Grenelle de l'Education [Compte rendu d'atelier] Revalorisation : séance 4 - Reconnaissance

L’incubateur du Grenelle de l’Éducation permet une concertation large avec la société civile, sous la forme d’ateliers associant des représentants de la communauté éducative. Consultez le compte rendu de l'atelier Revalorisation, séance 4, Reconnaissance, 16 décembre 2020.

Introduction 

Marie-Pierre LUIGI accueille un nouveau participant, représentant du collège élus et collectivités. Elle rappelle à tous que l’atelier en est à sa quatrième séance, après deux séances consacrées à la rémunération, une troisième séance dédiée aux conditions d’exercice du métier (action sociale proposée au personnel, action culturelle, et conditions matérielles d’exercice du métier). 

Le tour de table n’a pu se terminer sur les conditions matérielles et la séance commencera par les prises de parole sur ce point par le collège des représentants du personnel. 

Conditions matérielles d’exercice du métier (suite de la précédente séance)

Un représentant du collège des syndicats observe que l’organisation spatiale de l’école est essentielle : le bâti scolaire diffère entre le milieu rural et le milieu urbain, ne serait-ce que pour la cour de récréation plus ou moins vaste. 

Des collègues travaillent dans de très vieux bâtiments, entretenus de manière diverse. Les nouvelles constructions sont réalisées en concertation avec les enseignants, ce qui devrait être un impératif, pour que les besoins des enseignants soient intégrés. Les investissements varient selon les moyens des collectivités territoriales. Des problèmes de confort thermique existent. Certains enseignants exercent dans des préfabriqués qui ont 20 ans. Avoir un lieu de repos au calme est nécessaire pour les enseignants, confrontés constamment au bruit. Certaines écoles ne comportent même pas de toilettes pour les enseignants. Un problème se pose également du point de vue du droit à la déconnexion : dans les petites écoles, il convient de surveiller les récréations, avec peu ou pas de rotation. Les moyens informatiques sont également essentiels. Les constructions nouvelles pourraient se baser sur une surface minimale par élève. 

Un autre représentant du collège des syndicats considère que le bâti scolaire présente des problèmes thermiques, dans les périodes de froid comme de canicule. Une commission « bâti scolaire » a été mise en place, mais les productions sont encore inexistantes. Une instance indépendante devrait étudier ce point et apporter son expertise sur les conditions de sécurité et d’accessibilité. L’organisation des locaux doit être pensée pour tenir compte des problématiques de collectif de travail. Il conviendrait également de prévoir des conditions satisfaisantes pour accueillir les parents d’élèves. Un volet du plan de relance doit normalement apporter des réponses et il devra être sollicité de manière pertinente. 

Un représentant du collège des élus et collectivités indique que la ville de Vannes a initié une réflexion sur le bâti, puisque l’école se trouve à proximité du centre de loisirs et d’un complexe sportif, avec des horaires de fonctionnement différents. Les mètres carrés doivent être mutualisés et rationalisés, pour les collectivités. 

Un représentant du collège des syndicats observe qu’un lieu de repos est utile, dans le métier, puisque l’amplitude horaire est importante, mais juge surtout essentiel de disposer de lieux où travailler, ce qui permettrait aux enseignants de ne pas travailler chez eux le week-end. 

Un autre représentant du collège des syndicats insiste sur le fait que ces questions relèvent du temps long. L’impact des réformes engagées, comme celle du lycée, doit être anticipé, avec l’effet sur les classes. Les conditions matérielles participent du bien-être des agents et de la qualité du service qu’ils rendent. Des personnes qui se sentent bien sur leur lieu de travail travaillent mieux. Un enjeu de visibilité du service public se pose aussi puisque les établissements scolaires accueillent du public, et les conditions d’accueil envoient des signaux aux usagers. Il convient d’imaginer, avec les collectivités locales des éléments d’aménagement modulables et adaptables aux futures évolutions. Tous les efforts d’optimisation et de rationalisation doivent être amplifiés, pas uniquement dans une logique de maîtrise des coûts. Les nouvelles normes sanitaires doivent être prises en compte. Dans certains lycées, les fenêtres ne peuvent être ouvertes, ne permettant pas l’aération des salles. Les évolutions climatiques doivent être anticipées pour l’isolation thermique. La question des emplois du temps doit être revue, pour mieux organiser les collectifs de travail sur les différents temps et améliorer les conditions de travail. 

