspension de fonctions doit correspondre à celle de la procédure disciplinaire (cf. C.E., 13 juillet 2006, 24 janvier 2007, n° 288865).
Même si le Conseil d’État n’a pas eu l’occasion de trancher expressément cette question, il ne fait guère de doute que cette procédure de suspension est la seule applicable aux personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires, à l’exclusion de toute autre et notamment de celle prévue par l’article L. 951-4 évoquée précédemment.
La procédure de suspension de droit commun de la fonction publique, prévue par l’article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, n’est susceptible d’être appliquée que dans les hypothèses évoquées plus haut dans lesquelles l’autorité disciplinaire compétente pour les membres des corps de personnels enseignants du second degré décide d’engager des poursuites disciplinaires à l’encontre d’un membre de l’un de ces corps exerçant dans l’enseignement supérieur à raison de faits de plagiat commis dans l’exercice de ses fonctions dans l’enseignement supérieur. Dans ce cas, recteur et ministre ont tous deux compétence pour prononcer la mesure de suspension de fonctions (cf. C.E., 22 novembre 2004, Ministre de l’éducation nationale c/ M. X, n° 244515, aux tables du Recueil Lebon)
2. Les sanctions disciplinaires applicables aux usagers dans l’enseignement supérieur
Aux termes de l’article L. 811-6 du code de l’éducation : « Un décret en Conseil d'État détermine les sanctions applicables aux usagers d'un établissement public d'enseignement supérieur. Celles-ci comprennent notamment l'exclusion temporaire ou définitive de tout établissement public d'enseignement supérieur, l'interdiction temporaire ou définitive de passer tout examen conduisant à un titre ou diplôme délivré par un établissement public d'enseignement supérieur et l'interdiction de prendre toute inscription dans un établissement public d'enseignement supérieur. »
C’est l’article R. 712-10 du code de l’éducation qui prévoit que le régime disciplinaire prévu aux articles R. 712-9 à R. 712-46 du même code est applicable non seulement aux enseignants-chercheurs et autres personnels d’enseignement de l’établissement comme rappelé ci-dessus, mais également à tout usager de l’université « (...) lorsqu’il est auteur ou complice, notamment : / a) D’une fraude ou d'une tentative de fraude commise à l'occasion d'une inscription, d'une épreuve de contrôle continu, d'un examen ou d'un concours ; / b) D'un fait de nature à porter atteinte à l'ordre ou au bon fonctionnement de l'université ; / c) D'une fraude ou d'une tentative de fraude commise à l'occasion d'une inscription dans un établissement d'enseignement supérieur privé lorsque cette inscription ouvre l'accès à un examen de l'enseignement supérieur public ou d'une fraude ou tentative de fraude commise dans cette catégorie d'établissement ou dans une université, à l'occasion d'un examen conduisant à l'obtention d'un diplôme national ».
Ainsi, les dispositions réglementaires du code de l’éducation prévoient explicitement qu’un acte frauduleux, comme l’est un plagiat, est au nombre des motifs permettant d’engager à l’encontre des usagers des universités les poursuites disciplinaires prévues par les articles R. 811-10 à R. 811-15 du code de l’éducation. Ces dispositions présentent par ailleurs un caractère particulier dans la mesure où elles comportent l’énoncé d’un certain nombre de mesures que l’autorité administrative peut prendre en conséquence des fraudes commises et sur lesquelles nous reviendrons un peu plus loin.
C. Les sanctions ordinales
Par trois de ses décisions rendues en matière de contestation de sanctions ordinales consécutives à des faits de plagiat (C.E., 30 janvier 1980, n° 11675, aux tables du Recueil Lebon ; C.E., 17 décembre 1990, n° 118732, au Recueil Lebon ; C.E., 29 avril 2002, n° 211514), le Conseil d’État a admis que des faits de plagiat commis à l’occasion de la soutenance de thèses, même révélés plusieurs années après les faits et alors que les intéressés exerçaient leur activité professionnelle de chirurgien-dentiste, constituaient un manquement à « la probité intellectuelle », étaient contraires à plusieurs dispositions du code de déontologie régissant la profession de chirurgien-dentiste et étaient par conséquent constitutifs d’une faute professionnelle relevant, à ce titre, de la compétence de la juridiction disciplinaire de l’ordre des chirurgiens-dentistes.
