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Lettre de la direction des affaires juridiques du ministÈre de l'Éducation nationale ET DE LA JEUNESSE et du ministÈre de l'enseignement supÉrieur, de la recherche et de l'innovation | ||||||||||
LIJ N°208 – novembre 2019 |
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ÉDITORIAL | ||
Il était difficilement concevable de ne pas évoquer dans ce numéro de la Lettre d’information juridique la décision du Conseil constitutionnel n° 2019-809 QPC du 11 octobre 2019 qui a fait l’objet de nombreux commentaires tant dans les revues spécialisées que dans les médias traditionnels.
Par une décision n° 430121 du 24 juillet 2019, le Conseil d’État avait décidé de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité à la Constitution du troisième alinéa de l’article 48 de la loi du 24 mai 1951 qui prévoit que des arrêtés du ministre intéressé et du ministre du budget fixent : « Les taux et modalités de perception des droits d’inscription, de scolarité, d’examen, de concours et de diplôme dans les établissements de l’État ».
Pour si surprenant que cela puisse paraître, la question de l’application à l’enseignement supérieur du treizième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 aux termes duquel : « (…) L’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’État » n’avait jamais été tranchée. Le Conseil d’État avait bien été saisi de cette question dans les années 70, mais l’application de la théorie de la loi-écran ne lui avait pas permis de se prononcer sur le sujet (C.E. Assemblée, 28 janvier 1972, Conseil transitoire de la faculté des lettres et des sciences humaines de Paris, n° 79200, au Recueil Lebon). Nicole Questiaux avait néanmoins estimé dans ses conclusions que la gratuité mentionnée au treizième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 n’interdisait pas de fixer des droits d’inscription du moment que leur montant n’écartait aucun étudiant de l’enseignement supérieur pour des considérations de fortune. L’objectif de gratuité s’apparentait ainsi davantage au principe d’égal accès mentionné au même alinéa.
Le Conseil constitutionnel aurait pu également trancher cette question à l’occasion de l’examen de la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur qui consacrait, dans son article 41 aujourd’hui codifié à l’article L. 719-4 du code de l’éducation, la perception par les établissements d’enseignement supérieur de droits d’inscription, mais cette disposition n’avait fait l’objet d’aucune mention particulière dans la décision n° 83-165 DC du 20 janvier 1984. La consécration législative du paiement de droits d’inscription pour l’accès à l’enseignement supérieur ne gênait alors manifestement personne.
Nous ne doutions pas que l’instauration, par l'arrêté du 19 avril 2019, de droits d’inscription différenciés pour certaines catégories d’étudiants étrangers serait l’occasion de voir cette question définitivement tranchée.
Dans sa décision du 11 octobre 2019, le Conseil constitutionnel a donc jugé que « l'exigence constitutionnelle de gratuité s'applique à l'enseignement supérieur public », mais que : « Cette exigence ne fait pas obstacle, pour ce degré d'enseignement, à ce que des droits d'inscription modiques soient perçus en tenant compte, le cas échéant, des capacités financières des étudiants. »
Il a ainsi décidé de ne pas suivre les observations du Gouvernement qui soutenait que le principe de gratuité, à la différence du principe d’égal accès, ne s’appliquait qu’à l’enseignement des premier et second degrés et donc à l’enseignement correspondant à la période de l’instruction obligatoire.
Ce faisant, le Conseil constitutionnel a choisi de s’engager dans une voie qui ne favorise pas nécessairement l’accessibilité du droit dès lors qu’elle consiste à élever au niveau constitutionnel le principe de gratuité de l’enseignement supérieur tout en admettant, dans un même mouvement, que ce principe ne fait toutefois pas obstacle au paiement de droits d’inscription et donc, in fine, à ce que l’accès à l’enseignement supérieur ne soit pas… gratuit.
Les limites que le Conseil constitutionnel a entendu poser à la détermination de droits d’inscription ne se comprennent pas non plus aisément à la première lecture.
Outre que la notion de « modicité » ne s’appréhende pas facilement sur le terrain juridique, comme bon nombre de commentateurs l’ont souligné, elle ne peut pas renvoyer à des montants insignifiants ou symboliques. Retenir une telle interprétation priverait en effet de sens la décision du Conseil constitutionnel selon laquelle, lorsque des droits d’inscription « modiques » sont perçus, il convient de tenir compte « des capacités financières des étudiants ». La prise en compte de ces capacités implique nécessairement que les droits d’inscription peuvent être fixés à un montant suffisamment élevé pour justifier leur éventuelle modulation.
Cette interprétation de la décision du Conseil constitutionnel du 11 octobre 2019 est finalement confortée par le commentaire que le Conseil constitutionnel a entendu faire de sa propre décision. On peut en effet y lire, en pages 14 et 15 :
« (…) Après avoir consacré l’application de l’exigence de gratuité à l’enseignement supérieur public, le Conseil constitutionnel a précisé la portée de cette exigence constitutionnelle. Il a jugé qu’elle “ne fait pas obstacle, pour ce degré d’enseignement, à ce que des droits d’inscription modiques soient perçus en tenant compte, le cas échéant, des capacités financières des étudiants’’ (paragr. 6). Ce faisant, le Conseil a considéré que l’exigence de gratuité, si elle constitue la règle applicable à l’enseignement supérieur comme à tout autre degré de l’enseignement public, ne doit pas pour autant revêtir pour l’enseignement supérieur une portée absolue. Il n’est donc pas interdit au législateur de prévoir des droits d’inscription pour l’accès aux établissements d’enseignement supérieur public dès lors que ces droits se caractérisent par leur modicité appréciée en tenant compte, le cas échéant, des capacités financières des étudiants. Ainsi, dans son acception propre à l’enseignement supérieur, cette exigence n’interdit pas que soient établis des droits d’inscription éventuellement corrélés aux coûts de la formation, pour autant que ces droits soient intrinsèquement peu élevés ou que des mécanismes tenant compte des situations financières respectives des étudiants assurent pour chacun de ceux-ci une modicité des droits dus propre à assurer leur égal accès à l’instruction. (…) »
La modicité et la prise en compte des capacités financières des étudiants ne sont plus ici deux conditions cumulatives à l’instauration de droits d’inscription pour l’accès à l’enseignement supérieur, mais deux conditions alternatives.
En tout état de cause, une chose est sûre : contrairement à ce que certains commentateurs ont soutenu ici ou là, aucune conclusion ne peut être tirée de cette décision du Conseil constitutionnel sur la constitutionnalité de l’arrêté du 19 avril 2019, et donc sur le montant des droits d’inscription fixés pour certaines catégories d’étudiants étrangers.
C’est au Conseil d’État, saisi du recours pour excès de pouvoir dirigé contre cet arrêté, qu’il appartiendra d’en juger, espérons-le, le plus rapidement possible afin de mettre un terme au sentiment d’insécurité juridique que la décision du Conseil constitutionnel a fait naître dans les établissements d’enseignement supérieur.
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Natacha Chicot | ||
SOMMAIRE | ||
Jurisprudence | ||
Principes générauxNEUTRALITÉLaïcité Laïcité – Activités assimilables à l’enseignement – Port de signe ou de tenue manifestant ostensiblement une appartenance religieuseC.A.A. Lyon, 23 juillet 2019, n° 17LY04351
Enseignement scolaireSECOND DEGRÉAdministration et fonctionnement des établissements scolaires Collèges – Restauration scolaire – Collectivités territoriales – Dépenses obligatoiresC.E., 24 juin 2019, Département d’Indre-et-Loire, n° 409659, au Recueil Lebon
PersonnelsQUESTIONS COMMUNESCongés Fonctionnaires et agents publics – Congé de maternitéC.A.A. Douai, 8 juillet 2019, n° 17DA01335
Cumul d’activités des fonctionnaires – Autorisation préalable – Activité privée lucrative – Sanction disciplinaireT.A. Nice, 7 juin 2019, n° 1704264
Personnel – Droit syndical – Réunion syndicale – Demande d’autorisation spéciale d’absence – Décision implicite – Retenue sur traitementC.A.A. Douai, 29 mai 2019, Ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, n° 18DA02222
Protection fonctionnelle – Refus du bénéfice de la protection fonctionnelle – Lien de causalité entre les fonctions exercées par l’agent et les attaques (absence) – Conflit de voisinage entre deux agents publicsT.A. Lyon, 19 juin 2019, n° 1803127
Fonctionnaires et agents publics – Dossier individuel – Composition – Refus d’insertion de pièces dans le dossier individuel de l’agent – Mesure d’ordre intérieur – Retrait de piècesT. A. Lille, 11 juillet 2019, n° 1610276
Discipline et suspension Personnel – Discipline – Procédure – Saisine de la commission administrative paritaire – Rapport écrit – Signature (absence) – Garantie au sens de la jurisprudence dite « Danthony » (absence)C.E., 24 juillet 2019, n° 426870
Fonctionnaires et agents publics – Condamnation pénale – Atteinte sexuelle – Discipline – Sanction disciplinaire – Admission d’office à la retraiteC.A.A. Douai, 29 mai 2019, Ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, n° 17DA00586
Personnel – Discipline – Sanction – Référé-suspension – Suspension d’une sanction – Exécution – Nouvelle sanction – Coexistence de deux sanctions dans l’ordonnancement juridique – Méconnaissance du principe général du droit non bis in idem (absence)T.A. Paris, 13 juin 2019, nos 1819193 et 1822802
Questions propres aux agents non titulaires Indemnisation – Agent non titulaire – GRETA – Responsabilité de l’État (non)C.E., 24 juillet 2019, n° 417984, aux tables du Recueil Lebon
Enseignement supérieur et recherche – Agents non titulaires régis par les dispositions de l’article L. 952-1 du code de l’éducation – Nature du contrat – Transformation du contrat en contrat à durée indéterminée (non)C.A.A. Marseille, 18 juin 2019, n° 18MA01619 C.A.A. Marseille, 18 juin 2019, n° 18MA01777
Temps de travail Enseignant-chercheur – Suppression d’heures de cours ne figurant plus au programme de la formation dispensée – Répartition des enseignements au sein de l’établissement – Répartition des services entre enseignants-chercheurs de l’établissement – Situation de sous-service – Autorité compétente en matière de constat et de sanction d’éventuels sous-services d’enseignants affectés dans un institut universitaire de technologie (I.U.T.)C.A.A. Versailles, 25 juillet 2019, n° 16VE02205
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Consultations | ||
PersonnelsQUESTIONS COMMUNESDroits et garanties Décision accordant le bénéfice de la protection fonctionnelle – Autorité compétente – Compétence du président de l’université ou du directeur de l’établissement public lorsqu’il est concerné, soit parce qu’il est à l’origine de la demande de protection fonctionnelle, soit parce qu’il est mis en cause par l’agent sollicitant celle-ci (oui)Note DAJ B2 n° 2019-040 du 19 juillet 2019
Cessation de fonctions Professeur stagiaire – Inaptitude physique – LicenciementNote DAJ A2 n° 2019-035 du 1er juillet 2019
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Le point sur | ||
Les principales dispositions de la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance et ses premiers décrets d’application
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ActualitÉs | ||
TEXTES OFFICIELS
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Jurisprudence | ||
Principes générauxNEUTRALITÉLaïcité ENSEIGNEMENT SCOLAIRE Parents d’élèves Laïcité – Activités assimilables à l’enseignement – Port de signe ou de tenue manifestant ostensiblement une appartenance religieuseC.A.A. Lyon, 23 juillet 2019, n° 17LY04351
Le règlement intérieur d’une école primaire prévoyait la participation de parents d’élèves à divers ateliers en classe et leur imposait, lors de cette participation, la neutralité en prohibant le port de tout signe ostentatoire manifestant une appartenance religieuse ou politique. Deux parents d’élèves avaient demandé à la rectrice de l’académie de Lyon d’intervenir pour mettre fin à cette pratique, mais celle-ci avait maintenu la demande faite aux parents de ne pas arborer de signes manifestant ostensiblement leur appartenance religieuse.
Saisie d’une demande d’annulation du jugement rendu par le tribunal administratif de Lyon rejetant la requête dirigée contre cette décision, la cour administrative d’appel de Lyon a d’abord rappelé que le principe de laïcité de l’enseignement public impose que l’enseignement soit dispensé dans le respect, d’une part, de cette neutralité par les programmes et par les enseignants et, d’autre part, de la liberté de conscience des élèves.