Une représentante du collège des syndicats relève que l’augmentation des seuils à plus de 30 en école-collège, 35 en lycée n’est pas prise en compte, puisque la capacité des salles de classe reste la même. Les salles de professeurs sont inadaptées, avec trop peu de postes informatiques (exemple de 7 postes pour 200 enseignants). Or, certains départements continuent à voir une augmentation de la population. Les établissements n’ont pas de salle adaptée pour recevoir les parents. Il semble donc nécessaire de construire des bâtiments et de restructurer les existants en réduisant le nombre d’élèves et d’enseignants et en revoyant les salles de classe et les salles de travail. Certains préfabriqués restent actuellement plusieurs années.

Résumé des échanges de la séance précédente

Guy WAISS a retenu plusieurs thèmes consensuels. Le premier concerne la question du logement des enseignants, avec les expériences de certaines académies de réserver un parc de logements sociaux et la question du montant de l’indemnité de résidence, insuffisamment modulée et insuffisante. Le deuxième porte sur la création d’une carte professionnelle qui pourrait donner accès à des prestations culturelles, voire sportives, avec des gratuités ou des tarifs réduits. Le troisième concerne la création d’espaces pour les enseignants dans les établissements scolaires, et notamment des espaces hybrides. Le quatrième porte sur la prévention en matière de santé (visites médicales régulières, orthophonie, relaxation…). Enfin, le cinquième point concerne l’augmentation sensible des crédits d’action sociale du ministère, puisque les crédits sont actuellement très inférieurs à ceux d’autres ministères. La création d’une structure, comme un Comité d’Entreprise national, présenterait un intérêt pour négocier des tarifs, éventuellement couplé à des associations en académie ou en département, voire à des structures dans les établissements scolaires.

Marie-Pierre LUIGI suggère de reprendre la proposition d’un cahier des charges a minima, pour les futures constructions. Les écoles sont pensées pour accueillir les élèves, mais pas pour accueillir les adultes qui y travaillent. L’élaboration d’un cahier des charges avec les collectivités territoriales présenterait un intérêt. 

Un représentant du collège des syndicats revient sur la question des médecins scolaires et des médecins de prévention, en indiquant que le niveau de leur rémunération est extrêmement bas au sein de l’Education nationale. Des conventionnements avec des médecins du travail permettent de pallier le manque, mais ces conventionnements sont problématiques si les médecins ne connaissent pas l’Education nationale. 

Guy WAISS précise que les médecins de prévention, pour les personnels, ne font pas partie d’un corps de fonctionnaires et sont des médecins contractuels correctement rémunérés, alors que la grille indiciaire des médecins scolaires, destinés aux élèves, qui relèvent d’un corps de fonctionnaires, est effectivement moins   attractive. 

Revalorisation du métier et de l’image : quels leviers ? 

Marie-Pierre LUIGI considère que l’image de l’enseignant a été revalorisée au cours des derniers mois : avec le confinement, la société française a redécouvert les différentes facettes du métier d’enseignant. L’événement dramatique qu’a été l’assassinat de Samuel Paty et les hommages qui lui ont été rendus ont également participé à la meilleure connaissance du métier. Les images évoluent. Sur le fond, l’enseignant doit retrouver une véritable image au sein de la société civile. Le sujet est vaste. 

Guy WAISS souhaite que l’atelier dégage des leviers pour qu’au-delà de la revalorisation matérielle l’enseignant soit fortement positionné dans la société française. 

Un représentant du collège associatif et économique observe que les élèves ne connaissent pas les métiers de l’enseignement et suggère de présenter le métier aux élèves, voire aux parents, notamment à l’occasion de l’information à l’orientation. Un spot télévisé « devenir enseignant » était de qualité et il conviendrait de multiplier ce type d’initiatives. 