Dans ces affaires, le Conseil d’État admet également que les sanctions ordinales retenues peuvent se cumuler, le cas échéant, avec des sanctions universitaires. Il est à noter d’ailleurs que cette possibilité de cumuler les procédures disciplinaires est aujourd’hui expressément prévue par les dispositions de l’article 24-1 du décret n° 84-135 du 24 janvier 1984 et de l’article 52 du décret n° 90-92 du 24 janvier 1990 aux termes desquels les sanctions prononcées par la juridiction disciplinaire des enseignants de statut hospitalo-universitaire ne font pas obstacle à la traduction des intéressés, en raison des mêmes faits, devant les chambres disciplinaires des ordres professionnels dont ils relèvent. Ce cumul est également prévu, s’agissant des professionnels de la santé, par les dispositions de l’article L. 4126-5 du code de la santé publique.
Le Conseil d’État retient par ailleurs le caractère attentatoire à l’honneur et à la probité des faits de plagiat, ce qui a pour conséquence de les exclure du bénéfice de toute amnistie.
Les autorités universitaires ont toute compétence pour saisir une juridiction ordinale, selon les procédures propres à cette dernière, lorsque le plagiat a été commis par un ressortissant de cette juridiction (voir par exemple, pour les professionnels de la santé, les dispositions législatives et règlementaires du chapitre IV relatif à la procédure disciplinaire dans le titre II du livre 1er de la quatrième partie du code de la santé publique relative aux professions de santé).
II. LES MESURES ADMINISTRATIVES CONSÉCUTIVES À LA RÉVÉLATION D’UN PLAGIAT
A. Les mesures administratives assortissant le prononcé de sanctions que prévoit la règlementation pour les usagers du service public de l’enseignement supérieur
Ces mesures, prévues pour assortir des sanctions prononcées à l’encontre des usagers de l’université à l’occasion de fraudes ou de tentatives de fraude, figurent aux articles R. 811-10 à R. 811-15 du code de l’éducation.
Ainsi, une inscription dans une formation est réputée nulle si la sanction a été prononcée à l’occasion d’une fraude commise à l’occasion de l’inscription. De manière similaire, une fraude commise à l’occasion d’une épreuve de contrôle continu, d’un examen ou d’un concours entraîne la nullité de l’épreuve correspondante, et si la juridiction disciplinaire le décide, du groupe d’épreuves ou de la session d’examen ou du concours (articles R. 811-10 et R. 811-11 du code de l’éducation). Dans cette dernière hypothèse, l’autorité administrative doit saisir le jury pour une nouvelle délibération sur les résultats obtenus par l’usager sanctionné (article R. 811-13 du même code).
Enfin, l’autorité administrative compétente retire l’inscription, le diplôme ou l’admission à l’examen ou au concours obtenus frauduleusement, en saisissant si c’est nécessaire le jury pour une nouvelle délibération (article R. 811-14 du code de l’éducation).
B. Le retrait des décisions obtenues par fraude résultant d’un principe général
Conformément au principe général selon lequel « la fraude corrompt tout », un acte obtenu par fraude ne crée pas de droits au profit de son bénéficiaire et peut être retiré ou abrogé, sans texte, à tout moment (principe aujourd’hui codifié à l’article L. 241-2 du code des relations entre le public et l’administration).
Le Conseil d’État a ainsi admis qu’une décision d’inscription sur une liste de qualification pouvait être retirée par le Conseil national des universités, au motif que la thèse de l’intéressée, prise en compte pour obtenir sa qualification, résultait du plagiat d’une autre thèse publiée trois ans plus tôt (C.E., 23 février 2009, n° 310277, aux tables du Recueil Lebon).
Le raisonnement apparaît aisément transposable au retrait d’un diplôme de doctorat reposant sur une thèse entachée de plagiat, bien qu’un tel cas n’ait jusqu’à ce jour jamais été présenté à juger au Conseil d’État. Ce retrait est nécessairement prononcé par l’autorité ayant délivré le diplôme ou titre, en l’espèce le chef de l’établissement l’ayant délivré, le jury s’étant initialement prononcé n’étant pas compétent pour apprécier une nouvelle fois la valeur des travaux d’un candidat (C.E., 17 juin 2005, n° 253800, aux tables du Recueil Lebon) et donc la réalité du plagiat.
Il doit être également rappelé que ces décisions de retrait, quand bien même les décisions qu’elles retirent auraient perdu leur caractère de décisions créatrices de droits du fait de la fraude dont elles sont entachées, doivent être motivées et faire l’objet d’une procédure contradictoire préalable sur le fondement des dispositions des articles L. 211-2 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l’administration (C.E., 29 septembre 2004, n° 249543, aux tables du Recueil Lebon).
Olivier Serre
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