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L'égalité entre les filles et les garçons, entre les femmes et les hommes, dans le système éducatif - vol. 3 [Éducation & formations n° 98]

Ce numéro est le troisième volume consacré à la thématique de l’égalité entre les filles et les garçons, entre les femmes et les hommes, dans le système éducatif. Il fait suite aux n° 96 et n° 97 respectivement publiés en mars et en septembre 2018.

Six nouvelles contributions s’ajoutent aux 16 articles déjà parus. Elles sont axées sur la non-mixité en cours d’EPS, sur le sexisme dans les albums jeunesse, sur la question de l’égalité entre les filles et les garçons dans les politiques éducatives, sur la place des femmes dans les programmes et les manuels d’histoire du collège, sur l’insertion professionnelle des femmes et des hommes à l’issue de master selon les disciplines, ou à l’issue d’un doctorat.

Rédactrice en chef : Caroline Simonis-Sueur

    1. Plus libres sans les garçons ? Une analyse des manières de « faire le genre » chez des adolescentes au sein de classes non mixtes en EPS.

    Antoine Bréau, Denis Hauw, Vanessa Lentillon-Kaestner

    Au regard du maintien des inégalités entre les filles et les garçons en classes d’éducation physique et sportive (EPS), la séparation des sexes est une stratégie parfois utilisée par des enseignants et enseignantes dans différents pays. C’est notamment le cas en Suisse romande où l’enseignement de l’EPS au collège rassemble des cours mixtes et non mixtes. Affichant des objectifs visant à lutter contre les stéréotypes de genre et à favoriser une meilleure réussite des filles, la non-mixité en EPS souffre d’un manque d’appuis scientifiques et s’accompagne toujours de nombreuses incertitudes. En donnant la parole à des adolescentes, ce travail a souhaité revenir sur les expériences vécues par des filles en contexte non mixte. S’inscrivant dans une démarche enactive et se basant sur l’analyse du comportement situé des filles et des significations qui s’y rattachent, cette étude avait pour but de repérer différentes manières de « faire le genre » (doing gender) via l’identification de configurations typiques d’actions et d’expériences. À partir de la mise en place de 12 focus groups réunissant au total 56 collégiennes, deux dimensions caractérisant l’expérience vécue par les adolescentes ont émergé de l’analyse : (a) la non-mixité en EPS vue comme un espace de liberté et (b) la non-mixité comme lieu de frustration et de violences de genre. Bien que favorisant, dans une certaine mesure, un meilleur investissement des filles, la non-mixité tend aussi à renforcer les stéréotypes de genre et à rendre plus prégnante encore la division entre la masculinité et la féminité. La diversité des expériences des filles recueillies dans cette étude témoigne aussi que la mise en place d’un enseignement égalitaire passe, au-delà du seul choix de démixer les groupes, par une réflexion autour d’une EPS qui favorise la reconnaissance de tous les élèves et qui respectent le profil de chacun.

     

    2. Le sexisme des albums jeunesse à l’école primaire toujours d’actualité ? Des élèves et leurs enseignantes et enseignants mènent l’enquête.

    Elsa Le Saux-Pénault, Cendrine Marro

    L’éducation à l’égalité des sexes est une question socialement vive que les professeurs des écoles ont bien souvent des difficultés à mettre en œuvre au sein de leur classe, et ce pour diverses raisons. Parmi celles-ci, le fait de considérer l’école comme fondamentalement égalitaire n’est pas négligeable. Les quelques résultats d’une Recherche-Action conduite l’année scolaire 2014-2015 soulignent toutefois combien, encore aujourd’hui, domination masculine et sexisme perdurent dans les albums jeunesse disponibles dans nos écoles, via notamment, une mise en exergue récurrente de la différence des sexes [Marro, 2012]. Le fait que les inégalités de sexe, dont est porteuse cette différence, soient aisément repérables par les élèves, pour peu qu’on leur donne quelques éléments leur permettant de réaliser ce repérage, tels de petits chercheurs et chercheuses en action, ouvre des perspectives en termes de mise en œuvre effective de l’éducation à l’égalité des sexes à l’école. Cet article montre l’intérêt, toujours bien actuel, de permettre aux élèves et à leurs enseignantes ou enseignants d’examiner de manière critique ces supports de lecture proposés à l’école et donne quelques exemples d’outils utilisables dans cette perspective.

     

    3. L’égalité filles-garçons à l’école. Apports des recherches en psychologie sociale et en psychologie du développement au regard des politiques éducatives.