Un représentant du collège des syndicats juge le sujet complexe. Depuis de nombreuses années, une concurrence existe dans la transmission des savoirs et la légitimité de l’éducation est remise en question. L’investissement dans l’éducation doit être considéré comme une priorité pour l’avenir de la nation. L’Education nationale constitue le premier budget de la nation, mais pas forcément la priorité. Les défis des filières professionnelles, des élèves isolés pendant le confinement ou de la réforme du bac affectent les enseignants. Le métier est complexe puisque l’enseignant doit se dédoubler, en dispensant son enseignement et en observant ce qui se passe dans sa classe. La formation initiale et continue des enseignants est complexe. Pour que la place des enseignants soit reconnue, il faut avant tout bien préparer les enseignants au métier. Le recrutement s’opère en France par concours sur un niveau Bac+5, alors que d’autres pays prévoient une formation longue. La formation initiale suivie par les enseignants ne les destine pas à ce métier. La durée de formation initiale est insuffisante pour former au métier, même si les enseignants disposent du savoir universitaire. Cette professionnalisation requiert de poursuivre la formation par la suite : la formation continue devrait faire partie de l’exercice professionnel, dans les premières années de la carrière, mais aussi tout au long de la carrière. Enfin, le fonctionnement hiérarchique du ministère participe de la dévalorisation de la fonction d’enseignant. 

Une représentante du collège des professeurs rejoint le propos relatif à la formation, indispensable. L’image de l’enseignant souffre beaucoup des petites phrases égrenées dans les médias comme « dégraisser le mammouth » ou « est-il nécessaire d’avoir Bac +5 en maternelle pour faire faire la sieste et changer les couches ? » ou la référence aux « enseignants décrocheurs » pendant le confinement. La population doit avoir le sentiment que le respect de ce métier est porté par le ministère. 

Enfin, la classification INSEE ne classe pas les enseignants de premier degré en professions intellectuelles supérieures, mais en profession intermédiaire. La perception par les parents est toutefois positive. Il faut toutefois expliciter le métier. Son école maternelle organise « la semaine de l’école maternelle » qui permet d’inviter les parents à l’école pendant une matinée, pour assister à l’enseignement et y prendre part, ce qui leur permet de comprendre la complexité du métier. Le regard que les parents portent sur l’expertise du métier change complètement après cela. 

Marie-Pierre LUIGI observe qu’il existe des a priori.  

Un représentant du collège des syndicats relève que l’employeur attend des enseignants qu’ils soient exemplaires et l’employeur doit aussi l’être dans sa communication vis-à-vis des personnels. L’Education nationale est le premier budget de la nation, mais elle ne doit pas pour autant être le premier gisement d’économies. Il convient de reconnaître tout ce qui est accompli, puisque le travail de l’enseignant est en grande partie invisible et méconnu. Pour rendre visible ce travail invisible, il faut le reconnaître. Des tâches sont constamment ajoutées comme l’heure de vie de classe, le cahier de texte numérique ou les réunions. Certains collègues se sentent épuisés ou ont le sentiment d’être « pressés comme des citrons ». Les enseignants ont besoin d’une reconnaissance qui n’est pas que financière. Le temps de travail des enseignants doit être sécurisé : certains enseignants ont des amplitudes horaires importantes, sans que rien ne limite cette durée quotidienne de travail. Dans l’enseignement de premier degré, 108 heures sont attribuées et de nombreux collègues dépassent les 108 heures. Les enseignants travaillent 41 heures dans le second degré et 44 heures dans le premier degré. En début de carrière, le temps de travail est plus important et le temps de présentiel devant élèves pourrait être modulé pour tenir compte de la formation. 

Un représentant du collège familles et élèves juge le rôle de l’institution fondamental, ainsi que le rôle politique. La reconnaissance des parents est aussi la reconnaissance de la France. Il a fallu une crise pour que les Français se rendent compte de l’importance de l’école de la République. Le dialogue social et la concertation sont nécessaires, mais les déclarations n’en tiennent pas toujours compte. Une école est vivante avec sa direction, ses enseignants, ses élèves et ses parents. Les parents ont toutefois peur d’aller vers l’école et vers l’institution et le dialogue est nécessaire avec la communauté éducative, pour instaurer un climat serein. Majoritairement, les parents sont satisfaits du travail des enseignants et leur apportent leur reconnaissance. 