La cour a déduit que le principe de laïcité « impose également que, quelle que soit la qualité en laquelle elles interviennent, les personnes qui, à l’intérieur des locaux scolaires, participent à des activités assimilables à celles des personnels enseignants, soient astreintes aux mêmes exigences de neutralité ».
Elle a précisé que l’interdiction contestée n’avait ni pour objet ni pour effet d’édicter une interdiction générale faite aux parents arborant un signe religieux de participer à l’ensemble des activités scolaires, mais qu’elle était circonscrite à des activités se déroulant à l’intérieur des classes et dans lesquelles les parents exercent des fonctions similaires à celles des enseignants.
N.B. : Dans une étude adoptée le 19 décembre 2013, rédigée à la demande du Défenseur des droits, le Conseil d’État avait affirmé que les parents d’élèves demeuraient des usagers du service public et n’étaient dès lors pas soumis au principe de neutralité religieuse. Il avait cependant précisé que les exigences liées au bon fonctionnement du service public de l’éducation pouvaient conduire l’autorité compétente à recommander à ceux-ci de s’abstenir de manifester leur appartenance religieuse.
Deux jugements de tribunaux administratifs sont, depuis cette étude, intervenus pour prohiber une interdiction de principe et rappeler que seules des considérations liées à l’ordre public ou au bon fonctionnement du service peuvent permettre de restreindre la liberté d’expression des convictions religieuses des accompagnateurs de sorties scolaires (cf. T.A. Nice, 9 juin 2015, n° 1305386 ; T.A. Amiens, 15 décembre 2015, n° 1401797, p. 2). L’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon, qui est clairement circonscrit aux activités se déroulant à l’intérieur des classes et dans le cadre desquelles les parents exercent des fonctions similaires à celles des enseignants ne remet pas en cause l’état du droit s’agissant de l’accompagnement des sorties scolaires.
Enseignement scolaireSECOND DEGRÉAdministration et fonctionnement des établissements scolaires RELATIONS DE L’ÉTABLISSEMENT AVEC LE DÉPARTEMENT OU LA RÉGION Collèges – Restauration scolaire – Collectivités territoriales – Dépenses obligatoiresC.E., 24 juin 2019, Département d’Indre-et-Loire, n° 409659, au Recueil Lebon
Par cette décision, le Conseil d’État tranche la question du caractère obligatoire ou non du service public de la restauration scolaire au collège. Si le caractère facultatif de la restauration scolaire dans le premier degré ne fait aucun doute (C.E. Section, 5 octobre 1984, Commissaire de la République de l’Ariège, n° 47875, au Recueil Lebon), la question demeurait posée pour les collèges.
Le Conseil d’État a ainsi rappelé qu’en application de l’article L. 213-2 du code de l’éducation, dans sa version antérieure à la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, et du décret n° 85-934 du 4 septembre 1985 relatif au fonctionnement du service annexe d’hébergement des établissements publics locaux d’enseignement, le service de restauration dans les collèges constituait une compétence de l’État à caractère facultatif.
Par conséquent, le Conseil d’État a jugé qu’en transférant par la loi du 13 août 2004 au département la charge du service de restauration dans les collèges, assortie du transfert des moyens et de la gestion des agents concernés, le législateur n’avait pas entendu transformer ce service public administratif facultatif en service public administratif obligatoire.
Le Conseil d’État est ainsi revenu sur la décision de la cour administrative d’appel du 10 février 2017, Commune de Fondettes, n° 15NT01973, qui avait estimé que les départements étaient tenus d’assurer la charge du service public de restauration scolaire dans les collèges (cf. LIJ n° 200, novembre 2017), et il a affirmé clairement que la restauration scolaire est un service public facultatif pour les départements. N.B. : Les dispositions de l’article L. 213-2 du code de l’éducation relatives à la compétence des départements en matière de restauration scolaire étant identiques à celles de l’article L. 214-6 du même code relatives à la compétence des régions, et ces deux articles ayant été modifiés de manière identique par la loi du 13 août 2004, le raisonnement du Conseil d’État dans cette affaire semble transposable aux conseils régionaux concernant les établissements dont ils ont la charge.
PersonnelsQUESTIONS COMMUNESCongés CONGÉ DE MATERNITÉ, DE PATERNITÉ, D’ADOPTION Fonctionnaires et agents publics – Congé de maternitéC.A.A. Douai, 8 juillet 2019, n° 17DA01335
La requérante, professeure de l’enseignement secondaire, avait demandé à bénéficier d’un allongement de son congé de maternité au titre de sa troisième grossesse. En vertu des dispositions de l’article L. 331-4 du code de la sécurité sociale applicable aux fonctionnaires pour la détermination de la durée du congé de maternité, la fonctionnaire qui a déjà mis au monde au moins deux enfants nés viables bénéficie d’un allongement de son congé de maternité. L’allongement du congé de maternité au titre d’une troisième grossesse est donc subordonné à la viabilité des enfants nés antérieurement à la maternité en cause.
La demande de la professeure avait été refusée, l’administration ayant déduit de l'acte d’enfant sans vie communiqué à l’appui de sa demande que l’enfant n’était pas né viable.
La cour administrative d’appel de Douai a considéré que l’établissement d’un acte d’enfant sans vie, document dressé par un officier d’état civil dans les conditions définies par le second alinéa de l’article 79-1 du code civil, ne préjuge pas de la viabilité ou de l’absence de viabilité d’un enfant ; l’administration avait donc commis une erreur de droit en fondant son refus sur ce document.
Obligations des fonctionnaires NON-CUMUL D’ACTIVITÉS Cumul d’activités des fonctionnaires – Autorisation préalable – Activité privée lucrative – Sanction disciplinaireT.A. Nice, 7 juin 2019, n° 1704264
Le requérant, professeur d’éducation physique et sportive, s’est vu infliger la sanction de rétrogradation assortie de la radiation du tableau d’avancement pour avoir, d’une part, créé avec d’autres associés une société commerciale sans avoir au préalable sollicité l’autorisation de l’autorité dont il relevait, comme le prescrit l’article 4 du décret n° 2007-658 du 2 mai 2007 relatif au cumul d’activités des fonctionnaires, et, d’autre part, usé de ses fonctions professionnelles afin de mettre en œuvre un projet qui favorisait ses intérêts personnels, méconnaissant ainsi les dispositions alors applicables de l’article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires qui prohibent l’exercice, par les agents publics, d’activités privées lucratives en dehors de certaines hypothèses.
Par un jugement du 7 juin 2019, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de l’intéressé demandant l’annulation de cette sanction.
Il a rappelé que si la détention par le requérant de parts sociales dans une société n’était soumise à aucune autorisation préalable, comme le prévoyait expressément l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 dans sa rédaction en vigueur avant sa modification par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, sa participation à la création de la société en tant que dirigeant devait en revanche être soumise à l’autorisation préalable de sa hiérarchie.
Le tribunal administratif a jugé que ce manquement constituait une faute et que la sanction infligée n’était pas disproportionnée.
Droits et garanties DROITS SYNDICAUX Personnel – Droit syndical – Réunion syndicale – Demande d’autorisation spéciale d’absence – Décision implicite – Retenue sur traitementC.A.A. Douai, 29 mai 2019, Ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, n° 18DA02222
Le requérant, professeur de l’enseignement scolaire, avait demandé à bénéficier d’une autorisation spéciale d’absence afin de participer à une réunion de l’organisme directeur du syndicat dont il était membre. Malgré l’absence de réponse à sa demande, le professeur y avait participé.
L’administration a procédé, le 1er décembre 2015, à une retenue d’un trentième de son traitement pour service non fait, en raison de cette absence qu’elle jugeait irrégulière.
Par un jugement du 5 septembre 2018, le tribunal administratif de Lille a annulé la mesure de retenue au motif que l’agent aurait disposé d’une autorisation implicite d’absence pour se rendre à la réunion syndicale.
Par un arrêt du 29 mai 2019, la cour administrative de Douai a annulé ce jugement et a rejeté la demande d’annulation.
La cour administrative d’appel a, tout d’abord, cité les dispositions de l’article 13 du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique, qui prévoient que des autorisations spéciales d’absence (ASA) peuvent être accordées aux représentants syndicaux mandatés par les statuts de leur syndicat pour participer à certaines réunions syndicales, et les dispositions de l’article 15 du même décret, qui prévoient que des autorisations spéciales d’absence peuvent être accordées à des représentants syndicaux sur convocation de l’administration pour siéger dans des organismes de concertation ou dans des groupes de travail, ou pour participer à une négociation.
La cour administrative d’appel a ensuite précisé que l’article 13 prévoyait explicitement la possibilité pour l’administration de refuser l’autorisation demandée de participer à une réunion syndicale, sous réserve des nécessités du service, par une décision motivée (cf. C.E., 25 septembre 2009, Commune de Saint-Martin-de-Valgalgues, n° 314265, aux tables du Recueil Lebon, pour les demandes de congé pour formation syndicale), ce qui n’est pas le cas pour les demandes fondées sur les dispositions de l’article 15 qui prévoient la délivrance systématique d’une autorisation spéciale d’absence pour les réunions des diverses instances de concertation ou organismes énumérés par ce texte.
La cour administrative d’appel en a déduit qu’une absence de réponse à une demande fondée sur le dispositions de l’article 13 du décret du 28 mai 1982 ne pouvait constituer une autorisation implicite de participation. L’administration était donc fondée à procéder à une retenue sur le traitement de ce professeur qui s’était absenté irrégulièrement.
N.B. : Si l’article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations a posé le principe selon lequel l’absence de réponse de l’administration à une demande d’un usager vaut décision implicite d’acceptation au terme d’un délai de deux mois, le législateur a toutefois limité le champ d’application de ce nouveau principe et défini des exceptions.
Tel est notamment le cas des décisions intervenant dans le cadre des relations entre l’administration et ses agents, comme le prévoit le 5° de l’article L. 231-4 du code des relations entre le public et l’administration.
Les demandes présentées par les agents qui ne reçoivent pas de réponse font donc naître des décisions implicites de rejet (cf. C.E., 2 juillet 2012, n° 355871, aux tables du Recueil Lebon), hormis dans les hypothèses où un texte spécial prévoit un régime implicite d’acceptation, ce qui n’est pas le cas pour l’instruction des demandes d’autorisation spéciale d’absence présentées sur le fondement de l’article 13 du décret du 28 mai 1982.
PROTECTION FONCTIONNELLE Protection fonctionnelle – Refus du bénéfice de la protection fonctionnelle – Lien de causalité entre les fonctions exercées par l’agent et les attaques (absence) – Conflit de voisinage entre deux agents publicsT.A. Lyon, 19 juin 2019, n° 1803127
Le principal d’un collège avait sollicité le bénéfice de la protection fonctionnelle, en raison des injures et des menaces prononcées à son encontre par l’adjoint gestionnaire du collège dont le logement de fonction était situé dans le même immeuble que celui dont il bénéficiait.
Toutefois, le tribunal administratif a relevé, d’une part, que l’attitude irrespectueuse et non professionnelle reprochée à l’adjoint gestionnaire par le principal du collège ne concernait pas l’attitude de l’adjoint en sa qualité d’agent public, mais en tant qu’occupant de l’immeuble où leurs logements de fonction se situaient et, d’autre part, que les faits litigieux s’étaient déroulés dans les parties communes de l’immeuble, en dehors des heures de service du principal du collège ou de sa présence.
N.B. : Le bénéfice de la protection prévue par le IV de l’article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 est subordonné à l’existence d’un lien entre les attaques subies et les fonctions de l’agent public qui sollicite cette protection (cf. C.E., 26 septembre 2011, n° 329228, au Recueil Lebon).
ACCÈS AU DOSSIER DE CARRIÈRE Fonctionnaires et agents publics – Dossier individuel – Composition – Refus d’insertion de pièces dans le dossier individuel de l’agent – Mesure d’ordre intérieur – Retrait de piècesT. A. Lille, 11 juillet 2019, n° 1610276
Le requérant, professeur agrégé de l’enseignement du second degré, avait demandé sans succès au recteur d’académie le retrait de plusieurs pièces de son dossier individuel relatives à son comportement au cours de l’année scolaire 2008-2009 et l’insertion d’autres documents dans ce même dossier.
