bo Le Bulletin officiel de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports

Le Bulletin officiel de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports publie des actes administratifs : décrets, arrêtés, notes de service, etc. La mise en place de mesures ministérielles et les opérations annuelles de gestion font l'objet de textes réglementaires publiés dans des BO spéciaux.

Enseignements primaire et secondaire

Prévention et lutte contre les risques sectaires

Action de l'éducation nationale

NOR : MENE1208599C

Circulaire n° 2012-051 du 22-3-2012

MEN - DGESCO B3-3 - DAJ

Texte adressé aux rectrices et recteurs d'académie

L'État a depuis plusieurs années renforcé sa vigilance et ses moyens d'action à l'encontre des phénomènes d'emprise qui peuvent s'exercer au préjudice d'individus, notamment dans le cas de dérives sectaires.
Cette vigilance s'est manifestée par l'intervention réitérée du législateur, notamment en matière de protection de l'enfance, depuis la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989, aux termes de laquelle « les États parties prennent toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l'enfant contre toute forme de violence, d'atteinte ou de brutalités physiques ou mentales, d'abandon ou de négligence, de mauvais traitements ou d'exploitation, y compris la violence sexuelle, pendant qu'il est sous la garde de ses parents ou de l'un d'eux, de son ou ses représentants légaux ou de toute autre personne à laquelle il est confié. » La référence principale à cet égard est la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance.
Cette vigilance s'exprime aussi par l'action des différents départements ministériels, coordonnés en cela par la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) placée auprès du Premier ministre et chargée : de suivre et analyser le phénomène des mouvements à caractère sectaire ; de favoriser la coordination de l'action préventive et répressive des pouvoirs publics ; de contribuer à l'information et à la formation des agents publics, ainsi qu'à l'information de l'opinion publique et à la prévention. En tout état de cause, et conformément aux principes de liberté d'opinion et de croyance, il ne s'agit en aucun cas de stigmatiser l'appartenance à un courant de pensée : la lutte contre les dérives sectaires concerne strictement les comportements portant atteinte aux droits, à l'ordre public, ou contraires aux lois et règlements. La circulaire du 27 mai 2005 du Premier ministre avait déjà affirmé la nécessité d'abandonner toute référence à la qualification de « secte » et à des listes de groupements préalablement identifiés, afin de privilégier une logique de faits ; elle appelait notamment à faire usage de faisceaux de critères pour caractériser une dérive sectaire.

Cadre de l'action de l'éducation nationale

Au niveau des rectorats, l'éducation nationale exerce une vigilance au travers des correspondants que vous désignez dans votre académie depuis 2000, par les directeurs académiques des services de l'éducation nationale agissant par délégation du recteur (DASEN), les corps d'inspection, de direction et d'enseignement.
Compte tenu de la gravité de certaines situations de danger vécues par des enfants et adolescents  et du rôle que peut jouer l'école dans le repérage et la prise en compte de ces situations, l'action de l'éducation nationale doit être impérativement renforcée. En effet :
- La jeunesse constituant une cible privilégiée pour de telles emprises, cette vigilance doit s'exercer de façon large, aussi bien en direction des enfants (élèves qui fréquentent des établissements d'enseignement scolaire ; enfants instruits dans leur famille) que des adultes qui interviennent auprès d'eux (personnels et cadres de l'enseignement, que celui-ci soit public, privé sous contrat ou privé hors contrat, en présentiel ou à distance ; membres d'organismes intervenant au sein des établissements en complément ou en soutien de l'enseignement dispensé).
- Tout en garantissant la liberté constitutionnelle d'enseignement et de croyance, votre action doit évidemment privilégier, si les normes respectives paraissent s'opposer dans les faits, les droits et l'intérêt fondamentaux des enfants et adolescents, en transmettant, sans délai :
. au président du conseil général (article L. 226-2-1 du code de l'action sociale et des familles), à des fins de protection, les informations préoccupantes concernant les situations de danger ou de risque de danger (au sens de l'article 375 du code civil), 
. au procureur de la République (article L. 226-4 du code de l'action sociale et des familles), à des fins de protection des victimes et de poursuites des auteurs, les situations de danger de particulière gravité ou susceptibles de revêtir une qualification pénale et notamment celles paraissant constituer des cas d'emprise.
Les agents que vous avez désignés à cette fin sont coordonnés par une mission, la  Mission nationale de prévention des phénomènes sectaires en éducation (MPPS) qui, rattachée à la direction des affaires juridiques et confiée à deux inspecteurs généraux, est l'interlocutrice des autres ministères par l'intermédiaire de la Miviludes. En vue de la pleine efficacité de cette mission, il s'impose de :
1°) clarifier le concept de dérive sectaire à l'attention des agents de l'éducation nationale ;
2°) préciser le champ visé par l'action de vigilance contre les dérives sectaires ;
3°) rappeler les principes de l'identification du risque, la chaîne des responsabilités à assumer et des obligations à respecter ;
4°) relier l'action de l'éducation nationale à celle des autres administrations de l'État comme des collectivités territoriales.

