II - ÉCOLE MATERNELLE

INTRODUCTION


Permettre à chaque enfant une première expérience scolaire réussie est l'objectif majeur de l'école maternelle. Dotée d'une identité originale et d'une culture adaptée à l'âge et au développement des enfants qu'elle accueille, cette école de plein exercice se distingue de l'école élémentaire par la pédagogie qu'elle met en œuvre.

Les enseignants (1) y ont le souci d'offrir à chaque enfant un cadre de vie et une organisation des activités qui favorisent son autonomie et lui laissent le temps de vivre ses premières expériences tout en l'engageant à de nouvelles acquisitions. Ils identifient avec précision les besoins de chacun, ils créent les conditions des découvertes fortuites et suscitent les expérimentations spontanées. Ils encouragent l'activité organisée et maintiennent un niveau d'exigence suffisant pour que, dans ses jeux, l'enfant construise de nouvelles manières d'agir sur la réalité qui l'entoure. L'école maternelle constitue le socle éducatif et pédagogique sur lequel s'appuient et se développent les apprentissages qui seront systématisés à l'école élémentaire. C'est par le jeu, l'action, la recherche autonome, l'expérience sensible que l'enfant, selon un cheminement qui lui est propre, y construit ses acquisitions fondamentales.

La loi d'orientation de 1989 a rappelé les places respectives de l'école maternelle et de l'école élémentaire dans l'enseignement primaire. Le décret du 6 septembre 1990 (2) en a précisé l'organisation en trois cycles pédagogiques : "le cycle des apprentissages premiers, qui se déroule à l'école maternelle" ; "le cycle des apprentissages fondamentaux, qui commence à la grande section dans l'école maternelle et qui se poursuit pendant les deux premières années de l'école élémentaire" ; "le cycle des approfondissements, qui correspond aux trois dernières années de l'école élémentaire et débouche sur le collège". La responsabilité de l'école maternelle est donc double. Il lui appartient d'abord de mener à bien les apprentissages premiers. Il lui appartient aussi d'engager tous ses élèves, sans exception, dans cette première étape des apprentissages fondamentaux, sans laquelle l'entrée dans l'écrit ne saurait être réussie.

Les "apprentissages premiers" ne sont pas dénommés tels parce qu'ils sont chronologiquement les premiers auxquels soient confrontés les tout jeunes élèves. Ils sont premiers parce qu'ils permettent à l'enfant de découvrir que l'apprentissage est dorénavant un horizon naturel de sa vie. Ils lui permettent d'entrer dans cette articulation entre jeux et activités par laquelle il deviendra progressivement un écolier qui aime apprendre, qui a pris conscience qu'il existe des chemins qui mènent à des savoir-faire inédits, à des connaissances toujours neuves. La première étape des "apprentissages fondamentaux" suppose, pour être menée à bien, le cadre spécifique de la pédagogie de l'école maternelle. C'est cette dynamique qui donne à cette école sa nécessaire unité, son identité et son intégrité.

Dans cet esprit, les présents programmes concernent la totalité de l'école maternelle, et les compétences qui y sont détaillées sont celles de fin de grande section.


1 - Une école organisée pour les jeunes enfants


L'enfant qui entre pour la première fois à l'école maternelle s'est déjà donné de nombreux savoir-faire et habitudes qui règlent sa vie quotidienne dans son milieu familial ou chez l'assistante maternelle, mais aussi, de plus en plus souvent, dans des lieux de vie collective comme la crèche ou la halte-garderie. L'école, par ses dimensions, le nombre d'adultes et d'enfants qui la fréquentent, ses équipements, constitue cependant un environnement inattendu qui met en défaut ses repères et auquel il va devoir s'adapter.

Les enseignants, en apportant un soin tout particulier à l'organisation du milieu scolaire, facilitent ce passage tout en répondant aux exigences et besoins des âges successifs de la petite enfance. Ils permettent que la participation aux multiples formes de la vie collective se combine sans heurts avec les moments de retrait et d'isolement. Il incombe à tous les adultes présents, sous la responsabilité de l'enseignant, de créer pour chaque enfant les conditions d'un développement harmonieux, respectueux de ses rythmes de croissance et de sa personnalité.

L'aménagement de l'école, des salles de classe, des salles spécialisées doit offrir de multiples occasions d'expériences sensorielles et motrices. Il permet d'éprouver des émotions, de créer et de faire évoluer des relations avec ses camarades ou avec les adultes. Il garantit à chaque enfant de grandir dans un univers culturel qui aiguise sa curiosité et le conduit à des connaissances sans cesse renouvelées en totale sécurité.

L'organisation du temps respecte les besoins et les rythmes biologiques des enfants tout en permettant le bon déroulement des activités et en facilitant leur articulation. La durée des séquences est adaptée à la difficulté des situations proposées autant qu'à l'âge des enfants concernés. Les moments exigeant une attention soutenue alternent avec d'autres plus libres, les ateliers avec les regroupements, les travaux individuels avec les activités nécessitant échanges ou coopération. L'accueil, les récréations, les temps de repos et de sieste, de goûter ou de restauration scolaire sont des temps d'éducation. Ils sont organisés et exploités dans cette perspective par ceux qui en ont la responsabilité.

Toutefois, le vécu quotidien des enfants ne se réduit pas au temps scolaire. Il y a bien sûr la vie familiale, mais aussi des moments durant lesquels l'enfant est pris en charge dans d'autres modes d'accueil. Tout en gardant sa liberté d'action et ses spécificités, l'école maternelle joue un rôle pivot dans le réseau des institutions de la petite enfance pour mettre en place les synergies possibles et éviter les incompatibilités et les surcharges.

Les enseignants partagent avec les parents l'éducation des enfants qui leur sont confiés. Cette situation impose confiance et information réciproques. Il est important que l'école explique, fasse comprendre et justifie ses choix, qu'elle donne à voir et à comprendre ses façons de faire. Elle doit prendre le temps d'écouter chaque famille et lui rendre compte fidèlement des progrès ou des problèmes passagers rencontrés par son enfant. La qualité de cette relation est le socle de la nécessaire co-éducation qu'école et famille ne doivent cesser de construire.


2 - Accompagner les ruptures et organiser les continuités


La scolarisation d'enfants de plus en plus jeunes a confronté l'école maternelle aux difficultés d'une hétérogénéité accrue de ses élèves. Les tout-petits qui ont à peine deux ans y côtoient des grands qui en ont déjà presque six. Organiser trois ou quatre années de vie scolaire exige de définir des principes de progressivité.

L'accueil des tout-petits impose des exigences particulières. À deux ans, les enfants restent fragiles. Ils ne doivent pas être privés des temps où ils s'isolent et qui sont nécessaires à leur maturation, mais ils doivent aussi s'engager dans une vie collective qui suppose acceptation d'autrui et coopération. Souvent la présence des plus grands leur est une aide précieuse. Seul un projet exigeant permet d'articuler ces contraintes. Il doit impliquer l'ensemble de l'équipe pédagogique.

Entre trois et cinq ans se font jour de nombreuses possibilités d'action et de création. Les enfants manifestent une curiosité insatiable et le plaisir renouvelé de s'engager dans des expériences neuves. Il faut pouvoir répondre de manière ordonnée à toutes ces attentes, satisfaire le désir d'apprendre de tous sans décevoir les uns ni décourager les autres.

Lorsqu'ils arrivent en dernière année d'école maternelle (grande section), la plupart des enfants précisent et structurent leurs acquis tout en poursuivant la découverte active du monde. C'est ce qui se produit en particulier dans le domaine du langage, où les multiples questionnements sur l'écrit qui s'étaient manifestés les années précédentes commencent à trouver des solutions plus cohérentes et mieux structurées. Pour d'autres enfants, l'année des cinq ans est souvent nécessaire pour renforcer des compétences encore fragiles. Cela est vrai pour ceux qui sont confrontés à un environnement difficile, pour ceux dont la scolarisation a été trop réduite faute d'une fréquentation régulière ou encore pour certains enfants nés en fin d'année et qui se retrouvent ainsi les plus jeunes de leur classe.

Cette attention aux phases successives du développement n'impose pas, pour autant, que l'organisation de l'école maternelle en classes d'âge homogène soit le seul et le meilleur moyen d'accompagner chaque enfant au rythme qui est le sien. Chacun sait le rôle décisif que la fratrie joue dans le développement. Elle permet aux plus jeunes de multiplier les occasions d'interactions avec les plus âgés et à ces derniers d'éprouver dans leur relation aux plus petits les savoir-faire et les savoirs nouvellement acquis. Les uns et les autres en tirent bénéfice. Selon les moyens dont dispose l'école et les besoins des enfants qui la fréquentent, il est possible de structurer les classes en mélangeant les âges sans pour autant se priver de moments où l'on revient à des groupes plus homogènes.

L'enseignant est particulièrement attentif aux réactions des enfants mais n'interprète pas trop hâtivement leurs productions. L'enjeu est de comprendre les cheminements et d'évaluer les progrès pour adapter les exigences et ajuster les propositions de manière à ce que chaque enfant découvre, tout au long de sa scolarité, des activités sans cesse renouvelées et inscrites dans des progressions d'apprentissage cohérentes.

L'évaluation est une dimension centrale de l'activité des enseignants, à l'école maternelle comme dans les autres niveaux de la scolarité primaire. Elle facilite l'adaptation des activités aux besoins de la classe comme de chacun des élèves. Des outils variés ont été produits par les maîtres ou leur ont été proposés. Ils permettent de faire le point au moment où chacun des enfants commence à mettre ses premiers acquis au service des exigences d'une nouvelle étape d'apprentissages.

L'école maternelle entretient des liens étroits avec l'école élémentaire. Cette articulation, qui ne concerne pas que les enseignants de la grande section et du cours préparatoire, est structurée par le projet de chacune des deux écoles. Elle permet une véritable programmation des activités du cycle des apprentissages fondamentaux et un suivi individualisé de chacun des élèves au moment de la rupture délicate mais nécessaire entre école maternelle et école élémentaire.

Les enseignants de maternelle jouent souvent un rôle important dans la détection précoce et dans la prévention des handicaps. L'enjeu est de repérer les difficultés potentielles, de susciter la coopération des autres services de la petite enfance et de se donner ainsi toutes les chances de les résoudre.

Il s'agit dans tous les cas, et tout au long de la scolarité maternelle, d'assurer un accompagnement de l'enfant, qui respecte son identité, son rythme, ses besoins en lui donnant les conditions d'une scolarité heureuse et réussie.


3 - Cinq domaines d'activités pour structurer les apprentissages


Pour donner à chaque enfant l'occasion d'une première expérience scolaire réussie, d'une part l'école maternelle lui permet de former sa personnalité et de conquérir son autonomie au sein d'une communauté qui n'est plus celle de sa famille, d'autre part elle l'aide à grandir et lui offre les moyens de constituer le socle des compétences nécessaires pour construire les apprentissages fondamentaux.

Le jeu est l'activité normale de l'enfant. Il conduit à une multiplicité d'expériences sensorielles, motrices, affectives, intellectuelles... Il permet l'exploration des milieux de vie, l'action dans ou sur le monde proche, l'imitation d'autrui, l'invention de gestes nouveaux, la communication dans toutes ses dimensions, verbales ou non verbales, le repli sur soi favorable à l'observation et à la réflexion, la découverte des richesses des univers imaginaires... Il est le point de départ de nombreuses situations didactiques proposées par l'enseignant. Il se prolonge vers des apprentissages qui, pour être plus structurés, n'en demeurent pas moins ludiques.

Il appartient à l'équipe des maîtres d'assurer à leurs élèves, tout au long de leur scolarité, l'exploration d'une grande variété de situations et d'univers culturels, l'usage d'outils et d'instruments diversifiés. À l'école maternelle comme dans l'école primaire tout entière, la programmation des activités collectivement élaborée est seule susceptible de garantir cette diversité, de l'ordonner et, en conséquence, de sauvegarder la richesse éducative des enseignements proposés. Dans tous les cas, l'utilisation de situations réelles (avec des objets courants, du matériel spécifique, des jeux) doit être préférée aux exercices formels proposés par écrit.

Aux côtés des jouets, des jeux, des aménagements ludiques ou des livres, les supports numérisés ont tout à fait leur place en école maternelle. L'ordinateur est, pour les petits comme pour les plus grands, un instrument fécond d'exploration du monde virtuel dès lors que l'usage en est correctement guidé par l'adulte.

L'école maternelle structure ses enseignements en cinq grands domaines d'activités. Chacun est essentiel au développement de l'enfant et constitue un socle pour ses apprentissages. Chacun participe de manière active et complémentaire à la conquête du langage et ancre son usage dans des communications authentiques, dans l'expérience et dans l'action. De même, chacun est l'occasion, pour l'enfant, d'organiser le monde dans lequel il vit, de construire les catégories qui rassemblent ou différencient les objets qui l'entourent en apprenant à tenir compte des critères qui les distinguent (3) .

3.1 Le langage au cœur des apprentissages

Dans l'appropriation active du langage oral se développent des compétences décisives pour tous les apprentissages : comprendre la parole de l'autre et se faire comprendre, se construire et se protéger, agir dans le monde physique et humain, explorer les univers imaginaires... En s'ouvrant ainsi aux usages et fonctions du langage, l'enfant acquiert une langue, le français, qui lui permet non seulement de communiquer avec ceux qui l'entourent, mais aussi d'accéder à la culture dont la langue nationale est le vecteur, une langue qui lui permet d'apprendre et de comprendre le monde dans lequel il vit.

Le langage s'exerce d'abord à travers l'expérience quotidienne, mais ses fonctions plus complexes se découvrent aussi dans des situations organisées qui permettent à chacun de découvrir, de structurer des manières neuves de comprendre la parole d'autrui ou de se faire comprendre. L'accent mis à l'école maternelle sur les usages oraux du langage n'interdit pas, bien au contraire, d'accéder à de multiples visages des cultures écrites. Cela n'empêche pas non plus l'enfant de commencer à concevoir comment fonctionne le code alphabétique et comment il permet de lire ou d'écrire. C'est en effet dans l'activité orale que l'écrit est rencontré à l'école maternelle. De la qualité de ce premier et nécessaire abord dépend en grande partie l'aisance des apprentissages ultérieurs.

Profitant de la plasticité des compétences auditives du jeune enfant et de ses capacités expressives, l'école maternelle est partie prenante de l'effort du système éducatif en faveur des langues étrangères ou régionales. Elle conduit les enfants à devenir familiers des sons caractérisant d'autres langues, elle leur fait rencontrer d'autres rythmes prosodiques, d'autres phénomènes linguistiques et culturels. Elle utilise à ce propos la multiplicité des langues parlées sur le territoire national et, plus particulièrement, celles qui sont les langues maternelles de certains de ses élèves. Dès la grande section, elle met les enfants en situation de commencer à apprendre une nouvelle langue.

3.2 Vivre ensemble

Lorsqu'il arrive à l'école maternelle, l'enfant a souvent été le sujet privilégié d'attentions centrées sur sa personne. Il s'affronte maintenant à un monde nouveau dans lequel d'autres enfants réclament les mêmes soins, un monde dans lequel les adultes sont tout à la fois attentifs à ses attitudes ou ses actions et distants face aux exigences qu'il manifeste. Un parmi d'autres, il doit apprendre à vivre avec des enfants qui ont autant de difficultés que lui à trouver les repères leur permettant de comprendre les comportements des adultes, particulièrement lorsqu'ils manifestent leur autorité ou, au contraire, les laissent libres de leurs actes.

C'est dans cet univers nouveau et contraignant que chaque enfant doit apprendre à éprouver sa liberté d'agir et à construire des relations nouvelles avec ses camarades comme avec les adultes. Il forge ainsi les points d'appui d'une personnalité qui, à cet âge, ne cesse de se chercher. Il découvre qu'on peut apprendre non seulement à vivre avec d'autres, mais aussi à échanger et coopérer avec eux, tout en construisant sa place au sein de la collectivité de la classe ou, même, de l'école.

Le passage d'une communication centrée sur des attitudes ou des comportements quelquefois agressifs ou, au contraire, résignés, à une communication inscrite dans un usage aisé du dialogue est certainement un des objectifs importants du domaine d'activités "Vivre ensemble". La vie de la classe permet de créer toutes les occasions de faciliter le développement de compétences de communication verbale.

3.3 Agir et s'exprimer avec son corps

L'action motrice est, à l'école maternelle, un support important de construction des apprentissages. C'est à cette période de l'enfance que s'élabore le répertoire moteur de base composé d'actions fondamentales : des déplacements (marcher, courir, sauter...), des équilibres (se tenir sur un pied...), des manipulations (saisir, tirer, pousser...), des lancers, des réceptions d'objets....

L'école doit offrir à l'enfant l'occasion d'élargir le champ de ses expériences dans des milieux et des espaces qui l'aident à mieux se connaître et à développer ses capacités physiques, qui l'incitent à ajuster et diversifier ses actions, qui lui offrent une palette de sensations et d'émotions variées, lui procurent le plaisir d'évoluer et de jouer au sein d'un groupe.

C'est dans cette perspective qu'il est amené à explorer et à se déplacer dans des espaces pensés et aménagés par l'enseignant, à agir face aux obstacles rencontrés en comprenant progressivement ce qu'est prendre un risque calculé, à réaliser une performance que l'on peut mesurer, à manipuler des objets pour s'en approprier ou en inventer des usages. Il apprend aussi à partager avec ses camarades des moments de jeux collectifs, de jeux dansés et chantés. Toutes ces compétences sont construites à travers la pratique d'activités physiques qui contribuent à orienter les efforts des enfants et à leur donner sens : "sauter le plus loin possible" (activités athlétiques) est différent de "sauter d'un engin pour retomber sur ses pieds" (activités gymniques).

Ces expériences l'amènent à exprimer et à communiquer les impressions et les émotions ressenties.

3.4 Découvrir le monde

L'école maternelle permet à l'enfant d'exercer sa curiosité en découvrant, au-delà de l'expérience immédiate, quelques-uns des phénomènes qui caractérisent la vie, la matière ou encore les objets fabriqués par l'homme. Les activités proposées dans cette perspective lui donnent des repères pour ordonner les événements dans le temps qui passe et structurer les espaces qu'il explore. En lui permettant de distinguer le monde physique et le monde vivant, elles lui offrent l'occasion de mieux connaître les besoins de son corps et de structurer ses actions dans l'univers qui est le sien.

Dans ces situations, grâce à des expériences faciles à mettre en œuvre, l'enfant apprend à formuler des interrogations plus rationnelles, à anticiper des situations, à prévoir des conséquences, à observer les effets de ses actes, à construire des relations entre les phénomènes observés, à identifier des caractéristiques susceptibles d'être catégorisées. Il s'essaie à raisonner. Bref, il expérimente les instruments du travail intellectuel qui permettent de décrire la réalité, de la quantifier, de la classer ou de la mettre en ordre, en un mot de la comprendre.

En même temps qu'il découvre avec d'autres yeux le monde qui l'entoure, l'enfant continue à apprendre à parler, à nommer avec précision les objets et leurs qualités, les actions et leurs caractéristiques. Il prend conscience des usages plus contraints du langage. Il découvre aussi que le dessin peut représenter avec précision ce qu'il a observé et rendre partageables les informations dont il dispose.

3.5 La sensibilité, l'imagination, la création

Chez le jeune enfant, la sensibilité et la compréhension, l'imagination et l'intelligence rationnelle restent encore intimement liées. Elles ne se distinguent que progressivement. À l'âge où l'intelligence sensible joue un rôle central, les activités de création et les pratiques artistiques doivent être particulièrement développées. Elles ne sont pas seulement des moyens d'expression et de découverte, elles ouvrent des voies pour s'approprier les connaissances, explorer de nouveaux rapports avec les autres et avec le monde.

L'école maternelle encourage et développe les langages d'expression qui mobilisent le corps, le regard et le geste. L'enseignant installe les conditions propices à des expériences à la fois ludiques et fonctionnelles et à des réalisations concrètes. L'enfant doit pouvoir chercher, inventer, transformer, exprimer, éprouver le plaisir de la création. Dans les réalisations, une part importante est laissée à la spontanéité et à l'imagination. Les échanges oraux autour des démarches et réalisations, qui sont valorisées, permettent la mise en mot de l'expérience et aident à établir les relations entre les sensations éprouvées et les effets produits.

