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Grenelle de l'Éducation [synthèse d'atelier] : formation

Consultez la synthèse des ateliers "formation" du Grenelle de l'Éducation.

Dans ce contexte de crise sanitaire sans précédent, la communauté éducative s’est trouvée confrontée à des problématiques inédites. Faisant preuve d’agilité, le système éducatif français et les acteurs qui le composent se sont attachés à agir et à réagir afin d’assurer la continuité du service public de l’éducation et la qualité du service rendu aux élèves. Cette crise a permis, dans une certaine mesure, de prendre du recul sur l’offre globale de formation, sur les pratiques et dispositifs de formation, sur la question de la place du numérique, sur les temps de formation, sur les modalités, les espaces et les lieux de formation. Loin de remettre en question ce qui était fait, cette crise encourage à opérer une réflexion en profondeur, parfois nouvelle, sur ce que sera la formation initiale, continuée et continue des personnels du système éducatif de demain. Cette transformation, initiée dès 2019 (réforme des Espé en Inspé, loi du 06-08-19 de transformation de la fonction publique, nouveau schéma directeur de la formation continue des personnels 2019-2022) est porteuse de nombreux enjeux : politiques et sociaux (employabilité et insertion professionnelle, formation tout au long de la vie et droit à la formation pour tous), sociaux (attractivité des métiers de l’éducation, fidélisation  des talents, bien-être et qualité de vie au travail, développement professionnel et accompagnement des personnels), économiques et financiers (1145300 personnels en poste en 2018-2019). 

Face à cela, comment la formation peut-elle s’adapter aux besoins et aux attentes de chacun ? Comment l’offre de formation peut-elle être plus lisible et attractive ? Comment mesurer l’impact de la formation sur la qualité du service rendu à l’élève, sur la réussite scolaire, sur la vie et le climat scolaire et sur le bien-être et la qualité de vie au travail ? Quelles propositions et recommandations faire en matière de formation pour favoriser le développement personnel et professionnel des acteurs du système éducatif français ? Telles sont les questions posées dans l’atelier.

L’atelier postule qu’un bon dispositif de formation (efficace et efficient) serait de nature à renforcer la capacité et le potentiel du ministère de l’éducation nationale à attirer et fidéliser ses talents et à les maintenir en poste dans un climat de bien-vivre, de bien-être et de bien-faire ensemble.

Modalités de travail et d’organisation de l’atelier

Les propositions des travaux de cet atelier formation sont issues d’un travail collégial et collaboratif mené lors de 4 demi-journées de travail avec les 20 membres permanents de cet atelier. Elles s’appuient et se nourrissent toutefois d’une multiplicité de sources : les expériences de terrain et retours d’expériences des membres de l’atelier, la note de cadrage qui a guidé les travaux, les résultats des recherches et expérimentations des experts interrogés (chercheurs, praticiens), les ressources documentaires nationales et internationales mises à disposition des membres de l’atelier, les travaux des états généraux du numérique et du colloque international "Quels professeurs au XXIème siècle ?", ainsi que les contributions de la plateforme de concertation en ligne.

En synthèse sur la période du 09 novembre au 07 décembre l’atelier a organisé 4 matinales ouvertes au grand public, 1 journée de travail en académie et il s’est réuni 4 fois en séance de travail. Au total 382 personnes ont participé à une ou plusieurs actions organisées par l’atelier formation. Sept propositions ont émergé de l’atelier et s’articulent autour de 3 grands axes.

Axe 1 :  attractivité - fidélisation et développement des talents 

Recueillir les besoins de formation au plus proche des acteurs du système éducatif afin de proposer une offre lisible et attractive

Cette proposition répond à de fortes attentes exprimées par les personnels du système éducatif qui consiste à être au plus proche des problématiques exprimées sur le terrain et vécues par les personnels. Il serait donc utile d’opérer une remontée des besoins individuels et collectifs par bassin, école ou établissement. Pour effectuer cette mission il est possible de la confier à différents types d’acteurs (directeurs d’école, chefs d’établissement, inspecteurs, RH de proximité ou bien un référent formation par bassin), ce qui aurait pour effet de renforcer leur rôle et leur légitimité auprès des équipes pédagogiques. Ce recueil au plus près du terrain permettrait également de répondre plus rapidement et prioritairement à ce dont les acteurs de terrain ont besoin.

Cette proposition a de forts impacts en termes de collectifs pédagogiques apprenants, de communication, d’écoute et de proximité au regard des besoins exprimés. Elle renforce l’utilité des formations et de leur retour sur investissement. Elle est de nature à concourir à la fidélisation des personnels qui se sentent écoutés et entendus, disposant alors d’une offre de formation visible, lisible et utile à leurs pratiques de tous les jours. 