Un représentant du collège des syndicats juge la question de l’image complexe. La mauvaise image peut venir d’une expérience personnelle malheureuse. Quand la famille comprend le rôle social de l’école, elle ne critique pas les enseignants. L’image peut être régulièrement ternie : proposer que l’école soit facultative en fin de semaine revient à dire que l’école assure de la garde d’enfants. La rémunération ne participe pas à la reconnaissance. Redonner son importance à l’enseignant peut passer par une reconnaissance de son rôle de professionnel et de l’importance de sa parole par rapport à celle des parents. L’entrisme de la société civile est important. L’enseignant est un fonctionnaire d’Etat et doit bénéficier d’une protection à ce titre. 
L’instituteur était auparavant une personnalité d’importance et le contenu de son enseignement est maintenant contesté, ce qui montre la prise que la société civile pense pouvoir avoir sur l’école. Si le médecin peut se prévaloir de sa formation et de son expertise face à un patient qui pense avoir raison parce qu’il a regardé des sites Internet, l’enseignant ne parvient pas à se mettre dans la même posture. 
Pour faire évoluer l’image de l’enseignant, il faut faire connaître ce qu’est son métier, avec une communication adéquate. Des écoles proposent des stages d’observation aux parents qui peuvent ainsi passer une demi-journée à observer la classe, ce qui est intéressant. Les élèves de troisième ne sont plus autorisés à effectuer leur stage en école, à cause de la situation sanitaire, ce qui est dommage. 
A l’instar du médecin, les enseignants pourraient prêter serment lors de leur prise de fonction. 

Un représentant du collège associatif et économique suggère de donner à des professionnels de la société civile la capacité d’enseigner pour favoriser les passerelles. Repositionner l’enseignant au cœur d’un service public, comme faisant partie des biens communs - au même titre que la justice, la santé, la police et les services de secours - semble primordial, avec une campagne de communication sur les métiers qui sont nos biens communs. La profession doit sortir d’une posture de victimisation qui consiste à considérer que sa situation est la pire. Dans tous les métiers, tous les salariés ont l’impression d’être trop mal rémunérés et se plaignent de la communication, se jugeant sous-informés. Si, dans les biens communs, la justice ne doit pas forcément se rapprocher de la société civile, ce rapprochement présenterait sans doute un intérêt pour l’éducation, avec des passerelles entre la sphère du privé et l’enseignement. Tous les métiers ont leurs spécificités, ceux de l’enseignement également.

Un représentant du collège des syndicats considère que les représentants du personnel doivent accompagner tout le monde et dire les choses – par exemple sur les enseignants décrocheurs qui existent – avec exigence. La vision de l’école, citadelle assiégée, doit être revue puisque l’école est au service de la société civile : valoriser les métiers de l’éducation revient à rendre visible le travail et le professionnalisme. Les expertises doivent en outre être partagées, avec des interactions, échanges et parcours. L’expertise se développe, se travaille et se diversifie. Une confusion existe actuellement entre diplômes et compétences et ce point doit être réglé, puisque les enseignants n’osent pas dire qu’ils n’y arrivent pas, puisqu’ils ont le diplôme. Il convient de lever l’omerta et de dire les choses. Donner des possibilités est important : il n’est pas normal qu’un enseignant n’ait pas une obligation de formation qui lui permettrait toutefois de s’enrichir. 

Une représentante du collège des élus et collectivités relève qu’une étude récente montre que 70 % des enseignants aiment leur métier et en sont fiers, ce qui constitue un paradoxe puisque de nombreux enseignants souffrent du manque de soutien, du manque de moyens et du manque de reconnaissance. Le terme investissement est important : l’éducation n’est pas une dépense, mais un investissement pour préparer l’avenir. Si les premiers adultes auxquels sont confrontés les enfants ne se sentent pas valorisés et de fait ne prennent pas d’initiatives, ces enfants n’en prendront peut-être pas plus tard. 
D’autres points sont importants, comme l’autonomie des équipes et le rapport à l’inspection dont les missions doivent être repensées : l’inspecteur doit pouvoir entendre les fragilités et aider l’enseignant à progresser. L’enseignant peut être un chercheur, pour identifier des problèmes et trouver des solutions, un partenaire de recherche-développement. 
Les professeurs doivent effectivement être reconnus comme professions intellectuelles supérieures. 
Le professeur doit être formé à la gestion de classe, au management, et progresser grâce à la formation continue. Une télévision de l’éducation nationale pourrait être lancée, avec des enseignants qui interviendraient comme experts. Le professeur doit être mis en avant comme expert. 
Sur la dynamique de carrière, il convient d’instaurer la possibilité d’aller-retour avec l’administration ou l’extérieur et de prévoir des rencontres plus régulières avec l’inspecteur. Associer les professeurs aux réformes est également important, d’autant que se préoccuper de l’avenir des enfants nécessite des actions s’inscrivant sur le long terme. Une plus grande mobilité pourrait être envisagée, avec des mobilités en Europe pour les enseignants, en début de carrière ou plus tard. Enfin, le suivi des élèves – souvent les professeurs ont besoin de savoir ce que deviennent leurs élèves - pourrait donner une continuité de la mission dans le temps. 