Pour aider l'enfant à progresser dans son expression et à préciser ses intentions, l'école maternelle doit aussi lui proposer des situations qui le conduisent progressivement à l'acquisition de savoir-faire. Il peut ainsi découvrir et s'approprier de nouvelles manières de procéder, des moyens techniques qui élargissent sa manière personnelle de faire. Il peut réinvestir les techniques qu'il met au service de ses tentatives et de son projet. En construisant des réponses diversifiées, il apprend à affiner son regard et son jugement.

L'école maternelle offre un milieu ouvert à des démarches artistiques et à des références culturelles. Elles ne sont pas données comme modèles à atteindre ou à admirer. Elles permettent l'ouverture à des sensibilités différentes et posent les bases d'une culture commune. Guidé par le maître, l'enfant découvre les liens entre les inventions des artistes et les propositions des élèves.

Grâce à des actions spécifiques organisées dans le cadre du projet d'école, éventuellement soutenues par des projets artistiques et culturels (PAC), les enfants sont amenés à explorer des univers artistiques variés, notamment ceux du théâtre ou de la danse.

3.6 Compétences transversales

Les activités qui concourent à l'acquisition de compétences spécifiques à chacun des domaines permettent également de développer des compétences transversales : attitudes face aux apprentissages, méthodes. La curiosité et l'envie de connaître, l'affirmation de soi, le respect des autres, l'autonomie sont autant de comportements qui sont sans cesse encouragés. L'attention, la patience, la concentration doivent régulièrement sous-tendre l'observation comme l'action. En s'habituant à mettre en jeu son activité de manière ordonnée (participation à l'élaboration du projet, aux tâches suggérées, à la réflexion sur l'action et son résultat ; repérage des informations pertinentes, organisation des données ; mémorisation des étapes de la séquence et des résultats obtenus...), l'enfant se dote d'une première méthodologie de l'apprentissage.


LE LANGAGE AU CŒUR DES APPRENTISSAGES


OBJECTIFS ET PROGRAMME
En accueillant des enfants de plus en plus jeunes, l'école maternelle a fait du langage oral l'axe majeur de ses activités. En effet, au moment de leur première rentrée, les tout-petits ne savent souvent produire que de très courtes suites de mots et ne disposent encore que d'un lexique très limité. Lorsqu'ils quittent l'école maternelle, ils peuvent construire des énoncés complexes et les articuler entre eux pour raconter une histoire, décrire un objet, expliquer un phénomène. Ils sont prêts à apprendre à lire. Ce parcours doit certes beaucoup au développement psychologique extrêmement rapide qui caractérise ces années, mais il doit plus encore à l'aide incessante des adultes ou des enfants plus âgés qui entourent "l'apprenti parleur". C'est dire l'attention de tous les instants que les enseignants doivent porter aux activités qui mettent en jeu le langage.

1 - Permettre à chaque enfant de participer aux échanges verbaux de la classe et inscrire les activités de langage dans de véritables situations de communication

Quand il arrive pour la première fois à l'école maternelle, l'enfant découvre qu'il ne se fait plus comprendre aussi facilement et que lui-même ne comprend plus très bien ce qui se passe et ce qui se dit autour de lui. La communication avec les adultes, comme avec les autres enfants, perd l'évidence attachée au milieu familial.
La pédagogie du langage repose donc d'abord sur le rétablissement puis le maintien de la communication entre chaque enfant et les adultes de l'école d'une part, entre chaque enfant et tous les autres d'autre part. Cette communication est loin d'être seulement verbale. Elle s'inscrit aussi dans les gestes et les attitudes, dans la clarté et dans l'évidence des situations. Elle suppose donc, de la part de l'enseignant, un respect scrupuleux de l'organisation des espaces et du temps, une mise en place matérielle rigoureuse de chaque activité, une attention permanente à ce qui se passe dans la classe, un souci d'explicitation du vécu quotidien, une verbalisation simple et fortement ancrée dans son contexte. Le domaine d'activités "Vivre ensemble" contribue au développement progressif d'une communication efficace dans la classe et dans l'école. Toutefois, les autres domaines d'activités supposent, eux aussi, des échanges verbaux de qualité et, en conséquence, sont l'occasion de développer, chez chaque enfant, les compétences de communication que leur mise en œuvre exige.
C'est dans le cadre de cette communication sans cesse relancée ­ entre l'enfant et les adultes, entre l'enfant et ses camarades ­ que vient s'inscrire toute la pédagogie du langage. Elle vise à accompagner l'enfant dans ses premiers apprentissages, à l'aider à franchir le complexe passage d'un usage du langage en situation (lié à l'expérience immédiate) à un langage d'évocation des événements passés, futurs ou imaginaires, à lui permettre de se donner enfin tous les moyens nécessaires à une bonne entrée dans l'écrit.
Dans la mesure où le langage est au cœur de tous les apprentissages, il importe que chaque activité ait une dimension linguistique clairement affichée. Toutefois, le travail du langage ne peut être seulement occasionnel et doit donc être programmé avec rigueur. L'équilibre entre ces deux modalités est l'un des gages de la qualité des enseignements proposés.

2 - Accompagner le jeune enfant dans son premier apprentissage du langage : langage en situation

Pour les plus jeunes (deux et trois ans), il s'agit, pour l'essentiel, de faciliter l'acquisition des usages les plus immédiats du langage : comprendre les énoncés qu'on leur adresse pourvu qu'ils soient "en situation", c'est-à-dire directement articulés avec l'action ou l'événement en cours ; se faire comprendre dans les mêmes conditions.
2.1 Créer pour chaque enfant le plus grand nombre possible de situations d'échange verbal
L'essentiel de cette acquisition passe par la participation de chaque enfant à de nombreux échanges linguistiques ayant un sens pour lui et le concernant directement. La pédagogie du langage, pour les plus jeunes, relève donc d'abord d'une organisation de la classe qui permette à chaque enfant d'être sollicité personnellement à de nombreuses reprises dans la journée. Les autres adultes de l'école mais aussi les enfants plus âgés jouent un rôle tout aussi efficace que le maître dans cette première acquisition du langage. Cela signifie que, bien encadrés, ils peuvent contribuer notablement à l'augmentation des échanges verbaux dans la vie scolaire quotidienne. Cela signifie aussi que la répartition des élèves dans des classes d'âge hétérogène peut être un facteur déterminant de l'accès au langage en multipliant les interactions entre plus grands et plus petits.
2.2 Inscrire les activités de langage dans l'expérience (verbaliser les actions) et multiplier les interactions
Pour que ces échanges aient une signification, il est nécessaire qu'ils soient très fortement ancrés dans le vécu d'une situation dont l'enfant est l'un des protagonistes. En effet, pour le tout-petit, le sens des énoncés se confond souvent avec ce qu'il perçoit et comprend de l'action ou de l'événement concomitant. C'est dire que, à cet âge, le travail du langage est obligatoirement lié à une activité ou à un moment de vie quotidienne. Comme en milieu familial, il importe que l'adulte verbalise abondamment la situation en cours, sollicite l'échange avec chaque enfant et interagisse avec lui chaque fois qu'il tente de produire un énoncé (reprise de l'énoncé, restructuration de celui-ci dans le langage oral de l'adulte). Les contrôles de la compréhension construite par l'enfant doivent être tout aussi fréquents et conduire aux mêmes interactions pour relancer son effort d'interprétation de la situation et des énoncés qui la commentent : ancrage fort des énoncés de l'adulte dans la situation, expressivité de la voix et des gestes, utilisation des moyens non verbaux de la communication, reprise de la formulation, paraphrases nombreuses.
L'utilisation d'une marionnette ou d'une marotte peut permettre de créer des moments de dialogue qui engagent les plus timides à parler.

3 - Apprendre à se servir du langage pour évoquer des événements en leur absence : événements passés, à venir, imaginaires

Vers trois ans, une nouvelle étape conduit l'enfant à entrer dans un langage susceptible d'évoquer des situations ou des événements qu'il n'est pas en train de vivre. Certes, le tout-petit tente aussi de dire ce qui a frappé son attention et qu'il a retenu, mais il ne dispose pas encore des moyens adéquats pour le verbaliser et rencontre donc les plus grandes difficultés à se faire comprendre lorsque son interlocuteur n'a pas vécu la même situation que lui.
La compréhension de ces énoncés renvoyant à une expérience passée ou à venir (ou imaginaire) implique la maîtrise progressive d'un lexique de plus en plus précis et abondant, de structures syntaxiques nouvelles, de formes linguistiques qu'il ne connaît pas encore. La production de ce même langage suppose une structuration plus ferme d'énoncés plus longs et mieux articulés entre eux. Il s'agit en fait de l'acquisition d'un nouveau langage. Si, lors de la première phase, l'enfant semble capable de s'emparer aisément de la langue qu'on parle autour de lui, dans cette deuxième phase une action incessante de l'adulte est nécessaire.
Chaque fois que ce dernier veut se faire entendre, il ne doit pas hésiter à reformuler différemment un premier énoncé de manière à fournir les points d'appui nécessaires à la compréhension. Quand, à l'inverse, l'enfant tente de rappeler un événement passé ou d'anticiper une situation à venir, il est nécessaire que l'adulte dialogue avec lui (interaction) pour l'amener progressivement à une formulation adéquate, c'est-à-dire qui offre à l'interlocuteur tous les repères nécessaires à la compréhension (dans le cas de l'annonce d'une nouvelle, par exemple, localisation dans le temps et l'espace de l'événement, présentation des individus ou des objets concernés, usage normal des pronoms de substitution, gestion des temps du passé, etc.).
3.1 Rappeler verbalement les activités qui viennent de se dérouler dans la classe
Le rappel de ce qui vient de se passer dans la classe est certainement l'une des meilleures entrées dans ces apprentissages. On peut faire varier la complexité des événements concernés, le temps qui sépare le moment où ils ont eu lieu du moment où ils sont évoqués, le caractère individuel ou collectif de la verbalisation suggérée. Le rôle de l'adulte, dans ce type de travail, consiste à exiger l'explicitation nécessaire, à s'étonner lorsque la compréhension n'est pas possible, à relancer l'effort de l'enfant ou des enfants, à reformuler dans un langage plus approprié les essais qui ne parviennent pas à trouver leur forme adéquate. L'utilisation de dessins ou de photographies peut se révéler efficace lorsque l'on aborde un événement plus complexe à raconter. En effet, ils facilitent la restructuration collective des représentations mémorisées.
La progressive maîtrise de la compréhension de ce langage passe par des activités mettant en jeu des situations d'échange avec les familles ("livre de vie"), de correspondance interscolaire, en particulier par le moyen du courrier électronique (l'enseignant est dans ce cas le lecteur des messages reçus). Elles peuvent aussi s'appuyer sur l'échange de cassettes, l'usage de la radio ou de la vidéo... Les discussions sur la signification des énoncés entendus permettent des interaction identiques à celles qui ont lieu lors d'activités de production.
3.2 Se repérer dans le temps et utiliser les marques verbales de la temporalité
La construction de repères temporels est un aspect important du développement psychologique de l'enfant pendant sa scolarité à l'école maternelle. Le langage joue un rôle essentiel dans ce développement. Les marques de la temporalité sont complexes et supposent, pour être acquises, des interventions importantes de l'adulte.
L'enfant doit d'abord apprendre à utiliser les marques de l'énonciation qui lui permettent de situer le présent au moment où il parle et, de part et d'autre, le passé et le futur. Ces marques sont soit des mots outils ou expressions ("maintenant", "aujourd'hui", "cette semaine"... ; "il y a un moment", "hier", "le mois dernier"... ; "tout à l'heure", "après-demain", "la semaine prochaine"...), soit des flexions temporelles (présent, temps du passé, temps du futur, passé proche, futur proche...). En général, elles font partie de ce langage en situation qui s'acquiert de manière quasi spontanée, à condition que l'enfant soit partie prenante d'échanges réguliers avec des adultes mettant en jeu ces différentes marques linguistiques dans un contexte à la signification facilement accessible.
Il n'en est pas de même pour les marques temporelles relatives à l'usage du langage d'évocation, qui se révèlent beaucoup plus difficiles à acquérir et supposent un travail d'étayage assidu de la part de l'enseignant. Dans ce cas, l'enfant doit apprendre à se donner une origine temporelle référée au temps objectif des calendriers, que cette origine soit vague ("autrefois") ou précise ("le 1er janvier 2000"), qu'elle se réfère au temps réel du récit historique (date) ou au temps imaginaire de la fiction ("Il était une fois..."). Ce temps chronique peut être celui des différentes communautés dans lesquelles vit l'enfant : sa famille (dates d'événements familiaux marquants), son école (la rentrée, la fête de l'école). Il doit aussi devenir celui de la société civile (calendrier) et, plus tard, de la culture qui la sous-tend (histoire).
Une deuxième difficulté réside dans la compréhension et l'expression de la position relative des événements les uns par rapport aux autres dans la trame de ce temps objectif. Il en est de même pour la superposition ou la succession des différentes durées. Cela suppose l'emploi d'autres marques verbales : des mots-outils référés cette fois à des dates et non plus au présent de l'énonciation ("avant", "après", "le jour suivant", "le jour précédent"...), des usages différents des temps des verbes marquant l'antériorité relative (temps simples opposés au temps composé), le caractère ponctuel et fini d'un événement ou, au contraire, le fait qu'il dure ou soit répétitif (opposition du passé composé à l'imparfait, voire, dans les récits littéraires, du passé simple à l'imparfait). Comme pour l'espace, le lexique (les verbes en particulier) joue un rôle essentiel dans cette expression de la temporalité.
À l'école maternelle, ce n'est que par l'usage répété de ces multiples manières de marquer la temporalité que l'enfant parvient à en comprendre le fonctionnement et qu'il commence à les utiliser à bon escient. Cela suppose de la part du maître d'incessantes interactions venant soutenir les efforts de chaque élève. La dictée à l'adulte est, dans ce cas, un instrument utile dans la mesure où elle permet de réviser les premières tentatives.
3.3 Du rappel des événements passés au récit : découvrir les cultures orales
Les moments où l'on rassemble le groupe pour dire un conte ou une histoire constituent un apport important pour l'accès au langage de l'évocation. Ils permettent d'aller plus avant encore dans le pouvoir de représentation du langage, en explorant des mondes imaginaires et en constituant une première culture partagée. L'immense répertoire des traditions orales est ici au centre du travail. Son exploration doit être soigneusement programmée de manière à ce que se constitue une véritable connaissance des grands thèmes (la vie, la mort, les rites de passage, la dépendance et la liberté, le courage et la lâcheté, la pauvreté et la richesse, le bien et le mal...) ainsi que des personnages qui ne sauraient être ignorés (bestiaire traditionnel, héros des principaux contes ou des classiques de la littérature de jeunesse qui inspirent à leur tour la culture orale). On prendra soin de ne pas oublier les traditions orales régionales ainsi que celles des aires culturelles des enfants étrangers ou d'origine étrangère qui fréquentent l'école. Au travers de cette diversité, il est possible d'effectuer des rapprochements qui manifestent le caractère universel de cette culture.
L'art du conteur, qui non seulement raconte mais adapte son texte à son public et dialogue avec lui, doit être ici au centre de la démarche. Le retour régulier sur les histoires ou les contes les plus forts est la règle : ils doivent pouvoir être connus et reformulés par tous les élèves. Certes, une partie de la trame narrative échappe toujours aux enfants, mais, si l'on prend soin de construire une progression qui aille des histoires les plus simples aux plus complexes, il est possible de constituer progressivement une culture des contes en s'appuyant sur l'un pour aller vers l'autre.
Là encore, jouer avec les images est décisif : les albums illustrés, les images projetées, les films d'animation et, dans un second temps, les contes présentés sur des cédéroms interactifs peuvent être des supports de la parole de l'enseignant sans, cependant, se substituer à celle-ci. Il importe de faire se rencontrer des réalisations différentes d'un même conte de manière à permettre aux enfants de s'approprier sa forme verbale plutôt que l'une de ses mises en images.
Enfin, on n'oubliera pas que la mémorisation de poèmes, de comptines, de jeux de doigts, de chansons participe largement, par leur caractère narratif, à cette construction progressive d'un riche répertoire de représentations et de langage.
3.4 Se repérer dans l'espace et décrire des objets ordonnés
Lorsque l'enfant dispose d'une représentation orientée de son propre corps et commence à s'en servir pour organiser l'espace qui l'entoure (voir dans le domaine "Découvrir le monde" la rubrique "Repérages dans l'espace"), il peut verbaliser de manière plus assurée les relations spatiales. Il convient alors de l'aider à s'approprier :
- les marques de l'énonciation structurant l'espace à partir de celui qui parle ("ici", "là", "près de moi", "loin de moi", "en haut", "en bas", "à droite", "à gauche", "devant moi", "derrière moi"...),
- les éléments lexicaux exprimant des déplacements ou des situations orientés ("s'éloigner", "se rapprocher", "venir", "s'en aller", "partir", "arriver", "monter", "descendre"...).
Les repérages dans un espace indépendant de celui qui parle se structurent parallèlement. Ce sont alors les caractéristiques fixes des objets qu'il contient qui permettent de l'orienter. Ainsi, la salle de classe comporte le côté des fenêtres, celui du tableau, celui de la porte d'entrée... Il est intéressant d'explorer les positions relatives de deux ou trois objets et les positions dans un espace strictement défini comme la classe ou la salle de jeu. L'enfant apprend alors à décrire les objets et leurs déplacements, indépendamment de sa position.
Le langage utilisé dans ces différentes situations ne se limite pas à une liste de petits mots. Il comporte aussi de très nombreux noms et verbes qui ont des valeurs spatiales spécifiques comme "le sol", "le plafond", "la cave", "le grenier", "l'escalier", "monter", "descendre", "avancer", "reculer"...