Dans cette perspective il serait utile de "sanctuariser" au moins un moment dans l’année pour réunir les équipes par école, établissement, discipline, par bassin) en vue de l’expression des besoins collectifs. Ces moments d’échange, d’expression et de partage pourraient être relayés par la création d’une plateforme numérique dédiée à cette remontée des besoins collectifs mais également individuels. Ces personnes en charge de cette remontée "territoire" devront être formées et cette nouvelle mission nécessitera d’être valorisée (évolution de carrière, rémunération, temps de décharge, etc.). Une telle proposition nécessite une meilleure adéquation entre le niveau national et le niveau académique en termes de plan de formation (cohérence), de budget et de gouvernance. Cette mesure vise à opérer une meilleure adéquation entre les besoins de formation et l’offre ; elle est également de nature à renforcer le bien-être et à la qualité de vie au travail. 

L’enjeu le plus important de cette proposition est de "renverser" la logique de construction du plan de formation en passant d’une logique de l’offre à une logique de la demande

Intégrer dans la formation initiale, continuée et continue des personnels une expérience professionnelle à l’international

Cette proposition répond à des attentes exprimées par de nombreux acteurs (Erasmus +, discours présidentiel en Sorbonne, professeurs, Inspé, universités). Toutefois cette dimension internationale traverse l’ensemble des autres propositions et l’atelier a été vigilant pour intégrer cet élément dans chacune de ses réflexions. Une telle proposition revêt de multiples avantages : l’ouverture à d’autres pratiques professionnelles et cultures ; une mobilité internationale, des perspectives de développement professionnel élargies ; un renforcement de compétences transversales réutilisables par l’institution. L’impact est potentiellement élevé en termes d’attractivité dans les métiers de l’éducation et en termes de fidélisation des talents avec des perspectives d’évolution professionnelle. Plus globalement cette mesure est de nature à renforcer le rayonnement de la France à l’international. La proposition peut aller jusqu’à rendre cette expérience obligatoire dans une carrière (quelques jours, semaines, mois, …). Il sera toutefois important de proposer des dispositifs d’accompagnement et de préparation (formations aux langues et à la culture) des personnels et d’envisager dans quelles mesures ces formations pourront être valorisées et prises en compte dans la carrière. Les modalités concrètes sont assez variées et pourraient être adaptées au profil des personnels : suivi de formation, stage d’observation de classes et/ou d'entreprises (cf. CEFPEP), accueil de professionnels, visites d'établissements à l'étranger avec ses élèves et/ou en équipe pédagogique, aller enseigner à l’étranger (renforcer le dispositive existant au sein de la DGRH), effectuer un stage à l’étranger dans le cadre de sa formation initiale (Inspé), etc.

Cette mesure s’inscrit dans un contexte particulièrement favorable puisque le dispositif Erasmus+ 2021-2027 a vu son budget considérablement augmenté.

Proposer un dispositif de développement personnel et professionnel aux personnels néo-titulaires du système éducatif par un système de tutorat et de mentorat

Cette proposition répond à de fortes attentes exprimées par les personnels du système éducatif. Cette mesure serait de nature à faciliter l’intégration des personnels, réduisant ainsi les problématiques de turn-over ou d’absentéisme des personnels récemment recrutés. Disposer d’un tuteur et/ou d’un mentor permet aux individus récemment recrutés et à ceux qui sont en poste de disposer de conseils et d’accompagnement en matière d’expertise métier, de gestes professionnels, de connaissance de la structure "éducation nationale", etc. Ces dispositifs s’inscrivent dans une logique de développement personnel et professionnel pouvant permettre des évolutions et des changements en termes de carrière, de mobilité, de reconversion, de parcours. Les personnels se sentiraient ainsi mieux "sécurisés" (accompagnement, conseils) sur le court et le moyen terme et deviendraient ainsi "sécurisants" pour leurs collègues, leurs élèves, leurs étudiants. L’impact en matière de qualité de vie au travail est réel, et permet de réduire les risques psycho-sociaux et le mal être au travail. Il s’agit ici de dispositifs de gestion de ressources humaines qui ont la volonté d’intégrer l’individu dans un collectif de travail, dans une équipe pédagogique. Il sera donc nécessaire de formaliser des dispositifs de tutorat (accompagnement par un pair au moment de l’entrée dans le métier) et de mentorat (personne expérimentée sans lien hiérarchique avec la personne mentorée qui de bénéficier de conseils sur la structure et les possibilités d’évolution ainsi que sur les problématiques rencontrées) en les distinguant bien l’un de l’autre (finalités, processus différents) tout en s’assurant d’un processus de formation dédié aux futurs tuteurs et mentors avec une prise en compte et une valorisation de ces nouvelles missions. On peut aussi concevoir ces missions comme des possibilités d’aménagement d’emploi en fin de carrière pour ceux qui le souhaiteraient et en auraient la compétence. Cette mesure pourrait être étendue aux contractuels. L’enjeu de cette mesure réside dans la création de ces dispositifs, la formation à ces missions et surtout au fait de ne pas réserver ces dispositifs aux seuls personnels fragiles ou en difficultés.