I - Le concept spécifique de dérive sectaire en matière d'éducation nationale : une perte des chances de s'instruire

La liberté de croyance comme celle d'enseignement sont garanties par la Constitution et notre législation. L'article L. 122-1-1 du code de l'éducation définit, dans le cadre des missions de l'enseignement scolaire, les objectifs de la scolarité obligatoire en référence au « socle commun constitué d'un ensemble de connaissances et de compétences qu'il est indispensable de maîtriser pour accomplir avec succès sa scolarité, poursuivre sa formation, construire son avenir personnel et professionnel et réussir sa vie en société ». Les articles D. 131-11 et D. 131-12 du code de l'éducation, dans leur rédaction résultant du décret n° 2009-259 du 5 mars 2009, fixent aussi le contenu des connaissances requis des enfants instruits dans la famille ou dans les établissements d'enseignement privés hors contrat, à l'issue de la période de l'instruction obligatoire, en référence au socle commun. De sorte que, juridiquement, la perte des chances de s'instruire pour un enfant peut être légitimement regardée comme une atteinte à son droit fondamental à l'instruction et à son droit de bénéficier d'une formation permettant d'acquérir le socle commun de connaissances. L'article L. 131-1-1 du code de l'éducation dispose notamment que « le droit de l'enfant à l'instruction a pour objet de lui garantir, d'une part, l'acquisition des instruments fondamentaux du savoir, des connaissances de base, des éléments de culture générale et, selon les choix, de la formation professionnelle et technique et, d'autre part, l'éducation lui permettant de développer sa personnalité, d'élever son niveau de formation initiale et continue, de s'insérer dans la vie sociale et professionnelle et d'exercer sa citoyenneté. »
C'est ce point qui doit d'abord mobiliser les agents de l'éducation nationale qui, par leurs connaissances professionnelles, sont capables d'analyser et identifier les situations d'absence d'instruction ou d'absence d'une formation permettant d'acquérir le socle commun des connaissances et des compétences.
Il est nécessaire de prêter une attention particulière, dans la mesure où il est possible d'en avoir connaissance, au cas des enfants soumis à l'obligation scolaire non inscrits dans un établissement d'enseignement et qui n'ont pas fait l'objet d'une déclaration d'instruction dans la famille (art. L. 131-2 et L. 131-5 du code de l'éducation). Le cas des enfants non inscrits dans un établissement d'enseignement public ou privé, malgré une mise en demeure de l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation après que les résultats des contrôles effectués ont fait apparaître que l'instruction dispensée dans la famille s'avérait insuffisante, doit également faire l'objet d'une particulière vigilance. Il en va de même dans l'hypothèse de non-fermeture de classes hors contrat malgré une mise en demeure  de l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation - cette autorité est en principe le DASEN en application de l'article R. 222-24-1 du code de l'éducation (art. 227-17-1 et 227-17-2 du code pénal, reproduits à l'article L. 131-11 du code de l'éducation). Doivent également nous alerter les cas d'inassiduité scolaire importante (art. R. 624-7 du code pénal reproduit à l'article R. 131-19 du code de l'éducation) et, de façon plus générale, tous les cas où « la santé, la sécurité, la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises » (article 375 du code civil), les cas également de « privations » d'éducation infligées à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger, dont l'article 434-3 du code pénal impose la dénonciation, ainsi que ceux relevant de l'abus frauduleux de l'état de faiblesse et d'ignorance défini à l'article 223-15-2 du code pénal.
Il est clair que la mise en danger d'enfants et d'adolescents soumis à l'obligation scolaire peut cumuler l'infraction principale spécifique à l'univers éducatif (la privation des chances de s'instruire) et les autres motifs de danger.
L'obligation de dénonciation aux autorités judiciaires ou administratives des privations, de mauvais traitements ou d'atteintes sexuelles infligés à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger s'impose à quiconque au titre de l'article 434-3 du code pénal, et l'article 40 du code de procédure pénale impose à tout fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, d'en donner avis sans délai au procureur de la République.