Le tribunal administratif de Lille a partiellement accueilli la requête présentée par l’intéressé.
Il a tout d’abord estimé que le refus de l’administration d’insérer des pièces dans le dossier individuel à la demande de l’agent est une mesure d’ordre intérieur insusceptible de faire grief à l’agent. Par suite, les conclusions du requérant dirigées contre un tel refus ont été jugées irrecevables (cf. C.E., 25 juin 2003, n° 251833, au Recueil Lebon).
Ensuite, et après avoir cité les dispositions des articles 11 et 18 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, ensemble l’article 13 du décret n° 2011-675 du 15 juin 2011 relatif au dossier individuel des agents publics et à sa gestion sur support électronique, le tribunal administratif a examiné au fond la légalité du refus du recteur d’académie de retirer du dossier du requérant deux pièces litigieuses, à savoir un courrier de parents d’élèves faisant mention de gestes inappropriés que l’enseignant aurait eus en classe et un rapport du proviseur rapportant les explications fournies par l’intéressé sur les faits en cause, mentionnant notamment la pathologie à l’origine d’un handicap du professeur.
Le tribunal administratif a jugé que ces deux documents, en tant qu’ils se rapportaient à des gestes inappropriés du professeur et avaient trait à son comportement dans l’exercice de ses fonctions, intéressaient sa situation administrative. Le tribunal administratif a également relevé que le requérant n’établissait pas l’inexactitude des faits relatés dans ces pièces. Dès lors, si l’enquête préliminaire ouverte par le procureur de la République avait effectivement été classée sans suite, le tribunal a relevé que le juge répressif n’avait ni constaté l’inexistence des faits invoqués à l’encontre du requérant, ni jugé que ceux-ci ne lui étaient pas imputables. Ces documents avaient donc vocation à figurer dans le dossier individuel de l’agent.
Toutefois, une indication mentionnant dans le second document une pathologie du professeur aurait dû être effacée dans la mesure où cette information n’intéressait pas sa situation administrative et portait atteinte au secret médical liant l’administration, et ce, même si ce document n’avait fait l’objet d’aucune diffusion.
N.B. : Le contenu des pièces composant le dossier individuel de l’agent est encadré par les textes législatifs et réglementaires ainsi que par la jurisprudence.
Ainsi, les pièces faisant état des opinions ou activités politiques, syndicales, religieuses et philosophiques de l’agent, ou qui font état par exemple d’éléments relevant strictement de sa vie privée sont prohibées (cf. T.A. Montreuil, 26 janvier 2018, n° 1600778, LIJ n° 204, novembre 2018). Dans ce contexte, le tribunal administratif s’est attaché à préserver le secret médical du requérant, et ce, même si l’information médicale litigieuse n’avait pas été diffusée.
Par ailleurs, et s’agissant de l’hypothèse dans laquelle l’agent soutient que les faits mentionnés dans les pièces litigieuses sont erronés, le tribunal administratif a précisé qu’il appartient à l’intéressé d’établir cette inexactitude. La seule circonstance selon laquelle l’enquête préliminaire sur ces faits a été classée sans suite ne peut suffire à elle seule à établir leur inexistence.
La cour administrative d’appel de Nancy avait adopté une position différente en considérant que le refus d’un recteur d’académie de retirer des pièces faisant référence à des plaintes dont le requérant avait fait l’objet alors que le signalement effectué par l’administration auprès du ministère public avait abouti à un classement sans suite, au motif que les investigations effectuées par les enquêteurs n’avaient pas permis de révéler l’existence d’une infraction pénale, était illégal dans la mesure où l’exactitude matérielle des faits ne ressortait pas des pièces du dossier (C.A.A. Nancy, 10 novembre 2004, n° 99NC02449).
Discipline et suspension PROCÉDURE Personnel – Discipline – Procédure – Saisine de la commission administrative paritaire – Rapport écrit – Signature (absence) – Garantie au sens de la jurisprudence dite « Danthony » (absence)C.E., 24 juillet 2019, n° 426870
M. X, professeur de sciences de la vie et de la Terre dans un lycée de Saône-et-Loire, avait été mis à la retraite d’office par la décision du 17 juillet 2013 du ministre de l’éducation nationale, après avoir été reconnu coupable d’agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans par personne abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions par un jugement du tribunal correctionnel de Chalon-sur-Saône du 15 octobre 2012.
La légalité de cette sanction disciplinaire avait finalement été reconnue le 18 décembre 2018 par la cour administrative d’appel de Lyon, statuant sur renvoi du Conseil d’État après la cassation prononcée par la décision n° 401527 du 18 juillet 2018 (aux tables du Recueil Lebon, LIJ n° 204, novembre 2018).
M. X s’était également pourvu en cassation à l’encontre de ce second arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon. Par sa décision du 24 juillet 2019, le Conseil d’État a rejeté ce pourvoi.
La Haute juridiction a rappelé les dispositions de l’article 2 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'État qui prévoient que l’organisme siégeant en conseil de discipline doit être saisi, lorsque sa consultation est nécessaire, par « un rapport émanant de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire ou d'un chef de service déconcentré ayant reçu délégation de compétence à cet effet ». Le Conseil d’État a estimé que ces dispositions n’imposaient pas, à peine d’irrégularité de la décision finalement prise par l’autorité compétente, que le rapport de saisine du conseil de discipline soit signé par l’autorité auprès de laquelle siège le conseil de discipline. Il a en effet jugé que l’absence de signature de ce rapport n’était pas susceptible, par elle-même, d’avoir exercé une influence sur le sens de l’arrêté du 17 juillet 2013 ou d’avoir privé M. X d’une garantie. Le juge de cassation a ainsi confirmé l’application de la jurisprudence dite « Danthony » (C.E. Assemblée, 23 décembre 2011, n° 335033, au Recueil Lebon), faite par les juges du fond.
SANCTIONS Fonctionnaires et agents publics – Condamnation pénale – Atteinte sexuelle – Discipline – Sanction disciplinaire – Admission d’office à la retraiteC.A.A. Douai, 29 mai 2019, Ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, n° 17DA00586
Le requérant, professeur certifié, avait été condamné par jugement d’un tribunal correctionnel à la peine d’emprisonnement délictuel de douze mois, assortie d’un sursis total avec mise à l’épreuve durant trois ans, pour des faits d’atteinte sexuelle sur mineur de quinze ans pour la période allant de septembre à octobre 2011. À la suite de cette condamnation pénale, l’administration avait engagé une procédure disciplinaire et prononcé à l’encontre du professeur la sanction du quatrième groupe de la mise à la retraite d’office prévue à l’article 66 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État.
Le tribunal administratif de Lille avait, par un jugement du 3 mars 2017, annulé la mesure prononçant la sanction au motif de sa disproportion. Par un arrêt du 29 mai 2019, la cour administrative d’appel de Douai a annulé le jugement et rejeté la demande d’annulation.
La cour a considéré qu’eu égard à l’exigence d’exemplarité et d’irréprochabilité qui incombe aux enseignants dans leurs relations avec les mineurs, y compris en dehors du service et même lorsque ceux-ci affirment consentir à une relation, voire en sont à l’initiative, et compte tenu de l’atteinte portée, du fait de la nature de la faute commise, à la réputation du service public de l’éducation nationale ainsi qu’au lien de confiance qui doit unir les enfants et leurs parents aux enseignants du service, la sanction de la mise à la retraite d’office n’était pas, dans les circonstances de l’espèce, disproportionnée.
N.B. : Cet arrêt est conforme à la jurisprudence du Conseil d’État en la matière (cf. C.E., 18 juillet 2018, Ministre de l’éducation nationale, n° 401527, aux tables du Recueil Lebon). En l’espèce, la sanction prononcée à l’égard du professeur est justifiée quand bien même l’élève a consenti à la relation avec le professeur.
Personnel – Discipline – Sanction – Référé-suspension – Suspension d’une sanction – Exécution – Nouvelle sanction – Coexistence de deux sanctions dans l’ordonnancement juridique – Méconnaissance du principe général du droit non bis in idem (absence)T.A. Paris, 13 juin 2019, nos 1819193 et 1822802
Le requérant, professeur de philosophie, s’était vu infliger, par une décision ministérielle du 24 août 2018, une sanction de mise à la retraite d’office en raison de manquements graves et répétés à ses obligations de dignité, de neutralité et d’obéissance hiérarchique. L’exécution de cette sanction avait été suspendue par le juge des référés du tribunal administratif de Paris le 7 novembre 2018, qui avait également ordonné la réintégration du professeur dans ses fonctions.
Par une décision du 10 décembre 2018, le ministre de l’éducation nationale avait, en exécution de cette ordonnance, réintégré le professeur à compter du 8 novembre 2018 et prononcé à son encontre une sanction d’exclusion temporaire des fonctions pour une durée de dix-huit mois assortie d’un sursis de douze mois à compter de la notification de la décision. L’exécution de cette seconde sanction avait également été suspendue par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Paris du 24 décembre 2018.
Le professeur avait, en parallèle, demandé l’annulation des deux sanctions prises à son encontre. À l’appui de ses requêtes au fond, le professeur avait notamment fait valoir que les deux sanctions prononcées à son encontre étaient disproportionnées et que la seconde sanction était intervenue en méconnaissance de l’article L. 11 du code de justice administrative et du principe non bis in idem.
Par son jugement du 13 juin 2019, le tribunal administratif de Paris, qui a estimé que les faits reprochés au requérant pouvaient être regardés comme établis et constitutifs de fautes, a annulé la décision du 31 juillet 2018 infligeant la sanction de mise à la retraite d’office, qu’il a jugée disproportionnée par rapport aux fautes commises par l’intéressé. En revanche, il a rejeté la demande d’annulation de la sanction d’exclusion temporaire des fonctions, qu’il a jugée proportionnée à la gravité des fautes commises.
Le tribunal administratif a rappelé que, si eu égard à leur caractère provisoire, les décisions du juge des référés n’ont pas, au principal, l’autorité de la chose jugée, elles sont néanmoins, conformément au principe rappelé à l’article L. 11 du code de justice administrative, exécutoires, et en vertu de l’autorité qui s’attache aux décisions de justice, obligatoires.
Le tribunal administratif a estimé que ce principe avait été respecté et que l’administration avait exécuté l’ordonnance du juge des référés du 24 décembre 2018 dès lors qu’elle pouvait décider, pour tenir compte de l’ordonnance, après avoir procédé à la réintégration du professeur dans ses fonctions, de prendre une nouvelle sanction d’une gravité moins importante que celle dont l’exécution avait été suspendue.
Par ailleurs, le tribunal administratif a considéré que le principe général du droit selon lequel une personne ne peut être sanctionnée deux fois à raison des mêmes faits n’avait pas non plus été méconnu. Il a ainsi rappelé qu’une décision intervenue pour assurer l’exécution d’une mesure de suspension prise sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative revêt, par sa nature même, un caractère provisoire jusqu’à ce qu’il soit statué sur le recours en annulation présenté parallèlement à la demande en référé.
Aussi, l’exécution de la décision de sanction de mise à la retraite d’office du 24 juillet 2018 ayant été suspendue par le juge des référés, cette décision n’a produit aucun effet juridique à compter de la date de l’ordonnance du juge et jusqu’à ce que le juge se prononce au fond. Le tribunal administratif de Paris a relevé que « l’administration a, pour tenir compte de la suspension prononcée, réintégré le requérant rétroactivement à compter du 8 novembre 2018, puis a décidé, par l’arrêté querellé du 10 décembre 2018, de prononcer son exclusion temporaire », et retenu que : « Il est constant que cette sanction était, dès lors, au jour de son prononcé, la seule susceptible de produire effet, alors qu’au demeurant, une telle mesure n’aurait matériellement pas été possible si la sanction de mise à la retraite avait porté effets. »
N.B. : Par ce jugement, le tribunal administratif de Paris confirme que la circonstance que le juge des référés a ordonné la réintégration d’un agent public et suspendu l’exécution de la décision de mise à la retraite d’office, au seul motif que le moyen tiré de la disproportion de la sanction était de nature en l’état de l’instruction à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision, ne fait pas obstacle à ce qu’une nouvelle sanction, moins sévère pour tenir compte de l’ordonnance du juge, soit prise avant qu’il soit statué au fond sur la légalité de décision suspendue.
