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Grenelle de l'Education [Compte rendu d'atelier] Ecoute et proximité : séance 3 - Reconnaissance

L’incubateur du Grenelle de l’Éducation permet une concertation large avec la société civile, sous la forme d’ateliers associant des représentants de la communauté éducative. Consultez le compte rendu de l'atelier Écoute et proximité, séance 3, reconnaissance, 18 novembre 2020.

Introduction

Aziz JELLAB, secrétaire général de l’atelier, remercie les participants ayant versé des contributions depuis la précédente séance, notamment la description d’expériences menées en différents lieux du territoire. Il propose que Daniel Pennac introduise l’atelier en revenant sur la question de la solitude des enseignants.

Daniel PENNAC, président de l’atelier, évoque son grand-oncle Jules Pennachioni, qui avait une façon particulière de créer du lien dans des villages reculés de la Corse montagneuse : il allait chercher les élèves directement dans les champs, là où ils étaient obligés par leur père de travailler, plutôt que d’aller à l’école, et parfois les installait même chez lui, en disant au père : « tu auras ton petit lorsqu’il aura son certificat d’étude ». En dépit de ces manières, l’oncle Pennachioni a fait fonctionner l’ascenseur social durant plusieurs années, certains de ses « élèves » étant même devenus des cadres supérieurs au service de la Nation. Certes, l’école n’est plus celle de Pagnol, comme l’ont souligné plusieurs participants. Les enfants que les hussards de la République arrachaient au champ, à la mine et au travail forcé, grâce à de grandes voix qui les avaient précédés (Hugo en France, Dickens en Angleterre, Gorki en Russie…) ont en tout cas largement profité de cet ascenseur social jusqu’à la fin des Trente Glorieuses. Une rupture de lien social s’est alors produite et accentuée au fil du temps entre l’école et la population. Il faut dire que l’enfant lui-même a considérablement changé depuis l’oncle Jules : d’enfant sauvé de l’esclavage, il est devenu client d’une société marchande qui s’adresse plus souvent à lui en tant que tel que pour en faire un élève avisé. Il faut ajouter à cela que la France d’aujourd'hui, dont les populations les plus démunies sont reléguées au énième cercle de la banlieue, n’a plus grand-chose à voir avec celle des champs et des usines, ce qui a aussi contribué à distendre le lien avec l’école.

Daniel PENNAC se rend souvent dans des établissements où les enseignants et les équipes éducatives ont à cœur de recréer le lien social avec la population environnante. Pour ce faire, ils créent de la culture et l’exportent immédiatement autour d’eux. Il a par exemple été invité, en 2012, à Digne, par des professeurs ayant fait travailler leurs élèves sur un des livres de Daniel PENNAC. La directrice de ce lycée technique organisait une fête de fin d’année de trois jours. Lorsqu’elle se présentait en classe, dès les premiers jours de l’année, elle disait : « commençons par les choses sérieuses, nous allons dès maintenant préparer la fête de fin d’année ». Chacun croyait entendre une plaisanterie. Cette fête était pourtant bien préparée tout au long de l’année et elle était prodigieuse. C’était une production culturelle (musique, arts plastiques, architecture, architecture végétale, théâtre, écriture…). Les parents y étaient conviés, de même que leurs amis, et Daniel PENNAC y a vu défiler des parents extrêmement fiers de la production de leurs enfants. Il se dit convaincu que tous les établissements scolaires, en France, dans le primaire et le secondaire, devraient être dotés d’une troupe de théâtre, car il n’y a pas d’activité plus fédératrice des élèves et des enseignants. Outre l’apprentissage du texte, le théâtre implique la mise en scène, la construction des décors, la confection des costumes, la gestion économique du projet, la communication autour de celui-ci, la musique, la mise en œuvre technique… Une pièce fédère ainsi un grand nombre de compétences mobilisées vers un but partagé. C’est ce projet commun à propos duquel Daniel PENNAC s’interroge systématiquement lorsqu’il visite un établissement scolaire, afin que les enfants ne soient plus seulement des clients de la société marchande. Le fait est que le premier jour où un téléphone portable a été autorisé à entrer dans une classe, le moyen a été donné aux élèves de sortir de la classe en s’y asseyant. Daniel PENNAC s’étonne qu’il n’y ait pas eu de combat sur ce point. Il dit même en avoir été sidéré, même s’il n’avait pas évoqué cette question jusqu’à ce jour. La création de chorales par le ministère de l’Education nationale constitue une autre façon de créer du lien, note-t-il enfin.