II - Champ visé par l'action de vigilance contre les dérives sectaires

Quelles que soient les modalités de l'instruction dispensée aux enfants, vous ferez preuve de vigilance notamment lors des contrôles dont la responsabilité vous incombe. Sont ainsi visées les situations suivantes :
- élèves scolarisés au sein :
. d'écoles et établissements d'enseignement français, publics et privés sous contrat, situés en France ou à l'étranger ;
. de classes d'enseignement privé hors contrat : outre les contrôles obligatoires à l'ouverture ou relatifs aux titres exigés des directeurs et des maîtres, au respect de l'ordre public, des bonnes mœurs et à la prévention sanitaire et sociale (art. L. 441-2 et L. 442-2 du code de l'éducation), l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation peut « prescrire chaque année un contrôle des classes hors contrat afin de s'assurer que l'enseignement qui y est dispensé respecte les normes minimales de connaissances requises par l'article L. 131-1-1 et que les élèves de ces classes ont accès au droit à l'éducation tel que celui-ci est défini par l'article L. 111-1 » (art. L. 442-2) ; il paraît indispensable de proposer au moins une programmation de mise en place de ces contrôles à partir d'une évaluation des risques ;
- instruction dans les familles, contrôlées conformément à la loi, selon les instructions fournies par la DGESCO ;
- demandes d'agrément formulées par des associations pour intervenir dans des établissements publics ou privés sous contrat : le correspondant, chargé de la prévention, doit être systématiquement consulté à ce sujet ;
- activités en direction d'enfants justifiant d'une scolarisation en France des organismes ou établissements d'enseignement à distance, dont le siège social est situé en France ou à l'étranger ;
- activités des organismes associatifs ou commerciaux qui interviennent dans le champ du soutien scolaire, dont le contrôle tel qu'il est prévu par l'article L. 445-1 du code de l'éducation est exercé par les préfets.

III - Identification du risque et chaîne des responsabilités à assumer et des obligations à respecter