Ce jugement reprend les arguments développés par la direction des affaires juridiques dans son mémoire en défense, qui s’inscrivent dans la continuité de la jurisprudence du Conseil d’État selon laquelle le juge des référés ne peut, sans méconnaître son office de juge de l’évidence, prononcer une injonction ayant des effets en tous points identiques à ceux qui résulteraient de l’exécution d’un jugement d’annulation (cf. C.E., 23 octobre 2015, Ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, n° 386649, aux tables du Recueil Lebon).
Le tribunal administratif de Paris a, en outre, fait application de la jurisprudence du Conseil d’État relative au caractère provisoire des mesures prises en exécution d’une ordonnance de suspension d’une décision prise par le juge des référés, notamment lorsque le juge des référés a suspendu l’exécution d’une mesure excluant du service un agent public et a enjoint à l’administration de le réintégrer dans ses fonctions (cf. C.E., 23 mai 2018, Ministre d'État, ministre de l'intérieur, n° 416313, aux tables du Recueil Lebon).
Par ailleurs, il résulte également de la jurisprudence du Conseil d’État que deux décisions de même nature peuvent coexister dans l’ordonnancement juridique sans cumuler leurs effets (cf. C.E., 7 juin 2017, Société Margo Cinéma, n° 404480, aux tables du Recueil Lebon). Il s’ensuit qu’une décision prise en exécution d’une ordonnance du juge des référés qui a, par nature, un caractère provisoire peut coexister provisoirement, dans l’ordonnancement juridique, avec la décision initiale dont l’annulation est demandée, dès lors qu’elle ne cumule pas ses effets avec les siens, et dans le délai strictement nécessaire à l’aboutissement de la procédure contentieuse engagée à l’encontre de la première décision par l’agent qui en est l’objet. Le requérant ayant relevé appel de ce jugement, la LIJ rendra compte de la position du juge d’appel.
Questions propres aux agents non titulaires LICENCIEMENT – NON-RENOUVELLEMENT D’ENGAGEMENT Indemnisation – Agent non titulaire – GRETA – Responsabilité de l’État (non)C.E., 24 juillet 2019, n° 417984, aux tables du Recueil Lebon
Dans cette affaire, le Conseil d’État a rappelé qu’il résulte des dispositions des articles L. 423-1, D. 423-1, D. 423-3, D. 423-10 et D. 423-15 du code de l’éducation que les missions de formation professionnelle font partie des missions légalement dévolues aux établissements publics d'enseignement et qu’à ce titre, les établissements relevant du ministère de l'éducation nationale peuvent s'associer dans des groupements dépourvus de personnalité morale dits « GRETA » . Il résulte également de ces dispositions combinées qu'un des établissements membres du groupement est désigné comme établissement public support, chargé d'en assurer la gestion, l'ordonnateur et le comptable du groupement étant ceux de cet établissement public support.
Le Conseil d’État a également rappelé qu’en application de l'article 1er du décret n° 93-142 du 19 mars 1993 relatif aux personnels contractuels du niveau de la catégorie A exerçant en formation continue des adultes, les personnels contractuels des GRETA sont recrutés par le chef de l'établissement support du groupement et que leur rémunération est assurée par les ressources tirées de l'activité de formation continue de ce groupement.
Le Conseil d’État a donc déduit de l’ensemble de ces dispositions qu’alors même que les agents du GRETA sont recrutés, en vertu de l'article 17 du décret n° 93-432 du 24 mars 1993 sur la mission de formation continue des adultes du service public de l’éducation, dans les conditions prévues aux articles 4 et 6 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d’État, et relèvent donc, pour leur gestion, des dispositions de cette loi et de celles du décret du 17 janvier 1986 applicables aux agents non titulaires de l'État, ils sont des agents de l'établissement support du GRETA et non des agents de l'État.
Il a ainsi réaffirmé que la personne morale responsable du fonctionnement du GRETA est l’établissement support et non l’État. Par conséquent, le paiement des sommes qui sont dues aux agents à raison du contrat qui les lie à l'établissement support du GRETA incombe à ce dernier, et non à l’État.
N.B. : Par cette décision, le Conseil d'État se prononce sur le statut des personnels contractuels des GRETA en relevant qu’ils sont des agents de l’établissement public d’enseignement support de ce GRETA et non des agents de l’État. Il avait adopté une position identique dans une précédente décision (cf. C.E., 22 octobre 2014, Ministre de l'éducation nationale, n° 368262, aux tables du Recueil Lebon), mais d’une façon implicite, en jugeant que « lorsqu’une réorganisation de service conduit à la suppression d’un emploi occupé par un agent contractuel titulaire d’un contrat à durée indéterminée au sein d’un GRETA, l’administration doit mettre en œuvre l’obligation [de reclassement] (…) en prenant en compte l’ensemble des postes vacants au sein de ce GRETA ». C.D.I.SATION Enseignement supérieur et recherche – Agents non titulaires régis par les dispositions de l’article L. 952-1 du code de l’éducation – Nature du contrat – Transformation du contrat en contrat à durée indéterminée (non)C.A.A. Marseille, 18 juin 2019, n° 18MA01619 C.A.A. Marseille, 18 juin 2019, n° 18MA01777
Des chargés d’enseignement vacataires avaient demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler les décisions implicites par lesquelles le président de l’université avait rejeté leurs demandes de requalification de leurs contrats en contrat à durée indéterminée. Leurs demandes ayant été rejetées par le tribunal, les intéressés avaient formé un recours en appel devant la cour administrative d’appel de Marseille.
Les deux présents arrêts, rendus le 18 juin 2019, ont été l’occasion pour la cour administrative d’appel de Marseille de préciser le champ d’application de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, dont les dispositions de l’article 8 prévoient un droit à transformation du contrat en contrat à durée indéterminée pour les agents qui justifient notamment d’une durée de services publics effectifs de six années.
La cour a jugé qu’il résulte des dispositions de cet article 8 que le droit à transformation du contrat en contrat à durée indéterminée est exclu pour les agents dont l’emploi est régi par des dispositions législatives faisant exception au principe énoncé à l’article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires qui prévoit que, sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l’État sont occupés par des fonctionnaires.
En ce qui concerne les chargés d’enseignement vacataires, la cour a jugé que : « Le recrutement par les universités d’agents non titulaires pour exercer des fonctions d’enseignement est régi par les dispositions particulières de l’article L. 952-1 du code de l’éducation et par le décret pris pour son application », à savoir le décret n° 87-889 du 29 octobre 1987 relatif aux conditions de recrutement et d’emploi de vacataires pour l’enseignement supérieur, et que l’article L. 952-1 du code de l’éducation « constitue précisément une disposition législative faisant exception au principe selon lequel les emplois permanents de l’État sont occupés par des fonctionnaires ».
La cour a également rappelé qu’il résulte de ces dispositions que « les contrats passés par les universités en vue de recruter des chargés d’enseignement sont conclus pour une durée déterminée, le cas échéant renouvelable », reprenant ainsi la jurisprudence du Conseil d’État en la matière (cf. C.E., 15 décembre 2010, Université de la Méditerranée Aix-Marseille-II, n° 328372, aux tables du Recueil Lebon ; C.E., 15 décembre 2010, Université de la Méditerranée Aix-Marseille-II, n° 328373 ; C.E., 12 septembre 2018, n° 400453).
Par conséquent, les requérants, dont la situation est régie par cet article, ne pouvaient, en qualité de chargés d’enseignement vacataires « prétendre à ce que de tels services, dont les personnes en charge sont censées exercer une activité professionnelle principale en dehors de leur activité d’enseignement, entrent dans le champ de la loi du 12 mars 2012 et puissent être requalifiés en contrats à durée indéterminée ».
Ils ne pouvaient pas davantage y prétendre au titre de services par ailleurs accomplis en qualité de professeurs associés.
En effet, s’agissant des enseignants associés et invités régis par les dispositions de l’article 5 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, la cour a rappelé qu’ils étaient expressément exclus du dispositif de requalification du contrat et de la prise en compte des services dans le calcul de l’ancienneté de la durée de services publics effectifs de six années pour obtenir un contrat à durée indéterminée.
Il en est de même pour les agents recrutés par contrat dans le cadre d'une formation doctorale (cf. dernier alinéa de l’article 8 de la loi du 12 mars 2012).
Temps de travail Enseignant-chercheur – Suppression d’heures de cours ne figurant plus au programme de la formation dispensée – Répartition des enseignements au sein de l’établissement – Répartition des services entre enseignants-chercheurs de l’établissement – Situation de sous-service – Autorité compétente en matière de constat et de sanction d’éventuels sous-services d’enseignants affectés dans un institut universitaire de technologie (I.U.T.)C.A.A. Versailles, 25 juillet 2019, n° 16VE02205
Une enseignante-chercheuse, affectée au sein d’un institut universitaire de technologie (I.U.T.) d’une université, avait demandé au tribunal administratif de Montreuil d’annuler, d’une part, la décision de la directrice pédagogique de l’I.U.T. de suspendre le cours qu’elle assurait jusqu’à présent au motif qu’il ne figurait pas au programme de la formation pour laquelle elle intervenait et, d’autre part, la décision par laquelle le président de l’université l’avait informée que, se trouvant en situation de sous-service, elle devait rattraper les heures d’enseignement qu’elle n’avait pas effectuées l’année précédente, qu’en l’absence de rattrapage, il serait procédé à une retenue sur sa rémunération et à la suppression de sa prime d’enseignement et de recherche, et, en outre, qu’une procédure disciplinaire serait engagée à son encontre en cas de récidive.
Le tribunal administratif ayant rejeté sa requête par jugement du 18 mai 2016, l’intéressée avait interjeté appel.
1. Sur la décision de la directrice pédagogique de l’I.U.T. de suspendre le cours dispensé par la requérante
La requérante estimait que la décision de la directrice pédagogique de l’I.U.T. de suspendre le cours qu’elle dispensait avait été prise en méconnaissance tant des dispositions de l’article L. 952-4 du code de l’éducation, qui prévoient notamment que : « La répartition des fonctions d'enseignement et des activités de recherche au sein d'un même établissement fait l'objet d'une révision périodique (…) », que des dispositions du III de l’article 7 du décret du 6 juin 1984, qui prévoient qu’il appartient au président de l’université de prendre les décisions individuelles d’attribution de services en appliquant les règles définies par le conseil d’administration en formation restreinte et en prenant en compte les avis motivés exprimés par les instances dirigeantes de l’unité de recherche de rattachement et de la composante (C.E, 15 décembre 2010, Collectif pour la défense de l’université, n° 329056).
La cour administrative d’appel de Versailles a toutefois relevé que « la décision de suspendre le cours dispensé par [la requérante] au motif qu’il ne figurait pas au programme de la formation pour laquelle la requérante intervenait n’a[vait] ni pour objet ni pour effet de procéder à la répartition des enseignements au sein de l’I.U.T., ou de répartir les services entre enseignants-chercheurs au sein de l’établissement » et a donc jugé que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne pouvait qu’être écarté.
2. Sur la décision du président de l’université constatant la situation de sous-service de la requérante et l’informant d’éventuelles sanctions
La requérante, affectée au sein d’un des I.U.T. de l’université, estimait que le président de l’université était incompétent pour lui rappeler ses obligations de service dès lors que le directeur de l’I.U.T. a autorité sur les personnels qui y travaillent, en vertu notamment de l’article L. 713-9 du code de l’éducation.
La cour a tout d’abord rappelé qu’en application des dispositions de l’article L. 951-3 du code de l’éducation, le ministre a, par un arrêté du 10 février 2012 portant délégation de pouvoirs en matière de recrutement et de gestion de certains personnels enseignants des établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche, notamment délégué aux présidents des universités ses pouvoirs en matière de recrutement et de gestion des carrières des enseignants-chercheurs.
La cour a ensuite considéré qu’il ressort de ces textes que « le président de l’université (…) était compétent pour prendre toute décision relative au recrutement ou à la gestion des carrières des maîtres de conférences affectés à l’I.U.T. (…) ». Après avoir relevé qu’« aucune disposition législative ou réglementaire ne réservait au directeur de l’I.U.T. la compétence pour intervenir en matière de constat et de sanction des éventuels sous-services des enseignants [affectés à l’I.U.T.] », la cour a donc confirmé la compétence du président de l’université pour prendre la décision attaquée.