Cette représentante du collège des élus et collectivités souhaite apporter quelques éclairages européens sur la valorisation du métier. 
En 2014, la Suède a lancé un grand plan pour dynamiser le recrutement des professeurs et valoriser la profession, avec une loi qui a permis de remonter les salaires et d’augmenter la progression salariale au cours de la carrière. Cette mesure a été accompagnée d’une grande campagne d’information "Pass it on" avec un site internet dédié qui contenait des informations sur la profession, présentait les opportunités d’emplois et faisait la promotion du métier (et notamment des voies alternatives pour devenir enseignants).
En Estonie, en plus des mesures de revalorisation des salaires, le gouvernement a lancé le programme « Youth to School » pour susciter de l’intérêt pour les métiers de l’éducation en attribuant des bourses à des étudiants qui s’orientent vers les métiers de l’éducation. L’Estonie a également mis en place des récompenses pour mettre en valeur les personnels de l’éducation et notamment un "Teacher of the Year Gala".
Il convient de penser, en plus de la revalorisation générale, à faire une plus grande place à la reconnaissance de l’institution à l’égard des professeurs engagés dans des projets et des missions particulières (primes, valorisation des réalisations, faciliter les initiatives pédagogiques...)

Un représentant du collège encadrement revient sur la logique d’une formation obligatoire avec une rémunération pour des formations hors temps de classe, pour mettre à jour les compétences, en fonction des innovations pédagogiques. Ces formations valoriseraient le professeur dans son expertise et dans sa rémunération. 
L’Armée réussit à communiquer, pour recruter, et des spots télévisés pourraient valoriser le métier et améliorer le taux de sélection, avec une communication dans les périodes de concours. 
Enfin, valoriser consiste aussi à faire savoir que l’Education nationale protège ses enseignants et ses personnels et les accompagne, lorsqu’ils rencontrent des difficultés. Une meilleure connaissance des dispositifs d’accompagnement et une formation sur la médiation présenteraient un intérêt. 

Un autre représentant du collège encadrement observe que devenir enseignant n’est plus un gage de promotion sociale, comme auparavant. L’enseignant s’interroge sur son rôle et sur le rôle de l’école. L’image de l’enseignant s’est noyée dans un ensemble d’acteurs de l’éducation. Dans une société de concurrence des savoirs, tous les cours sont disponibles sur Internet et la plus-value de l’enseignant réside dans le contact direct avec les élèves et les familles. La quantification des temps en face à face, des temps en formation et des temps nécessaires de formation à la médiation et à la régulation présentent un intérêt. Les enseignants ont besoin de temps de respiration et de temps de pause dans une carrière, et ce n’est pas simple à gérer. Cette définition des temps doit être précisée. 

Un représentant du collège des élus et collectivités a le sentiment que les enseignants sont respectés, en maternelle et en primaire, dans sa ville, et que les incidents sont marginaux. Le premier ambassadeur de l’image restaurée du professeur est le professeur lui-même qui doit faire savoir ce qu’il fait. 

Marie-Pierre LUIGI souligne quelques éléments des échanges : la société doit mieux comprendre le métier de l’enseignant, ce qui requiert de mieux communiquer et de valoriser le métier. L’ouverture et le partage sont importants, ainsi que les interactions et les passerelles. Il faut préciser, éclairer et lever le flou autour du temps de l’enseignant. 

Réflexions sur un éventuel serment

Marie-Pierre LUIGI relève qu’un participant a fait référence au serment d’Hippocrate des médecins : en Belgique, les enseignants prêtent serment (le serment de Socrate). Cette prestation de serment permettrait de reconnaître le métier, avec par exemple un lien avec la lettre de Jean Jaurès. Marie-Pierre LUIGI souhaite connaître l’opinion des participants sur ce point. 

Un représentant du collège des élus et collectivités juge l’idée excellente, pour mettre l’enseignant au cœur de la cité. 