4 - Se familiariser avec le français écrit et se construire une première culture littéraire

Dès quatre ans, quelquefois avant, la plupart des enfants sont attentifs aux écrits qui les entourent. Ils tentent d'en comprendre le fonctionnement et, souvent, construisent des hypothèses intelligentes, même inexactes, sur les relations entre les écritures et la réalité orale du langage qu'ils connaissent bien. L'école maternelle doit les aider dans cette appropriation progressive des formes écrites du langage et du principe alphabétique qui structure l'écriture du français : la représentation du langage oral par les signes écrits (graphèmes) se fait prioritairement au niveau des unités distinctives (phonèmes) et non au niveau de ce qui est signifié.
Cet aspect du travail de la maîtrise du langage introduit l'enfant aux apprentissages fondamentaux de manière particulièrement efficace. Il est donc au centre de la dernière année de l'école maternelle (enfants de 5 ans) mais doit se poursuivre pendant la première année de l'école élémentaire comme préalable nécessaire à une entrée explicite dans l'apprentissage de la lecture. C'est en ce sens que le cycle des apprentissages fondamentaux commence dès l'école maternelle et se poursuit à l'école élémentaire. C'est aussi en ce sens que la programmation des activités des deux premières années de l'école élémentaire ne peut être effectuée sans l'aide des enseignants de l'école maternelle.
4.1 Découvrir les principales fonctions sociales de l'écrit
Avant même de savoir lire, l'enfant peut et doit se familiariser avec les principales fonctions de l'écrit en jouant avec les supports les plus fréquents de celui-ci, de la signalisation aux affiches et aux livres, en passant par la presse ou les supports informatiques. Le monde de l'école est évidemment découvert le premier, mais le quartier, le milieu familial, les bibliothèques ou les musées de proximité supposent le même travail.
Cette exploration commence lorsque l'adulte explicite les usages quotidiens qu'il fait de l'écrit. Elle est complétée par des séances de travail spécifiques qui permettent à l'enfant de s'interroger à haute voix sur le sens que pourrait avoir tel ou tel écrit. Le dialogue qui se constitue alors permet d'évoquer les différentes hypothèses, d'éliminer celles qui ne sont pas adéquates, d'affiner les premières représentations. La séquence se termine par une lecture à haute voix du maître. Une programmation précise des différents usages de l'écrit rencontrés doit être effectuée de manière à ce qu'une exploration suffisamment riche ait été conduite entre trois et six ans.
De la même manière, les supports de l'écrit peuvent être explorés et donner lieu à des tris, à des comparaisons. Avec les plus grands, on peut commencer à travailler sur l'organisation du coin lecture ou de la bibliothèque-centre documentaire en séparant quelques types de livres. Dans toutes ces activités, il ne s'agit jamais de se livrer à un travail formel, excessif à cet âge, ni de construire des catégories abstraites. On attend des élèves qu'ils manipulent les matériaux proposés, qu'ils les comparent, qu'ils constituent des tris provisoires qui pourront être remis en question par le tri suivant.
4.2 Se familiariser avec le français écrit
En français, la distance entre langue orale et langue écrite est particulièrement importante. Cela se remarque tout autant pour le lexique utilisé que pour la syntaxe ou encore pour la prégnance de la norme. Si le jeune enfant se rapproche des réalités de la langue écrite en apprenant à utiliser le langage de l'évocation, il reste encore très éloigné de celles-ci alors qu'il sait déjà comprendre beaucoup de choses et se faire bien comprendre à l'oral. Il convient donc de le familiariser avec la langue de l'écrit si l'on souhaite qu'il profite plus pleinement des lectures qui lui seront faites et que, plus tard, à l'école élémentaire, lorsqu'il apprendra à lire, il reconnaisse derrière les signes graphiques une langue qui lui est déjà familière.
L'une des activités les plus efficaces dans ce domaine consiste certainement à demander à un enfant ou à un groupe d'enfants de dicter au maître le texte que l'on souhaite rédiger dans le contexte précis d'un projet d'écriture. Ce n'est que progressivement que l'enfant prend conscience de l'acte d'écriture de l'adulte. Lorsqu'il comprend qu'il doit ralentir son débit, il parvient à gérer cette forme inhabituelle de prise de parole par une structuration plus consciente de ses énoncés. L'adulte interagit en refusant des formulations "qui ne peuvent pas s'écrire" et conduit les enfants à s'inscrire progressivement dans cette nouvelle exigence et à participer à une révision négociée du texte. Peu à peu, l'enfant prend conscience que sa parole a été fixée par l'écriture et qu'il peut donc y revenir, pour terminer une phrase, pour la modifier en demandant à l'adulte de redire ce qui est déjà écrit. Chaque type d'écrit permet d'explorer les contraintes qui le caractérisent. La programmation met en jeu de nombreux paramètres : nombre d'élèves participant à l'exercice (moins il y a d'élèves, plus l'exercice est difficile), longueur du texte, évocation antérieure du thème, choix du thème et du type d'écrit...
Les lectures entendues participent largement à la construction d'une première culture de la langue écrite pourvu qu'elles soient l'occasion, pour l'enfant, de reformuler fréquemment, dans ses propres mots, les textes qu'il rencontre par la voix du maître.
Les livres illustrés (albums) qui s'adressent aux enfants ne sachant encore lire constituent le plus souvent une littérature d'excellente qualité tant par les thèmes qu'elle traite que par la manière de les aborder dans un subtil échange entre textes et images. Ces objets sont faits pour être lus et discutés avec les enfants dans la famille (par un prêt de livres à domicile) comme à l'école. Ils sont l'occasion d'une première rencontre avec l'un des constituants importants d'une culture littéraire vivante et doivent tenir une place centrale dans le quotidien de l'école maternelle. Une bibliographie courante mise régulièrement à jour par le ministère de l'éducation nationale permet aux maîtres d'effectuer au mieux leurs sélections.
4.3 Se construire une première culture littéraire
Des parcours de lecture doivent être organisés afin de construire progressivement la première culture littéraire, appropriée à son âge, dont l'enfant a besoin. Ces cheminements permettent de rencontrer des œuvres fortes, souvent rééditées, qui constituent de véritables "classiques" de l'école maternelle, tout autant que des œuvres nouvelles caractéristiques de la créativité de la littérature de jeunesse d'aujourd'hui. Ils conduisent à rapprocher des personnages ou des types de personnages, à explorer des thèmes, à retrouver des illustrateurs ou des auteurs... Cette imprégnation qui commence dès le plus jeune âge doit se poursuivre à l'école élémentaire afin de constituer une base solide pour les lectures autonomes ultérieures.
Si, pour les plus petits (deux ans), l'essentiel de l'activité réside dans l'impact de la lecture faite par le maître ainsi que dans la verbalisation suggérée à propos des images qui accompagnent le texte, dès trois ans il convient de demander à l'enfant qu'il reformule ce qu'il a entendu dans son propre langage. La mémorisation est soutenue par les images. C'est par le dialogue qui accompagne ces tentatives que l'enseignant reconstruit les passages qui, parce qu'ils n'ont pas été compris, n'ont pas été mémorisés ou encore qui ont été compris de manière erronée. Dès cinq ans, des débats sur l'interprétation des textes peuvent accompagner ce travail rigoureux de la compréhension.
On évitera de passer de trop longs moments à analyser de manière formelle les indications portées par les couvertures. Par contre, on peut, à partir des illustrations qu'elles comportent, apprendre aux enfants à retrouver le texte qu'ils cherchent, à faire des hypothèses sur le contenu possible d'un nouvel album. Dans tous les cas, il appartient au maître de dire ce qu'est réellement cette histoire par une lecture à haute voix des textes dont on a tenté de découvrir le contenu.
Chaque fois que l'enseignant lit un texte à ses élèves, il le fait d'une manière claire avec une voix correctement posée et sans hésiter à mobiliser des moyens d'expressivité efficaces. Contrairement à ce qu'il fait lorsqu'il raconte, il s'interdit de modifier la lettre des textes de manière à permettre aux enfants de prendre conscience de la permanence des œuvres dans l'imprimé. C'est dire combien, au moment du choix, l'enseignant a dû tenir le plus grand compte de la difficulté de la langue utilisée ou des références auxquelles le texte renvoie.
4.4 Prendre conscience des réalités sonores de la langue
Le système d'écriture alphabétique se fonde essentiellement sur la relation entre unités distinctives du langage oral (phonèmes) et unités graphiques (graphèmes). L'une des difficultés de l'apprentissage de la lecture réside dans le fait que les constituants phonétiques du langage sont difficilement perceptibles pour le jeune enfant. En effet, celui-ci traite les énoncés qui lui sont adressés pour en comprendre la signification et non pour en analyser les constituants. Il convient donc de lui permettre d'entendre autrement les paroles qu'il écoute ou qu'il prononce en apprenant à centrer son attention sur les aspects formels du message. On sait que la poésie joue avec les constituants formels, rythmes et sonorités, autant qu'avec les significations. C'est par cette voie que l'on peut introduire les jeunes enfants à une relation nouvelle au langage : comptines, jeux chantés, chansons, poésies, "virelangues" sont autant d'occasions d'attirer l'attention sur les unités distinctives de la langue.
La syllabe est un point d'appui important pour accéder aux unités sonores du langage. Retrouver les syllabes constitutives d'un énoncé est le premier pas vers la prise de conscience des phonèmes de la langue. On prendra garde au fait qu'il s'agit de syllabes orales et que, selon les régions, les découpages syllabiques des énoncés sont différents (il suffit de se tenir à un même type de découpage). L'un des moyens les plus simples de faire sentir la réalité des syllabes consiste à rythmer les énoncés, en frappant dans les mains par exemple. Cela se fait naturellement dans une chanson et peut se faire très facilement dans des comptines ou des poèmes. On peut aller plus loin en instaurant des jeux visant à allonger un mot d'une syllabe, à le diminuer, à inverser les syllabes ou à trouver des enchaînements de la dernière syllabe d'un mot à la première du mot suivant... Ces jeux peuvent tout aussi bien se faire avec des syllabes non signifiantes dans la mesure où il s'agit précisément de détourner l'attention de la signification.
Dans un deuxième temps, essentiellement à partir de cinq ans, on invite les enfants à découvrir que la langue comporte des syllabes semblables. Là encore tous les systèmes d'assonances peuvent être explorés (rimes en fin de mot dans les poésies et les chansons, assonances en début de mot...). Les jeux consistent à trouver des mots rimant avec un autre, à prolonger des structures poétiques simples, à transformer des mots en jouant sur des substitutions de syllabes, sur l'introduction de syllabes supplémentaires ("javanais"), etc. C'est en jouant de cette manière que l'on découvre que l'on peut casser les syllabes elles-mêmes et, en définitive, comparer des mots qui ne diffèrent que d'un phonème. On ne s'engagera cependant pas dans des exercices d'épellation phonétique trop difficiles à réaliser pour des enfants qui ne savent pas encore lire.
D'une manière générale, toutes ces activités doivent être courtes mais fréquentes et s'inscrire dans des jeux aux règles claires ou encore dans des moments centrés sur les activités artistiques.
4.5 Des activités graphiques aux activités d'écriture
Dès qu'ils deviennent capables d'une pensée symbolique et grâce aux interactions verbales des adultes, les enfants découvrent le pouvoir d'expression et de communication des traces que laissent certaines de leurs actions motrices. Au fur et à mesure qu'ils acquièrent le contrôle de leurs mouvements et de leurs gestes, que s'affinent leurs capacités à manipuler les instruments et à utiliser les surfaces qu'on leur offre, ils explorent les multiples possibilités de l'activité graphique : le dessin, le graphisme, l'écriture.
Ces trois dimensions de l'activité symbolique sont exercées à tous les niveaux de l'école maternelle sans jamais être confondues. Par le dessin, l'enfant organise des tracés et des formes pour créer des représentations ou exprimer des sentiments et les communiquer. Le graphisme utilise des enchaînements de lignes simples, rectilignes ou courbes, continues ou discontinues, et des alternances de couleurs qui se rythment et se structurent en motifs. L'écriture est une activité graphique et linguistique dont les deux composantes ne peuvent être dissociées, particulièrement dans le cycle des apprentissages premiers.
Dans ces diverses activités, l'enseignant permet aux enfants de passer d'une activité spontanée à une activité intentionnelle qui réponde à leurs vœux, à leurs besoins mais aussi aux contraintes imposées par l'adulte. La verbalisation des activités permet de donner sens aux productions et de les rendre communicables, elle permet aussi à l'enfant de se repérer et de se situer dans les étapes successives de l'apprentissage.
Le geste graphique
Le développement et l'enrichissement du geste graphique relèvent à la fois d'un processus de maturation et de l'action attentive de l'enseignant. Du plaisir de l'action, spécifique des premières années, l'enfant passe au plaisir conscient et de plus en plus maîtrisé de la réalisation et de la représentation. Dans cette évolution, il se comporte comme un explorateur et un créateur de formes. Toutefois, l'école doit lui offrir les conditions sans lesquelles son engagement spontané serait rapidement tari : variété des outils, variation des supports et des matériaux mis à disposition, progression des propositions d'activités, rencontre d'œuvres et de propositions graphiques diversifiées. Tout au long de ces activités, l'enfant est amené à contrôler peu à peu la préhension de l'outil qu'il utilise ainsi que la pression exercée sur le support. Il découvre et renforce sa dominance motrice en même temps qu'il se donne progressivement des repères de latéralisation.
C'est en étant attentif à ses comportements dans différentes activités qu'on peut vérifier si un enfant va devenir droitier ou gaucher et qu'on peut donc l'aider à structurer cette composante importante de sa motricité. Il convient de lui offrir de réelles alternatives et de lui faire prendre conscience des résultats qu'il obtient en fonction du geste et de la main qu'il mobilise. Qu'il soit droitier ou gaucher, il doit apprendre à tenir ses instruments sans crisper la main (en utilisant la pince du pouce et de l'index et le support du majeur), à disposer la surface qu'il utilise dans le prolongement de l'avant-bras (correctement placé) tout en adoptant une posture adéquate.
Dans cet univers stimulant, l'enfant a l'occasion de découvrir ses possibilités, de contrôler ses tracés, de mettre en évidence les formes de base qui vont progressivement s'affiner, se complexifier pour être utilisées librement dans diverses situations. Cependant la tenue des instruments, la mise au point de gestes élémentaires efficaces (monter, descendre, tourner dans un sens, enchaîner, s'arrêter...), l'observation et l'analyse des formes, leur reproduction, nécessitent un véritable apprentissage.
L'observation et l'analyse des formes sont certainement l'aspect le plus délicat de l'activité graphique. Ce sont des processus perceptifs qui restent difficiles jusqu'à l'école élémentaire. Là encore, la verbalisation joue un rôle déterminant. La reproduction de motifs graphiques suppose que l'enfant apprenne à trouver le geste le mieux adapté et le plus efficace dans la situation proposée. Cette exploration qui met en jeu des processus moteurs et perceptifs complexes et nécessite une maturation physiologique et nerveuse tout juste en place entre cinq et six ans pour la majorité des enfants, ne sera pas totalement aboutie à la fin de l'école maternelle et devra donc être poursuivie à l'école élémentaire.
Activités de dessin
Elles sont détaillées dans le domaine "La sensibilité, l'imagination, la création".
Activités graphiques
Les activités graphiques sont très souvent utilisées, à l'école maternelle, dans l'unique but de former la main de l'enfant à l'écriture. C'est trop en réduire l'intérêt. L'expression graphisme peut en effet s'appuyer sur une culture très développée dans de nombreuses aires culturelles qui, pour diverses raisons, ne privilégient pas la figuration. Elle est aussi très présente dans les arts décoratifs (tissage, poterie, décoration d'objets utilitaires...). Elle utilise des enchaînements de lignes simples, rectilignes ou courbes, continues ou brisées, et des alternances de couleurs qui se structurent parfois en motifs. Elle s'inscrit sur la surface graphique en utilisant aussi bien le fond que les tracés et joue sur la répétition, l'alternance, les rythmes ou les multiples facettes de la symétrie.
On peut faire entrer l'enfant dans ce riche univers dès qu'il peut mobiliser le bras et la main pour tenir un instrument scripteur et contrôler la dynamique de la trace. Toutefois, un véritable apprentissage est nécessaire et doit porter sur les trois faces de l'activité : la mise au point de gestes élémentaires efficaces, l'observation et l'analyse des modèles, leur reproduction et, éventuellement, leur détournement.
Activités d'écriture
Si les activités d'écriture requièrent des compétences grapho-motrices, elles sont indissociables d'apprentissages linguistiques. L'enfant doit ainsi devenir progressivement capable de tracer des écritures tout en découvrant le fonctionnement du code alphabétique, en le comprenant et en commençant à le maîtriser (voir § 4.6.).
Au niveau moteur, l'entrée dans l'écriture s'appuie sur l'ensemble des compétences développées par les activités graphiques. Elle requiert toutefois des compétences particulières : la capacité de percevoir les traits caractéristiques d'une lettre, de les analyser et les décrire, de les reproduire. Comme dans les autres activités de symbolisation, l'enseignant attire l'attention de l'enfant sur la distinction entre l'objet, sa représentation par le dessin, son nom et l'écriture de son nom. Lors de ces échanges, les enfants expriment leur souhait d'écrire bien avant de pouvoir reproduire les lettres et les mots. Cette incapacité momentanée peut être contournée par la médiation de l'enseignant qui écrit sous la dictée. Il est cependant déterminant de favoriser toutes les tentatives d'écriture autonome de l'enfant, aussi imparfaites soient-elles.
Le recours à l'écriture en capitales d'imprimerie facilite l'activité en proposant des formes faciles à reproduire. Cela nécessite toutefois un accompagnement vigilant, notamment pour parvenir à une orientation correcte et à un regroupement fiable des lettres.
C'est par l'observation de ses productions que l'enfant, guidé par l'enseignant, parvient à comprendre en quoi elles sont inabouties ou inadéquates. Peu à peu, dans cet échange guidé par le maître, il acquiert ses premières connaissances sur l'alphabet et le code alphabétique, il intègre les premières règles de la communication écrite.
L'usage parallèle du clavier de l'ordinateur, dont les touches sont repérées par des capitales d'imprimerie, permet d'utiliser les lettres ainsi découvertes avant même de savoir les tracer. Il renforce de manière particulièrement heureuse l'apprentissage de l'écriture.
Le recours à l'écriture cursive (4) s'impose quand l'enfant est amené à reproduire des enchaînements de mots ou de phrases. Elle favorise le nécessaire découpage en mots de l'écriture. Elle doit donc être proposée à tous les enfants à l'école maternelle dès qu'ils en sont capables. L'écriture cursive nécessite une capacité d'observation des modèles particulièrement aiguisée puisque, dans ce cas, les lettres sont peu individualisées (un même tracé peut chevaucher deux lettres). Elle recourt à un geste graphique complexe fait d'enchaînements de tracés spécifiques selon un ordre prédéterminé et une orientation unique (de gauche à droite). Maîtriser les différents types de tracés, les enchaîner correctement pour former chaque lettre, suivre la trajectoire d'écriture en enchaînant les lettres entre elles constituent la première étape. Progressivement, en maîtrisant ses tracés, l'enfant est amené à écrire sur une ligne, puis, si possible, en fin de grande section, entre deux lignes. L'évaluation de ces compétences au début de la grande section permet à l'enseignant de situer la progression de ses élèves et de moduler ses exigences en fonction de leurs possibilités.
Apprendre à écrire, c'est faire un long parcours qui débute tout juste à l'école maternelle et se prolonge tout au long du cycle des apprentissages fondamentaux, pour parvenir à une automatisation suffisante. L'observation des productions des enfants par l'enseignant est déterminante. Elle permet de repérer la façon dont ils entrent dans cet apprentissage, de comprendre leur évolution à un âge où les disparités sont importantes. Le maître a ainsi les moyens de mettre en place la différenciation pédagogique nécessaire, de relancer, pour certains, ses propositions au-delà de ce qu'il avait prévu ou, au contraire, de découvrir des difficultés inattendues pour d'autres et donc de revenir sur ses choix.
4.6 Découvrir le fonctionnement du code écrit
Si l'apprentissage explicite de la lecture ne fait pas partie du programme de l'école maternelle, la découverte du fonctionnement du code écrit en est un objectif important. On peut considérer que, dès quatre ans, la plupart des enfants ont commencé à s'intéresser aux écritures qui les entourent.
Ils doivent être attentifs à trois phénomènes différents et s'en approprier les mécanismes. La première conquête est certainement celle qui permet de comprendre que le mot écrit renvoie au mot oral et non à la personne ou à l'objet qu'il représente et que, en conséquence, les caractéristiques d'un mot écrit, sa longueur par exemple, sont en relation avec les caractéristiques orales du mot et non avec sa signification ("train" n'est pas un mot plus long que "bicyclette"). Les imagiers peuvent être d'excellents supports pour de fréquents débats sur ce qui est écrit dans un mot et pour des comparaisons portant sur la relation entre ce qui est écrit et la longueur orale du mot.
La deuxième conquête est celle qui permet de prendre conscience que l'écrit est composé de mots séparés les uns des autres, alors que l'oral est fait d'énoncés continus, rythmés par des coupures qui ne correspondent que rarement avec les frontières des mots. On peut aider l'enfant à faire ce nouveau pas en écrivant devant lui, tout en disant à haute voix ce qu'on écrit, ou encore en lui demandant où se trouve tel ou tel mot d'une phrase qu'on vient de lui lire.
La troisième conquête, très progressive, est celle qui éclaire le mécanisme d'encodage de l'écriture alphabétique : il met en relation des unités sonores et des unités graphiques. Le prénom est souvent le support privilégié d'une première prise de conscience. Il en est de même pour les mots qui reviennent le plus souvent dans l'activité de la classe, comme les jours de la semaine. L'enfant les reconnaît d'abord de manière approximative, sans être capable de savoir comment les lettres qu'ils contiennent jouent leur rôle. Lorsqu'il tente de les reproduire, il invente des systèmes d'écriture successifs. Il est important de lui laisser le temps de construire cette connaissance du principe alphabétique et de lui en donner les moyens. Trouver comment l'on pourrait écrire un mot simple en se servant des matériaux qui ont été progressivement constitués dans la vie de la classe est l'aboutissement de ces "ateliers d'écriture".
C'est dans les activités d'écriture, non de lecture, que les enfants parviennent à vraiment "voir" les lettres qui distinguent les mots entre eux. À cet égard, la reconnaissance globale de mots écrits sur des étiquettes est un exercice insuffisant. Les activités graphiques d'écriture, dans la mesure où elles individualisent des lettres, fournissent un matériel important pour la construction du principe alphabétique. Il en est bien sûr de même pour les exercices de copie, à condition qu'ils soient verbalisés. En copiant un mot (en lettres capitales pour les plus jeunes, en lettres cursives dès que c'est possible et, en tout état de cause, avant la fin de l'école maternelle), en décrivant un mot écrit, en utilisant le nom des lettres pour distinguer ce qui différencie deux mots, les enfants se dotent de connaissances importantes qu'ils peuvent réinvestir dans les moments où ils tentent de trouver la manière d'écrire un mot qui n'est plus présent devant eux.
Tous les enfants ne sont pas parvenus à construire le principe alphabétique à la fin de l'école maternelle. Ils doivent donc continuer à travailler dans cette perspective à l'école élémentaire. La transmission des informations sur ce qui a été fait et sur ce qui a été obtenu par chaque élève au moment du changement d'école ne peut en aucun cas être éludée.