Enfin, la cour a constaté que la requérante se trouvait effectivement en situation de sous-service et que si elle soutenait que ce sous-service résultait de la décision de suspendre le cours qu’elle dispensait et de l’absence d’attribution par l’université d’heures de cours de nature à compenser cette suppression, elle n’établissait toutefois par aucun élément que la situation de sous-service qui lui était reprochée résulterait effectivement de la suppression de ce cours dont elle ne précisait d’ailleurs pas la quotité horaire. Par suite, la cour a conclu que l’autorité compétente était fondée à prendre la décision attaquée.
QUESTIONS PROPRES AUX PERSONNELS DE L’ENSEIGNEMENT SCOLAIREPersonnels enseignants QUESTIONS COMMUNES Personnel enseignant – Liberté pédagogique et principe hiérarchique – Évaluation des élèves – Modification par le chef d’établissement des moyennes des notes attribuées aux élèves par un enseignant – Mesure non susceptible de recoursT.A. Rouen, 28 février 2019, nos 1602239, 1603673, 1703537 et 1704008
Le requérant, professeur certifié, demandait au tribunal administratif de Rouen d’annuler les modifications apportées par le proviseur aux moyennes des notes qu’il avait initialement attribuées à ses élèves dans le cadre de sa mission d’évaluation prévue à l’article D. 331-25 du code de l’éducation.
Le tribunal administratif a jugé que la modification, sous la responsabilité du proviseur et dans le cadre d’échanges pédagogiques avec les enseignants, des notes et moyennes mentionnées dans les relevés trimestriels de notes et reportées dans les livrets scolaires des élèves s’inscrit dans l’exercice de la mission pédagogique des enseignants, sans pour autant porter atteinte aux droits et prérogatives que ces derniers tirent de leur statut de fonctionnaire de l’État soumis au pouvoir hiérarchique.
Il a relevé qu’en l’espèce, les moyennes de notes initialement attribuées par le professeur à ses élèves comprenaient les résultats obtenus lors d’une épreuve dite « baccalauréat blanc », en méconnaissance directe d’une consigne donnée par le chef d’établissement.
Le tribunal a considéré, par suite, que la modification apportée par le chef d’établissement aux moyennes des notes initialement attribuées par le professeur à ses élèves ne présentait pas la nature d’une décision susceptible de recours et qu’ainsi, le professeur n’était pas recevable à demander l’annulation des modifications des moyennes de ses élèves.
QUESTIONS PROPRES AUX PERSONNELS DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHEEnseignants-chercheurs et enseignants RECRUTEMENT Jury de concours – Composition du comité de sélection – Principe d’impartialité du jury – 1) Existence de liens professionnels entre un candidat et un membre du jury – Appréciation de l'intensité du lien compte tenu de la nature hautement spécialisée du recrutement – Manquement au principe d’impartialité (oui) – 2) Existence de liens professionnels entre un candidat et un membre du jury – Présence dans le jury d’un ancien membre du jury d’habilitation à diriger des recherches de l’un des candidats – Manquement au principe d’impartialité (non)C.E., 12 juin 2019, n° 409394, aux tables du Recueil Lebon C.E., 14 juin 2019, n° 408121
Les requérants, candidats à un concours de recrutement de maître de conférences, pour le premier, et de professeur des universités, pour le second, n’avaient pas été classés en première position par le comité de sélection et demandaient l’annulation du concours. Ils contestaient, notamment, la composition du comité de sélection en tant que celle-ci aurait méconnu le principe d’impartialité du jury.
Par les deux présentes décisions, le Conseil d’État a apporté des précisions sur les critères et les modalités d’appréciation de l’intensité des liens professionnels existant entre un candidat et un membre du comité de sélection.
Dans ces deux affaires, le Conseil d’État a rappelé sa jurisprudence bien établie en la matière selon laquelle si « la seule circonstance qu’un membre du jury d’un concours connaisse un candidat ne suffit pas à justifier qu’il s’abstienne de participer aux délibérations de ce concours » (cf. C.E., 8 juin 2015, n° 370539, aux tables du Recueil Lebon), en revanche, « le respect du principe d’impartialité exige que, lorsqu’un membre du jury d’un concours a, avec l’un des candidats, des liens tenant à la vie personnelle ou aux activités professionnelles, qui seraient de nature à influer sur son appréciation, ce membre doit s’abstenir de participer aux interrogations et aux délibérations concernant non seulement ce candidat, mais encore l’ensemble des candidats au concours » (C.E., 17 octobre 2016, Université Nice-Sophia-Antipolis, n° 386400, aux tables du Recueil Lebon ; C.E., 7 juin 2017, n° 382986, aux tables du Recueil Lebon – sur la question du principe d’unicité du jury, cf. jurisprudence commentée, LIJ n° 200, novembre 2017, et « Point sur », LIJ n° 199, juillet 2017).
Dans sa décision n° 409394 du 12 juin 2019, le Conseil d’État a tout d’abord réaffirmé ce principe en ces termes : « Le respect du principe d’impartialité fait obstacle à ce qu’un comité de sélection constitué pour le recrutement d’un enseignant-chercheur puisse régulièrement siéger en qualité de jury de concours si l’un de ses membres a, avec l’un des candidats, des liens tenant aux activités professionnelles dont l’intensité est de nature à influer sur son appréciation. » À ce titre, il ajoute toutefois que « la nature hautement spécialisée du recrutement et le faible nombre de spécialistes de la discipline susceptibles de participer au comité de sélection doivent être pris en considération pour l’appréciation de l’intensité des liens faisant obstacle à une participation au comité de sélection », ce qu’il avait déjà admis dans sa décision « Université Nice-Sophia-Antipolis » du 17 octobre 2016 susmentionnée.
Après avoir relevé qu’en l’espèce, l’un des membres du comité de sélection constitué pour examiner les candidatures du concours litigieux avait été le directeur de thèse du candidat retenu, lequel avait soutenu sa thèse moins de deux ans avant la tenue du concours et avait ensuite poursuivi une collaboration scientifique avec son directeur de thèse en cosignant plusieurs articles, le Conseil d’État a considéré que le principe d’impartialité du jury avait été méconnu, et ce, alors même que le recrutement en cause concernait un champ disciplinaire très spécialisé.
La décision du 12 juin 2019 du Conseil d’État s’inscrit dans la continuité de celle par laquelle il avait jugé que la circonstance qu’un membre du jury soit l’ancien directeur de thèse d’un candidat n’est pas, par elle-même, de nature à établir un manque d’impartialité (cf. C.E., 13 mars 1991, n° 109792, aux tables du Recueil Lebon). A fortiori, il n’est pas porté atteinte au principe d’impartialité lorsque l’un des rapporteurs a siégé dans le jury d’habilitation à diriger des recherches du candidat classé premier par le comité de sélection, comme l’a jugé le Conseil d’État dans la présente décision du 14 juin 2019.
Enfin, s’agissant de l’appréciation de l’intensité des liens professionnels qui peuvent exister entre les membres du jury et les candidats, en dehors de la relation particulière entre un directeur de thèse et son doctorant, le Conseil d’État a, dans la décision du 14 juin 2019, considéré que le fait que le candidat classé premier par le comité de sélection a participé à l’organisation de colloques et de conférences initiés par le président du comité de sélection et qu’il est intervenu dans des séminaires auxquels ont participé certains membres du comité de sélection « ne suffi[t] pas à caractériser une collaboration scientifique étroite de nature à faire obstacle à ce que ces membres participent régulièrement au comité de sélection ».
N.B. : Le collège de déontologie de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation a recommandé, dans un avis du 14 décembre 2018 relatif aux principes de nature à renforcer l’impartialité des membres des comités de sélection des enseignants-chercheurs de statut universitaire, publié au Bulletin officiel, de respecter, pour les habilitations à diriger des recherches (H.D.R.) et les thèses de doctorat, un délai de cinq ans entre la soutenance et la participation du directeur de thèse ou garant/tuteur H.D.R. à un comité de sélection, afin de se prémunir contre toute situation mettant en cause l’impartialité du jury. Dans ce même avis, le collège de déontologie identifie au titre des situations susceptibles de mettre en cause l’impartialité, compte tenu d’autres éléments, le fait pour un membre du comité de sélection d’avoir été le directeur de thèse ou le garant/tuteur H.D.R. d’un candidat dans une période comprise entre cinq et dix ans avant le concours de recrutement concerné.
Informatique et libertésQUESTIONS GÉNÉRALESResponsabilité de traitement et sous-traitance RESPONSABILITÉ DE TRAITEMENT Traitements de données à caractère personnel – Facebook – Cookies et traceurs – Responsable de traitement – Responsabilité conjointe de traitement (oui) – Obligation d’information (oui) – Consentement (oui)C.J.U.E., 29 juillet 2019, Fashion ID GmbH & Co. KG c/ Verbraucherzentrale NRW e.V., n° C-40/17
Une entreprise allemande de vente en ligne a inséré sur son site internet le bouton « j’aime » du réseau social Facebook. Lorsqu’un visiteur consulte ce site internet, des données à caractère personnel le concernant sont transmises à Facebook Ireland du seul fait que le site intègre le bouton « j’aime ». Cette transmission s’effectue sans que le visiteur en soit conscient, et indépendamment du fait qu’il soit membre du réseau social Facebook ou qu’il ait cliqué sur le bouton « j’aime » de Facebook.
Une association de consommateurs allemande a formé une action en justice contre l’entreprise allemande pour manquement à l’obligation de recueillir le consentement des visiteurs du site internet et d’informer ces derniers. Un tribunal régional allemand a condamné l’entreprise, qui a fait appel de la décision. Un appel incident a été formé par Facebook.
La juridiction allemande d’appel a décidé de surseoir à statuer et de poser des questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne (C.J.U.E.), dont celle de savoir si, en insérant sur un site internet un module tel que celui proposé en l’espèce par Facebook, le gestionnaire du site pouvait être qualifié de responsable conjoint du traitement. Il était également demandé à la C.J.U.E. de déterminer, dans une situation telle que celle en cause, si le recueil du consentement des personnes concernées et leur information relevait de la responsabilité du gestionnaire du site internet et/ou du fournisseur du bouton à y insérer.
La C.J.U.E. a considéré que l’entreprise allemande et la société Facebook devaient être qualifiées de responsables conjoints, au sens de l’article 2, d) de la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, en vigueur au moment des faits, du traitement relatif à la collecte et à la transmission à Facebook de données à caractère personnel concernant les visiteurs du site internet de l’entreprise.
Pour retenir cette solution, la Cour a considéré qu’il y avait bien, dans ce cas, détermination conjointe des moyens et des finalités du traitement.
Plus précisément, selon la Cour, en proposant le bouton « j’aime », Facebook participe à la détermination des données collectées et des modalités de cette collecte. Par ailleurs, en décidant d’insérer ce bouton sur son site internet, l’entreprise allemande permet à Facebook d’obtenir des données que cette société n’aurait pas la possibilité d’obtenir sans cette opération. Il s’agit donc, pour la C.J.U.E., dans un cas comme dans l’autre, de choix déterminant les moyens du traitement.
La Cour a également retenu une détermination conjointe des finalités du traitement en considérant que la collecte et la transmission des données concourent à un intérêt économique pour les deux entités, à savoir la publicité ciblée pour l’entreprise allemande et la possession des données à ses propres fins commerciales pour Facebook.
En revanche, la C.J.U.E. a précisé dans son arrêt que, dans cette hypothèse, la responsabilité conjointe se limite à la collecte et à la transmission des données. Elle a donc considéré que l’entreprise allemande ne pouvait pas être tenue pour responsable des traitements et de l’utilisation des données réalisés par la suite par Facebook.
La Cour a par ailleurs jugé que cette qualification de responsables conjoints attribuée au fournisseur du bouton « j’aime » et au gestionnaire du site internet faisait notamment peser sur ce dernier l’obligation d’information des personnes concernées. Elle a outre jugé qu’il revenait également au gestionnaire du site internet de recueillir le consentement des personnes concernées pour l’opération ou l’ensemble des opérations de traitement des données à caractère personnel dont il détermine effectivement les finalités et les moyens.