Guy WAISS indique que le sujet permet de rendre solennelle l’entrée dans le métier. 

Un représentant du collège des élus et collectivités indique qu’il remet une médaille aux titulaires d’une mention très bien au bac, et qu’il invite pour cela l’élève et le professeur à monter sur l’estrade. 

Un représentant du collège encadrement suggère que cet événement ne soit pas réservé aux seuls enseignants, même s’il pourrait se dérouler au sein de l’établissement scolaire. 

Un autre représentant du collège encadrement soutient l’idée, en précisant qu’il faudrait savoir quelle autorité participerait à cet événement. 

Une représentante du collège des professeurs juge nécessaire que l’événement se fasse devant les pairs et devant la hiérarchie. 

Une autre représentante du collège des professeurs revient sur la fragilisation des professeurs en lien avec le développement des contacts directs via le numérique. Les parents d’élèves sont majoritairement solidaires, mais les filtres qui existaient n’existent plus avec l’accès direct aux messageries. Les enseignants se retrouvent seuls pour répondre aux mails des parents, sans bénéficier du soutien de leurs collègues ou de la hiérarchie, sans savoir si leurs collègues se trouvent dans la même situation. Certains parents exercent de nouvelles pressions sur les notes attribuées par exemple, avec le passage du baccalauréat en fonction du contrôle continu. 

Un représentant du collège associatif et économique approuve l’idée de mettre en place une cérémonie. 

Un représentant du collège familles et élèves juge la mission d’enseignant noble et pense que le serment pourra contribuer à renforcer la noblesse du métier. Il suggère d’inviter les parents à cet événement. 

Une représentante du collège des élus et collectivités approuve ce rituel d’entrée, en présence d’élus locaux, de parents et de supérieurs hiérarchiques. Le problème ne vient pas de l’engagement du professeur, mais du respect du professeur. Le texte du serment de Socrate pourrait être écrit de manière participative. Une charte signée par les parents pourrait également être envisagée, charte qui préciserait notamment le rôle des parents. 

Un représentant du collège des syndicats suggère d’organiser l’événement avec des représentants d’élus locaux, voire d’un représentant de la préfecture. Les médecins prêtent serment devant leurs pairs et les personnes ayant assisté à la soutenance de leur thèse. Le caractère solennel doit être important. A l’époque du service militaire, une cérémonie de présentation aux drapeaux était organisée un mois après le début, en présence de hauts gradés. 

Un autre représentant du collège des syndicats juge important de prévoir des rituels de passage, entre pairs, dans la société, mais craint qu’un serment donne l’illusion d’apporter une réponse à une problématique bien plus complexe et conduise à l’inaction. 

Un autre représentant du collège des syndicats souscrit à l’idée, si elle s’associe bien à d’autres mesures de valorisation et ne s’y substitue pas. 

Un autre représentant du collège des syndicats considère que les symboles sont nécessaires, dans la vie sociale. Les symboles évoluent, au sein de l’Education nationale, et de nouveaux symboles peuvent effectivement émerger. Le serment ne doit pas créer une promesse qui ne sera pas tenue et aboutira à des frustrations. Il faudra déterminer s’il s’agit d’un engagement – avec des engagements pris alors de part et d’autre – ou d’un serment entre pairs, et préciser si la reconnaissance portera sur le métier ou sur le statut. Le besoin de sens existe, mais il convient de faire preuve de précaution quant à la manière dont il sera interprété. Enfin, il faut traiter de l’attractivité dans la fonction publique. 

Guy WAISS précise qu’en Belgique, le serment s’adresse aux élèves. Il faudra effectivement bien y réfléchir avant de mettre en œuvre l’idée qui vise à solenniser l’entrée dans le métier, avec l’institution et les partenaires de l’institution. Il faudra notamment préciser à qui s’adressera le serment. 

Un représentant du collège familles et élèves approuve la possibilité de mettre en œuvre ce rituel pour renforcer l’institution en tant que telle. L’école souffre, mais les autres institutions aussi (justice, police, médecine) avec des questions d’efficacité et de l’image renvoyée. Il convient de ré-institutionnaliser l’école et de revoir la posture de l’école et des parents d’élèves. 