Virginie GOHIN, responsable des ressources humaines, témoigne de la mise en œuvre d’une nouvelle approche en matière de ressources humaines, née d’une demande du ministre Jean-Michel Blanquer adressée aux académies en 2018 : être plus à l’écoute des personnels et leur proposer un accompagnement personnalisé par une gestion des ressources humaines de proximité. Cela s’est fait par une expérimentation, ce qui signifie que les académies ont été libres des formes de réponse à la commande afin d’adapter l’offre institutionnelle à la configuration de chaque territoire. Cette initiative repose sur plusieurs piliers :

  • Une gestion plus qualitative des ressources humaines et la création d’un écosystème : tous les acteurs participant à l’accompagnement des personnels doivent pouvoir, autour du directeur des ressources humaines de chaque académie, œuvrer en synergie pour fournir cet accompagnement au plus près des personnels ;
  • Une culture RH commune ;
  • L’association de tous les acteurs participant à l’accompagnement des personnels (y compris les inspecteurs, chefs de service, personnels de santé et les personnels chargés d’accompagner les personnes en situation de handicap).

L’objectif est de fournir une première écoute et un premier niveau de traitement. Le défi consiste à allier la proximité à la volumétrie d’un million de personnels. Le ministère a créé en juin 2019 en son sein deux structures transversales dédiées à l’accompagnement des personnels, l’une au sein de la DGRH et l’autre au sein de la direction générale chargée de l’enseignement scolaire. 

Une première étape a consisté à demander aux académies d’identifier des conseillers RH de proximité, chargés de réaliser des missions d’accompagnement pouvant être classées en quatre catégories : l’accompagnement individuel des personnels et de leur orientation, l’écoute des personnels et le soutien aux personnels en difficulté, un appui de premier niveau aux managers de proximité (inspecteurs, chefs d’établissement) et une collaboration avec les bassins d’emploi locaux (volet le moins développé pour l'instant). Ce cadrage a été construit avec les organisations syndicales et fait l’objet de présentations régulières aux Comités techniques du ministère.

Le dispositif s’appuie aujourd'hui sur un peu plus de 300 conseillers RH de proximité, répartis dans l’ensemble des académies. Ce sont, dans 64 % des cas, des personnels ayant un profil administratif, ce qui répond à une commande initiale (faire en sorte que ces personnels soient au plus près de ceux qui allaient les solliciter). Il y a en moyenne trois conseillers RH de proximité par département dans la configuration actuelle du dispositif.

Le nombre de sollicitations, d’environ 3 000 en novembre 2019, est en hausse constante depuis le lancement du dispositif et a atteint 24 000 sollicitations en juillet 2020. Ce nombre demeure certes modeste, convient Virginie GOHIN, dans la mesure où il faut s’assurer de la possibilité de répondre à toutes les demandes sans les décevoir. Il faut d'ailleurs saluer la créativité des académies et notamment celle de l’académie de Lyon, qui a créé l’outil numérique proxiRH, que le ministère s’attache à faire évoluer afin qu’elle réponde encore mieux aux demandes des agents, en tirant parti des avantages du numérique pour faciliter la prise de rendez-vous avec les conseillers RH de proximité mais aussi permettre un suivi individuel des demandes.