5 - Cas des élèves dont le français n'est pas la langue maternelle

Il ne faut pas oublier que de nombreux élèves n'ont pas le français pour langue maternelle et vivent dans des milieux familiaux qui ont des comportements langagiers variés à l'égard des enfants (usage de la seule langue familiale, usage du français avec les enfants, usage des deux langues, usage d'une langue d'intercompréhension entre langue familiale et français...).
L'accès au langage dans une situation de plurilinguisme n'est pas en soi un handicap ou une difficulté, particulièrement lorsque les interlocuteurs de chacune des langues sont bien identifiés et adoptent des attitudes claires en s'adressant à l'enfant. À cet égard, les enseignants de l'école "représentent" le pôle français de la situation de plurilinguisme et doivent s'y tenir.
Les situations dans lesquelles une des deux langues est socialement dévalorisée par rapport à l'autre (on parle alors de "diglossie") sont très souvent pénalisantes pour l'enfant. L'école doit jouer un rôle équilibrant et montrer que, si le français est la langue qu'on y utilise, cela ne signifie pas que parler une autre langue dans le milieu familial soit un signe de relégation culturelle. Avec les tout-petits, il n'est pas nécessaire de mettre en place un enseignement de type français langue seconde. Les situations de communication liées à la vie quotidienne de la classe sont le plus souvent très efficaces, à condition qu'elles se déroulent dans un contexte où le plurilinguisme n'est pas déprécié et que l'enfant soit plus souvent sollicité.
Dans certains cas, lorsque la langue maternelle fait réellement partie de la vie quotidienne familiale ou de celle du quartier, il n'est pas rare de voir que, lorsque la famille s'adresse à l'enfant, elle n'utilise qu'un nombre limité des fonctions du langage (accompagner l'action, donner des ordres...). Dans ce cas, il peut être utile de ne pas laisser s'installer un bilinguisme dans lequel les deux langues ne se développent pas de manière équilibrée. Il faut alors trouver les moyens de renforcer la langue maternelle au moins dans deux directions : utilisation du langage d'évocation (rappel, projet, langage de l'imaginaire), prise de conscience des réalités sonores de la langue.

6 - Évaluation et identification des difficultés

L'évaluation du langage oral est une chose particulièrement délicate. Elle repose sur une observation quotidienne. Il est utile à cet égard que l'enseignant tienne un journal de bord dans lequel il note, lorsqu'ils se produisent, les phénomènes marquants qui concernent les progrès ou les régressions de chaque élève. Les évaluations des apprentissages mis en œuvre viennent compléter ce dispositif et permettent de contrôler l'efficacité des actions engagées.
Des instruments d'évaluation plus précis (grilles d'observation ou épreuves de langage) sont à la disposition des enseignants. Ils concernent des étapes caractéristiques de l'évolution du langage de l'enfant (début de la dernière année d'école maternelle, début de cours préparatoire...). Ils permettent de prendre la mesure du travail fait et de celui qui reste à faire, et de mieux doser l'effort en direction de tel ou tel élève. En effet, les progrès en langage sont liés à de multiples facteurs, et l'hétérogénéité des classes reste la règle dans ce domaine.

7 - Premier contact avec une langue étrangère ou régionale

L'apprentissage d'une langue est commencé dès la dernière année d'école maternelle. Il sera poursuivi au cycle 2.
Les objectifs de cet apprentissage sont précisés dans le programme du cycle 2. La programmation des activités est effectuée avec les enseignants de l'école élémentaire qui reçoit les élèves en cours préparatoire afin d'assurer la continuité des apprentissages. Certains aspects de ce programme sont privilégiés à l'école maternelle.
7.1 Éducation de l'oreille aux réalités phonologiques et accentuelles
L'élève est systématiquement habitué à écouter les sonorités spécifiques de la langue étudiée, à en reconnaître, reproduire et produire les rythmes, phonèmes et intonations.
Il est en particulier sensibilisé aux phonèmes inconnus dans la langue française, à des traits linguistiques non pertinents en français comme la durée dans la réalisation des voyelles, la succession des syllabes accentuées ou non accentuées, les rythmes...
Les activités les mieux adaptées à cet apprentissage sont :
- la mémorisation d'énoncés, de chants et de comptines ;
- l'imitation de rythmes différents en accompagnant les phrases entendues ou reproduites au tambourin ;
- les jeux sur les sonorités de la langue.
7.2 Acquisition des premiers énoncés et de quelques éléments de la culture des pays ou régions concernés
L'élève est conduit à pouvoir parler de lui-même ou de son environnement, à pouvoir entretenir quelques relations sociales simples et participer oralement à la vie de la classe.
Parallèlement, il découvre certaines réalités et faits culturels du ou des pays où la langue est en usage, concernant la vie d'enfants du même âge et en relation avec d'autres domaines du programme.
7.3 Familiarisation avec la diversité des cultures et des langues
Selon les ressources présentes dans la classe, dans l'école ou dans son environnement immédiat, les langues parlées par des élèves dont le français n'est pas la langue maternelle sont valorisées. On peut présenter des énoncés, des chants ou des comptines dans ces diverses langues, en particulier lors d'événements festifs (anniversaire d'un élève, fête dans l'école...), et mémoriser les plus faciles. L'intervention ponctuelle de locuteurs de ces langues est favorisée.

(1) L'enseignant de l'école primaire est le plus souvent une enseignante. La grammaire du français conduit toutefois à utiliser le seul masculin lorsqu'il est fait référence à des fonctions abstraites. "L'enseignant", "le maître" comme "les élèves" ou "l'enfant" renvoient donc ici à l'usage générique de chacun de ces termes sans distinction de sexe. Dans les autres emplois des termes désignant des professions, il est au contraire recommandé de distinguer par le masculin et le féminin les fonctions qu'exercent des personnes réelles.
(2) Décret n° 90-788 du 6 septembre 1990 relatif à l'organisation et au fonctionnement des écoles maternelles et élémentaires, J O du 8 septembre 1990.

(3) Lorsque l'enfant compare, classe ou range en explicitant ce qu'il fait dans le cadre d'un dialogue serré avec l'adulte, les propriétés des objets prennent progressivement de la consistance. Il convient d'engager ces activités dans des situations aussi proches que possible de la vie quotidienne (remise en ordre d'un local, réorganisation des classements dans le coin jeu ou en bibliothèque...), en évitant de les systématiser.

(4) Si un travail suffisant est effectué sur la capitale d'imprimerie, il ne paraît pas nécessaire d'imposer aux élèves l'apprentissage du tracé des minuscules imprimées (ou de leur substitut manuscrit, l'écriture dite " script "). Ces caractères ne permettent pas à l'enfant de signaler facilement les frontières de mots. Ils doivent être réservés à la lecture. Il sera par contre nécessaire de faire progressivement découvrir les équivalences entre les différentes polices ou familles de caractères.

Compétences devant être acquises en fin d'école maternelle

1 - COMPÉTENCES DE COMMUNICATION

Être capable de :

- répondre aux sollicitations de l'adulte en se faisant comprendre dès la fin de la première année de scolarité (à 3 ou 4 ans) ;

- prendre l'initiative d'un échange et le conduire au-delà de la première réponse ;

- participer à un échange collectif en acceptant d'écouter autrui, en attendant son tour de parole et en restant dans le propos de l'échange.


2 - COMPÉTENCES CONCERNANT LE LANGAGE D'ACCOMPAGNEMENT DE L'ACTION (LANGAGE EN SITUATION)

Être capable de :
- comprendre les consignes ordinaires de la classe ;
- dire ce que l'on fait ou ce que fait un camarade (dans une activité, un atelier...) ;
- prêter sa voix à une marionnette.

3 - COMPÉTENCES CONCERNANT LE LANGAGE D'ÉVOCATION
Être capable de :
- rappeler en se faisant comprendre un événement qui a été vécu collectivement (sortie, activité scolaire, incident...) ;
- comprendre une histoire adaptée à son âge et le manifester en reformulant dans ses propres mots la trame narrative de l'histoire ;
- identifier les personnages d'une histoire, les caractériser physiquement et moralement, les dessiner ;
- raconter un conte déjà connu en s'appuyant sur la succession des illustrations ;
- inventer une courte histoire dans laquelle les acteurs seront correctement posés, où il y aura au moins un événement et une clôture ;
- dire ou chanter chaque année au moins une dizaine de comptines ou de jeux de doigts et au moins une dizaine de chansons et de poésies.

4 - COMPÉTENCES CONCERNANT LE LANGAGE ÉCRIT
4.1 Fonctions de l'écrit
Être capable de :
- savoir à quoi servent un panneau urbain, une affiche, un journal, un livre, un cahier, un écran d'ordinateur... (c'est-à-dire donner des exemples de textes pouvant être trouvés sur l'un d'entre eux).
4.2 Familiarisation avec la langue de l'écrit et la littérature
Être capable de :
- dicter individuellement un texte à un adulte en contrôlant la vitesse du débit et en demandant des rappels pour modifier ses énoncés ;
- dans une dictée collective à l'adulte, restaurer la structure syntaxique d'une phrase non grammaticale, proposer une amélioration de la cohésion du texte (pronominalisation, connexion entre deux phrases, restauration de l'homogénéité temporelle...) ;
- reformuler dans ses propres mots un passage lu par l'enseignant ;
- évoquer, à propos de quelques grandes expériences humaines, un texte lu ou raconté par le maître ;
- raconter brièvement l'histoire de quelques personnages de fiction rencontrés dans les albums ou dans les contes découverts en classe.
4.3 Découverte des réalités sonores du langage
Être capable de :
- rythmer un texte en en scandant les syllabes orales ;
- reconnaître une même syllabe dans plusieurs énoncés (en fin d'énoncé, en début d'énoncé, en milieu d'énoncé) ;
- produire des assonances ou des rimes.
4.4 Activités graphiques et écriture
Être capable de :
- écrire son prénom en capitales d'imprimerie et en lettres cursives ;
- copier des mots en capitales d'imprimerie, en cursives avec ou sans l'aide de l'enseignant ;
- reproduire un motif graphique simple en expliquant sa façon de procéder ;
- représenter un objet, un personnage, réels ou fictifs ;
- en fin d'école maternelle, copier une ligne de texte en écriture cursive en ayant une tenue correcte de l'instrument, en plaçant sa feuille dans l'axe du bras et en respectant le sens des tracés.
4.5 Découverte du principe alphabétique
Être capable de :
- dès la fin de la première année passée à l'école maternelle (à 3 ou 4 ans), reconnaître son prénom écrit en capitales d'imprimerie ;
- pouvoir dire où sont les mots successifs d'une phrase écrite après lecture par l'adulte ;
- connaître le nom des lettres de l'alphabet ;
- proposer une écriture alphabétique pour un mot simple en empruntant des fragments de mots au répertoire des mots affichés dans la classe.


VIVRE ENSEMBLE


OBJECTIFS ET PROGRAMME
Apprendre à "vivre ensemble" est l'un des principaux objectifs d'une école maternelle qui offre à chaque enfant le cadre éducatif d'une collectivité structurée par des règles explicites et encadrée par des adultes responsables. Grâce aux multiples relations qui s'y établissent, dans les situations de vie quotidienne comme dans les activités organisées, l'enfant découvre l'efficacité et le plaisir de la coopération avec ses camarades. Il apprend aussi que les apports et les contraintes du groupe peuvent être assumés. En trouvant la distance qu'il convient d'établir dans ses relations à autrui, il se fait reconnaître comme sujet et construit progressivement sa personnalité.
On doit aider l'enfant à identifier et comparer les attitudes adaptées aux activités scolaires, aux déplacements et aux situations collectives, au jeu avec quelques camarades ou pratiqué individuellement. Il faut le conduire à prendre conscience des repères sur lesquels il peut s'appuyer et des règles à respecter dans chaque cas, mais aussi des façons d'agir et de s'exprimer qui lui permettront de mieux vivre ces diverses situations.

1 - Être accueilli

Avant son arrivée à l'école maternelle, le tout-petit n'a pas encore nécessairement fait l'expérience de la vie en collectivité. Il a évolué dans un réseau de relations restreintes, souvent limitées à quelques familiers dont il est dépendant. Quand il entre à l'école maternelle, en compagnie de nombreux autres enfants du même âge, il découvre les exigences et les contraintes du groupe. Les enseignants de l'école favorisent son adaptation et l'aident à tirer profit de cette nouvelle expérience en organisant ce passage délicat, notamment par un accueil des parents avec leur enfant, pour une prise de contact avec les lieux et les personnes.
L'enfant et sa famille découvrent, si possible avant même le jour de la rentrée, la classe et l'ensemble des locaux. Ils font connaissance avec les adultes de l'école. La qualité de l'accueil dépend en premier lieu de l'aménagement des espaces, intérieurs comme extérieurs. Les premiers moments vécus en commun y trouvent leur tonalité particulière. Dans la classe, les lieux de regroupement contrastent avec les tables d'atelier et des coins de jeux plus isolés qui doivent aussi pouvoir être perçus comme des refuges. Des ateliers permanents et fonctionnels comme le coin lecture ou l'atelier peinture sont clairement identifiables. Les trajets vers les lieux d'hygiène, les salles spécialisées, les lieux de repos, le restaurant scolaire sont balisés et facilement mémorisables. Tous les équipements sont appropriés à l'âge et à la taille des enfants dans un souci de sécurité, d'hygiène, de confort et d'esthétique.
L'enseignant aide l'enfant à trouver progressivement ses repères dans sa classe et dans l'école (espaces intérieurs et extérieurs). Il explore progressivement l'environnement immédiat (quartier, jardin public proche, équipements culturels...). Il structure la journée en alternant les moments consacrés aux activités collectives avec ceux réservés à des occupations plus individualisées.

2 - Construire sa personnalité au sein de la communauté scolaire

Avec l'aide des adultes, l'enfant se repère dans le groupe et peu à peu y trouve sa place avant d'en comprendre et de s'en approprier les règles. Dans ce cheminement, il se construit aussi comme sujet, capable de se positionner, de s'affirmer en se respectant et en respectant les autres.
2.1 Trouver ses repères et sa place
Lors de l'accueil quotidien, moment de classe à part entière, se multiplient les échanges entre enfants, mais aussi entre enfants et adultes. Il importe qu'à l'occasion de cette prise de contact avec l'école chacun puisse retrouver les repères qui jalonnent les espaces qui lui sont attribués (portemanteaux, casiers...), et venir occuper spontanément les coins collectifs aménagés pour ce moment particulier.
Les repères qui structurent le temps favorisent également l'entrée chaque jour plus autonome dans les activités qui sont proposées : le calendrier comportant des éléments concrets de repérage des jours, les symboles ou les objets qui situent les moments de la journée les uns par rapport aux autres...
Au cours de la journée, grâce aux indications données par l'enseignant, l'enfant repère le rôle et la nature de l'aide que peut apporter chacun des adultes qui constituent un réseau cohérent dans l'école : parents, enseignants, agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM), aides-éducateurs, intervenants. En retour, chaque enfant est nommé et reconnu, encouragé à trouver sa place de sujet au sein du groupe constitué et à bénéficier ainsi d'un espace d'action et d'expression. Il s'exprime sur les activités menées, participe aux échanges et aux débats, développe des essais personnels dans les domaines les plus variés : dessins, activités corporelles, activités de découverte du monde...
2.2 Apprendre à coopérer
Peu à peu l'enfant se perçoit comme membre du groupe. Les moments d'activité collective le conduisent à partager le temps et l'attention de l'enseignant qui, tout en étant présent pour chacun, donne à tous des consignes et des encouragements.
Chaque jour, dire des comptines ou des poèmes, écouter des histoires racontées ou lues, regarder des marionnettes, chanter, participer à une ronde, etc., sont autant d'occasions de sentir que l'on partage avec ses camarades des moments d'émotion, de plaisir, de rire. Les jeux sont également des moments forts qui donnent de la cohésion au groupe. Au-delà de sa participation, l'enfant acquiert le goût des activités collectives qui lui permettent d'échanger et de confronter son point de vue à celui des autres (par exemple, pour les plus jeunes dire à l'enseignant ce que l'on fait, pour les plus âgés raconter comment s'est effectuée une réalisation collective).
Devenir élève, c'est participer à la réalisation de projets communs, c'est prendre et progressivement partager des responsabilités au sein du grand groupe. Si la coopération entre pairs existe dans des temps collectifs, elle doit être aussi favorisée lors de travaux en petits groupes. L'expérience de ces formes diverses de relations permet à l'enfant de construire sa personnalité, son identité, et de conquérir son autonomie. C'est alors qu'il peut faire preuve d'initiative et proposer des solutions personnelles aux problèmes qui ont été soulevés.
2.3 Comprendre et s'approprier les règles du groupe
Pour la grande majorité des enfants, l'école maternelle est le premier lieu où l'on découvre une vie sociale collective régulée par des conventions. Dans un premier temps, les règles de vie sont données par l'enseignant qui indique à l'enfant les droits et les obligations de la communauté scolaire : attendre son tour, partager les objets, ranger... Lorsque l'âge de l'enfant le permet, ces règles sont élaborées collectivement et parfois négociées. Elles constituent des incitations permanentes au respect des autres. Parce qu'elles sont explicites et stables, elles deviennent des références qui permettent de construire le sentiment d'appartenance au groupe.
L'appropriation des règles de vie passe par la réitération d'activités rituelles (se regrouper, partager des moments conviviaux...). Celles-ci peuvent être transformées dans la forme et dans le temps. Lorsque tous les enfants se sont approprié un rituel, il doit évoluer ou être remplacé.
Ainsi l'école maternelle transmet concrètement au travers de situations vécues et commentées quelques règles, valeurs et principes de la vie en société : le droit d'être considéré comme un interlocuteur à part entière, de bénéficier en toutes circonstances d'un traitement équitable ; le devoir de prêter attention aux autres et de s'entraider ; le droit et le devoir de se défendre sans mettre autrui en danger ; l'acceptation de l'effort et de la persévérance.