Pour respecter les libertés publiques et la neutralité de l'État, le diagnostic d'un risque ou d'un phénomène sectaire doit être établi avec une grande prudence : c'est pourquoi est privilégiée une approche en termes de faisceaux de critères de risques. Une attitude, un fait, un contenu doctrinal peut difficilement être à soi seul révélateur d'une dérive sectaire. Concernant la protection des mineurs contre les dérives sectaires, on retient généralement le faisceau d'indices suivant : isolement et désocialisation ; atteintes physiques ; régime alimentaire carencé ; rupture du suivi thérapeutique et privation de soins conventionnels ; dés-instruction ; changement important du comportement de l'enfant ; embrigadement ; discours stéréotypé, absence d'expression autonome.
Une situation de risque sectaire, pour un enfant, est donc celle où lui sont imposés un discours et des pratiques à l'exclusion de tout autre discours ou pratique. Cette situation est susceptible de nuire à son développement intellectuel, à son insertion sociale et, finalement, à son accession à l'autonomie. Le risque porte non seulement sur le contenu des connaissances transmises, sur la possibilité d'accéder aux valeurs et au pluralisme des sociétés démocratiques, mais également sur la possibilité pour l'enfant de développer et d'exercer un esprit critique, une indépendance du jugement. Le contexte en est familial, voire communautaire : l'enfant est alors susceptible d'être sous l'emprise de discours et de pratiques menaçant son éducation ; ou extrafamilial : l'enfant est ici susceptible de subir un discours et des pratiques pouvant lui être préjudiciables, et ce :
- soit dans un cadre scolaire (par le biais de l'éducateur, de ses camarades, d'une association intervenant dans les établissements scolaires, de publications distribuées) ;
- soit dans le cadre d'un organisme de soutien scolaire ;
- soit pendant un séjour au sein d'une famille à l'étranger ou au sein d'un organisme d'accueil ou d'une association prenant en charge des mineurs.
Les acteurs de ces missions, la chaîne des responsabilités qu'ils ont à assumer, les obligations qu'il leur faut respecter, sont les suivants : 
1. Correspondants académiques chargés de la prévention contre les dérives sectaires
Un correspondant chargé de la prévention contre les dérives sectaires existe auprès de chaque recteur, et intervient en son nom, par délégation, dans l'académie. Il convient de définir sa mission sous forme d'une lettre qui lui fixe des objectifs inspirés de la politique gouvernementale en la matière tout en répondant à la situation particulière de l'académie, et de lui demander un compte rendu annuel d'activités dont copie sera tenue à la MPPS. Son activité se déploiera notamment dans les directions suivantes :
- obtenir des différents acteurs académiques d'être informé rapidement et précisément de tout élément survenu dans l'académie dans ce domaine ; vous en informer régulièrement, ainsi que la cellule nationale ; veiller à la diffusion de l'information ainsi qu'à la formation des divers personnel en cette matière ;
- effectuer la synthèse des observations formulées par les DASEN (cf. articles L. 131-10 et R. 222-24-1 du code de l'éducation) dans leur mission essentielle de contrôle de l'instruction dans les familles, ainsi que de l'instruction dans les établissements scolaires sous contrat et surtout hors contrat ;
- s'assurer que les différents domaines de responsabilité sont couverts dans l'académie ;
- s'informer du suivi du traitement des affaires qui viennent à la connaissance des autorités de l'éducation nationale, dès lors qu'elles sont signalées aux autorités administratives et/ou judiciaires ;
- veiller à la permanence du lien entre les autorités de l'éducation nationale et celles des autres services déconcentrés de l'État ainsi que des autorités décentralisées.
2. Règles des signalements qui incombent à tout agent de l'éducation nationale selon son champ de compétences
Les réactions qui s'imposent aux personnels de l'éducation nationale sont définies par la loi d'une façon qui doit être adaptée aux différentes occurrences :
- en certains cas, il convient de traiter en urgence une situation individuelle, soit parce qu'il y a infraction, au titre du code pénal, soit parce qu'il y a mise en danger ou risque de danger au titre du code de l'action sociale et des familles et du code civil, les deux situations pouvant naturellement se cumuler.
Selon les situations, une information préoccupante au président du conseil général (cellule de recueil et d'évaluation des informations préoccupantes) ou un signalement au procureur s'imposent dans des délais très rapides ;
- en d'autres cas, il faut agir vis-à-vis d'un organisme privé, d'une association ou d'une école de fait, pour obtenir qu'elle se conforme au droit ou pour prendre des mesures administratives assorties de signalements au procureur. Il convient de préciser que les termes « organismes privés » font uniquement référence aux établissements d'enseignement privés et aux établissements d'enseignement privés à distance, à l'exclusion des organismes de soutien scolaire pour lesquels aucun contrôle par les services de l'éducation n'est prévu par les textes ;
- il peut aussi s'agir de manquements d'agents de l'éducation nationale qui, lorsqu'ils sont repérés, appellent une réponse rapide pouvant aller, dès qu'un soupçon existe, jusqu'à un signalement au procureur, dans le respect de la présomption d'innocence et des compétences respectives de chaque acteur, sans omettre les transmissions d'informations préoccupantes au président du conseil général à des fins de protection. Il n'appartient pas aux services de l'éducation nationale de saisir directement le juge des enfants. En effet, conformément à l'article L. 226-3 du code de l'action sociale et des familles, c'est le président du conseil général qui recueille auprès des autres services publics les informations permettant au ministère public de saisir le juge des enfants, lorsque la situation du mineur entre dans le champ d'application de l'article L. 226-4 du même code (article 375 du code civil).