Le ministère a veillé à former les acteurs prenant en charge cette mission d’accompagnement, car cette mission ne s’improvise pas. Aussi a-t-il mis en place une formation certifiante d’une durée de sept mois, mise en œuvre à l’Institut des Hautes Etudes de la Formation. Certaines académies ont mis un agenda en ligne afin de rendre on ne peut plus facile la prise de rendez-vous, par des personnels, avec un conseiller RH de proximité. 

Les demandeurs sont, dans 80 % des cas, des femmes. 66 % d’entre eux ont plus de 40 ans et 27 % ont 50 ans et plus. 80 % des demandes émanent de personnels enseignants (42 % de professeurs du second degré et 38 % de professeurs des écoles).

Les demandes exprimées portent pour une part importante sur l’accompagnement d’un projet professionnel (39 %), devant les difficultés professionnelles (17 %), des raisons de santé (16 %) ou encore l’aide à la constitution de dossier de candidature ou de mobilité (15 %). Dans 67 % des cas, une information individuelle et collective a été apportée au demandeur. Dans 27 % des cas, celui-ci a été orienté vers un interlocuteur au sein de l’Institution (par exemple un inspecteur) ou hors de celle-ci.

Une enquête nationale a été lancée auprès des usagers afin d’adapter le dispositif aux besoins. Certains personnels interrogés saluent une écoute centrée sur leur demande, sans chercher à les influencer. D’autres disent avoir été confortés dans leurs choix par les informations reçues. De bonnes pratiques se dégagent d'ores et déjà du côté des académies, par exemple la création de DRH de proximité (qui coordonnent l’ensemble des acteurs RH) et la création de divisions de l’accompagnement ou encore la formation à l’accompagnement de formateurs que les académies ont certifiés.

Il s’agit maintenant de créer un véritable écosystème de l’accompagnement personnalisé, sur la base d’une feuille de route RH de chaque académie. Outre la poursuite de la professionnalisation des acteurs, deux enjeux majeurs sont d'ores et déjà identifiés pour le ministère : valoriser les talents, reconnaître la formation et l’enrichissement des compétences des enseignants, d’une part ; construire des parcours professionnels (qui ne seront pas nécessairement linéaires) d’autre part.

Échanges

Une représentante du collège syndical souligne que les enseignants passent beaucoup de temps à travailler dans leur classe et hors de celle-ci, dans l’école. Il leur est souvent difficile de se rendre hors de l’école. Ces contraintes, en matière de gestion du temps et de l’espace, sont particulièrement prégnantes dans le premier degré. 

Un autre représentant du collège syndical souligne le sentiment de protection que doivent ressentir les enseignants et qui appelle un travail à réaliser par l’Institution vis-à-vis des parents d’élèves : il faut que ceux-ci puissent suivre la scolarité de leurs enfants. Il ne doit pas y avoir d’interférence ni de situation dans laquelle les parents se sentiraient comme des professionnels, au point de remettre en cause des pratiques pédagogiques et d’être tentés de sortir de leur place pour empiéter sur celle de l’enseignant. 

Aziz JELLAB rappelle que la situation de crise ne relève pas seulement des acteurs de l’Education nationale : d’autres acteurs sont en jeu, notamment l’ARS (Agence régionale de Santé) et le préfet. Il note aussi que l’on confond parfois le contrôle et l’évaluation. Celle-ci implique une forme d’accompagnement et se met en œuvre selon une logique distincte de la relation hiérarchique.