3 - Échanger et communiquer dans des situations diversifiées

La communication s'installe dans la classe bien avant que les enfants n'en maîtrisent les formes verbales (voir "Le langage au cœur des apprentissages"). C'est dans ces échanges mettant en jeu le corps tout entier que se font et se défont les groupes de pairs, que se forgent des alliances ou qu'éclatent des conflits. Progressivement, avec l'aide des adultes, l'enfant apprend à parler avant d'agir, à se faire comprendre et à négocier plutôt qu'à tenter d'imposer sa volonté ou de subir celle d'autrui. Il conquiert ainsi sa place dans la classe.
3.1 Dialoguer avec des camarades, avec des adultes
Les diverses formes prises par les activités sont, dès la première année d'école maternelle, autant d'espaces de communication structurée. L'enfant y apprend à réagir à une sollicitation, plus tard à prendre l'initiative d'un court dialogue. L'enseignant s'efforce de multiplier les occasions d'échanges en veillant à ce que personne ne soit tenu en dehors de ce processus d'interactions verbales. Il tente d'en prolonger la durée de manière à ce que chaque enfant commence à éprouver les enjeux d'un véritable dialogue.
Certaines situations ­ habillage, retour au calme précédant la sieste, récréation, sorties, déplacements ­ facilitent les échanges langagiers personnalisés avec un adulte disponible. Elles sont des occasions privilégiées de nouer des dialogues mettant en jeu une confiance réciproque : l'enfant est incité à communiquer ; on lui renvoie des commentaires, on lui demande de préciser. Il entre progressivement dans un usage plus fortement socialisé de son langage.
Le tutorat entre enfants (en particulier entre enfants d'âges différents) est encouragé dans de nombreuses activités. Cette forme d'entraide souple, mais n'excluant pas la rigueur dans son organisation, peut être ponctuelle ou régulière, intervenir dans un ou plusieurs domaines d'activités, concerner un nombre variable d'enfants. Ces situations d'échange, autour d'un jeu ou d'une tâche à réaliser, peuvent être l'occasion d'instaurer des habitudes d'activités autonomes.
3.2 Découvrir les usages de la communication réglée
L'enseignant installe les conditions d'une communication au sein du groupe large et organise les prises de parole. Il rend explicites les règles de la communication et incite chacun à les respecter : écouter, parler à son tour, rester dans le propos de l'échange et chercher à l'enrichir. Chaque expression non verbale est accueillie, chaque prise de parole est reconnue et guidée vers l'espace d'écoute et d'échanges. Dépassant progressivement la dimension de l'expression ponctuelle et individuelle, la communication au sein du groupe participe à l'élaboration d'une réflexion qui intègre les apports de chacun.
Vivre ensemble, c'est aussi quelquefois accepter de ne pas se faire entendre ni comprendre immédiatement, c'est accepter d'attendre une réponse que l'adulte diffère dans l'intérêt du groupe ou de l'enfant lui-même.
3.3 Prendre sa place dans les discussions
La vie collective s'organise autour de discussions qui permettent d'aborder des questions concrètes à forte valeur sociale. Ces échanges soutiennent les expressions personnelles, l'émotion et les sentiments y trouvent leur place. L'enseignant guide la réflexion du groupe pour que chacun puisse élargir sa propre manière de voir ou de penser.
Peuvent être abordés notamment des faits proches, d'actualité ou de la vie de l'école, connus d'un maximum d'enfants de la classe. Des notions ou des valeurs comme la vie, le respect de l'autre, la prise de conscience du danger, la protection de la nature, l'amitié sont examinées. C'est l'occasion d'établir des relations avec les contes et les récits lus par ailleurs.
L'évocation de comportements posant problème est l'occasion de rappeler les règles que chacun doit respecter pour assurer le bon fonctionnement de l'école et réguler les conflits.
Utiliser le langage pour commenter les événements (dans l'école ou dans la société), c'est mettre l'enfant en situation d'apprendre à connaître son milieu de vie, comprendre les causes et les liens entre les faits. Il importe de faire percevoir, si possible, le sens sous-jacent de chaque expérience et de permettre d'exercer les premiers rudiments du sens critique.
L'école est un lieu où l'on peut s'écouter. Il se caractérise par la qualité des rapports établis entre des adultes accessibles, disponibles. Les règles étant mises en place, les droits de la personne y sont préservés. L'enfant apprend ainsi à motiver un refus face à d'éventuels mauvais traitements de pairs ou d'adultes. Il doit se savoir protégé. Familiarisé avec ses droits et ses devoirs, l'enfant est en confiance.

Compétences devant être acquises en fin d'école maternelle

Être capable de :
- jouer son rôle dans une activité en adoptant un comportement individuel qui tient compte des apports et des contraintes de la vie collective ;
- identifier et connaître les fonctions et le rôle des différents adultes de l'école ;
- respecter les règles de la vie commune (respect de l'autre, du matériel, des règles de la politesse...) et appliquer dans son comportement vis-à-vis de ses camarades quelques principes de vie collective (l'écoute, l'entraide, l'initiative...).

AGIR ET S'EXPRIMER AVEC SON CORPS

OBJECTIFS ET PROGRAMME
Jusqu'à l'âge de six ou sept ans, l'activité physique mettant en jeu le corps est un moyen d'action, d'exploration, d'expression et de communication privilégié pour permettre un développement moteur, affectif et intellectuel harmonieux.

1 - Des actions motrices fondamentales aux situations d'activités

C'est à cette période que se construit le répertoire moteur de base. Il est composé d'actions motrices fondamentales (les patrons moteurs de base) :
- les locomotions (ou déplacements) : marcher, courir, sauter, grimper, rouler, glisser...
- les équilibres (attitudes stabilisées) et les manipulations : saisir, agiter, tirer, pousser...
- les projections et réceptions d'objets : lancer, recevoir...
Ces actions sont à la base de tous les gestes. Elles se retrouvent, seules ou en combinaison avec d'autres, sous des formes variées et avec des intentions différentes, dans toutes les activités physiques que l'on peut proposer à l'école maternelle. Par exemple, l'action de courir se retrouve dans les jeux athlétiques (courir en droite ligne le plus vite possible), la danse (courir pour exprimer un état, un sentiment), les jeux collectifs (courir en zigzag pour échapper à un poursuivant), les activités d'orientation (courir vers un point donné)...
La construction de ces actions, véritable "vocabulaire moteur", se fait par étapes. D'abord acquises dans leur forme simple, elles sont peu à peu enrichies et diversifiées : par exemple, la marche, qui ne pouvait se faire que sur un sol plat et stable, est progressivement possible sur des supports de plus en plus étroits, élevés, en pente, instables....
Dans l'étape suivante, ces actions sont enchaînées avec d'autres, d'abord juxtaposées, puis combinées de manière articulée (comme le sont les mots dans une phrase) dans des actions de plus en plus complexes et variées (par exemple, courir et lancer, courir et sauter...).
C'est en s'exerçant librement, puis de façon plus guidée, que les enfants vont peu à peu construire ces actions, les diversifier, les enrichir, commencer à les coordonner et les enchaîner entre elles. Elles ne sont pas élaborées pour elles-mêmes, mais au travers de la pratique des activités physiques qui leur donnent tout leur sens.
Ainsi, les situations proposées par l'enseignant doivent permettre aux enfants de construire progressivement le sens de chaque activité, de découvrir et d'explorer des espaces proches et progressivement plus lointains, de s'y déplacer, avec ou sans engins, de manipuler des objets familiers, de se confronter à des obstacles variés, de s'exprimer avec leur corps, de rencontrer d'autres enfants, de communiquer et de jouer avec eux...
Toutes ces actions, dont les effets sont particulièrement visibles et perceptibles (positions renversées, modes de déplacements divers, sensations physiques de déséquilibre, de vitesse, d'essoufflement...), procurent des émotions variées. Elles permettent de répondre au besoin de bouger des enfants et d'éprouver un véritable "plaisir d'agir".
Ces différentes expériences corporelles, en aidant l'enfant à mieux connaître son corps, ses possibilités physiques, ses réactions à l'effort, apportent leur contribution à une véritable éducation à la santé.
En outre, c'est en s'engageant dans l'activité que l'enfant apprend peu à peu à prendre des risques mesurés tout en étant attentif à la sécurité, que ce soit la sienne ou celle des autres. Il le fait dans des situations pédagogiques dont le niveau de risque objectif est contrôlé par l'enseignant (nature de l'environnement, matériel et règles de jeu ou d'action adaptés).
Enfin, en participant avec les autres à des activités qui comportent des règles, des rôles différents, des difficultés à résoudre, les enfants apprennent progressivement l'intérêt et les contraintes des situations collectives.
Ainsi, à l'école maternelle, l'éducation physique et sportive poursuit trois objectifs :
- favoriser la construction des actions motrices fondamentales (locomotions, équilibres, manipulations...) ;
- permettre une première prise de contact avec les diverses activités physiques (pratiques sociales de référence) ;
- faire acquérir les compétences et connaissances utiles pour mieux connaître son corps, le respecter et le garder en bonne santé.
En ce sens, ce domaine d'activités apporte une contribution originale au développement de la personne.

2 - Expériences corporelles et langage

L'action physique procure des sensations, des émotions diverses, intenses. Les exprimer verbalement, c'est pouvoir mettre des mots sur ces émotions ressenties, échanger des impressions, mieux comprendre ce qui a été vécu et ce qu'il faut faire.
Il faut donc offrir aux enfants l'occasion de parler de leur activité : dire ce qu'on a envie de faire, nommer des actions, se situer dans l'espace et le temps, formuler une question, exprimer ses émotions, communiquer avec les autres pour élaborer un jeu, donner son avis. Le dessin peut être un relais important dans la mesure où il permet d'identifier et d'ordonner des gestes, des événements dans le cours continu de l'action.
Il est important de préciser que ces moments de verbalisation, éventuellement relayés par un écrit de l'adulte, doivent se dérouler pour leur plus grande part dans la classe, en amont et en aval de la séance d'activités physiques dont l'objectif premier reste l'action motrice.

3 - Articulation avec les autres domaines d'activités

L'activité physique à l'école maternelle, par la diversité des expériences qu'elle propose, aide à rendre plus facile la construction de certaines des connaissances visées dans le domaine d'activités "Découvrir le monde". C'est le cas de celles qui concernent le corps, son fonctionnement, la santé, les différents aspects des principaux éléments (la terre, l'eau, la neige), les qualités des matériaux.
L'activité physique permet aussi de faire l'expérience d'un temps et d'un espace structurés par l'action. L'articulation avec le domaine "La sensibilité, l'imagination, la création" est tout aussi essentielle. En effet, lorsque l'enfant est amené à exercer son pouvoir d'expression et à solliciter son imagination, ce sont sa perception et l'action de son corps qui en sont les moteurs (mise en jeu des différents sens, action sur des matières, utilisation d'objets ou d'instruments...). Les situations vécues dans les diverses activités physiques peuvent donner lieu à la réalisation individuelle ou collective de projets artistiques : dessins, modelages, peintures, fresques.
En travaillant sur des supports sonores ou musicaux divers et variés, ces activités participent également à l'éducation musicale. Les rondes et jeux dansés mettent les enfants au contact d'un patrimoine culturel qui doit être rassemblé de manière à élargir sans cesse son horizon.
La danse, activité physique et artistique, en utilisant le corps comme instrument d'expression et de communication, en mettant en œuvre le "corps poétique", est, de ce point de vue, exemplaire. Elle permet aux enfants une mise en scène de l'imaginaire ainsi qu'une première rencontre avec des œuvres chorégraphiques différentes par la vidéo, les livres, les spectacles.

4 - L'activité de l'enfant et le rôle de l'enseignant

À l'école maternelle, l'enfant a besoin de temps pour découvrir l'espace et le matériel, pour comprendre les consignes, pour réaliser ses actions, affiner ses gestes, pour trouver de nouvelles réponses, s'exercer, agir avec les autres... Sans une organisation rigoureuse des activités, il risque de passer plus de temps à attendre son tour qu'à réaliser des actions.
Celles-ci doivent d'abord être l'occasion d'explorer les espaces, de manipuler les objets ou le matériel, d'exercer et de jouer successivement des rôles différents, d'explorer les façons de mobiliser son corps et ses segments, notamment en construisant progressivement sa latéralité, d'expérimenter différents types d'efforts, en particulier lors d'activités de course, de lutte, de jeux... Cela suppose une mise à disposition de matériel en quantité suffisante (un objet par enfant pour le petit matériel : balles, ballons, rubans, foulards...).
Les situations sont conçues et organisées comme des jeux. Elles permettent l'exploration libre du dispositif proposé. L'enseignant aide ou guide l'enfant lorsque le besoin s'en fait sentir, il lui suggère des solutions nouvelles aux problèmes qu'il a posés, bref il interagit sans cesse avec lui.
Le besoin de mouvement des enfants est réel. Il est donc impératif d'organiser une séance d'activités corporelles chaque jour (de 30 à 45 minutes environ, selon la nature des activités, l'organisation choisie, l'intensité des actions réalisées, le moment dans l'année, les comportements des enfants...). Ces séances doivent être placées dans l'emploi du temps de manière à respecter les rythmes de l'enfant : le milieu de matinée (niveau de vigilance optimum) est plutôt favorable aux activités de prise de risque, à la découverte d'une nouvelle situation ; la fin de matinée est propice aux activités plus calmes (rondes et jeux chantés, jeux déjà connus...) ; le début d'après-midi n'est pas un moment très favorable ; la deuxième partie de l'après-midi convient, pour les plus grands, à toutes les activités qui ne comportent pas de prises de risque excessives.
Chaque fois que c'est possible, il est judicieux de pratiquer des activités physiques en extérieur pour éprouver d'autres sensations, prendre d'autres repères.
Seule une programmation ordonnée des activités tout au long de la scolarité à l'école maternelle permet de faire des activités corporelles une véritable éducation. Elle doit prendre le plus grand soin d'adapter les situations didactiques à l'âge et au développement des enfants, en créant la dynamique qui leur permet d'aller au-delà de ce qu'ils savent faire. Elle doit contrôler que chacune des actions motrices élémentaires sera bien sollicitée. Elle doit varier les activités physiques et les situations dans lesquelles ces actions peuvent être mises en œuvre et faire découvrir, de manière ordonnée, les différents milieux, les différents matériels, les différents jeux qui permettent à l'enfant de se familiariser avec les multiples facettes de l'univers et des activités humaines qui l'entourent.

5 - L'activité physique des tout-petits

Les premières actions du jeune enfant sont réalisées "pour le plaisir", et sont liées aux sensations et aux émotions ressenties. Il s'agit donc de le laisser jouer, c'est-à-dire éprouver son pouvoir sur le monde et les objets qui l'entourent.
Progressivement, en fonction de l'effet produit, le tout-petit ajoute une intention qui précise cette action et, finalement, l'organise et la construit de façon plus affinée et mieux adaptée au milieu.
Les situations qui sont proposées doivent permettre :
- des actions de déplacement (locomotions), qui répondent bien au besoin qu'a le tout-petit de mieux connaître son corps, d'affirmer son équilibre à peine conquis. Ces actions sont menées dans des environnements familiers, puis de plus en plus étrangers. Les espaces d'évolution variés sont progressivement délimités, notamment pour des jeux de poursuite. Pour solliciter des actions spécifiques (marcher debout, à quatre pattes, courir, sauter, monter, descendre, rouler, ramper...), l'espace sera structuré à l'aide d'objets (blocs de mousse, bancs, gros tapis, plans inclinés, tunnels, mini-échelles...) incitant à l'action ou, au contraire, jouant le rôle d'obstacles. On peut aussi privilégier les actions de déplacement utilisant des engins à pousser, à rouler (chariots, tricycles, trottinettes...) ;
- des ajustements de plus en plus fins à toutes sortes d'objets et de matériels (cartons, cubes en mousse, balles, ballons...) que l'on peut manipuler, pousser, tirer, transporter, démolir, lancer ;
- des jeux de doigts, des déplacements et mouvements "dansés", des jeux d'expression, des imitations de personnages, d'animaux... qui sont autant de situations très riches pour les tout-petits. On aide l'enfant à structurer ses actions et ses déplacements en les soutenant par de la musique, des chansons, des comptines.
L'enseignant permet d'abord une exploration libre des espaces et du matériel proposés sans chercher au départ une trop grande complexité dans l'aménagement du milieu. En effet, l'espace d'investigation ne doit pas être trop vaste si l'on souhaite que des enfants de cet âge y trouvent aisément des repères. Pendant les activités, l'enseignant doit se situer au plus près du groupe d'enfants, au milieu d'eux si nécessaire, afin de pouvoir jouer pleinement son rôle d'incitateur, d'aide, de régulateur.
Il peut à l'occasion aider les enfants en difficulté passagère (assurer un équilibre vacillant en proposant l'appui de sa main, rassurer les timorés par des encouragements, suggérer un geste à faire...), sans toutefois anticiper sur les initiatives ou substituer des réponses toutes faites aux tâtonnements. La verbalisation par l'enseignant de ce qui est fait par les enfants joue un rôle important dans la compréhension de leurs actions.
Les réponses sont d'abord recherchées de manière individuelle, en laissant du temps pour explorer, ressentir, trouver de nouvelles façons de faire, imiter un autre enfant (l'imitation est à cet âge une façon d'entrer en communication). Peu à peu des interactions entre enfants se mettent en place, permettant à chacun de trouver sa place à l'intérieur d'un groupe et de commencer à participer à une action commune.

Compétences devant être acquises en fin d'école maternelle

La plupart des compétences relatives aux activités corporelles sont étroitement liées aux situations dans lesquelles elles se construisent, et s'expriment en termes de niveau à atteindre. Ces compétences sont de nature identique dans les trois cycles, mais se situent à des niveaux de maîtrise différents, et dans différentes activités. La liste des compétences spécifiques à atteindre en fin de maternelle est présentée ci-dessous avec, dans certaines activités, des exemples concrets. Les documents d'application donnent une description plus complète de ces compétences, illustrées d'exemples de niveaux à atteindre sur un plus grand nombre d'activités physiques, ainsi que des commentaires.
D'autres compétences, plus transversales, sont présentées dans une deuxième partie.