IV - Complémentarité de l'action de l'éducation nationale avec les administrations de l'État et les collectivités territoriales

1. Le travail avec les services de l'État
Il convient tout d'abord de rappeler ici que le contrôle des organismes de soutien scolaire appartient aux préfets.
Il existe dans chaque département (circulaire du ministère de l'intérieur du 25 février 2008) un groupe de travail restreint à dimension opérationnelle réuni par le préfet consacré à la problématique sectaire. L'éducation nationale doit systématiquement s'y associer et le correspondant académique doit être en position d'informer le recteur de la réalité des phénomènes sectaires dans son académie à partir des constats départementaux, de même qu'il doit diffuser informations et préoccupations aux éventuels représentants de l'éducation nationale dans ces groupes départementaux.
2. La collaboration avec les collectivités territoriales
Les services de l'éducation nationale sont appelés à rencontrer sur ces matières les compétences des maires ainsi que celles des présidents des conseils généraux :
- L'action des maires est importante dans le domaine de l'éducation puisqu'ils ont la charge du fonctionnement des écoles maternelles et élémentaires, la charge de l'organisation des activités éducatives, sportives et culturelles dans les locaux scolaires ainsi que celle des personnels non enseignants au sein des écoles. En outre, les maires, en dressant la liste de tous les enfants soumis à l'obligation scolaire en application de l'article L. 131-6 du code de l'éducation,  contrôlent le respect de l'obligation d'instruction. Ils interviennent également dans le cadre de l'instruction à domicile, puisque, conformément aux dispositions de l'article L. 131-10 du code de l'éducation, dès la première année de la déclaration d'instruction dans la famille, et tous les deux ans, est prévue une enquête de la mairie compétente, « uniquement aux fins d'établir quelles sont les raisons alléguées par les personnes responsables, et s'il est donné [aux enfants] une instruction dans la mesure compatible avec leur état de santé et les conditions de vie de la famille. Le résultat de cette enquête est communiqué à l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation » (cette autorité est en principe le DASEN en application de l'article R. 222-24-1 du code de l'éducation). Il est essentiel que les résultats de cette enquête lui soient régulièrement et rapidement communiqués afin qu'elle exerce à son tour et au mieux le contrôle pédagogique relevant de ses propres compétences et responsabilités - et ce même si elle n'est naturellement pas dispensée des dispositions pénales de droit commun signalées plus haut. Aux termes de l'article L. 131-10 du code de l'éducation, en effet, l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation doit, au moins une fois par an, vérifier que l'enseignement dispensé dans la famille est conforme au droit de l'enfant à l'instruction défini à l'article L. 131-11 du même code.
- Les présidents des conseils généraux sont les premiers responsables de la protection de l'enfance. La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance poursuit trois objectifs : 
. 1. le renforcement de la prévention, domaine dans lequel les membres de la communauté éducative et notamment l'assistant de service social, le médecin et l'infirmière de l'éducation nationale jouent un rôle prépondérant pour la sensibilisation des élèves, le repérage, l'évaluation et la prise en compte des situations d'élèves en danger, 
. 2. l'organisation du recueil, du traitement et de l'évaluation des informations préoccupantes concernant la situation d'un enfant. Il s'agit d'une part de renforcer l'accompagnement des parents et la prévention, d'autre part d'autoriser, dans les conditions fixées par la réglementation, le partage de certaines informations à caractère secret par les personnels tenus au secret professionnel, afin d'organiser la complémentarité des actions au titre de la protection de l'enfance.
Dans le cadre de la protection de l'enfance, les informations que les services académiques auront acquises et organisées dans ce domaine relèvent potentiellement de ce partage entre les professionnels tenus au secret et les autorités administratives et judiciaires , 
. 3. le renforcement de l'observation, de l'analyse et du partenariat.
Ainsi, l'observatoire départemental de la protection de l'enfance (art. L. 226-3-1 du code de l'action sociale et des familles), placé sous l'autorité de chaque président de conseil général, constitue désormais un maillon stratégique de la protection de l'enfance, notamment en ce qu'il favorise la coordination entre tous les acteurs de la protection de l'enfance - et donc bien évidemment ceux de l'éducation nationale au niveau de l'académie.
Les objectifs principaux de la protection de l'enfance, tels que les définit le code de l'action sociale et des familles (art. L. 112-3 et 4), sont d'abord de « prévenir les difficultés auxquelles les parents peuvent être confrontés dans l'exercice de leurs responsabilités éducatives, d'accompagner les familles et d'assurer, le cas échéant, selon des modalités adaptées à leurs besoins, une prise en charge partielle ou totale des mineurs, [ensuite] de prévenir les difficultés que peuvent rencontrer les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et d'assurer leur prise en charge ».
Ces missions et responsabilités confiées depuis 2007 aux présidents des conseils généraux, en particulier celles touchant au recueil, au traitement et à l'évaluation « des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l'être » (art. L. 226-3 du code de l'action sociale et des familles), nécessitent une très étroite coopération entre les services et concernent à l'évidence, au premier chef, ceux de l'éducation nationale. Celle-ci est signataire d'un protocole partenarial avec les conseils généraux dans 88 % des départements. Elle est au premier rang pour la transmission des informations préoccupantes (enquête nationale Oned octobre 2011).
L'éducation nationale concourt au dispositif de protection de l'enfance aux différents niveaux du système éducatif (une rubrique consacrée à la protection de l'enfance est en ligne sur le site Éduscol de l'éducation nationale à l'adresse :http://eduscol.education.fr/pid23812-cid50665/protection-de-l-enfance.html). Les autorités de l'État compétentes en matière d'éducation participent aux observatoires départementaux de la protection de l'enfance. Les conseillers techniques sociaux et de santé des services départementaux de l'éducation nationale sont les interlocuteurs des cellules de recueil, de traitement et d'évaluation des informations préoccupantes (Crip)
Je vous demande donc, compte tenu des enjeux particulièrement importants engagés par ce sujet, de mettre en œuvre toutes les dispositions susceptibles de créer dans votre académie une nouvelle dynamique relativement à ce domaine de prévention contre les risques sectaires, domaine dont vous avez constaté combien sa complexité le disputait à sa gravité.
Pour le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative
et par délégation,
Le secrétaire général,
Jean Marimbert
Le directeur général de l'enseignement scolaire,
Jean-Michel Blanquer