En revanche, la Cour a considéré que le gestionnaire du site, en l’espèce l’entreprise allemande, n’était pas tenu à ces obligations pour les traitements de données réalisés par la suite par Facebook, une fois les données à caractère personnel transmises.
N.B. : Le présent arrêt a été rendu sous l’empire du droit antérieur au règlement 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (dit « règlement général sur la protection des données » : R.G.P.D.), mais ses apports demeurent parfaitement transposables, dans la mesure où les deux textes (R.G.P.D. et directive 95/46/CE) sont très proches sur ces questions. Par ailleurs, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, par sa délibération n° 2019-093 du 4 juillet 2019, a adopté de nouvelles lignes directrices relatives à l’application de l’article 82 de la loi du 6 janvier 1978 modifiée aux opérations de lecture ou écriture dans le terminal d’un utilisateur, effectuées notamment par le biais de cookies et autres traceurs. Ces lignes directrices précisent en particulier les modalités de recueil du consentement des personnes concernées et de leur information par le(s) responsable(s) du traitement.
TRAITEMENT DE DONNÉES À CARACTÈRE PERSONNELTraitements algorithmiques Parcoursup – Traitement de données à caractère personnel – Traitement algorithmiqueC.E., 10 juillet 2019, Groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste du Sénat et autres, n° 417906
Le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste du Sénat et plusieurs syndicats d’étudiants et de lycéens ont saisi le Conseil d’État afin d’obtenir l’annulation pour excès de pouvoir de l’arrêté du 19 janvier 2018 de la ministre chargée de l’enseignement supérieur autorisant la mise en œuvre d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Parcoursup », au motif que celui-ci prévoyait la mise en œuvre d’un traitement méconnaissant les dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
Le Conseil d’État a confirmé la légalité de cet acte. Il a notamment considéré que les finalités du traitement étaient suffisamment déterminées et explicites et que la collecte des données à caractère personnel prévue n’excédait pas celle nécessaire à l’appréciation des critères de classement des candidatures prévus à l’article L. 612-3 du code de l’éducation. Le Conseil d’État a en effet considéré que dans la mesure où le projet de loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (loi ORE), en cours d’examen au moment de l’édiction de l’arrêté, prévoyait de rajouter des critères à l’article L. 612-3, l’ensemble des données collectées dans « Parcoursup » était susceptible de revêtir un caractère adéquat et pertinent.
En outre, le Conseil d’État a relevé que l’article 4 de l’arrêté contesté prévoyait une date à laquelle les données devaient être supprimées si aucun texte législatif ou règlementaire en vigueur à cette date n’envisageait expressément leur utilisation dans le cadre de la procédure nationale de préinscription.
Le Conseil d’État s’est par ailleurs prononcé sur la légalité des contenus librement accessibles sur le site internet Parcoursup, qui avaient pour objet d’indiquer aux usagers de la plateforme les règles applicables aux inscriptions dans l’enseignement supérieur ainsi que les modalités d’utilisation du site.
Il a considéré que ces contenus, qui précisaient notamment le calendrier de la procédure de préinscription dans l’enseignement supérieur ainsi que les conditions de formulation et d’examen des vœux, ne pouvaient être légalement publiés avant le 11 mars 2018, date d’entrée en vigueur des dispositions donnant compétence au ministre pour fixer l’ensemble de ces éléments.
Le Conseil d’État n’a toutefois annulé ces contenus qu’en ce que le caractère non définitif de ces derniers n’avait pas été souligné sur le site internet Parcoursup. Il a de plus rappelé que ces éléments pouvaient légalement être publiés dès le 11 mars 2018.
Cette annulation n’a ainsi eu aucun effet sur la légalité du dispositif Parcoursup.
N.B. : L’arrêté du 19 janvier 2018 autorisant la mise en œuvre d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Parcoursup » a été abrogé et remplacé par l’arrêté du 28 mars 2018 du même nom.
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Consultations | ||
PersonnelsQUESTIONS COMMUNESDroits et garanties Décision accordant le bénéfice de la protection fonctionnelle – Autorité compétente – Compétence du président de l’université ou du directeur de l’établissement public lorsqu’il est concerné, soit parce qu’il est à l’origine de la demande de protection fonctionnelle, soit parce qu’il est mis en cause par l’agent sollicitant celle-ci (oui)Note DAJ B2 n° 2019-040 du 19 juillet 2019
La direction des affaires juridiques a été saisie de plusieurs demandes de protection fonctionnelle concernant des présidents d’université et directeurs d’établissements publics (centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires notamment). Ces demandes ont soulevé la question de savoir si le ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche est compétent pour attribuer la protection fonctionnelle dans ces cas particuliers.
1. Un président ou directeur d’établissement public est compétent pour accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, y compris lorsqu’il est concerné.
Aux termes du I de l’article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : « À raison de ses fonctions et indépendamment des règles fixées par le code pénal et par les lois spéciales, le fonctionnaire ou, le cas échéant, l'ancien fonctionnaire bénéficie, dans les conditions prévues au présent article, d'une protection organisée par la collectivité publique qui l'emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire. »
À cet égard, les établissements publics, qui ont la personnalité morale, constituent des collectivités publiques au sens de la disposition précitée et sont ainsi compétents pour se prononcer sur des demandes de protection fonctionnelle relatives à des faits survenus à l’occasion de l’exercice de fonctions accomplies pour leur compte (cf. C.E., 7 juin 2004, n° 245562, aux tables du Recueil Lebon), y compris lorsque le président ou le directeur d’établissement est à l’origine de la demande (T.C., 14 novembre 2016, M. X c/ Office public de l’habitat Moselis, n° C4070, au Recueil Lebon ; C.E., 5 avril 2013, n° 349115) ou est mis en cause (C.E., 23 décembre 2014, n° 358340, aux tables du Recueil Lebon).
Ainsi, le ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche n’est pas compétent pour se prononcer sur les demandes de protection fonctionnelle émanant d’agents d’établissements publics relevant de sa tutelle. Il appartient par conséquent à l’établissement public d’accorder la protection fonctionnelle à son président ou directeur (cf. C.E., 8 juin 2011, n° 312700, au Recueil Lebon) ou à un enseignant-chercheur affecté dans cet établissement, « sans que puisse y faire obstacle la circonstance [que l'intéressé est] nommé et rémunéré par l’État » (C.E., n° 245562, déjà citée).
Le Conseil d’État a notamment jugé que les présidents d’université sont compétents, sur le fondement de l’article L. 712-1 du code de l’éducation, pour accorder la protection fonctionnelle (cf. C.E., 31 décembre 2008, n° 310172 ; C.E., 4 avril 2011, n° 334402).
2. Il est recommandé au président ou directeur de l’établissement public de déléguer la signature de la décision dans certains cas.
Lorsque la demande de protection fonctionnelle concerne un président ou directeur d’établissement public, soit parce qu’il est à l’origine de la demande, soit parce qu’il est mis en cause par l’agent la sollicitant, il est préférable qu’il délègue la signature de la décision à l’une des personnes pour lesquelles la réglementation prévoit expressément qu’elles peuvent recevoir délégation de signature, à savoir notamment, s’agissant des universités, le directeur général des services (cf. article L. 712-2 du code de l’éducation) et, s’agissant des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS), le directeur adjoint ou les autres agents de catégorie A ou de catégorie B de l’établissement (article R. 822-13 du code de l’éducation), en s’assurant au préalable que la délégation de signature dont bénéficie cette personne couvre l’attribution de la protection fonctionnelle. À défaut, il sera nécessaire de modifier l’arrêté de délégation en conséquence.
Par ailleurs, toute intervention du conseil d’administration de l’établissement pour décider d’octroyer la protection fonctionnelle doit être exclue afin de ne pas entacher cette décision d’incompétence. N.B. : Sur les modalités d’instruction des demandes de protection fonctionnelle, cf. « Le Point sur le champ de la protection fonctionnelle des agents publics et la procédure d’instruction des demandes au regard de l’évolution récente des textes applicables », LIJ n° 197, mars 2017.
Cessation de fonctions Professeur stagiaire – Inaptitude physique – LicenciementNote DAJ A2 n° 2019-035 du 1er juillet 2019
La direction des affaires juridiques a été interrogée sur l’autorité administrative compétente pour prononcer le licenciement d’un professeur des écoles inapte physiquement, de manière totale et définitive, à l’exercice de ses fonctions.
La décision de licencier un professeur des écoles relève de la compétence du recteur d’académie sous l’autorité duquel il est placé.
À la différence des professeurs de l’enseignement secondaire public dont les statuts particuliers prévoient expressément que le ministre est compétent pour procéder aux nominations en qualité de professeur stagiaire (pour les professeurs certifiés, cf. article 2 du décret n° 72-581 du 4 juillet 1972), le statut particulier des professeurs des écoles fixé par le décret n° 90-680 du 1er août 1990 ne désigne pas l’autorité compétente pour prononcer les nominations en qualité de professeur des écoles stagiaire.
Cependant, les membres du corps des professeurs des écoles, classés dans la catégorie A de la fonction publique en vertu de l’article 1er de leur statut particulier fixé par le décret du 1er août 1990, sont recrutés par académie ou par département selon la voie de recrutement mise en œuvre, en application de l’article 4 de ce décret et ainsi que le permettent les dispositions de l’article 13 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
Ce transfert aux autorités déconcentrées de l’éducation nationale de l’organisation du recrutement des membres du corps des professeurs des écoles, qui respecte les dispositions de l’article 4 de l’ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l’État en ce qu’il résulte du décret statutaire organisant ce corps, inclut implicitement mais nécessairement les actes portant nomination en qualité de professeur des écoles stagiaire (cf. C.E., section de l’administration, avis sur question du Gouvernement, 28 et 29 mai 2009, n° 382741).
Par ailleurs, les dispositions du 2 de l’article 1er de l’arrêté du 23 septembre 1992 délèguent de manière permanente aux recteurs d’académie le pouvoir de prendre les décisions relatives à la nomination des élèves professeurs des écoles et des professeurs des écoles stagiaires. Ces dispositions ne font que tirer les conséquences du recrutement déconcentré des professeurs des écoles prévu par leur statut particulier.
Si cet arrêté du 23 septembre 1992 délègue aux recteurs d’académie le pouvoir de prononcer à l’égard des professeurs des écoles stagiaires les décisions relatives à la nomination, il ne comporte en revanche aucune disposition sur les décisions relatives au licenciement pour inaptitude physique des professeurs des écoles stagiaires.
Il ressort cependant d’une jurisprudence constante qu’à défaut de dispositions expresses déterminant l’autorité compétente pour mettre fin aux fonctions, ce pouvoir appartient, de plein droit, à l’autorité investie du pouvoir de nomination (cf. C.E. Assemblée, 13 mars 1953, n° 07423, au Recueil Lebon ; C.E. Section, 10 avril 1959, n° 22184, au Recueil Lebon ; C.E., 27 octobre 2010, n° 316636, aux tables du Recueil Lebon).
La délégation de pouvoir consentie par l’arrêté du 23 septembre 1992 a également pour effet de dessaisir le délégant de sa compétence au profit du délégataire (cf. C.E. Section, 5 mai 1950, n° 91488, au Recueil Lebon ; C.E. Section, 20 mai 1966, Centre national du commerce extérieur, n° 57093, au Recueil Lebon).
Il résulte de ce qui précède que le recteur d’académie – ou le délégataire de sa signature – est seul compétent, dès lors qu’il est seul titulaire du pouvoir de nomination, pour licencier un professeur des écoles stagiaire dont l’inaptitude physique définitive ne lui permet pas de reprendre un service.
Si le directeur académique des services de l’éducation nationale, ou un délégataire de sa signature mentionné à l’article D. 222-20 du code de l’éducation, signe la mesure prononçant son licenciement, ce sera nécessairement en qualité de délégataire de la signature du recteur d’académie.