1 - COMPÉTENCES SPÉCIFIQUES LIÉES AUX DIFFÉRENTES ACTIVITÉS
Les différentes activités physiques font vivre aux enfants de l'école maternelle des "expériences corporelles" particulières. Les intentions poursuivies, les sensations et les émotions éprouvées sont différentes selon les types de milieux et d'espaces dans lesquels elles sont rencontrées (incertitude ou non, interaction des autres ou non). Il ne s'agit pas de proposer une copie des pratiques sportives "de club", connues par les enfants (par la famille, l'environnement social, les médias...), mais de traiter ces activités pour qu'elles soient adaptées aux enfants de cet âge, et d'en construire le sens avec eux : par exemple, faire des activités athlétiques, c'est courir, sauter, lancer, en faisant des efforts pour essayer de battre son propre record...
Par la pratique de ces activités physiques variées, les enfants peuvent construire quatre types de compétences spécifiques, significatives de ces expériences corporelles, élaborant ainsi un répertoire aussi large que possible d'actions élémentaires.
Parce qu'elles sont complémentaires, chacune de ces quatre compétences doit être vécue par l'enfant chaque année, dans des modules de différentes activités, sur plusieurs séances (cinq à six au minimum). Au cours d'une semaine, et pendant au moins un demi-trimestre, deux ou trois compétences spécifiques peuvent être programmées à travers des activités différentes, par exemple :
- lundi : réaliser une action que l'on peut mesurer (activités athlétiques) ;
- mardi : adapter ses déplacements à différents types d'environnements (activités gymniques) ;
- jeudi : adapter ses déplacements à différents types d'environnements (activités de pilotage : bicyclettes, trottinettes...) ;
- vendredi : réaliser des actions à visée artistique, esthétique ou expressive (rondes et jeux dansés).
Un exemple plus complet de programmation est présenté dans le document d'application. Les compétences sont illustrées, pour quelques activités, dans des fiches d'accompagnement.
1.1 Réaliser une action que l'on peut mesurer
Être capable de :
- courir, sauter, lancer de différentes façons (par exemple : courir vite, sauter loin avec ou sans élan) ;
- courir, sauter, lancer dans des espaces et avec des matériels variés (par exemple : lancer loin différents objets) ;
- courir, sauter, lancer pour "battre son record" (en temps, en distance).
Mise en œuvre :
- activités athlétiques.
Exemples de compétences à atteindre en fin de maternelle : activités athlétiques :
- courir vite en ligne droite pendant 4 à 5 secondes ;
- lancer loin un objet lesté, sans sortir de la zone d'élan ;
- sauter le plus loin ou le plus haut possible, avec ou sans élan.
1.2 Adapter ses déplacements à différents types d'environnement
Être capable de :
- se déplacer dans des formes d'actions inhabituelles remettant en cause l'équilibre (sauter, grimper, rouler, se balancer, se déplacer à quatre pattes, se renverser...) ;
- se déplacer (marcher, courir) dans des environnements proches puis progressivement dans des environnements étrangers et incertains (cour, parc public, petit bois...) ;
- se déplacer avec ou sur des engins présentant un caractère d'instabilité (tricycles, trottinettes, vélos, rollers...) ;
- se déplacer dans ou sur des milieux instables (eau, neige, glace, sable...).
Mise en œuvre :
- vers les activités gymniques : salles aménagées avec du gros matériel, des obstacles (on peut s'y déplacer de manières différentes) ;

- activités d'orientation : environnements proches et familiers (école) ; environnement semi-naturels et proches (parcs) ou plus lointains (bois, forêt...) ;
- activités de roule et de glisse (pilotage) : chariots, tricycles, vélos, rollers, patins à glace, skis...
- activités aquatiques (en piscine) : partout où ce sera possible, les activités de natation seront proposées aux enfants de grande section, sous la forme de modules d'apprentissage d'un minimum de 10 séances ;
- activités d'escalade : modules et murs aménagés ;
- activités d'équitation : poneys.
Exemples de compétences à atteindre en fin d'école maternelle :
- vers les activités gymniques : se déplacer d'un point à un autre de différentes façons (rouler, franchir, sauter...) en prenant des risques mesurés, et en essayant d'arriver sur ses pieds ;

- activités d'orientation : dans un parc public, à vue de l'enseignant, par groupes de 2, retrouver les objets que l'on a déposés juste avant, au cours de la promenade de découverte faite avec l'enseignant ;
- activités de pilotage : bicyclette (rouler en ligne droite, accélérer, ralentir, faire un virage, monter et descendre une petite pente, s'arrêter sur une zone de quatre mètres) ;
- activités aquatiques : se déplacer sur quelques mètres, en grand bain, par l'action des bras et des jambes, avec ou sans support (frite ou planche).
1.3 Coopérer et s'opposer individuellement ou collectivement
Être capable de :
- s'opposer individuellement à un adversaire dans un jeu de lutte : tirer, pousser, saisir, tomber avec, immobiliser... ;
- coopérer avec des partenaires et s'opposer collectivement à un ou plusieurs adversaires dans un jeu collectif : transporter, lancer (des objets, des balles), courir pour attraper, pour se sauver.
Mise en œuvre :
- avec les grands surtout : jeux d'opposition duelle (jeux de lutte) ;
- avec les petits : jeux collectifs (y compris les jeux de tradition avec ou sans ballons) : jeux de poursuite, jeux de transports d'objets, activités de lancers de balles et ballons sur des cibles-buts et à des distances variées ;
- avec les moyens et les grands : ces mêmes jeux et activités sont menés dans des espaces délimités, avec des rôles différents à jouer.
Exemples de compétences à atteindre en fin d'école maternelle
- jeux de lutte : s'investir dans une activité de corps à corps pour priver l'adversaire de sa liberté d'action ;
- jeux collectifs : avec son équipe, transporter en courant des objets d'un point à un autre sans se faire toucher par un enfant défenseur.
1.4 Réaliser des actions à visée artistique, esthétique ou expressive
Être capable de :
- exprimer corporellement des images, des personnages, des sentiments, des états ;
- communiquer aux autres des sentiments ou des émotions ;
- s'exprimer de façon libre ou en suivant un rythme simple, musical ou non, avec ou sans matériel.
Mise en œuvre :
- à tous les âges : danse, mime, rondes et jeux dansés, manipulation de petit matériel (vers la gymnastique rythmique, avec des rubans, des foulards, des cerceaux) ;
- avec les grands : activités gymniques (dans leur aspect artistique), activités de cirque.
Exemples de compétences à atteindre en fin de maternelle
- rondes et jeux dansés : danser (se déplacer, faire les gestes) en concordance avec la musique, le chant, et les autres enfants ;
- danse : construire une courte séquence dansée associant deux ou trois mouvements simples, phrase répétée et apprise par mémorisation corporelle des élans, vitesses, directions.

2 - COMPÉTENCES TRANSVERSALES ET CONNAISSANCES
Ces compétences ne sont pas construites pour elles-mêmes. Elles impliquent le désir de connaître, l'envie d'agir dans un espace et un temps structurés. Il s'agit pour l'enseignant d'aider l'élève à acquérir des attitudes, des méthodes, des démarches favorables aux apprentissages, dans la pratique de l'activité mais aussi dans la vie sociale.
C'est par une pédagogie adaptée que les élèves apprennent à mieux apprécier leurs possibilités, à mieux connaître les autres enfants, à accepter puis contrôler leurs émotions, à prendre des repères dans l'environnement pour réussir leurs actions, à comprendre et mettre en œuvre des règles, des codes. Ainsi, les situations mises en place par l'enseignant doivent permettre à chaque enfant de choisir son niveau de difficulté, de tenter de nombreux essais en toute sécurité, de pouvoir recommencer s'il a échoué, de regarder comment les autres agissent, de pouvoir se faire aider par une parade ou un conseil.
C'est donc à travers les différentes activités physiques, lors des séances vécues avec la classe, que les enfants vont pouvoir montrer qu'ils sont capables de s'engager dans l'action (oser s'engager en toute sécurité, contrôler ses émotions), faire un projet d'action (à court terme), identifier et apprécier les effets de l'activité (prendre des indices simples, prendre des repères dans l'espace et le temps, constater ses progrès), se conduire dans le groupe en fonction de règles (participer à des actions collectives, comprendre des règles, écouter et respecter les autres, coopérer).
En construisant les compétences, dans la pratique des différentes activités, les enfants acquièrent des connaissances variées. Ce sont des connaissances sur soi, des savoirs pratiques portant sur la manière de réaliser différentes actions, sur les façons de se conduire dans le groupe classe. Ce sont aussi des connaissances sur les activités elles-mêmes, sur les instruments utilisés, sur les règles qu'elles impliquent.
Les compétences transversales et les connaissances peuvent être abordées dans toutes les activités physiques. Elles sont présentées et détaillées plus précisément dans le document d'application, avec des exemples de mise en œuvre dans certaines activités.


DÉCOUVRIR LE MONDE

OBJECTIFS
À l'école maternelle, l'enfant prend conscience que son expérience immédiate n'épuise pas le champ auquel s'applique sa curiosité. Il découvre la richesse du monde qui l'entoure, les objets comme les êtres vivants.
En jouant, en poussant toujours plus avant ses expériences et ses tâtonnements, l'enfant se constitue un premier capital de connaissances. Il manipule, il observe, il cherche comment utiliser un objet, un instrument. Il s'interroge. Il identifie des réalités, les représente et les nomme. Il distingue les qualités des objets ou des collections d'objets qu'il compare, classe, range, dénombre. Il apprend à conduire ses actions, à en prévoir les résultats, à anticiper les événements et à les expliquer. Il raconte ses expériences, verbalise ses actions, écoute l'enseignant lorsqu'il les commente et dialogue avec lui à leur propos. Il obtient les premières réponses aux nombreuses questions qu'il se pose et devient peu à peu capable de formuler des interrogations plus rationnelles. Il commence ainsi à se confronter aux contraintes de la pensée logique, apprend à utiliser des repères spatiaux et temporels pour structurer ses observations et son expérience, constate qu'on peut relier la cause et l'effet. L'enseignant lui montre qu'il est possible de décentrer son point de vue et il l'aide à se forger un début de pensée rationnelle.
L'école maternelle suscite ainsi toutes les occasions d'une découverte active du monde et en sollicite des représentations. L'enrichissement des connaissances s'appuie sur des expériences vécues mais passe aussi par la découverte de documents (imprimés ou numérisés) grâce à la médiation de l'adulte qui lit, explique, commente les textes comme les images ou les schémas. Dès son plus jeune âge, l'enfant est mis en présence d'un grand nombre d'images, analogiques ou numériques, fixes (photographies, affiches, albums...) ou animées (vidéo, télévision, cinéma...). D'abord sensible aux impressions qu'elles produisent, il apprend à les percevoir aussi comme des documents.
Il dessine, produit, utilise diverses représentations de ses expériences, ainsi que des désignations symboliques. Il élabore des textes qui rendent compte de son activité (dictées à l'adulte). À mesure que ses représentations s'affinent, il utilise un lexique plus précis et acquiert une syntaxe plus complexe mieux adaptée à la description des relations spatiales, temporelles, de causalité, et au cheminement du raisonnement.
Ainsi, l'enfant apprend, à se représenter le monde et à construire des connaissances. Comme dans les autres cycles de l'école, la démarche s'articule autour d'un questionnement guidé par le maître et conduit à des investigations menées par les élèves.
Issue d'un questionnement provenant le plus souvent de l'activité des enfants, l'investigation menée en maternelle n'est pas conduite uniquement pour elle-même : elle débouche sur des savoir-faire et des connaissances. Même très élémentaires, ces derniers constituent un progrès important pour l'élève.

PROGRAMME
C'est à l'occasion d'activités globales et, bien entendu, non disciplinaires que l'enseignant guide les enfants dans l'exploration des thèmes décrits ci-dessous. Les rubriques ont été sériées dans le seul but de faciliter la lecture.

1 - Découverte sensorielle

Pour qu'il puisse établir des connaissances, il importe d'abord de guider l'enfant vers une toute première analyse de son environnement fondée sur la mise en ordre des perceptions qu'il en reçoit. C'est par l'usage de ses sens que l'enfant reconnaît les objets et les événements qu'il perçoit. L'aider à mieux découvrir le monde, c'est donc enrichir et développer ses aptitudes sensorielles, lui permettre de s'en servir pour distinguer des réalités différentes, les classer ou les ordonner, les décrire grâce au langage. Dans cette perspective, on lui propose des situations mettant en jeu :
- l'exploration des qualités tactiles : rugueux, lisse, doux, piquant, chaud, froid, etc. ;
- l'exploration tactile des formes et des surfaces, y compris en fermant les yeux ;
- l'exploration des caractéristiques gustatives et olfactives : textures, odeurs, saveurs, etc. ;
- la reconnaissance des éléments du monde sonore, leur reproduction ;
- l'exploration des caractéristiques visuelles des objets : couleurs, intensités, oppositions brillant/terne, clair/sombre.
L'observation des effets de la lumière (jeux de lumière et d'ombres, de miroirs), la déformation de la vision avec des instruments d'optique simples (loupes, lunettes, verres de couleur, tubes...) permettent à l'enfant de percevoir autrement les objets qui l'entourent.

2 - Exploration du monde de la matière

Une première appréhension intuitive du concept de matière peut être sous-tendue par la distinction entre les objets et les substances dont ils sont constitués, elles-mêmes caractérisées par leurs propriétés.
En agissant sur la matière, l'enfant élabore des représentations. Il peut ainsi s'exercer à modeler, tailler, couper, morceler, mélanger, assembler, fixer, transporter, transvaser, transformer en agissant sur des matériaux nombreux et variés.
Grâce à ces actions, il complète son expérience du monde en découvrant quelques propriétés de matières usuelles comme le bois, la terre, la pierre, le sable, le papier, le carton, le tissu... Il repère des réalités moins visibles comme le vent et ainsi prend conscience de l'existence de l'air.
En rapprochant l'eau du robinet, la pluie, la neige, la glace, il élabore un premier niveau, très modeste, d'abstraction et comprend que ces diverses réalités renvoient à une même substance : l'eau. Il compare des mélanges : sirops, peintures.
Cette exploration conduit à des dialogues avec l'enseignant qui permettent de repérer, classer, sérier, désigner les matières, les objets et leurs qualités.

3 - Découvrir le monde vivant

Les différents aspects de la découverte du vivant ne peuvent être abordés qu'à partir de mises en situation et d'observation du réel qui répondent à la curiosité des enfants. En maternelle, l'important est qu'ils repèrent et nomment ce qu'ils observent. L'essentiel est de prendre conscience de la diversité du monde vivant et des différents milieux tout en identifiant quelques-unes des caractéristiques communes aux végétaux, aux animaux et à l'enfant lui-même.
3.1 Observation des caractéristiques du vivant
Les jeunes enfants ont des rapports privilégiés avec les animaux. Ainsi, ils découvrent rapidement certaines caractéristiques de la vie : un animal naît, grandit, se reproduit et meurt.
L'observation et la description de la nature, associées à la désignation des plantes et des animaux, sont l'occasion d'aborder les grandes fonctions du vivant : croissance, nutrition, reproduction, locomotion (pour les animaux).
L'organisation, l'entretien et l'observation d'élevages et de cultures constituent un support privilégié de verbalisation et de dialogue, y compris pour les plus jeunes et les plus timides. L'enregistrement écrit des observations (dictée à l'adulte) donne les moyens de mémoriser des connaissances, de structurer les relations spatiales et temporelles, de rendre compte de liens de causalité. Toutes ces expériences sont le support de débats, de tentatives de représentations (par le dessin, la photographie), elles-mêmes à nouveau objets de discussion. C'est au cours de ces échanges avec l'adulte que se construisent un questionnement ordonné, des représentations claires et, finalement, des connaissances.
3.2 Découverte de différents milieux, sensibilisation aux problèmes de l'environnement
Ce n'est que lorsque le milieu proche a été exploré et reconnu qu'il devient possible d'aller à la rencontre de réalités plus complexes. On conduira donc les enfants de la découverte et l'observation de l'environnement proche (la classe, l'école, le quartier...) à celles d'espaces moins familiers (espaces verts, terrains vagues, forêt, étangs, haies, parcs animaliers, campagne, mer, montagne, ville...). La caractérisation de ces différents lieux par leur position (en particulier leur altitude) est possible avec les plus grands. L'observation des constructions humaines (maisons, commerces, monuments, routes, ponts...) suppose le même cheminement.
Pour les plus grands, une première approche du paysage comme milieu marqué par l'activité humaine devient possible. On peut comparer, à l'occasion d'une promenade, les paysages rencontrés et leurs représentions photographiques.
Toutes ces situations sont l'occasion d'une initiation concrète à une attitude responsable : respect des lieux, de la vie, entretien des plantations et du jardin scolaire, soins aux animaux, impact de certains comportements sur l'environnement de la classe (lutte contre le gaspillage, tri des déchets pour recyclage, repérage des nuisances). Elles constituent des situations de questionnement sur le monde et sont autant d'occasions de recherche d'informations (grâce à la médiation du maître) dans des documents photographiques imprimés ou numérisés, dans des documentaires, sur des sites internet.
3.3 Découverte du corps et sensibilisation aux problèmes d'hygiène et de santé
La découverte de son corps dans sa globalité et dans ses différentes parties, leur désignation sont source d'intérêt pour le jeune enfant. Chaque jour et de manière très concrète, dans le respect des habitudes culturelles de chacun, on apprend à satisfaire aux règles élémentaires d'hygiène :
- du corps : lavage des mains ;
- des locaux : remise en ordre, maintien de la propreté ;
- de l'alimentation : régularité des repas, composition des menus.
Une information sur l'enfance maltraitée est effectuée chaque année. Une sensibilisation aux questions d'hygiène et de santé permet aux enfants de comprendre la nécessité de respecter l'intimité de chacun, l'intégrité de son corps et de celui des autres.

4 - Découvrir le monde des objets, éducation à la sécurité

Les actions sur les objets guidées par le maître ne se réduisent pas à des activités purement manuelles. Elles sollicitent la réflexion de l'enfant et le conduisent à une première appréhension de ce que sont un système et les éléments qui le composent.
L'utilisation d'objets techniques variés dans des situations fonctionnelles (vie de l'école, alimentation et cuisine, communication,, jeux...) conduit d'abord à la découverte de leurs usages et au développement de l'habileté de l'utilisateur. Ces situations permettent aussi de tenter de répondre à des questions simples : à quoi servent ces objets ? comment les utiliser ? d'où viennent-ils ? Quelquefois, l'enfant ne peut que mimer ce qu'il ne parvient pas encore à dire. L'enseignant le conduit à préciser ses gestes, à trouver les mots qui les accompagnent, à dire enfin ou à représenter ce qu'il a compris.
L'ambition de ces activités est limitée. L'enfant prend conscience de l'usage de l'objet, de ses différentes parties. Il constate qu'il fonctionne ou non (une analyse méthodique du fonctionnement et des principales pannes est réservée à l'école élémentaire).
La fabrication d'objets contribue tout aussi fortement à cette première découverte du monde technique. La séquence préparée par l'enseignant permet d'articuler projet de réalisation, choix des outils et des matériaux adaptés au projet, actions techniques spécifiques (plier, couper, coller, assembler, actionner...), organisation de l'atelier de fabrication.
On peut ainsi explorer :
- des montages et des démontages (jeux de construction, maquettes...) ;
- des appareils alimentés par des piles comme lampes de poche, jouets, magnétophones, etc. (pour d'évidentes raisons de sécurité, on prend soin de montrer aux enfants comment les distinguer de ceux qui sont alimentés par le secteur) ;
- des objets programmables.
La prise de conscience des risques occupe une place importante dans ce domaine d'activités :
- risques de la rue ou de la route (piétons et véhicules) ;
- risques de l'environnement familier proche (objets dangereux et produits toxiques) ou plus lointain (risques majeurs).

5 - Repérages dans l'espace

Se repérer dans différents espaces, s'y déplacer avec ou sans contraintes, représenter des objets localisés, coder un déplacement, utiliser les marques spatiales du langage sont des compétences qui s'acquièrent tout au long de l'école maternelle. Il ne s'agit pas seulement d'apprendre à se situer dans l'espace ordinaire. Se retrouver dans un texte, dans un document, organiser les objets d'une collection pour en maîtriser la quantité, s'assurer qu'aucun n'a été enlevé ou ajouté ou que tous ont été comptés sont autant de savoir-faire qui doivent être construits...
Les situations proposées, les problèmes à résoudre doivent, en particulier, donner à l'enfant la possibilité d'échapper à l'usage exclusif de son propre point de vue et le conduire à pouvoir adopter celui d'autrui. Ce n'est que lorsqu'il est particulièrement à l'aise dans la structuration du monde qui l'entoure et qu'il commence à pouvoir l'expliciter verbalement qu'il lui devient possible de prendre vraiment conscience de la relativité de sa position. Toutefois, il est rare que cela soit achevé dans le temps de l'école maternelle.
Pour le jeune enfant, la possibilité de situer des objets dans l'espace commence par la construction de l'image orientée de son propre corps. Il organise l'univers dans lequel il évolue en distinguant ce qui est devant ou derrière lui, ce qui est au-dessus ou au-dessous de lui, plus difficilement ce qui est à sa droite ou à sa gauche. Il complète ces repérages en opposant ce qui est loin à ce qui est près et en introduisant des descriptions dynamiques pour caractériser ce qui se rapproche de lui ou au contraire s'en éloigne, pour signifier qu'il a atteint le lieu vers lequel il se déplaçait ou qu'il a quitté celui dont il vient... La construction de l'espace propre suppose une manipulation aisée du langage qui permet d'y situer les objets et les personnes ainsi que leurs déplacements (voir "Le langage au cœur des apprentissages").
La représentation des relations spatiales reste difficile tout au long de l'école maternelle. Elle suppose en effet que l'enfant accepte une autre contrainte, celle de l'orientation de l'espace graphique. Les maquettes sont une étape importante qui précède le dessin. Il convient de multiplier les occasions de jouer avec des représentations (en se souvenant que la production d'une représentation est, dans ce cas, plus aisée que sa lecture) sans pour autant exiger des résultats pérennes.
Les activités mettant en jeu l'espace à l'école maternelle concernent également l'approche du sculpteur ou du plasticien (représentation des volumes et de leurs positions, installations), celle du peintre (représentation de la profondeur par la taille relative des objets, par l'usage des contrastes de couleur...), celle du photographe (cadrage), celle de l'écrivain (description d'espaces réalistes ou imaginaires). Elles sont autant de registres qui peuvent être explorés en liaison avec les domaines d'activités correspondants. Il en est de même pour la découverte, essentiellement par le biais de la littérature de jeunesse, de territoires lointains et inconnus.