Un représentant du collège syndical se dit interpellé par plusieurs points de la présentation de Mme Gohin qui lui semblent devoir être pris en compte afin de continuer à perfectionner cet outil. Il s’agit d'abord de la formation et du recrutement des conseillers RH de proximité. Les critères sont manifestement très différents d’une académie à l’autre quant aux profils recrutés pour cette fonction et ce participant se demande si une uniformisation des profils sera recherchée à l’échelle nationale. Il juge par ailleurs indispensable de redonner confiance aux enseignants afin que ceux-ci s’emparent des outils institutionnels qui leur sont proposés. Pour l’application du protocole sanitaire et de continuité pédagogique, par exemple, l’Institution a privilégié une logique de contrôle a priori. Les établissements ont dû demander l’autorisation au rectorat d’appliquer telle ou telle organisation, alors que le ministère pourrait faire confiance à l’échelon de proximité en considérant que le collectif de l’établissement peut mettre en place une organisation pédagogique satisfaisante pour les élèves et pour les personnels (en fonction des contraintes définies au plan national), sans contrôle a priori. 

Virginie GOHIN précise que plutôt que de rechercher une uniformisation des profils, l’Institution s’est plutôt attachée à diversifier la formation proposée afin qu’elle tienne compte de la diversité des profils recrutés selon les académies. Plus largement, l’objectif est désormais d’enclencher un cercle vertueux : proposer un service qui inspire confiance (ce qui suppose d’être efficace) par la qualité des réponses apportées et ainsi redonner confiance aux enseignants.

Aziz JELLAB relève que, pour initier la démarche, il faut être informé de cette possibilité. L’expérience montre aussi que lorsqu’un personnel soumet une demande écrite, d’autres choses sont évoquées en entretien, ce qui doit être pris en compte d’emblée pour entendre l’intégralité de la demande exprimée par les personnels. 

Un représentant du collège syndical dit avoir été intéressé par l’exposé de solutions pouvant être proposées aux enseignants, d’autant plus que de nombreux enseignants se sont retrouvés « sinistrés » suite à la réforme de transformation de la voie professionnelle. Néanmoins, les solutions qui leur ont été proposées se sont avérées applicables. Il leur a par exemple été proposé de changer de discipline, à ceci près qu’il n’y avait pas de place dans ces disciplines. Dans certains cas, une certification leur était proposée, alors que la plupart d’entre eux ne répondaient pas à l’une des conditions requises (avoir une formation initiale de niveau Bac+3). 

Virginie GOHIN précise que la solution ne reposera pas sur les conseillers RH de proximité dans le cas de telles transformations au travers desquelles le ministère fait évoluer une filière de formation : la responsabilité d’accompagnement des personnels repose alors sur l’Institution.

Un représentant de l’encadrement souligne que dans la plupart des académies, les conseillers RH de proximité se déplacent vers les établissements et les écoles. Le nombre de personnels représente une difficulté, à l’échelle de l’Institution, dès lors que celle-ci souhaite instaurer un dialogue de proximité avec chacun. D’aucuns pourraient craindre que la création d’une interface telle que proxiRH ne dépersonnalise la relation mais il s’agit d’un outil de prise de contact, après lequel une personne physique prend immédiatement le relais pour écouter les personnels et leur apporter des réponses. L’Institution n’est d'ailleurs qu’aux débuts de l’élaboration de ces réponses, y compris dans la prise en compte des projets professionnels des personnels, à moyen et long terme. Chaque fois qu’une réponse négative devra être apportée dans un premier temps, elle ne devra pas être synonyme d’un blocage : il faut pouvoir expliquer à l’enseignant pourquoi son projet ne peut être mis en œuvre immédiatement tout en continuant d’y travailler. Ce participant se dit frappé par la diversité des personnels ayant répondu à l’enquête lancée sur la GRH de proximité. Il note enfin que le développement de ce réseau RH de proximité élargira les perspectives de développement professionnel pour un certain nombre d’agents. Il s’agit maintenant de mailler l’ensemble du territoire avec la juste densité pour être en mesure de répondre à chacun.

Virginie GOHIN souscrit à ces constats et souligne qu’on ne peut construire ce dispositif sans être proche des académies qui le bâtissent. L’expérimentation a été conduite avec l’aide des personnels, sur la base des freins qu’ils avaient identifiés, ce qui constitue une dimension particulièrement importante car c’est là le premier gage de confiance de la part de l’Institution.