Annexe

Articles du code civil, du code pénal, du code de l'action sociale et des familles, du code de procédure pénale et du code de l'éducation cités dans cette circulaire


Code civil

Article 375 - Modifié par la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 - art. 14 - J.O. du 6 mars 2007
Si la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises, des mesures d'assistance éducative peuvent être ordonnées par la justice à la requête des père et mère conjointement, ou de l'un d'eux, de la personne ou du service à qui l'enfant a été confié ou du tuteur, du mineur lui-même ou du ministère public. Dans les cas où le ministère public a été avisé par le président du conseil général, il s'assure que la situation du mineur entre dans le champ d'application de l'article L. 226-4 du code de l'action sociale et des familles. Le juge peut se saisir d'office à titre exceptionnel.
Elles peuvent être ordonnées en même temps pour plusieurs enfants relevant de la même autorité parentale.
La décision fixe la durée de la mesure sans que celle-ci puisse, lorsqu'il s'agit d'une mesure éducative exercée par un service ou une institution, excéder deux ans. La mesure peut être renouvelée par décision motivée.
Cependant, lorsque les parents présentent des difficultés relationnelles et éducatives graves, sévères et chroniques, évaluées comme telles dans l'état actuel des connaissances, affectant durablement leurs compétences dans l'exercice de leur responsabilité parentale, une mesure d'accueil exercée par un service ou une institution peut être ordonnée pour une durée supérieure, afin de permettre à l'enfant de bénéficier d'une continuité relationnelle, affective et géographique dans son lieu de vie dès lors qu'il est adapté à ses besoins immédiats et à venir.
Un rapport concernant la situation de l'enfant doit être transmis annuellement au juge des enfants.