6 - Le temps qui passe

Le temps du tout-petit est un temps cyclique, caractérisé par le retour régulier d'événements attendus, et l'on sait qu'une rupture dans ces rythmes perturbe immédiatement le jeune enfant. À l'école maternelle, il apprend à maîtriser les cycles de la vie quotidienne en les anticipant ou, au contraire, en se les remémorant. Il apprend les mots qui les désignent et qui peuvent être différents de ceux qu'on utilise dans son milieu familial. Progressivement, il sépare les événements des moments où ils se produisent et parvient à ordonner des activités très différentes les unes des autres, en fonction du moment où elles ont eu lieu.
Cette organisation temporelle de son activité se structure à partir du temps propre, celui de son énonciation, qui pose le "maintenant" et distingue par rapport à cette origine "l'avant" et "l'après" (voir dans le domaine "Le langage au cœur des apprentissages", (§3.2). Le présent prend de la consistance lorsqu'il peut devenir un "aujourd'hui" qui permet de distinguer "hier" de "demain". L'enfant entre par là dans une première appréciation des durées sociales conçues d'abord comme ce qui sépare deux événements attendus ("le jour" est ce qui sépare deux moments où il faut aller dormir, "le matin" ce qui va du lever au déjeuner, "l'après-midi" ce qui va du déjeuner à "l'heure des mamans"...). Progressivement, l'enseignant lui permet d'installer ces moments dans les jalons chronologiques du temps social (succession des moments de la journée, succession des jours de la semaine ou du mois, succession des mois de l'année). Il conduit l'enfant à relier entre eux les différents systèmes de repérage : moments de la journée et heures (une horloge permet, même avec les tout-petits, d'objectiver les durées et les repères sans cesse utilisés par l'adulte), jours de la semaine et alternance des activités scolaires (le calendrier joue ici le même rôle que l'horloge), mois et saisons, mois et vacances...
À l'occasion de chaque activité scolaire, il est important de bien marquer les scansions séparant deux moments identifiés, en les reliant aux systèmes d'organisation du temps propres à la communauté scolaire (emplois du temps, programmation) et à ceux qui sont en usage dans notre société (heure, date...). Il en est de même pour le temps qui passe. Chaque enfant doit progressivement pouvoir articuler son appréciation subjective des durées (long/court souvent référé à ennuyeux/agréable) avec des repères partageables par la collectivité (durées caractéristiques des rythmes scolaires : demi-matinée, récréation, sieste, lecture d'une histoire), puis durées mesurées par l'horloge.
On comprend l'importance de l'organisation régulière de l'emploi du temps et des rituels qui marquent les passages d'un moment à l'autre.
L'utilisation des instruments de repérage chronologique (calendriers) et de mesure des durées (sabliers, clepsydres, horloges...) est un moyen sûr pour conduire les enfants à une meilleure appréciation du temps. Leur usage régulier (rituels) est nécessaire dès la première année d'école maternelle.
D'une manière générale, il est important de considérer que la structuration du temps et celle de l'espace sont indissociables. Une part importante du sentiment de la distance, par exemple, est liée à la représentation du temps nécessaire pour aller d'un point à un autre et suppose donc que la vitesse soit prise en compte. Pour l'enfant, ces phénomènes fonctionnent longtemps comme des obstacles à une appréhension claire des réalités. Ils font partie des représentations spontanées qui doivent être questionnées en attendant d'être élucidées.
À l'école maternelle, la structuration progressive de la temporalité doit être nourrie par le récit d'événements du passé (ou par le témoignage), mais aussi par la découverte d'objets ou de réalités du passé (patrimoine). Les enfants ont encore de grandes difficultés à distinguer passé proche et passé lointain. L'essentiel reste, en l'occurrence, de leur offrir la possibilité de se donner des représentations de ce qui n'est plus et de commencer à leur permettre de prendre conscience de la différence entre événement passé et événement imaginaire. Ces éléments d'une culture transmise par la voix du maître, par le livre comme par les divers types de médias, seront organisés et structurés à l'école élémentaire.

7 - Découverte des formes et des grandeurs

Parmi les activités quotidiennes, nombreuses sont celles qui conduisent l'enfant à manipuler des objets de formes et de dimensions variées. L'examen de leurs caractéristiques permet très rapidement de se doter de catégories simples et, au début, dichotomiques permettant de les classer : petit/grand, lourd/léger, arrondi/pointu. En enrichissant les observations et en multipliant les comparaisons, l'enseignant amène les enfants à mieux distinguer divers types de critères (forme, taille, masse, contenance...) et à se livrer à des classements, des rangements. Par des jeux variés, on les conduit à élaborer des stratégies de dénomination ou de reconnaissance. Dès lors, on peut construire ou fabriquer des objets en tenant compte de ces diverses propriétés. L'approche par le toucher (par exemple, avec les yeux bandés) complète l'approche visuelle.
Ces jeux peuvent conduire à :
- la différenciation et la classification d'objets selon leur forme, en particulier en tenant compte des caractéristiques de leur contour : droit, courbe, plat, arrondi, etc. ;
- la reproduction d'assemblages de formes simples ;
- la comparaison d'objets selon leur taille, leur masse ou leur contenance.
Bien que la désignation de certaines formes soit introduite à cette occasion (en particulier : carré, triangle, rectangle, rond), l'objectif principal n'est pas l'apprentissage d'un vocabulaire mathématique.

8 - Approche des quantités et des nombres

Le bébé déjà distingue des quantités. Toutefois, lorsque l'enfant commence à parler, même s'il utilise très tôt des noms de nombres, ces derniers ne sont pas nécessairement reliés à l'idée de quantité et l'activité de dénombrement peut rester longtemps difficile.
À l'école maternelle, l'enfant peut être confronté à des problèmes portant sur des quantités. Pour des tâches de comparaison, d'égalisation, de distribution, de partage, il fait appel à une estimation perceptive et globale (plus, moins, pareil, beaucoup, pas beaucoup), plus tard à la correspondance terme à terme ou à la quantification. Il faut cependant rester prudent, en particulier avec les plus jeunes, dans la mesure où l'apparence des collections domine encore sur la prise en compte des quantités.
Progressivement, dans les diverses occasions offertes par la vie de la classe, dans les jeux ou pour résoudre les problèmes posés par le maître, l'enfant élargit l'éventail des procédures de résolution en même temps qu'il s'approprie de nouveaux outils pour dénombrer les collections d'objets :
- reconnaissance du nombre d'objets dans de petites collections, par une perception instantanée (reconnaissance directe de "trois", sans nécessairement compter "un, deux, trois") ;
- comparaison de collections à des collections naturelles (par exemple, reconnaissance de "cinq" comme quantité qui correspond à celle des doigts de la main) ou à des collections repères (nombre de places autour de la table, constellations du dé...) ;
- dénombrement en utilisant la comptine parlée qui est progressivement fixée et complétée.
À l'école maternelle, il s'agit de donner du sens aux nombres par leur utilisation dans la résolution de problèmes articulés avec des jeux, des situations vécues, mimées ou racontées oralement. Ces problèmes sont choisis pour que les nombres y apparaissent comme des outils efficaces pour :
- comparer des quantités, les mémoriser ;
- mémoriser et communiquer des informations sur les quantités, sous forme orale ou écrite, les écrits étant d'abord ceux produits par les élèves, puis les écritures chiffrées habituelles ;
- réaliser une collection ayant autant, plus ou moins d'objets qu'une autre collection ;
- comparer certaines dimensions des objets en utilisant un objet intermédiaire ;
- repérer des positions dans une liste ordonnée d'objets ;
- hiérarchiser des séries en utilisant la comptine numérique.
À la fin de l'école maternelle, l'enfant est également confronté à des problèmes où les nombres peuvent être utilisés pour anticiper le résultat d'une action sur des quantités (augmentation, diminution, réunion, distribution, partage) ou sur des positions (déplacements en avant ou en arrière). La résolution des problèmes rencontrés ne nécessite pas le recours au formalisme mathématique (+, _, =). Celui-ci sera introduit à l'école élémentaire.
Le plus souvent, à l'école maternelle, les nombres sont "dits". Leur écriture est progressivement introduite à partir des propositions des enfants dans des activités de communication. Une première correspondance est établie entre désignations orales et écritures chiffrées, par exemple en utilisant une file numérique ou un calendrier. Le nécessaire apprentissage de la suite des noms des nombres relève d'une mémorisation qui peut être aidée par le recours à des comptines chantées, mais il ne doit pas intervenir prématurément. Il faut garder à l'esprit qu'apprendre la suite orale des nombres n'est pas "apprendre à compter" et ne suffit pas pour dénombrer une quantité qui dépasse les possibilités de reconnaissance globale. La pratique du comptage nécessite, en effet, une mise en correspondance des mots ("un", "deux", "trois"...) avec les objets d'une collection, sans oubli d'aucun objet et sans compter plusieurs fois le même objet. Celle-ci ne devient possible et rigoureuse que très progressivement et suppose, en particulier, la prise de conscience du fait que le dernier mot prononcé permet d'évoquer la quantité tout entière (et pas seulement de désigner le dernier objet pointé).
L'ordre de grandeur des quantités qui interviennent dans les activités dépend à la fois des compétences travaillées et des problèmes posés. Si, dans des problèmes où, par exemple, il s'agit de déterminer le résultat d'un ajout d'objets à une collection, les quantités doivent rester modestes, dans d'autres cas (comparaison de collections, par exemple), elles peuvent être nettement plus importantes. Il appartient à l'enseignant de faire les choix appropriés aux objectifs visés.

Compétences devant être acquises en fin d'école maternelle

1 - COMPÉTENCES DANS LE DOMAINE SENSORIEL
Être capable de :
- décrire, comparer et classer des perceptions élémentaires (tactiles, gustatives, olfactives, auditives et visuelles),
- associer à des perceptions déterminées les organes des sens qui correspondent.

2 - COMPÉTENCES DANS LE DOMAINE DE LA MATIÈRE ET DES OBJETS
Être capable de :
- reconnaître, classer, sérier, désigner des matières, des objets, leurs qualités et leurs usages ;
- utiliser des appareils alimentés par des piles (lampe de poche, jouets, magnétophone...) ;
- utiliser des objets programmables.
En liaison avec l'éducation artistique, être capable de :
- choisir des outils et des matériaux adaptés à une situation, à des actions techniques spécifiques (plier, couper, coller, assembler, actionner...) ;
- réaliser des jeux de construction simples, construire des maquettes simples ;
- utiliser des procédés empiriques pour faire fonctionner des mécanismes simples.

3 - COMPÉTENCES DANS LE DOMAINE DU VIVANT, DE L'ENVIRONNEMENT, DE L'HYGIÈNE ET DE LA SANTÉ
Être capable de :
- retrouver l'ordre des étapes du développement d'un animal ou d'un végétal ;
- reconstituer l'image du corps humain, d'un animal ou d'un végétal à partir d'éléments séparés ;
- reconnaître des manifestations de la vie animale et végétale, les relier à de grandes fonctions : croissance, nutrition, locomotion, reproduction ;
- repérer quelques caractéristiques des milieux ;
- connaître et appliquer quelques règles d'hygiène du corps (lavage des mains...), des locaux (rangement, propreté), de l'alimentation (régularité des repas, composition des menus) ;
- prendre en compte les risques de la rue (piétons et véhicules) ainsi que ceux de l'environnement familier proche (objets et comportements dangereux, produits toxiques) ou plus lointain (risques majeurs) ;
- repérer une situation inhabituelle ou de danger, demander de l'aide, pour être secouru ou porter secours.

4 - COMPÉTENCES DANS LE DOMAINE DE LA STRUCTURATION DE L'ESPACE
Être capable de :
- repérer des objets ou des déplacements dans l'espace par rapport à soi ;
- décrire des positions relatives ou des déplacements à l'aide d'indicateurs spatiaux et en se référant à des repères stables variés ;
- décrire et représenter simplement l'environnement proche (classe, école, quartier...) ;
- décrire des espaces moins familiers (espace vert, terrain vague, forêt, étang, haie, parc animalier) ;
- suivre un parcours décrit oralement (pas à pas), décrire ou représenter un parcours simple ;
- savoir reproduire l'organisation dans l'espace d'un ensemble limité d'objets (en les manipulant, en les représentant) ;
- s'intéresser à des espaces inconnus découverts par des documentaires.

5 - COMPÉTENCES DANS LE DOMAINE DE LA STRUCTURATION DU TEMPS
Être capable de :
- reconnaître le caractère cyclique de certains phénomènes, utiliser des repères relatifs aux rythmes de la journée, de la semaine et de l'année, situer des événements les uns par rapport aux autres (distinguer succession et simultanéité) ;
- pouvoir exprimer et comprendre les oppositions entre présent et passé, présent et futur en utilisant correctement les marques temporelles et chronologiques ;
- comparer des événements en fonction de leur durée ;
- exprimer et comprendre, dans le rappel d'un événement ou dans un récit, la situation temporelle de chaque événement par rapport à l'origine posée, leurs situations relatives (simultanéité, antériorité, postériorité) en utilisant correctement les indicateurs temporels et chronologiques.

6 - COMPÉTENCES RELATIVES AUX FORMES ET AUX GRANDEURS
Être capable de :
- différencier et classer des objets en fonction de caractéristiques liées à leur forme ;
- reconnaître, classer et nommer des formes simples : carré, triangle, rond ;
- reproduire un assemblage d'objets de formes simples à partir d'un modèle (puzzle, pavage, assemblage de solides) ;
- comparer, classer et ranger des objets selon leur taille, leur masse ou leur contenance.

7 - COMPÉTENCES RELATIVES AUX QUANTITÉS ET AUX NOMBRES
Être capable de :
- comparer des quantités en utilisant des procédures non numériques ou numériques ;
- réaliser une collection qui comporte la même quantité d'objets qu'une autre collection (visible ou non, proche ou éloignée) en utilisant des procédures non numériques ou numériques, oralement ou avec l'aide de l'écrit ;
- résoudre des problèmes portant sur les quantités (augmentation, diminution, réunion, distribution, partage) en utilisant les nombres connus, sans recourir aux opérations usuelles ;
- reconnaître globalement et exprimer de très petites quantités (de un à trois ou quatre) ;
- reconnaître globalement et exprimer des petites quantités organisées en configurations connues (doigts de la main, constellations du dé) ;
- connaître la comptine numérique orale au moins jusqu'à trente ;
- dénombrer une quantité en utilisant la suite orale des nombres connus ;
- associer le nom des nombres connus avec leur écriture chiffrée en se référant à une bande numérique.

LA SENSIBILITÉ, L'IMAGINATION, LA CRÉATION

Le domaine "La sensibilité, l'imagination, la création" s'appuie sur deux ensembles de pratiques artistiques mettant en jeu des sollicitations sensorielles complémentaires : visuelles et tactiles pour "le regard et le geste", auditives et vocales pour "l'écoute et la voix". Les domaines "Arts visuels" et "Éducation musicale" leur font suite à l'école élémentaire.
Le jeune enfant agit avec son corps et expérimente, en les vivant, les rapports sensibles qu'il entretient avec les choses et avec le monde. L'approche sensible est un moyen d'apprendre qui ne se distingue que progressivement de l'approche rationnelle, à mesure que l'enfant apprend à mieux différencier un sentiment, une impression, un argument. Les activités artistiques entretiennent de nombreux liens avec d'autres domaines d'apprentissage qu'elles permettent de compléter ou de prolonger. Elles ne sont pas seulement des moyens d'expression et de découverte. Elles ouvrent des voies pour s'approprier des connaissances.
À mesure qu'il maîtrise mieux ses gestes, sa voix et son corps, le choix de matériaux, quelques rudiments techniques, l'enfant découvre en lui de nouvelles possibilités d'observation, d'expression, d'imagination. Les apports de l'enseignant ménagent l'ouverture au dialogue, à la comparaison, permettent l'appropriation de savoir-faire et favorisent les projets.
L'école maternelle propose une première sensibilisation artistique. La rencontre avec les œuvres et les artistes nourrit la curiosité de l'enfant et sa capacité à s'émerveiller. Elle lui apporte des repères. L'enseignant l'encourage à exprimer ses réactions face aux productions. Il l'incite à trouver des liens entre les inventions, les solutions des créateurs et ses propres tentatives. Il se familiarise avec des œuvres qu'on lui fait découvrir dans des contextes différents. Il en perçoit des aspects divers et en distingue certaines particularités. Il acquiert ainsi un début de culture visuelle et musicale.

Le regard et le geste

OBJECTIFS
L'école maternelle installe et développe chez l'enfant une pratique créative à partir de situations qui sollicitent son imagination, l'amènent à exercer sa capacité d'invention, à enrichir ses formes d'expression.
Dans les activités proposées, l'enfant explore et exerce différents langages plastiques (dessin, peinture, collage, fabrication d'objets et d'images...). Le plaisir de la découverte constitue quelquefois la seule motivation et conduit à la possibilité de tracer, de dessiner, de jouer avec des matières, d'en découvrir les caractéristiques et les qualités et d'en tirer parti. Les situations mises en place visent à faire acquérir des compétences fondamentales : ajuster ses gestes en fonction d'une intention, percevoir et reconnaître les effets plastiques obtenus, modifier et affiner son action. Ainsi l'enfant acquiert progressivement une palette de savoirs et de savoir-faire élaborée dans le va-et-vient dynamique entre jeu et effort, liberté et contrainte.
La constitution d'une première culture artistique dans ce domaine s'opère au travers des rapprochements entre les productions des élèves et les œuvres d'art introduites sous différentes formes. Ces rencontres s'appuient sur le plaisir de la découverte de l'enfant, visent à nourrir sa curiosité et son regard, à développer son intérêt. Les œuvres et les artistes proposés viennent en appui d'une expérience créative concrètement vécue. Les repères culturels permettent d'aborder l'œuvre dans son contexte, apportent des connaissances sur l'œuvre, l'artiste et sa démarche.
Les moments d'échanges donnent l'occasion d'évoquer les procédés utilisés, de constater les effets produits, d'exprimer les sensations éprouvées. Ils permettent à l'enfant d'exercer sa faculté d'observer, d'enrichir son vocabulaire, de préciser sa démarche et d'écouter d'autres manières de faire et de voir.