Un représentant du collège syndical souhaite savoir si la mission des conseillers RH de proximité s’ajoute à leur charge de travail habituelle.

Virginie GOHIN précise ne pas avoir évoqué la question de la quotité de travail de cette mission. C’est un point identifié comme un axe de progrès car il paraît difficilement envisageable qu’un conseiller ne consacre que 20 % de son temps à sa mission d’accompagnement (ce qui est aujourd'hui le cas d’environ 50 % d’entre eux). Aussi le ministère s’efforce-t-il d’inciter les académies à augmenter la quotité de travail des conseillers, plutôt que de multiplier leur nombre, afin qu’ils puissent s’y consacrer pleinement et construire leur légitimité. 

La mobilisation du CPF (compte personnel de formation) est fortement valorisée dans le nouveau schéma directeur de la formation des personnels. Ce schéma demande aux académies de propose une formation qui soit davantage dans une logique de demande que d’offre, de manière à casser certaines routines selon lesquelles l’Institution offrait certaines formations qui n’intéressaient pas toujours les professeurs. Un troisième axe de ce schéma directeur, demande aux académies de consacrer 10 % à 20 % de leurs crédits délégués à la formation pour répondre aux demandes de formation des agents, notamment dans le cadre du CPF. Cette nouvelle politique de formation a été engagée en septembre 2019 et son bilan n’a pas encore été tiré. Il apparaît d'ores et déjà que certaines académies ont engagé plusieurs campagnes de CPF dans l’année, ce qui semble un signe positif. Des budgets qui étaient peut-être consacrés à l’offre de formation devront désormais être mobilisés selon une logique différente (de réponse à la demande), ce qui ne sera pas anodin dans l’évolution du fonctionnement du ministère. 

Un représentant des élus s’interroge quant à la façon dont le ministère entend traiter la question de la transition de carrière, en particulier autour de l’âge de 40 ans.

Virginie GOHIN convient que les personnes que l’Institution accueille aimeraient pouvoir bénéficier de temps variés au sein de leur trajectoire d’enseignant. Le ministère souhaite séquencer le long chemin de l’enseignement afin de lutter contre l’usure qui peut se faire jour, s'agissant d’un métier épuisant. Il a aussi lancé une réflexion sur la fin de carrière, étant entendu que des professeurs expérimentés pourraient apporter énormément à de jeunes collègues ou à des professeurs ressentant un sentiment d’usure, qui pourraient être épaulés à des moments cruciaux de leur parcours.

Aziz JELLAB confirme le caractère crucial de ce chantier. L’élargissement des missions pourrait aussi constituer un vecteur de reconnaissance. 

Pistes de réflexion

Aziz JELLAB rappelle que les deux séances précédentes ont mis en exergue des questions relatives à la reconnaissance du travail, la prise en considération de l’engagement des personnels, la nécessité de favoriser un accompagnement durant la carrière de manière régulière ou encore la formation que les personnels pourraient demander, étant entendu que cette formation ne devrait pas nécessairement être liée au métier et pourrait leur ouvrir d’autres horizons. Il a identifié, sur cette base, un certain nombre d’idées-clés dont l’atelier pourrait discuter :

  • L’aide de proximité à apporter aux personnels, en fonction des besoins identifiés (accueil, accompagnement, carrière, identification de besoins spécifiques nés du confinement dans le contexte de crise sanitaire) ;
  • La nécessaire implication des personnels d’encadrement (chefs d’établissement, corps d’inspection, directeurs d’école, CPC), notamment du point de vue de l’animation et des techniques d’encadrement et de gestion des équipes
  • La place à donner aux pairs et aux collectifs professionnels au sein des écoles et EPLE ;
  • Les moyens à privilégier pour le repérage des bonnes pratiques et leur valorisation ;
  • L’évolution possible vers un modèle « horizontal » de GRH, permettant d’établir un lien direct avec les acteurs ;
  • Les leviers à identifier et mobiliser pour la prévention des risques psychosociaux (signaux repérables, modes de travail avec les acteurs) ;
  • Le bien-être au travail dans toutes ses dimensions ;
  • Les besoins en formation ;
  • La communication avec les services RH.