QUESTIONS PROPRES AUX PERSONNELS DE L’ENSEIGNEMENT SCOLAIREPersonnels enseignants Professeurs des écoles – Animations pédagogiques – Prescription de leur suivi et de leur contenu par l’autorité hiérarchique (oui)Note DAJ A2 n° 2019-032 du 24 juin 2019
La direction des affaires juridiques a été interrogée sur la question de savoir si les enseignants du premier degré sont tenus de suivre les animations pédagogiques organisées à leur intention dans le cadre de la formation continue, et dans quelle mesure le contenu de celles-ci peut être prescrit par les inspecteurs de l’éducation nationale (I.E.N.) des circonscriptions concernées.
En premier lieu, le 2° de l’article 1er du décret n° 2007-1470 du 15 octobre 2007 relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie des fonctionnaires de l’État indique que la formation continue des fonctionnaires a pour objectif de maintenir ou parfaire la compétence des fonctionnaires en vue d'assurer « (….) / b) leur adaptation à l’évolution prévisible des métiers ; / c) le développement de leurs qualifications ou l’acquisition de nouvelles qualifications ».
Le premier alinéa de l’article 3 de ce décret précise que : « Les actions de formation professionnelle peuvent être entreprises soit à l'initiative de l'administration, soit à celle du fonctionnaire », et le premier alinéa de son article 7 indique que : « Les fonctionnaires peuvent être tenus, dans l’intérêt du service, de suivre les actions de formation continue prévue au 2° de l’article 1er ». En vertu de l’article 9 de ce même décret, les actions de formation continue suivies par les fonctionnaires sur instruction de leur administration sont prises en compte dans leur temps de service.
Il résulte ainsi de la combinaison de ces dispositions que les professeurs des écoles, comme l’ensemble des fonctionnaires de l’État à qui ces dispositions sont applicables, peuvent être tenus de suivre des formations dont le contenu est défini par l’administration qui les emploie dans le plan annuel de formation, mentionné à l’article 6 du décret.
En second lieu, les dispositions spécifiques relatives aux obligations de service des personnels enseignants du premier degré ne dérogent pas à cette règle générale.
En effet, le décret n° 2008-775 du 30 juillet 2008 relatif aux obligations de service des personnels enseignants du premier degré prévoit en son article 1er que ces personnels sont tenus d'assurer, sur l'ensemble de l'année scolaire, outre un service d’enseignement de 24 heures hebdomadaires, 108 heures annuelles d’activités et missions. Au nombre de ces activités et missions figurent, ainsi que le précise le 3° de l’article 2 de ce même décret, 18 heures annuelles « consacrées à des actions de formation continue, pour au moins la moitié d'entre elles, et à de l'animation pédagogique ».
Les actions de formation continue et les animations pédagogiques font ainsi partie intégrante des obligations réglementaires de service (O.R.S.) des enseignants du premier degré, en application des dispositions combinées des articles 1er et 2 du décret du 30 juillet 2008, et ceci au même titre que les heures d’enseignement qu’ils sont tenus d’accomplir devant les élèves, ainsi que l’a déjà jugé le Conseil d’État (pour une retenue sur traitement opérée à l’encontre d’un enseignant ayant refusé d’assister à une séance de formation à laquelle il avait été convoqué par le recteur d’académie, cf. C.E. Section, 15 octobre 1982, Ministre de l’éducation c/ X, n° 17816, au Recueil Lebon).
Enfin, l’article 3 du décret du 30 juillet 2008 précise que les 108 heures annuelles d’activités et missions imposées par les articles 1er et 2 sont réparties et effectuées sous la responsabilité de l'I.E.N. chargé de la circonscription dans laquelle exercent les enseignants concernés.
Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le minimum de 9 heures d’actions de formation continue et les animations pédagogiques, toutes deux prévues au 3° de l’article 2 du décret du 30 juillet 2008, relèvent des O.R.S. des enseignants, sont effectuées sous la responsabilité de l’I.E.N., et peuvent ainsi être imposées et définies par ce dernier en sa qualité d’autorité hiérarchique, y compris dans leur contenu.
Les I.E.N. chargés d’une circonscription peuvent donc par exemple légalement imposer aux professeurs des écoles élémentaires de leur circonscription de suivre 9 heures d’animation pédagogique consacrées à l’enseignement et à l’apprentissage des mathématiques, ainsi que le recommandait la circulaire ministérielle de rentrée n° 2017-045 du 9 mars 2017.
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Le point sur | ||
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Les principales dispositions de la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance et ses premiers décrets d’application
La loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance a été publiée au Journal officiel du 28 juillet 2019. Elle compte 63 articles dont deux – les articles 33 et 53 – ont été déclarés contraires à la Constitution car constituant des « cavaliers législatifs » (cf. Cons. const., 25 juillet 2019, n° 2019-787 DC).
Les premiers décrets d’application sont parus à l’été. La LIJ revient donc sur les principales dispositions de la loi, dont certaines des dispositions les plus structurantes sont entrées en vigueur dès la rentrée scolaire 2019. I. L’ENGAGEMENT DE LA COMMUNAUTÉ ÉDUCATIVE ET L’EXIGENCE D’EXEMPLARITÉ DES ENSEIGNANTS
L’article 1er inscrit, dans un nouvel article L. 111-3-1 du code de l’éducation, le « lien de confiance qui doit unir les élèves et leur famille au service public de l'éducation », auquel contribuent « l'engagement et l'exemplarité des personnels de l'éducation nationale ». En outre : « Ce lien implique le respect des élèves et de leur famille à l'égard des professeurs, de l'ensemble des personnels et de l'institution scolaire. »
Ces dispositions reprennent les termes de la jurisprudence du Conseil d’État qui, dans une affaire impliquant un enseignant pour des faits d’atteinte sexuelle sur mineurs en dehors du service, avait invoqué « l'exigence d'exemplarité et d'irréprochabilité qui incombe aux enseignants dans leurs relations avec des mineurs, y compris en dehors du service, et compte tenu de l'atteinte portée, du fait de la nature des fautes commises par l'intéressé, à la réputation du service public de l'éducation nationale ainsi qu'au lien de confiance qui doit unir les enfants et leurs parents aux enseignants du service » (C.E., 18 juillet 2018, Ministre de l'éducation nationale, n° 401527, aux tables du Recueil Lebon).
Cette jurisprudence est, depuis, régulièrement appliquée par les juges du fond (cf. C.A.A. Douai, 8 novembre 2018, Ministre de l'éducation nationale, n° 16DA01028, ou C.A.A. Douai, 21 février 2019, n° 17DA00665, LIJ n° 206, mai 2019).
II. L’ABAISSEMENT À TROIS ANS DE L’ÂGE DU DÉBUT DE L’OBLIGATION D’INSTRUCTION
L’article 11 abaisse à trois ans l’âge du début de l’instruction obligatoire, qui était demeuré inchangé depuis la loi du 28 mars 1882 portant sur l'organisation de l'enseignement primaire, dite « loi Ferry ». Le premier alinéa de l’article L. 131-1 du code de l’éducation prévoit désormais que : « L'instruction est obligatoire pour chaque enfant dès l'âge de trois ans et jusqu'à l'âge de seize ans. »
Entrée en vigueur à la rentrée scolaire 2019, cette mesure a plusieurs conséquences :
1. Elle se traduit dès la rentrée 2019 par la fréquentation de l’école maternelle – ou l’instruction dans la famille – des 26 000 enfants âgés de trois à six ans qui, jusqu’alors, n’étaient pas scolarisés.
Le décret n° 2019-824 du 2 août 2019 portant diverses mesures tirant les conséquences de l'extension de l'instruction obligatoire aux plus jeunes est venu apporter diverses mesures de coordination au sein du code de l’éducation.
2. L’école maternelle relevant désormais de l’instruction obligatoire, l’obligation d’assiduité s’impose sur l’ensemble des heures hebdomadaires. Le législateur a toutefois complété l’article L. 131-8 du code de l’éducation afin de permettre à l’autorité de l'État compétente en matière d'éducation d’autoriser « un aménagement du temps de présence à l'école maternelle des enfants scolarisés en petite section », sur la demande des responsables légaux de l'enfant et « après avis du directeur de l'école arrêté dans le cadre d'un dialogue avec l'équipe éducative ».
Le décret n° 2019-826 du 2 août 2019 relatif aux modalités d'aménagement de l'obligation d'assiduité en petite section d'école maternelle est venu préciser ces modalités, au sein d’un nouvel article R. 131-1-1 du code de l’éducation. L’aménagement, qui ne peut porter que sur les heures d’enseignement de l’après-midi, est décidé par l’inspecteur de l’éducation nationale (I.E.N.) de la circonscription. Si l’avis du directeur d’école est favorable, l’aménagement est mis en œuvre à titre provisoire dans l’attente de la réponse de l’I.E.N. ; le silence gardé par ce dernier pendant une durée de quinze jours vaut acceptation.
3. Le caractère obligatoire de la scolarisation en maternelle remet en cause le modèle des jardins d’enfants, qui accueillent des enfants âgés de deux à six ans sur le temps scolaire. Dans un souci de sécurité juridique, le législateur a prévu à l’article 18 une disposition transitoire permettant à ces structures d’accueillir des enfants relevant de l’obligation scolaire jusqu’à la rentrée scolaire 2024. L’enseignement qui y est dispensé fait l’objet d’un contrôle de la part des services académiques, selon des modalités analogues à celles du contrôle de l’enseignement dispensé dans les établissements d’enseignement privés hors contrat.
Deux décrets sont venus préciser, respectivement, les modalités du contrôle de l’obligation scolaire des enfants fréquentant ces structures et celles du contrôle des établissements accueillant ces élèves : le décret n° 2019-822 du 2 août 2019 relatif au contrôle de l'obligation scolaire pour les enfants soumis à l'instruction obligatoire et inscrits dans des établissements d'accueil collectif dits « jardins d'enfants » et le décret n° 2019-825 du 2 août 2019 relatif au contrôle des établissements d'accueil collectif dits « jardins d'enfants » recevant des enfants soumis à l'instruction obligatoire.
4. L’abaissement à trois ans de l’obligation d’instruction se traduit également par une extension de la compétence scolaire du bloc communal, qui revêt deux conséquences principales :
L’article 17 de la loi instaure en conséquence un mécanisme d’accompagnement financier par l’État, par lequel ce dernier prend en charge, pour les communes dont les dépenses obligatoires en matière scolaire augmentent en 2019-2020 par rapport à l’année précédente, la part de cette augmentation résultant directement de l’abaissement à trois ans de l’obligation d’instruction. Cet accompagnement, qui porte tant sur les dépenses d’investissement que de fonctionnement, pourra être demandé ou réévalué au titre des années scolaires 2020-2021 et 2021-2022.
III. L’OBLIGATION DE FORMATION JUSQU’À DIX-HUIT ANS
L’article 15 instaure une obligation de formation pour tous les jeunes âgés de seize à dix-huit ans. Cette obligation entrera en vigueur au 1er septembre 2020.
Inscrite dans un nouvel article L. 114-1 du code de l’éducation, cette obligation ne se confond pas avec l’obligation d’instruction. Aux termes de l’article L. 114-1, elle est en effet satisfaite « lorsque le jeune poursuit sa scolarité dans un établissement d'enseignement public ou privé, lorsqu'il est apprenti ou stagiaire de la formation professionnelle, lorsqu'il occupe un emploi ou effectue un service civique ou lorsqu'il bénéficie d'un dispositif d'accompagnement ou d'insertion sociale et professionnelle ».
Le contrôle du respect de cette obligation est confié aux missions locales, dont l’article L. 114-1 précise qu’elles « bénéficient à cet effet d'un dispositif de collecte et de transmission des données placé sous la responsabilité de l'État ».
Il reviendra à un décret en Conseil d’État de déterminer les conditions et les modalités d’application de cette obligation de formation, notamment les motifs d’exemption liés à la situation personnelle ou familiale du jeune.
IV. GARANTIR L’EFFECTIVITÉ DE L’OBLIGATION D’INSTRUCTION : LE RENFORCEMENT DU CONTRÔLE DE L’INSTRUCTION EN FAMILLE ET LES PRÉCISIONS APPORTÉES AU RÉGIME DE LA LOI GATEL
L’article 19 remanie profondément l’article L. 131-10 du code de l’éducation, qui prévoit les contrôles dont font l’objet les enfants instruits dans la famille, afin de :
Le décret n° 2019-823 du 2 août 2019 relatif au contrôle de l'instruction dispensée dans la famille ou dans les établissements d'enseignement privés hors contrat et aux sanctions des manquements aux obligations relatives au contrôle de l'inscription ou de l'assiduité dans les établissements d'enseignement privés est venu préciser les modalités d’application de ces dispositions. Il prévoit notamment les modalités du contrôle de l'acquisition des connaissances et des compétences requises des enfants instruits dans la famille ou dans les établissements d'enseignement privés hors contrat, ainsi que les conditions de sanction du refus réitéré et sans motif légitime de déférer au contrôle.