PROGRAMME
Les activités sont développées dans quatre directions :
- le dessin, en tant qu'activité d'expression graphique qui associe le geste et sa trace sur un support ;
- les compositions plastiques considérées comme des activités de fabrication d'objets et de manipulation de matériaux, en deux ou trois dimensions ;
- les images, abordées à travers des activités de découverte et d'utilisation de documents de natures variées ;
- les collections, conçues comme des activités de sélection et d'appropriation d'images et d'objets.
Dans la conduite de chacune de ces activités, l'expression orale joue un rôle essentiel. Par ailleurs, toutes ces activités participent déjà d'une éducation du regard.
1 - Le dessin
L'école maternelle encourage les manifestations graphiques naturelles qui accompagnent chez l'enfant la construction de soi. Traces, empreintes, tracés et dessins spontanés témoignent de l'émergence de la fonction symbolique. S'il est souvent pour le jeune enfant une expression essentiellement gestuelle et un jeu moteur, le dessin a aussi une fonction de langage (voir le domaine "Le langage au cœur des apprentissages", § 4.5). Il est langage plastique : l'enfant peut jouer à créer ses propres codes.
Le dessin est une activité graphique à part entière. Il exerce le mouvement pour produire des traces et obtenir des formes qui, associées les unes aux autres, permettent de satisfaire des intentions : jouer avec des éléments, organiser une surface, figurer. L'enfant découvre et expérimente les divers outils et procédés du dessin et les met au service de son imagination.
Tracer, dessiner sont des activités à distinguer de l'écriture proprement dite qui renvoie au langage. Cependant, les compétences perceptives motrices et visuelles exercées dans le cadre d'une démarche d'exploration graphique facilitent évidemment la maîtrise des tracés de l'écriture.
Pour les plus petits, les premiers gribouillages encouragés accompagnent la maturation de l'activité visuo-motrice. Ces tracés, accueillis par la parole de l'enseignant qui en fonde le pouvoir de communication en se gardant de toute interprétation touchant à la vie psychique de l'enfant, constituent un premier répertoire graphique qui s'enrichit très rapidement. L'adulte aide également l'enfant à dépasser les stéréotypes en favorisant les échanges et l'observation des diverses productions.
Les situations et activités proposées amènent l'enfant à :
- expérimenter divers outils, supports, médiums pour rechercher l'adaptation du geste aux contraintes matérielles ; ces expériences sont organisées comme des jeux et des investigations libres chez les plus jeunes,
- se constituer un réservoir de traces et de formes obtenues par les moyens les plus variés : dessin à main levée, dessin de réserve, frottage, empreintes, photocopie, encre, monotypes, logiciels de dessin, palette graphique, peinture, pastel, encre, feutres, crayons de couleur, fusain, etc.,
- exercer des choix motivés, matériels ou opératoires (celui d'un outil, d'une couleur ou d'un support pour les plus petits, celui d'un procédé technique, voire de l'association de plusieurs, pour les plus grands) en fonction d'une intention,
- organiser une composition plane constituée essentiellement d'éléments graphiques et à des fins expressives, dessiner pour inventer, dessiner pour imaginer des univers, des personnages, des histoires.
Le désir spontané de s'exprimer par des traces graphiques parfois combinées entre elles est fortement soutenu chez les plus jeunes. Dans l'organisation de la classe, ils trouvent les conditions temporelles, spatiales et matérielles adaptées à leurs expérimentations. Les propositions ouvertes de l'enseignant amènent progressivement l'enfant à exercer son imagination et enrichir son imaginaire.
Les ébauches sont conservées et servent parfois de supports ou de référents à des reprises, prolongements, enrichissements en vue de compositions plus élaborées.
Les élèves abordent le dessin dans des situations variées (au sol, sur table, sur plan incliné, en référence à une histoire, un objet, une émotion, en extérieur, dans la cour ou lors de sorties, etc.), constituant ainsi un ensemble de productions réunies, selon les cas, sous la forme d'un dossier, d'un cahier, d'un cédérom, ou d'un carnet de voyage.
2 - Les compositions plastiques
Au-delà des réalisations graphiques, les élèves découvrent d'autres procédés techniques d'expression, de fabrication et de manipulation des formes, en deux ou trois dimensions : peinture, papiers collés, collage en relief, assemblage, modelage, etc.
Ces procédés de recouvrement, d'agencement de masses et de matières, de fabrication d'objets et d'élaboration de volumes, entretiennent avec le dessin des liens étroits qui méritent également d'être explorés.
Ces activités permettent à l'enfant de :
- explorer et exploiter les qualités et les ressources expressives de matériaux à étaler, à modeler, à tailler, à découper, à déchirer, à éparpiller (encre, peinture, barbotine, pâte colorée, papier, pâte à papier, pâte à sel, pâte à modeler, sable, terre, bois, pierre, métal, plastique, etc.) ;
- transformer des matériaux en ajustant progressivement son geste en fonction de leurs qualités physiques et plastiques ;
- combiner des formes, des couleurs, des matières et des objets ;
- découvrir et exploiter les éléments de son environnement quotidien pour leurs qualités plastiques ;
- surmonter les obstacles rencontrés et en mémoriser l'expérience vécue, qu'elle soit délibérée ou fortuite ;
- réaliser une composition en plan ou en volume, à partir d'une consigne, d'un désir d'expression, d'un projet de figuration, etc.
Pour les plus petits, les jeux d'exploration et de tâtonnements propices à l'étonnement et à l'émerveillement doivent être privilégiés. Il s'agit tout simplement d'éprouver le plaisir de faire, de voir et de se voir faire. Tout en veillant à préserver cette dimension, les situations d'apprentissage conçues par l'enseignant pour les plus grands placent peu à peu l'élève face à des difficultés adaptées, qu'il surmonte presque naturellement dans la dynamique de la manipulation. Il engendre des formes nouvelles qu'il organise en ensembles progressivement plus cohérents, plus maîtrisés.
3 - L'observation et la transformation des images
Au moment où l'enfant est réceptif et motivé, il est important de lui donner à voir des images variées, d'arrêter son regard pour le temps de l'observation, de l'aider à préciser ce qu'il perçoit. Il doit trouver dans l'univers qui lui est offert des repères évocateurs (susceptibles de créer des émotions) et des supports culturels qui stimulent sa propre expression. L'univers des images qui l'entourent entre en résonance avec son propre monde d'images personnelles. Les explorations qu'il conduit lui donnent l'occasion de capitaliser ses expériences visuelles et d'exercer sa propre capacité à produire des images.
Les activités proposées abordent des connaissances propres aux images appréhendées selon leurs caractéristiques, leurs supports et leurs fonctions. Une grande diversité d'images est offerte et utilisée : les photographies liées à l'expérience vécue en classe, les affiches et les images prélevées dans l'environnement, les dessins et les illustrations d'albums, les reproductions d'œuvres (cf. liste d'œuvres), les images documentaires, les fictions (images fixes ou animées), les différentes images de l'écran de l'ordinateur.
Progressivement, les élèves sont amenés à :
- retrouver la provenance de certaines images ;
- utiliser un vocabulaire élémentaire de description d'une image ;
- comparer diverses images ;
- utiliser une image ou seulement une partie pour en réaliser une nouvelle.
Puisant dans la diversité renouvelée des images de la classe, l'enseignant accompagne l'enfant dans ses découvertes et sa compréhension du monde. Cette approche peut se développer dans une dimension narrative (les albums si souvent rencontrés permettent d'en explorer les multiples possibilités). Elle doit aussi se développer dans une dimension plastique qui donne à l'image sa puissance propre et son expressivité. Dans l'un et l'autre cas, l'observation, la manipulation, la production sont sans cesse sollicitées.
4 - Les collections et les musées
L'école doit donner à l'enfant l'occasion de se familiariser avec les images et les objets qui présentent une dimension affective, ou esthétique. Cette fréquentation s'appuie d'abord sur les motivations réelles de l'enfant pour conserver des images, des objets, les traces d'un événement, etc. L'enseignant lui fournit les supports et les moyens qui lui permettent de commencer une collection personnelle et de l'enrichir. Il l'encourage à exprimer ce qui motive son choix et son envie de conserver.
Une collection, un musée de classe peuvent être constitués à partir d'un projet ou en lien avec les moments exceptionnels de la vie de la classe. Cette collection est l'occasion de faire exister concrètement une culture commune à l'ensemble du groupe. Ces œuvres qui sont données à voir et à comprendre permettent de faire les liens avec les réalisations des enfants. Elles ménagent l'ouverture à la diversité des expressions artistiques, des techniques, des formes, et aux cultures du monde.
Ces activités incitent l'enfant à :
- choisir une image ou un objet pour l' intérêt qu'il lui reconnaît ;
- réunir ces images et ces objets de façon organisée dans un ensemble personnel ou collectif ;
- les réutiliser dans le cadre d'un projet individuel ou d'un projet de classe.
Les albums "d'images à parler" peuvent être fabriqués avec les enfants. Ils sont des instruments essentiels de conservation et de mise en ordre d'images qui sont parcourus et commentés dans le cadre d'échanges en petits groupes ou lors de présentation à la classe.
Un coin de la classe peut accueillir ponctuellement une petite exposition. Un meuble peut être consacré à la collecte et à la conservation de quelques objets "précieux". Des albums personnels (photographies, cartes postales, timbres, dessins spontanés...) se constituent parallèlement aux collections de classes. Des moments d'échanges, de discussion sont ménagés autour de ces collections lors de leur présentation ou de l'introduction d'un nouvel objet.
5 - Les activités de création et le langage oral
L'activité sensorielle s'appuie sur le langage qui aide à nommer les sensations et à établir progressivement des relations entre elles. Le langage oral qui accompagne l'action permet la mise en mots et l'objectivation de l'expérience. L'enseignant aide l'enfant à préciser son expression, en engageant le dialogue et en multipliant les interactions. Il amène chaque enfant à :
- évoquer des faits, des sensations en relation avec l'expérience ;
- présenter et parler de son dessin, de sa réalisation, d'un objet ou d'une image de son album et du musée de classe ;
- exprimer ses propres sensations devant une image, une œuvre et écouter celles de l'autre.
Les activités de création offrent à l'élève des situations où s'associent les désirs de faire, voir, penser et dire.

Compétences devant être acquises en fin d'école maternelle
Être capable de :
- adapter son geste aux contraintes matérielles (outils, supports, matières) ;
- surmonter une difficulté rencontrée ;
- tirer parti des ressources expressives d'un procédé et d'un matériau donnés ;
- exercer des choix parmi des procédés et des matériaux déjà expérimentés ;
- utiliser le dessin comme moyen d'expression et de représentation ;
- réaliser une composition en plan ou en volume selon un désir d'expression ;
- reconnaître des images d'origines et de natures différentes ;
- identifier les principaux constituants d'un objet plastique (image, œuvre d'art, production d'élève...) ;
- établir des rapprochements entre deux objets plastiques (une production d'élève et une reproduction d'œuvre par exemple) sur le plan de la forme, de la couleur, du sens ou du procédé de réalisation ;
- dire ce qu'on fait, ce qu'on voit, ce qu'on ressent, ce qu'on pense ;
- agir en coopération dans une situation de production collective.

La voix et l'écoute

OBJECTIFS
La voix et l'écoute participent à la fois des activités corporelles et du langage. Très tôt, elles apportent à l'enfant des moyens de communication et d'expression de soi. De plus, les capacités auditives et vocales gardent chez le jeune enfant un extrême plasticité. Aussi, à l'école maternelle, les activités d'éducation musicale visent-elles à constituer prioritairement la voix et l'écoute comme instruments de l'intelligence sensible.
Il s'agit d'abord de reconnaître les capacités de l'enfant face au monde sonore, de les préserver et de les enrichir. Il s'agit, dans le même temps, de nourrir et faire vivre son imaginaire musical personnel comme source de plaisir au travers de démarches d'appropriation, d'invention et de confrontation à la diversité des univers musicaux.
Les activités à mobiliser pour répondre à ces deux visées sont essentiellement corporelles. Elles impliquent en permanence l'audition, la voix, le mouvement et le geste.
Chaque séquence est organisée en faisant alterner l'écoute, la production imitative, les reprises, les transformations et les inventions. C'est dans ce cadre d'appropriation active que l'enfant, par ses découvertes successives, commence à s'approprier des univers musicaux diversifiés.
Ces activités apportent aussi une contribution forte à des apprentissages transversaux. La langue française ou les autres langues rencontrées dans l'école (voir le domaine "Le langage au cœur des apprentissages", § 4.4 et 7.1) offrent les matériaux de nombreux jeux vocaux dans lesquels le travail du rythme, de l'accentuation, de la prosodie, de l'articulation conduit à une première conscience de la complexité des caractéristiques sonores du langage. Mémoire auditive, formes variées d'attention, rapports vécus au temps et à l'espace sont toujours également présents au cœur des activités conduites. Enfin par le chant l'enfant éprouve concrètement son sentiment d'appartenance au groupe, comprend les exigences d'une production commune et expérimente son autonomie par les rôles différenciés qu'il assume dans une organisation d'ensemble.
Les activités, pour la clarté de l'exposition, sont présentées sous trois rubriques : activités vocales, activités d'écoute, activités avec des instruments. Les activités dansées, bien qu'à la croisée de l'éducation artistique et de l'éducation corporelle, font traditionnellement l'objet d'une présentation dans le domaine "Agir et s'exprimer avec son corps".

PROGRAMME
1 - Activités vocales
1.1 Acquisition d'un répertoire de comptines et de chansons
Le répertoire est enrichi, année après année. Il comporte des chansons en français, en langue régionale ou en langue étrangère. Il est issu de la tradition orale enfantine mais fait aussi appel aux propositions d'auteurs contemporains.
L'enseignant privilégie les chants à phrases musicales courtes, à structure simple, d'étendue restreinte, évitant de trop grandes difficultés mélodiques et rythmiques. Jeux de doigts et jeux de nourrice sont abondamment utilisés avec les plus petits.
L'apprentissage et la mémorisation se font selon des procédures que précise le document d'application. Elles supposent un travail de reprise quotidien. L'enfant chante dans le cadre de séances dirigées, mais aussi pour le plaisir partagé, en accompagnement d'autres activités comme pour ponctuer le déroulement de la journée.
1.2 Jeux vocaux
Jouer avec sa voix permet de découvrir la richesse de ses possibilités et de construire les bases de la future voix d'adulte parlée et chantée en évitant qu'elle ne se réduise trop rapidement à des usages courants et restreints. L'exploration ludique de la voix combinée à des jeux corporels en actualise toutes les possibilités expressives et est l'occasion de premières écoutes comparatives.
Ils peuvent porter sur :
- des bruits, cris, éléments sonores d'environnements de la vie quotidienne, qu'on imitera ou transformera ;
- des éléments musicaux enregistrés, dont ceux utilisés dans les évolutions et jeux dansés ;
- les matériaux parlés et chantés de poèmes, comptines, "formulettes", chansons issus de différentes cultures.
Un texte parlé, récité, chanté ­ poésie, chanson ou comptine ­ prend vie s'il est rythmé, si les mots, les phrases ont été explorés par des jeux sonores, des essais de respirations et des placements variés dans l'espace. Il se mémorise ainsi plus facilement, surtout en y ajoutant gestes et mimiques d'accompagnement.
1.3 Invention de chants et productions vocales
Il s'agit de nourrir par un travail de création des projets d'expression plus spécifiques, plus ambitieux (sonorisation d'albums, de bandes dessinées, de poèmes, activités dramatisées multiples...).
À l'école maternelle, la chorale reprend et amplifie dans le cadre de l'école le travail de chaque classe. Elle crée des interactions entre enfants d'âges différents et place chacun en situation de représentation. Ce sont autant de facteurs qui fortifient les capacités et le plaisir de chanter ensemble. C'est aussi l'occasion, pour les enseignants, de construire des projets collectifs avec, éventuellement, le concours de partenaires. Il conviendra toutefois de ne pas annuler ces bénéfices par la réunion d'un trop grand nombre d'élèves.
2 - Activités d'écoute
Les activités d'écoute visent prioritairement à développer la sensibilité, la discrimination et la mémoire auditives. Elles concernent l'écoute intérieure comme l'imaginaire sonore. Elles posent également les bases des premières références culturelles.
La mise en œuvre pédagogique s'organise autour de deux pôles :
- les temps d'écoute répétés et intégrés à toute séance dirigée qui articule dans des alternances et combinaisons variées : écouter, chanter, jouer, reproduire, évoluer, inventer, etc. (ces divers moments, indispensables à toute progression des réalisations, doivent être mis en œuvre dans chaque séquence) ;
- les temps d'écoute correspondant à des événements plus émotionnels et esthétiques : écoute pour le plaisir et non précisément finalisée (suite du conte, retour au calme, ponctuation entre activités) ; écoute en concerts, rencontres, spectacles, découverte de musiques nouvelles.
Au travers de l'éventail de ces moments très régulièrement offerts, l'enfant mémorise des formes sonores, des segments particuliers, isole des sons, les compare, les reproduit, les identifie. Il commence par percevoir les contrastes forts, puis progressivement distingue des écarts moins marqués ; il découvre que les silences ont une valeur musicale. Ces divers éléments sont souvent repris pour être mémorisés.
- Au travers des variantes de timbre et d'intensité d'abord, de durée et de hauteur ensuite, l'enfant apprend progressivement à caractériser ces éléments de base par la comparaison et, souvent, par l'imitation vocale ou gestuelle. Il acquiert avec ces notions vécues un lexique simple mais précis ou des formules imagées qui lui permettent de désigner, avec des qualificatifs de plus en plus nuancés, les caractéristiques d'un extrait. L'enseignant conduit la classe à effectuer des rapprochements, des comparaisons ; il justifie les reprises d'écoute, donne des explications brèves en réponse au questionnement de l'enfant.
En fin de scolarité maternelle, des activités de codage, parfois appuyées sur un répertoire de signes gestuels, prolongent certains moments d'écoute sélective.
Les activités d'écoute portent sur :
- l'écoute du monde sonore : l'enfant découvre des environnements sonores variés en situation ou enregistrés ("paysages sonores", bruitages) ; il s'essaie à localiser les sources sonores, fait des hypothèses sur leurs causes, sur les objets, les voix, les matériaux et les gestes qui peuvent les produire ;
- l'écoute des productions de la classe ou d'autres classes : l'enfant est soit auditeur en direct, soit auditeur d'enregistrements (émissions vocales, textes dits et chantés, percussions corporelles, usage d'instruments et d'objets sonores) ;
- l'écoute d'extraits d'œuvres musicales d'origines les plus variées possible (époques, styles, genres, pays, cultures) ;
- l'écoute, chaque fois que c'est possible, de musique vivante : musiciens invités à l'école, concerts, prestations d'élèves d'école élémentaire, de collège ...
L'enseignant accueille d'abord toutes les réactions que l'enfant mobilise en situation d'écoute. Les premières sont des réactions corporelles rythmiques pendant l'audition, irrépréssibles et indispensables chez les plus jeunes. Les déplacements et l'imitation (parlée, jouée ou chantée) sont ensuite utilisés.
L'expression verbale spontanée, puis rapidement dialoguée avec le maître, fait prendre conscience de la diversité des impressions personnelles, mais aussi parallèllement de la prégnance de certains éléments, à terme repérés par tous. Sans censure de ses réponses corporelles, guidé de façon répétée et progressive, l'enfant découvre ainsi les composantes rythmiques (pulsation, tempo, cellules courtes...) et apprend à les manier. Il repère des phrases musicales, les couplets et les refrains, certains des instruments utilisés. La réalisation de chorégraphies reste une activité doublement privilégiée : elle sollicite de façon corporellement intégrée les différents niveaux d'écoute, elle permet d'expérimenter en même temps les bases d'un langage corporel.
Tous ces éléments musicaux agis, vécus, repérés, identifiés et réincorporés peuvent, dès lors, mieux nourrir les activités d'expression, de symbolisation et de création, tout comme les capacités à comprendre des univers musicaux nouveaux.
3 - Activités avec des instruments
Elles sont directement liées à l'évolution des possibilités gestuelles de l'enfant et, surtout, au plaisir de la découverte de sources sonores les plus variées. On peut orienter ces activités dans de multiples directions :
- recherche exploratoire des possibilités sonores d'objets variés et de percussions corporelles ;
- expérimentation de gestes en vue de produire ou reproduire des sons, créer des séquences originales ;
- utilisation comparée d'instruments simples en vue de la recherche d'effets particuliers, élaboration de "familles" d'instruments à partir des effets constatés ;
- traduction en gestes instrumentaux de réactions corporelles spontanées, puis élaborées ;
- reproduction et invention (notamment dans le domaine rythmique) ;
- combinaison progressive des percussions corporelles et instrumentales avec les comptines parlées, les jeux chantés, les évolutions et les chants.
Ces activités développent les capacités d'écoute et d'attention, apprennent à mieux maîtriser la pulsation, le rythme, les nuances, et enrichissent les possibilités d'interprétation et d'invention. L'enfant élargit ainsi ses réactions personnelles à l'écoute de musiques variées, et commence à tenir des rôles alternés dans une situation de groupe.

Compétences devant être acquises à la fin de l'école maternelle
- Avoir mémorisé un répertoire varié de comptines et de chansons ;
- interpréter avec des variantes expressives un chant, une comptine, en petit groupe ;
- jouer de sa voix pour explorer des variantes de timbre, d'intensité, de hauteur, de nuance ;
- marquer la pulsation corporellement ou à l'aide d'un objet sonore, jouer sur le tempo en situation d'imitation ;
- repérer et reproduire des formules rythmiques simples corporellement ou avec des instruments ;
- coordonner un texte parlé ou chanté et un accompagnement corporel ou instrumental ;
- tenir sa place dans des activités collectives et intervenir très brièvement en soliste ;
- écouter un extrait musical ou une production, puis s'exprimer et dialoguer avec les autres pour donner ses impressions ;
- utiliser quelques moyens graphiques simples pour représenter et coder le déroulement d'une phrase musicale ;
- utiliser le corps et l'espace de façon variée et originale en fonction des caractéristiques temporelles et musicales des supports utilisés ;
- faire des propositions lors des phases de création et d'invention, avec son corps, sa voix ou des objets sonores.

Sommaire de l'annexe
Sommaire du Hors série
B.O. hors série n° 1 du 14 février 2002

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http://www.education.gouv.fr/bo/2002/hs1/maternelle.htm