Un représentant du collège syndical souligne qu’en matière de prévention des risques psychosociaux, les leviers existants sont multiples mais insuffisants. Cette prévention n’incombe pas aux personnels administratifs mais à la médecine du travail du travail. Or celle-ci n’existe pas en tant que telle : il existe une médecine de prévention, dont les effectifs sont notoirement insuffisants (ce qui semble lié, au moins en partie, à un problème de recrutement). Le principe d’une visite médicale unique, dans la carrière d’un enseignant, représente aussi une anomalie. Pour le reste, la création des conseillers RH a présenté l’intérêt de donner aux enseignants le sentiment d’être écouté. Il n’en demeure pas moins que la réponse à apporter, en matière d’écoute, de bien-être et de reconnaissance nécessitera de mobiliser des moyens humains et financiers – ce qui pourrait être le thème d’une première proposition de l’atelier.

Evoquant le premier degré, un représentant des enseignants rappelle que les investissements pour le bien-être au travail des enseignants relèvent de l’Education nationale, sachant que les collectivités prennent en charge ce qui relève des élèves.

Un représentant du collège syndical évoque la perte de collectif professionnel et constate qu’au sein des établissements scolaires, les enseignants sont souvent confrontés à une grande solitude du point de vue des pratiques pédagogiques. Ils ont en principe 18 heures dans la classe mais cette quotité doit être discutée, devant les difficultés qui existent par exemple pour mettre en œuvre la concertation dans le cadre de la co-intervention. C’est la raison pour laquelle ce participant propose que la quotité de temps à passer dans la classe soit constituée de 15 heures de face-à-face et 3 heures de concertation.

Aziz JELLAB observe que les rendez-vous de carrière ont également créé un besoin d’accompagnement. Les enseignants apprécient cette relation, sous un angle neuf, avec les chefs d’établissement, ce qui pose notamment la question de la mise en récit des parcours professionnels et des possibilités offertes aux professeurs en termes de diversification des compétences.

Une représentante du monde associatif et économique rappelle que l’accord-cadre passé notamment avec l’ANACT permet de venir en appui des équipes RH, par exemple pour l’organisation du travail face à des problématiques particulières identifiées dans un territoire ou au sein d’un établissement, ou à travers un soutien en formation dans une logique préventive (voix, troubles musculo-squelettiques…). Les dix centres de réadaptation, co-créés avec l’Education nationale et peut-être mal nommés, disposent aussi d’équipes pluridisciplinaires pouvant accompagner les personnes pour permettre une reprise de l’activité professionnelle ou la mise en place de stratégies de travail face aux difficultés identifiées. Chaque année, 300 médecins de prévention (requalifiés de médecins du travail par un arrêté de mai 2020) partent en retraite, pour seulement 100 nouveaux médecins formés en France, ce qui explique les difficultés de recrutement de l’Institution pour ces professionnels. L’action menée par le ministère en partenariat avec l’ANACT et la MGEN dans le cadre des réseaux PAS (Prévention Aide Suivi), déjà évoquée lors de la précédente séance, s’efforce de pallier certaines difficultés créées par cette situation selon trois axes :

  • Faciliter l’accès aux soins des personnels de l’Education nationale ;
  • Apporter un appui aux médecins de prévention en proposant les services des centres médicaux et de santé mentale de la MGEN;
  • Venir en appui des académies en proposant des téléconsultations à distance (assurées par des médecins de la MGEN) là où aucun médecin de prévention n’est en poste.