Par ailleurs, l’article 20 modifie l’article L. 131-5 du code de l’éducation afin de réprimer le fait, pour les représentants légaux d'un enfant, de l'inscrire dans un établissement privé ouvert en méconnaissance des dispositions du code de l'éducation alors qu'ils ont déclaré donner à cet enfant l'instruction dans la famille. La peine encourue s’élève à un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende.
Enfin, les articles 21 à 23 précisent les dispositions du code de l’éducation relatives à l’ouverture et au contrôle des établissements privés issues de la loi n° 2018-266 du 13 avril 2018 visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat, dite « loi Gatel ».
L’article 22 modifie l’article L. 441-3 du code de l’éducation afin de prévoir que l’autorité compétente de l’État en matière d’éducation est informée et peut former opposition dans un délai d’un mois lorsque l’établissement entend modifier son projet, l’objet de l’enseignement qu’il dispense, les diplômes ou emplois auxquels il prépare et, s’il prépare à des diplômes de l’enseignement technique, les horaires et les disciplines enseignées.
L’article 23 complète l’article L. 442-2 du code de l’éducation afin de prévoir les conditions dans lesquelles les autorités compétentes, en l’espèce le préfet et le recteur ou l’I.A.-DASEN agissant sur sa délégation, peuvent sanctionner un établissement privé hors contrat et son directeur lorsque les conditions de fonctionnement de l'établissement présentent un risque pour l'ordre public.
La procédure introduite au III de l’article L. 442-2, lorsque les conditions de fonctionnement de l’établissement présentent un risque pour l’ordre public, reprend les principes de la procédure prévue par le même article en cas de non-conformité de l’enseignement avec l’objet de l’instruction obligatoire : mise en demeure du directeur de remédier à la situation suivie, si la situation persiste, de la saisine du procureur de la République et de la mise en demeure des parents des élèves scolarisés dans l'établissement d'inscrire leur enfant dans un autre établissement dans les quinze jours.
V. LES DISPOSITIONS EN FAVEUR DE L’ÉCOLE INCLUSIVE
Lors de l’examen du projet de loi par l’Assemblée nationale a été introduit au sein du titre Ier un chapitre entier consacré au renforcement de l’école inclusive, regroupant les articles 25 à 31.
Parmi ces mesures, il convient de citer notamment la création des pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL), introduits à l’article L. 351-3 du code de l’éducation. Ces pôles ont pour objet d’organiser l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap à l’échelle d’un ou plusieurs établissements du second degré, de la circonscription du premier degré ou encore d’un collège et de ses écoles de secteur. Ils constituent également des pôles ressources à destination de la communauté éducative, associant à cet effet des professionnels de santé et des représentants du secteur médico-social.
L’article 25 du projet de loi apporte également des modifications importantes au statut des accompagnants d’élèves en situation de handicap (A.E.S.H.), régi par l’article L. 917-1 du code de l’éducation. Celui-ci prévoit désormais un recrutement de ces personnels par contrat d’une durée de trois ans, renouvelable une fois, une formation professionnelle continue obéissant à un référentiel national ou encore la désignation d’A.E.S.H. référents chargés de fournir un appui à leurs collègues.
VI. L’ÉTABLISSEMENT PUBLIC LOCAL D’ENSEIGNEMENT INTERNATIONAL
L’article 32 crée un nouveau type d'établissement public local d'enseignement, l’établissement public local d'enseignement international (E.P.L.E.I.).
Régis par les articles L. 421-19-1 et suivants du code de l’éducation, ces établissements, qui regroupent des classes des premier et second degrés, dispensent tout au long de la scolarité un enseignement en langue française et en langue vivante étrangère. Les enseignements délivrés préparent à l’option internationale des diplômes nationaux du brevet et du baccalauréat, voire à un diplôme binational, ou au baccalauréat européen.
Le décret n° 2019-887 du 23 août 2019 portant organisation et fonctionnement des établissements publics locaux d'enseignement international est venu préciser les modalités spécifiques d’organisation de ces établissements.
VII. LA RÉNOVATION DES DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXPÉRIMENTATION
L’article 38 consolide et clarifie les dispositions relatives à la recherche et à l'expérimentation pédagogique dans les établissements scolaires, qui relevaient jusqu’alors de plusieurs articles du code de l’éducation, dont une partie était tombée en désuétude.
Ces dispositions sont désormais unifiées au sein du chapitre IV du titre premier du livre III de la partie législative du code de l’éducation.
L’article L. 314-1 permet la mise en œuvre de travaux de recherche en matière pédagogique dans les établissements publics et privés sous contrat ainsi que dans les établissements dispensant un enseignement adapté à destination des élèves en situation de handicap.
L’article L. 314-2 fixe le cadre des expérimentations pédagogiques : « Sous réserve de l'autorisation préalable des autorités académiques et après concertation avec les équipes pédagogiques, le projet d'école ou d'établissement mentionné à l'article L. 401-1 peut prévoir la réalisation, dans des conditions définies par décret, d'expérimentations pédagogiques portant sur tout ou partie de l'école ou de l'établissement, d'une durée limitée à cinq ans. (…). »
Lorsque les travaux de recherche prévus à l’article L. 314-1 impliquent des expérimentations, celles-ci sont mises en œuvre dans les conditions prévues à l'article L. 314-2.
Le premier alinéa de l’article L. 314-2 précise également les domaines sur lesquels peut porter l’expérimentation pédagogique, désormais étendue, notamment, à la répartition des heures d'enseignement sur l'ensemble de l'année scolaire, à l'enseignement dans une langue vivante étrangère ou régionale et aux procédures d'orientation des élèves.
Le deuxième alinéa permet que dans le cadre de ces expérimentations, et sous réserve de l’accord des enseignants concernés, la périodicité de leurs obligations réglementaires de service soit modifiée.
VIII. LE CONSEIL D’ÉVALUATION DE L’ÉCOLE
L’article 40 remplace le Conseil national d'évaluation du système scolaire (CNESCO) par une nouvelle instance, le Conseil d'évaluation de l'école.
L’article L. 241-12 du code de l’éducation lui donne pour mission « d'évaluer en toute indépendance l'organisation et les résultats de l'enseignement scolaire », notamment en définissant le cadre méthodologique de l’évaluation des établissements et en en analysant les résultats. En application de l’article L. 241-14, ses rapports, avis et recommandations sont rendus publics.
La composition de l’instance est prévue par l’article L. 241-13 : outre son président, nommé par le président de la République, elle est constituée de six personnalités « choisies pour leur compétence en matière d'évaluation ou dans le domaine éducatif », qui sont désignées respectivement par le président de l’Assemblée nationale, le président du Sénat et le chancelier de l’Institut de France, de deux députés et de deux sénateurs désignés par les commissions permanentes compétentes des deux assemblées, enfin, de trois représentants du ministre chargé de l’éducation nationale.
IX. LES INSTITUTS NATIONAUX SUPÉRIEURS DU PROFESSORAT ET DE L'ÉDUCATION
Les articles 43 et 44 renomment les écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ÉSPÉ) « instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation » (INSPÉ). L’article 43 introduit au deuxième alinéa de l’article L. 625-1 du code de l’éducation un référentiel national de la formation initiale des personnels enseignants et d’éducation dispensée par ces instituts, défini par arrêté conjoint des ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur.
Les missions et le contenu de la formation dispensée par les INSPÉ, définis à l’article L. 721-2, sont précisés par l’article 47.
L’article 45 modifie la procédure de sélection des directeurs de ces établissements. S’ils demeurent nommés par les ministres chargés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, leur nomination résulte désormais d’une procédure d'appel à candidature, au cours de laquelle des candidats font l’objet d’une audition par un comité, et non plus de la proposition du conseil de l’établissement.
Les modalités de cette procédure ont été précisées par le décret n° 2019-920 du 30 août 2019 fixant les conditions de désignation des directeurs des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation. L’article D. 721-10 du code de l’éducation exige des candidats « une expérience avérée dans le domaine de la formation des enseignants ou de la recherche en éducation, y compris à l'international » ou « une expérience avérée d’enseignement, notamment dans les premier ou second degrés ». Dans ce dernier cas, les candidats doivent être titulaires d’un doctorat.
La composition du comité d’audition est précisée par l’article D. 721-11 : placé sous la présidence conjointe du recteur et du président ou du directeur de l'établissement de rattachement de l’INSPÉ, il est composé du président du conseil de l'institut et de quatre ou six personnalités extérieures désignées par les présidents du jury.
Enfin, l’article 47 crée un nouvel article L. 625-2 du code de l’éducation, qui prévoit que : « Au cours des trois années qui suivent sa titularisation, chaque enseignant bénéficie d'actions de formation qui complètent sa formation initiale. (…) », celles-ci devant tenir compte des spécificités de l'établissement et du territoire dans lesquels exerce l'enseignant.
X. L’EXTENSION ET L’ACTUALISATION DE L’INCAPACITÉ À EXERCER DANS UN ÉTABLISSEMENT SCOLAIRE
L’article 48 étend l’application de l’article L. 911-5 aux enseignants du second général de l’enseignement public.
L’article 48 actualise également les disposition de l’article L. 911-5, qui édicte une incapacité générale d’exercer dans un établissement d’enseignement scolaire ou un établissement de formation accueillant un public d’âge scolaire, qu’il soit public ou privé, à l’encontre des personnes condamnées définitivement pour crime ou délit contraire à la probité ou aux mœurs, privées par jugement de tout ou partie de leurs droits civiques, civils ou de famille, ou encore frappées d'une interdiction d'exercer, à titre définitif, une fonction d'enseignement ou une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs. Dans ce cas, l’autorité administrative, tirant les conséquences de la décision de justice, demande sans procédure disciplinaire préalable la radiation du cadre ou le licenciement de l’agent.
Dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2019, l'incapacité prévue par l’article L. 911-5 s’appliquait, pour le seul enseignement général du second degré public, aux personnes révoquées de l’enseignement public. L’article 48 a réécrit et harmonisé ces dispositions : l’incapacité s’applique désormais, pour l’ensemble des établissements précités, à toute personne ayant été « révoquée ou licenciée en application d'une sanction disciplinaire prononcée en raison de faits contraires à la probité et aux mœurs ».
XI. LA PRÉPROFESSIONNALISATION POUR ACCÉDER AUX MÉTIERS DE L’ENSEIGNEMENT ET DE L’ÉDUCATION
L’article 49 instaure un dispositif de préprofessionnalisation au bénéfice des étudiants préparant les concours de l'enseignement ou de l'éducation, qui s’appuie sur le statut des assistants d’éducation prévu par l’article L. 916-1 du code de l’éducation.
Le 1° de l’article 49 prévoit que : « (…) Les assistants d'éducation inscrits dans une formation dispensée par un établissement d'enseignement supérieur délivrant un diplôme préparant au concours d'accès aux corps des personnels enseignants ou d'éducation peuvent se voir confier progressivement des fonctions de soutien, d'accompagnement, d'éducation et d'enseignement. »
Le décret n° 2019-981 du 24 septembre 2019 portant création des contrats de préprofessionnalisation au bénéfice des assistants d'éducation est venu préciser les modalités d’application de cet article, notamment les modalités de recrutement de ces assistants d'éducation et les fonctions qui leur sont confiées. Il organise également leur temps de travail en établissement.
À cet effet, il limite la durée hebdomadaire de leur service à huit heures. Il définit également le montant du crédit d'heures de formation qui leur est accordé, en fonction de leur parcours universitaire et des missions qui leur sont confiées. Enfin, il prévoit que ces assistants d’éducation « disposent d'un accompagnement continu au sein de l'établissement scolaire d'affectation et de l'établissement d'enseignement supérieur dans lequel ils sont inscrits ».
Victor Lespinard | |
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