Code pénal

Article 227-17-1 - Modifié par la loi n° 2005-380 du 23 avril 2005 - art. 8 - J.O. du 24 avril 2005
Le fait, par les parents d'un enfant ou toute personne exerçant à son égard l'autorité parentale ou une autorité de fait de façon continue, de ne pas l'inscrire dans un établissement d'enseignement, sans excuse valable, en dépit d'une mise en demeure de l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation, est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende.
Le fait, par un directeur d'établissement privé accueillant des classes hors contrat, de n'avoir pas pris, malgré la mise en demeure de l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation, les dispositions nécessaires pour que l'enseignement qui y est dispensé soit conforme à l'objet de l'instruction obligatoire, tel que celui-ci est défini par l'article L. 131-1-1 et L. 131-10 du code de l'éducation, et de n'avoir pas procédé à la fermeture de ces classes est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. En outre, le tribunal peut ordonner à l'encontre de celui-ci l'interdiction de diriger ou d'enseigner ainsi que la fermeture de l'établissement.

Article 227-17-2 - Modifié par la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 - art. 124
Les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions définies aux articles 227-15 à 227-17-1 encourent, outre l'amende suivant les modalités prévues par l'article 131-38, les peines prévues par l'article 131-39.

Art. 223-15-2
- Modifié par la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 - art. 133
Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende l'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse soit d'un mineur, soit d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur, soit d'une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l'exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables.
Lorsque l'infraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit d'un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d'exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende.

Article 434-3 - Modifié par l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 - art. 3 (V) - J.O. du 22 septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002
Le fait, pour quiconque ayant eu connaissance de privations, de mauvais traitements ou d'atteintes sexuelles infligés à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.
Sauf lorsque la loi en dispose autrement, sont exceptées des dispositions qui précèdent les personnes astreintes au secret dans les conditions prévues par l'article 226-13.
 

Code de procédure pénale

Article 40 - Modifié par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 - art. 74 - J.O. du 10 mars 2004
Le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner conformément aux dispositions de l'article 40-1.
Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.
 

Code de l'action sociale et des familles

Article L. 112-3 - Créé par la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 - art. 1 - J.O. du 6 mars 2007
La protection de l'enfance a pour but de prévenir les difficultés auxquelles les parents peuvent être confrontés dans l'exercice de leurs responsabilités éducatives, d'accompagner les familles et d'assurer, le cas échéant, selon des modalités adaptées à leurs besoins, une prise en charge partielle ou totale des mineurs. Elle comporte à cet effet un ensemble d'interventions en faveur de ceux-ci et de leurs parents. Ces interventions peuvent également être destinées à des majeurs de moins de vingt et un ans connaissant des difficultés susceptibles de compromettre gravement leur équilibre. La protection de l'enfance a également pour but de prévenir les difficultés que peuvent rencontrer les mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et d'assurer leur prise en charge.

Article L. 112-4 - L'intérêt de l'enfant, la prise en compte de ses besoins fondamentaux, physiques, intellectuels, sociaux et affectifs ainsi que le respect de ses droits doivent guider toutes décisions le concernant.

Article L. 226-3 - Le président du conseil général est chargé du recueil, du traitement et de l'évaluation, à tout moment et quelle qu'en soit l'origine, des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l'être. Le représentant de l'État et l'autorité judiciaire lui apportent leur concours.
Des protocoles sont établis à cette fin entre le président du conseil général, le représentant de l'État dans le département, les partenaires institutionnels concernés et l'autorité judiciaire en vue de centraliser le recueil des informations préoccupantes au sein d'une cellule de recueil, de traitement et d'évaluation de ces informations.
Après évaluation, les informations individuelles font, si nécessaire, l'objet d'un signalement à l'autorité judiciaire.
Les services publics, ainsi que les établissements publics et privés susceptibles de connaître des situations de mineurs en danger ou qui risquent de l'être, participent au dispositif départemental. Le président du conseil général peut requérir la collaboration d'associations concourant à la protection de l'enfance.
Les informations mentionnées au premier alinéa ne peuvent être collectées, conservées et utilisées que pour assurer les missions prévues au 5º de l'article L. 221-1. Elles sont transmises sous forme anonyme à l'observatoire départemental de la protection de l'enfance prévu à l'article L. 226-3-1 et à l'Observatoire national de l'enfance en danger prévu à l'article L. 226-6. La nature et les modalités de transmission de ces informations sont fixées par décret.