Axe 2 : continuité du service public et mise en valeur du temps de travail 

Rendre la formation continue des personnels du système éducatif obligatoire et l’inscrire dans un continuum de développement professionnel

Cette proposition répond à de fortes attentes exprimées par la majorité des personnels du système éducatif. En effet, exercer un droit à la formation avec une offre plus large et adaptée aux besoins permettra le maintien et la consolidation des compétences nécessaires à l’exercice du métier mais permettra également d’envisager des mobilités internes et externes plus variées. De réelles attentes sont exprimées pour bénéficier de formations plus longues inscrites de façon pluriannuelle dans des parcours professionnels individualisés afin d’assurer le développement professionnel des personnels. Cette proposition pose la question de la nécessaire valorisation des formations suivies (diplôme, labels, certificats, etc.) et de la traçabilité des formations suivies par un individu (système d’information ressources humaines adapté) afin de les inscrire dans une véritable trajectoire professionnelle. Cette proposition est porteuse d’enjeux forts : financièrement en posant la question du compte personnel de formation (CPF), socialement en posant la question du caractère obligatoire ou facultatif de la formation, du temps de formation (temps travail/hors temps de travail), de la rémunération des formations suivies. L’idée de la création d’une compte épargne temps (CET) irait dans ce sens. L’idée d’exprimer le CPF ou le CET non pas en heures mais en euros a été avancée pour permettre de prendre conscience de la valeur des formations proposées ou choisies.

De plus, cette proposition serait l’occasion d’actualiser, de clarifier et/ou de modifier l’actuel référentiel de compétences des personnels d’éducation et faire en sorte que les formations proposées soient en adéquation avec les compétences recherchées et requises. Une telle proposition est à mettre en relation avec le recueil de l’expression des besoins au plus proche du terrain. En cela, elle est de nature à renforcer les collectifs pédagogiques apprenants.

Renforcer l’adossement à la recherche des formations (initiale, continuée et continue) et la formation à la recherche des formateurs et personnels de l’éducation

Cette proposition répond à de fortes attentes exprimées par les personnels du système éducatif. Elle concourt à l’amélioration de la qualité du service rendu dans la mesure où elle élève le niveau des formateurs, la qualité des formations dispensées et donc le niveau de compétence et d’expertise des personnels formés. Des mesures très concrètes peuvent être proposées afin de rapprocher les chercheurs du système éducatif et vice et versa : conventions de recherche, mémoire du master MEEF, colloques, etc. Il est essentiel que les personnels puissent bénéficier des derniers résultats de la recherche française et internationale en éducation afin de pouvoir mettre à jour leurs connaissances théoriques, percevoir les applications concrètes et pratiques de la recherche appliquée, apprécier les résultats sur le terrain et leur possible transposition dans leur quotidien et identifier les innovations qui seraient adaptables et adaptées à leur pratique professionnelle. En retour, les chercheurs et enseignants-chercheurs pourraient dans le cadre de leurs travaux bénéficier d’accès au terrain tout en formant les personnels de terrain. Une intégration systématique de la recherche dans la formation initiale, continue et continuée permettrait également d’accompagner les personnels souhaitant réaliser des formations d’excellence de type doctorat. Cette initiation ou formation à et par la recherche aurait comme avantage de développer des compétences plus transversales telles que l’esprit critique, la posture d’exploration, la rigueur et la curiosité scientifique. Cette prise en compte passe également par une meilleure diffusion et vulgarisation des résultats de la recherche (support, vecteurs et canaux de communication) ; il est important de rendre accessible et intelligible les recherches en éducation pour en mesurer son utilité économique et sociale.