Une représentante du collège des syndicats note que pour retrouver une bonne image, il est nécessaire de s’interroger sur les causes de la dégradation de cette image :

  • Climat anti-intellectuel global dans la société : dévalorisation de la culture, de la science, de la réflexion, de la rationalité.
  • Echec de l’institution (cf. classements internationaux et comparaisons nationales au fil du temps) dont les enseignants sont les boucs émissaires alors qu’ils ne font qu’appliquer les politiques éducatives successives. Critique, voire mépris des enseignants émanant de leur hiérarchie même et des personnels politiques.
  • Profession mal rémunérée = mal considérée par les familles et la société.
  • Problème du climat scolaire à améliorer (cf. étude OCDE constatant le manque de respect pour l’autre, dont le professeur, ce qui nuit fortement aux résultats scolaires).

Les leviers pourraient être : 

  • Hausse rémunérations pour un vrai traitement de cadre A.
  • Vigilance sur le respect : entre tous au sein des établissements ; à l’égard des enseignants de la part de la hiérarchie et du personnel politique.
  • Ecouter les enseignants pour redonner du sens et de l’efficacité à l’école, en considérant que ce sont eux les principaux experts, et non des exécutants.

Réflexions sur le temps de travail 

Marie-Pierre LUIGI revient sur le temps de travail : il existe un flou, sur le temps de travail des professeurs, pour la société civile, alors que la frontière s’amenuise pour les professeurs entre temps professionnel et temps privé. 

Une représentante du collège des professeurs considère que le flou existe dans le premier degré. Les conjoints des enseignants et enseignantes ont du mal à comprendre que les enseignants, censés travailler quatre jours par semaine, sont à l’école de 7 heures à 18 heures 30, ainsi que le mercredi et parfois le dimanche pour des événements particuliers. Le travail envahit le quotidien et la vie de famille. Le travail de direction ajoute encore au travail d’enseignant. Le temps de travail des enseignants est conséquent, et il est mal perçu. 

Un représentant du collège des syndicats distingue le sujet du premier degré, avec 25 heures hebdomadaires (24 heures devant la classe et une heure d’APC). L’heure de service pourrait être transformée en une heure supplémentaire rémunérée, sachant que le premier degré n’a pas d’heures rémunérées actuellement. Le temps de service devant élèves pourrait être revu à la baisse pour donner le temps au travail collectif. Le flou existe effectivement et il convient de donner davantage d’autonomie aux enseignants dans la gestion de leur temps, notamment pour les 108 heures. Si la priorité est de permettre aux enseignants de mieux faire leur métier, une reconnaissance est nécessaire. Un temps supplémentaire semble nécessaire, au sein de l’atelier, pour revenir sur les propositions qui ont été formulées. 

Un autre représentant du collège des syndicats juge indispensable de parler du temps de travail des enseignants, de manière plus précise. 

Marie-Pierre LUIGI reconnaît que le temps de travail est une vaste question, et souhaite évoquer les a priori sur le temps de travail qui demandent peut-être à mieux le cadrer. Quand un enseignant n’est pas en cours, les interlocuteurs ou les parents peuvent avoir l’impression qu’il est disponible et il faut peut-être travailler ce point. 

Un représentant du collège des syndicats juge compliqué de devoir répondre à 150 familles. Ce point est lié à la difficulté liée aux outils numériques. 

Un représentant du collège des syndicats observe que le passage à quatre jours, dans le premier degré, a été présenté comme permettant le repos au milieu de semaine, ce qui n’est pas le cas. Ce passage pose la question de l’intensification du travail. Les enseignants peuvent s’organiser, en autonomie, en indiquant les temps où ils sont disponibles (et ceux où ils ne le sont pas). Définir un cadre peut améliorer les conditions de travail. 

Un représentant du collège associatif et économique suggère que ces temps de travail invisibles apparaissent mieux pour que les parents d’élèves prennent conscience du temps de travail réel des enseignants. 

Un représentant du collège des syndicats signale que les enseignants du premier degré ne peuvent répondre aux sollicitations numériques en dehors des temps de classe et que ces outils numériques ajoutent une pression et du travail. 

Guy WAISS propose d’organiser une ultime séance pour parler des temps de travail et dresser un bilan des ateliers. 

Les participants acceptent cette proposition. 

Marie-Pierre LUIGI remercie les participants pour leurs contributions. 

Mise à jour : décembre 2020

Le ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports engage en 2021 une évolution profonde du système éducatif et des métiers des personnels de l'Éducation nationale.

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