Article L. 226-3-1 - Dans chaque département, un observatoire départemental de la protection de l'enfance, placé sous l'autorité du président du conseil général, a pour missions :
1º de recueillir, d'examiner et d'analyser les données relatives à l'enfance en danger dans le département, au regard notamment des informations anonymes transmises dans les conditions prévues à l'article L. 226-3. Ces données sont ensuite adressées par chaque département à l'Observatoire national de l'enfance en danger ;
2º d'être informé de toute évaluation des services et établissements intervenant dans le domaine de la protection de l'enfance et assurée en application de l'article L. 312-8 ;
3º de suivre la mise en œuvre du schéma départemental prévu à l'article L. 312-5 en tant qu'il concerne les établissements et services mentionnés aux 1º et 4º du I de l'article L. 312-1, et de formuler des avis ;
4º de formuler des propositions et avis sur la mise en œuvre de la politique de protection de l'enfance dans le département.
L'observatoire départemental de la protection de l'enfance comprend notamment des représentants des services du conseil général, de l'autorité judiciaire dans le département et des autres services de l'État ainsi que des représentants de tout service et établissement dans ce département qui participe ou apporte son concours à la protection de l'enfance, et des représentants des associations concourant à la protection de l'enfance et de la famille.
L'observatoire départemental de la protection de l'enfance établit des statistiques qui sont portées à la connaissance de l'assemblée départementale et transmises aux représentants de l'État et de l'autorité judiciaire.

Article L. 226-4
I - Le président du conseil général avise sans délai le procureur de la République lorsqu'un mineur est en danger au sens de l'article 375 du code civil et :
1º qu'il a déjà fait l'objet d'une ou plusieurs actions mentionnées aux articles L. 222-3 et L. 222-4-2 et au 1º de l'article L. 222-5, et que celles-ci n'ont pas permis de remédier à la situation ;
2º que, bien que n'ayant fait l'objet d'aucune des actions mentionnées au 1º, celles-ci ne peuvent être mises en place en raison du refus de la famille d'accepter l'intervention du service de l'aide sociale à l'enfance ou de l'impossibilité dans laquelle elle se trouve de collaborer avec ce service.
Il avise également sans délai le procureur de la République lorsqu'un mineur est présumé être en situation de danger au sens de l'article 375 du code civil mais qu'il est impossible d'évaluer cette situation.
Le président du conseil général fait connaître au procureur de la République les actions déjà menées, le cas échéant, auprès du mineur et de la famille intéressés.
Le procureur de la République informe dans les meilleurs délais le président du conseil général des suites qui ont été données à sa saisine.
II - Toute personne travaillant au sein des organismes mentionnés au quatrième alinéa de l'article L. 226-3 qui avise directement, du fait de la gravité de la situation, le procureur de la République de la situation d'un mineur en danger, adresse une copie de cette transmission au président du conseil général. Lorsque le procureur a été avisé par une autre personne, il transmet au président du conseil général les informations qui sont nécessaires à l'accomplissement de la mission de protection de l'enfance confiée à ce dernier et il informe cette personne des suites réservées à son signalement, dans les conditions prévues aux articles 40-1 et 40-2 du code de procédure pénale.

Articles cités du code de l'éducation

- partie législative : articles L. 122-1-1, L. 131-1-1, L. 131-2, L. 131-5, L. 131-6, L. 131-10, L. 131-11, L. 442-1, L. 442-2 et L. 445-1
- partie réglementaire : articles D. 131-11, D. 131-12, R. 131-19 et R. 222-24-1