Axe 3 : gouvernance et collectifs de travail 

Renforcer l’autonomie de gestion et budgétaire des écoles, des établissements et des académies en matière de formation et partager la gouvernance

Cette proposition répond à de fortes attentes exprimées par les personnels du système éducatif. Elle vise à donner plus d’autonomie de gestion au niveau académique, école et établissement. Elle suppose le renforcement du rôle des directeurs d’école, chefs d’établissement, inspecteurs et académie. Ce renforcement ne serait pas sans conséquence sur la proximité et l’écoute envers les personnels. 

Une telle proposition privilégie la dimension collective à deux niveaux en instaurant, d’une part, une gouvernance partagée de la formation y compris avec les opérateurs de formation, les universités, les Inspé, etc. et, d’autre part, en resserrant les liens entre les directeurs d’école, chefs d’établissement et leurs équipes pédagogiques. Il s’agit ici de prendre en compte les problématiques exprimées sur un territoire et de traiter collectivement de la réponse à apporter en matière de formation. Ainsi, tous les acteurs de la formation d’un territoire pourraient coconstruire des actions, des contenus de formation avec des modalités propres (actions au sein d’une école, un établissement, un bassin ; actions "hors les murs" ; etc.). Cette proposition intègre également la demande d’effectuer des formations intercatégorielle, interdisciplinaire, interdegrés, voire avec des personnels ne relevant pas de l’éducation nationale (exemple des ATSEM avec les professeurs ; des personnels de santé, techniques, etc.). Des formations plus transversales pourraient ainsi répondre de façon plurielle à des besoins de différentes catégories de personnels. 

Quelques expérimentations en académies montrent les vertus d’une telle proposition qui pourrait être plus largement déployée.

Sécuriser la formation des personnels en proposant, en fonction de la nature des besoins individuels et collectifs exprimés, des modalités et des contenus de formation pluriels (synchrone/asynchrone ; présentiel/distanciel ; multimodalités)

Cette proposition répond à de fortes attentes exprimées par les personnels du système éducatif. Parmi ceux-ci on identifie la volonté de pouvoir bénéficier de formations plus longues, s’inscrivant dans une perspective pluriannuelle afin de pouvoir s’inscrire dans une logique de parcours choisi et de trajectoire professionnelle (y compris hors éducation nationale). Un renforcement de la qualité des formateurs et des contenus de formations a été largement exprimé avec pour effet d’améliorer également le niveau des personnes formées, de faciliter les mobilités internes et externes, de renforcer l’engagement et la motivation des personnels en formation. Cette proposition permettrait, à certains personnels, de ne pas avoir le sentiment de "subir" une formation dont il ne mesure pas l’utilité. Cette proposition pose la question de la place du numérique et de ses usages et des innovations pédagogiques en la matière. De nombreux besoins ont été exprimés sur des formations comme la fonction de directeur d’école, les valeurs de la république, etc. L’enjeu est donc important et avant tout financier puisqu’il s’agit de toutes les formations et de tous les personnels ; elle s’s’inscrit donc dans un temps long afin que tous puissent en bénéficier (même si des solutions numériques, d’auto-formation ou entre pairs sont possibles). C’est une mesure dont il faut calculer les coûts en temps de formation de tous les personnels, en coût de formation, d’équipement numérique, d’applications performantes et répondant aux réels besoins, etc. Un renforcement des compétences technico-pédagogiques semble essentiel pour accompagner les personnels au plus proche du terrain ; cela peut passer par les DAN, les référents numériques, le recrutement de technico-pédagogues, etc. Si la formation en situation de travail, la formation entre pairs doit être développée, des besoins importants s’expriment également pour des formations "hors les murs"au sein d’autres organisations, par des chercheurs, des professionnels, des experts de la formation autres que les seuls formateurs académiques souvent en charge de très nombreux sujets. Des questions communes à d’autres propositions de cet atelier seront également à régler : la valorisation des formations suivies par des dispositifs autres que ceux de l’éducation nationale, les formations sur-mesure, la prise en compte de la recherche dans les contenus de la formations, l’articulation entre les formations purement disciplinaires et catégorielles et celles qui seraient plus transversales. Toutes ces évolutions nécessitent une meilleure articulation et coordination entre les acteurs de la formation sur le terrain (Canopé, Erasmus+, Inspé, universités, organismes certificateurs, coordonnateurs disciplinaires, académie, etc.).
 

Mise à jour : janvier 2021

Le ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports engage en 2021 une évolution profonde du système éducatif et des métiers des personnels de l'Éducation nationale.

Mobilisation d'experts, retours d'expériences, concertations, ateliers, agenda social : d'octobre 2020 à février 2021, suivez le Grenelle de l'éducation.

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