    Christine Morin-Messabel, Véronique Rouyer, Stéphanie Constans

    Cet article, sous forme de texte de réflexion, a pour objectif d’interroger les politiques éducatives en matière d’égalité filles-garçons à l’école en considérant les apports des travaux menés en psychologie sociale et en psychologie du développement. La question de la confrontation entre objets de recherches et objets de formation est abordée par les notions centrales en psychologie : les stéréotypes de sexe, les processus de socialisation de genre et de construction identitaire durant l’enfance. Autrement dit, il s’agit de mieux appréhender la question des variabilités intra-individuelle et interindividuelle des conduites liées au genre des filles et des garçons dans différents contextes éducatifs. Enfin, les apports de ces travaux concernent également la formation initiale et continue des personnels éducatifs, mais aussi la question de l’engagement de tous les acteurs et actrices, y compris les parents d’élèves.

     

    4. Les femmes dans l'histoire enseignée au collège. Programmes de 2015 et manuels de 2016.

    Catherine Chadefaud, Claire Desaint, Nicole Fouché

    Cet article traite de l’égalité filles-garçons/femmes-hommes ainsi que de la présence des femmes dans la discipline scolaire : histoire. Il compare les programmes d’Histoire de 2015 (de la sixième à la troisième) publiés au B.O.E.N. et seize manuels scolaires qui en sont issus. Ce suivi montre que les rédactrices et les rédacteurs sont fidèles aux directives données par le Conseil supérieur des programmes, d’où son rôle décisif. Lorsque les instructions sont formelles, un effort de représentation des femmes est poursuivi. Lorsqu’elles sont inexistantes ou réduites à des vœux, les équipes des manuels ne prennent aucune initiative pour remédier à cette carence des programmes.
    Des pans des programmes – de l’Antiquité au début du XXIe siècle – ne tiennent pas compte des résultats de la recherche nationale et internationale qui s’évertue avec succès à dévoiler la présence des femmes dans l’histoire. De plus, depuis les années 1980, quantité de textes officiels, émanant des gouvernements successifs et de leurs ministères, accompagnent l’égalité filles-garçons et les développements de la recherche. Hélas, ils ne sont pas respectés.
    L’article s’achève sur plusieurs pistes et propositions afin de remédier, dans le cadre des programmes actuels, à l’invisibilité des femmes. Nos propositions, à ce stade assez générales, pourront s’exemplifier, se singulariser et se concrétiser, au point de fournir aux enseignantes et aux enseignants, ainsi qu’aux élèves des modèles identificatoires, grâce à l’usage qu’elles et ils pourront faire des excellents dictionnaires biographiques et de diverses monographies consacrés aux femmes signalés dans notre bibliographie.

     

    5. Disciplines du diplôme de master et insertion professionnelle selon le genre.

    Louis-Alexandre Erb

    Pendant leur parcours scolaire et universitaire, femmes et hommes ne s’orientent pas de la même façon. Les étudiantes et étudiants se répartissent différemment au sein d’une organisation tubulaire composée de diplômes, de disciplines et de spécialisations. Au niveau master, cette ségrégation a des conséquences significatives sur l’insertion professionnelle des femmes et leurs conditions d’emploi, donnant à l’orientation universitaire un poids déterminant dans la re/production des inégalités de genre.
    Les femmes, pourtant plus nombreuses à être diplômées, s’insèrent plus difficilement que les hommes sur le marché du travail. S’appuyant sur une collecte annuelle et exhaustive, l’enquête Insertion professionnelle des diplômés de l’université permet de produire des analyses de données au niveau des disciplines fines du diplôme de master. Les étudiantes sont majoritaires parmi les disciplines donnant accès à des métiers du secteur public, associatif et social où les conditions d’emploi sont plus dégradées que dans les autres secteurs.
    La ségrégation disciplinaire explique à elle-seule la moitié des écarts de genre pour l’accès aux emplois stables et plus d’un quart des écarts d’accès aux emplois de catégorie cadre. Si les inégalités d’accès aux emplois les plus rémunérateurs ne trouvent pas d’explication dans les modélisations par discipline, les écarts de répartition selon le genre permettent de poser un regard différent sur l’influence de l’orientation dans les trajectoires d’insertion professionnelle.

     

     6. Les épreuves d’entrée dans les carrières universitaires. Un chemin défavorable aux femmes ?

    Julien Calmand

    En France, les femmes sont moins représentées que les hommes dans les emplois les plus prestigieux de la recherche académique (maîtres de conférences (MCF), professeurs des universités (PU), présidents d’université etc.). Les travaux sur ce sujet, aussi bien qualitatifs que quantitatifs, démontrent qu’il existe un plafond de verre qui affecte les carrières universitaires des femmes, un fonctionnement sexué des disciplines et enfin des stéréotypes de genre lors des recrutements. À l’université, les femmes n’auraient pas les mêmes carrières que les hommes. En partant du concept d’épreuves lors processus de transition de la thèse à l’emploi et à partir de données issues d’une enquête sur le devenir professionnel des jeunes, nous examinons les différences hommes-femmes relatives aux déterminants d’accès aux premiers emplois de titulaires à l’université. Nos résultats montrent que les femmes ne seraient pas désavantagées durant la thèse, c’est lorsqu’elles entrent sur le marché du travail que tout se joue.