Une enseignante juge très important d’aider les enseignants à ne pas vivre leur carrière comme figée et immobile. La lassitude qu’ils éprouvent fréquemment, après un certain nombre d’années, peut venir des freins à la mobilité d’un établissement à un autre et du fait que les enseignants ont peu d’occasions de rencontrer des publics scolaires différents à l’échelle de leur carrière. Le milieu de carrière constitue certainement un moment propice pour expérimenter de nouvelles missions et les enseignants peuvent, par ce détour, acquérir des compétences qui vont à la fois relancer leur intérêt pour leur métier et bénéficier à la suite de leur parcours en tant qu’enseignant.

Aziz JELLAB confirme que la carrière peut passer par des enrichissements du métier et non nécessairement un changement de métier. Un levier est certainement à actionner de ce point de vue. Le sentiment d’isolement qu’éprouvent des professeurs peut provenir de la difficulté à dire certaines difficultés. Les travaux d’Anne Barrère, notamment, montrent qu’il faut pouvoir mettre en évidence le caractère professionnel de ces difficultés, à partir desquelles un travail peut s’enclencher dans l’Institution.

Soulignant le caractère très complet et la difficulté du concours de recrutement des personnels de direction, un représentant de l’encadrement convient qu’il puisse néanmoins exister des dysfonctionnements sur le plan RH dans les établissements. Les attentes des personnels sont extrêmement variables et il arrive qu’à vouloir trop bien faire, dans la gestion des ressources humaines de proximité, les chefs d’établissement soient conduits à traiter des tensions entre personnels. C’est ce qui conduit ce participant à souhaiter la mise en place d’une formation qualifiante d’une durée assez longue, qui balaie tous les champs des compétences attendues d’un chef d’établissement. Il plaide aussi pour l’existence de temps institutionnalisés entre enseignants et pour l’existence d’un projet de gestion qui se fonde sur le diagnostic RH à l’arrivée d’un nouveau chef d’établissement.

Une représentante des familles rappelle que le premier interlocuteur de l’enseignant est le chef d’établissement dans le second degré et l’IEN dans le premier degré. Un employeur souhaitant mener une politique RH doit s’assurer que tous les échelons de son encadrement sont formés pour déployer cette politique. L’employeur doit également s’assurer que ses personnels sont en sécurité. Or l’écoute de proximité dépend aujourd'hui du personnel qui exerce cette mission. L’Education nationale forme ces encadrants à raison de quelques heures au moment du recrutement des chefs d’établissement, ce qui est évidemment insuffisant. La formation des encadrants au management constitue sans doute le levier essentiel pour combler les lacunes qui existent aujourd'hui sur le plan de cette formation.

Conclusion

Daniel PENNAC mesure, lors de chaque séance, l’ampleur des difficultés de la mission des enseignants, la précision de leurs propositions et la complexité du pilotage d’un vaisseau aussi gigantesque que l’Education nationale. Il insiste sur la nécessité de recréer du lien avec la population générale par le biais d’une production culturelle de l’école, quelles qu’en soient les formes (chorale, théâtre, autres).

Prolongements

La quatrième et avant-dernière séance de l’atelier aura lieu le mercredi 25 novembre de 14 heures à 17 heures.

Pascal Demurger, directeur général de la MAIF, y présentera la GRH qu’il a mise en place au sein de cette entreprise, ce qui pourrait inspirer.

Christelle Derache présentera par ailleurs la démarche de gestion des ressources humaines au sein de la communauté urbaine de Lille.

Enfin, un travail de recherche sur la GRH de proximité sera rapidement présenté par Sylvie Condette, maître de conférence à l’université de Lille et Franck Laurent, IA IPR EVS.

Mise à jour : novembre 2020

Le ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports engage en 2021 une évolution profonde du système éducatif et des métiers des personnels de l'Éducation nationale.

Mobilisation d'experts, retours d'expériences, concertations, ateliers, agenda social : d'octobre 2020 à février 2021, suivez le Grenelle de l'éducation.

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